Bonus 1 : Bavboules

Note du bêta : IIIIIIIIIIII'M BAAAAACK BABY ! ON EST LA ON EST VIVANTS ON EST CONFINÉS COMME DES NÉS MOLDUS ON EN AS MARRE MAIS ON FETE CA AVEC... UN CHAPITRE ?! Pas tout à fait non. Un spin off dirons nous. Le premier, j'espère, dune série ! (Réclamez et Cazoue finira par craquer). Les indices sont : Bavboules et romance. Bonne lecture aimez nous, vous m'avez manqué, réclamez d'autres choses à lire à Cazolie, et je l'espère à bientôt ! Big bisous !

Note de moi : Eh oui incroyable c'est nous ! Pour la petite histoire, j'ai écrit cet OS pour  Perripuce qui fêtait son anniversaire en confinement (je vous invite à aller lire ses fanfics d'ailleurs SI VOUS NE L AVEZ TOUJOURS PAS FAIT) Bref, elle m'a demandé un texte sur deux personnages que vous allez découvrir tout de suite ! Portez vous bien tout le monde, plein de love

Et mille mercis pour tous les commentaires que je continue à recevoir ! Vous êtes les meilleurs ! 


Bavboules

Partie 1 : tu tires ou tu pointes ?

Poudlard, 1969 – Cinquième année

Emmeline Vance mordilla sa plume avant de grimacer, des poils sur la langue. Après cinq ans à Poudlard, elle continuait à se faire avoir. Elle crachota discrètement dans la salle commune bondée de Serdaigle. Après le dîner, la plupart des étudiants se prélassaient dans les fauteuils et bavardaient, exception faite de ceux qui passaient des examens cette année-là – Emmeline était du nombre. Après avoir écrit sa phrase sans autre incident de plume, elle consulta sa montre et grommela pour elle-même. Il était temps qu'elle y aille. Elle roula soigneusement son parchemin, le fourra dans sa sacoche avec sa plume, son encrier et ses livres, et chargea le sac bien alourdi sur son épaule. « Quelle corvée », songea-t-elle en saluant quelques camarades du club de Bavboules qui discutaient du dernier championnat, assis près d'une fenêtre. Elle aurait préféré se joindre à eux ou, mieux encore, terminer tranquillement son devoir dans son dortoir.

Traînant les pieds, elle se dirigea vers la salle de retenue. Son insigne de préfète captait les éclats des flambeaux lorsqu'elle passait près d'eux. D'habitude fière de cette distinction que le professeur Flitwick lui avait attribuée au début de l'année, elle aurait préféré, pour l'heure actuelle, laisser sa fonction à quelqu'un d'autre.

Le pédant préfet-en-chef, Rodolphus Lestrange, l'avait coincée sur le chemin qui menait aux serres pour la convaincre de surveiller un élève qu'il avait collé. Emmeline ne savait pas dire non – encore moins quand on la coinçait de la sorte. Elle jeta un coup d'oeil peu amène à une statue qui se grattait le heaume avec des grincements stridents, agacée. Parvenue devant la salle de retenue entrouverte, elle la poussa de l'épaule et considéra avec surprise le grand adolescent qui, avachi sur sa chaise, fixait le plafond d'un air vide.

- Fenwick ?

Le dénommé Fenwick lui lança un regard peu intéressé. Ses boucles châtains clairs tombaient sur yeux et lui conféraient un côté négligé qui agaçait Emmeline.

- Salut, Vance. T'es collée ?

- Bien sûr que non, répondit-elle en laissant tomber sa sacoche avec un bruit sourd sur le bureau qui dominait la salle. Je suis là pour te surveiller.

Une vague expression surprise passa sur son visage mais il ne releva pas et reprit sa contemplation du plafond. Emmeline était étonnée de le trouver là ; Benjy Fenwick n'était pas du genre fauteur de troubles. Jeune homme taciturne, il participait peu en classe, ne chahutait pas, ne bousculait pas ses camarades dans les couloirs. Lestrange ne lui avait pas dit ce qu'il faisait là.

Tout en réfléchissant, Emmeline sortit son devoir de potions et le déroula. Elle saisit sa plume, faillit la porter à sa bouche mais se ravisa à temps. Alors qu'elle se plongeait dans la lecture de son dernier paragraphe, un bruit agaçant la tira de ses réflexions. Elle redressa vivement la tête, le regard assassin, et avisa Benjy qui tapotait à un rythme régulier sur son bureau avec sa baguette tout en fredonnant ce qui ressemblait vaguement à la dernière chanson de Magic Cauldron, saccagée au Bulbopus.

- Tu n'as pas quelque chose à faire ? Lâcha-t-elle sèchement. Lestrange ne t'a pas donné de tâche ?

Benjy cessa son concert et haussa les épaules.

- Non.

Emmeline leva les yeux au ciel tout en songeant « Préfet-en-chef à la noix ».

- Eh bien laisse les honnêtes gens travailler, au moins.

Le jeune homme fronça aussitôt les sourcils et ses yeux lancèrent des éclairs.

- Je ne sais pas ce qu'il t'a dit mais je suis aussi une honnête personne, gronda-t-il.

- Oh, eh, calme ! Je disais ça comme ça ! Lestrange ne m'a rien dit.

Benjy chassa une boucle de son front et la considéra d'un air torve. Emmeline soutint son regard, agacée. Il n'avait aucune raison de s'énerver contre elle de la sorte. Avec un soupir, Benjy capitula silencieusement et expliqua :

- J'ai insulté ce petit enfoiré de Walden Macnair. Et je l'ai attrapé par le col de sa chemise. (Il fit mine de réfléchir avant de se fendre d'un sourire mauvais). Et je l'ai un peu secoué.

- Mais pourquoi ? s'étonna Emmeline, choquée.

Pour ce qu'elle en savait, Macnair était un Serpentard de sixième année pas très malin mais costaud, qui trouvait sa joie dans le fait de frapper des cognards. Pas l'âme sœur d'Emmeline, a priori, mais il fallait de tout pour faire un monde.

Benjy se dandina un instant sur sa chaise en entendant sa question, la mine sombre. Finalement, il marmonna :

- Il avait insulté ma mère.

Se sentant franchement idiote, Emmeline répéta :

- Mais pourquoi ?

- Elle tient une boutique de vêtements dans Londres. Avec une section sorcière, et une moldue. Macnair considère que c'est trahir les Sorciers.

Il avait craché les derniers mots d'un air dégoûté, les poings serrés. Emmeline le considéra avec étonnement. Elle connaissait Benjy car ils suivaient les mêmes options qu'elle, elle l'avait aidé plus d'une fois en arithmancie et lui en potions. Pourtant, elle ne connaissait rien de sa vie. Elle ne savait pas d'où il venait, quels étaient ses amis à Poudlard. Elle le connaissait sans le connaître, et tout à coup cette idée la mettait mal à l'aise.

Benjy la regardait comme s'il attendait son jugement, qu'Emmeline ne se sentait nullement en droit de donner. Elle se contenta de répondre prudemment :

- Je ne vois pas en quoi ça pose un problème à Macnair.

- Tu vis tellement hors de ton monde que ça, Vance ? Railla-t-il. Tu n'as pas remarqué que depuis deux ou trois ans les agressions contre les Nés-Moldus ou autres Sorciers proches de leur monde se multipliaient ?

- Oh, si, mais je ...

Emmeline se tut, rougissante. Pour tout avouer, elle ne se concentrait pas sur grand-chose à part ses études et les résultats de Bavboules.

- Je n'avais pas fait le lien, compléta-t-elle faiblement.

Son devoir de potion complètement oublié, elle déposa sa plume sur le bureau et considéra Benjy avec un intérêt renouvelé.

- Ça arrive souvent, ce genre de choses ? A Poudlard ?

- J'en sais rien. On n'y fait jamais vraiment attention avant d'en être soi-même victime.

Dotée d'un fort sens de la justice, Emmeline se sentit envahie de colère à l'idée de toutes ces insultes restées impunies.

- J'imagine que Macnair n'a rien pris pour son insulte ?

- Merlin, non. Depuis quand Lestrange s'en prend aux types de sa maison ?

La jeune fille lui concéda cela d'un hochement de tête. Il arrivait souvent que les préfets-en-chef favorisent leur maison, et c'était encore plus vrai avec Lestrange.

- C'est injuste, déclara-t-elle. Il faut faire quelque chose.

Benjy leva les yeux au ciel.

- On ne va pas aller voir McGonagall. J'ai déjà eu de la chance que Lestrange se contente de sa punition sans en référer aux profs.

Si Emmeline avait eu une boulette de papier, elle la lui aurait envoyée à la figure.

- Eh, tu me prends pour qui ? On peut se faire justice nous-même.

- Nous ? Releva-t-il. Ce ne sont pas tes affaires.

- Trop tard, rétorqua-t-elle avec un sourire mutin, le premier de la soirée.

- Bon et qu'est-ce que tu vas faire ? Marmonna-t-il, renfrogné. Avoir une meilleure note que lui en Métamorphose ?

- J'ai toujours de meilleures notes que lui, je te remercie. Non, on va mettre à contribution le club de Bavboules.

- Oh, Merlin tout puissant, gémit-il en enfouissant son visage entre ses bras. J'aurais mieux fait de me taire. (Il redressa la tête pour la fusiller du regard). Hors de question que le club de Bavboules participe à tout ça. Toi comprise.

- Chut, répondit-elle, la tête penchée sur un parchemin vierge. Je réfléchis.

- Vance ! s'agaça-t-il.

Elle releva la tête, chassa une mèche brune de son visage et ouvrit de grands yeux.

- Fenwick ! C'est quoi ton problème ? Laisse-moi t'aider.

- Je n'ai pas besoin...

- Oh, ça suffit le Gryffondor. Votre orgueil stupide ça va deux secondes.

- VANCE ! Ragea-t-il à nouveau, en abattant ses deux mains sur la table.

Emmeline se contenta de lui répondre par un sourire innocent, plaça un doigt sur sa bouche pour lui signifier de se taire et commença à griffonner sur son parchemin. Benjy se leva dans un grincement de chaise et voulut lui arracher le papier, mais elle l'arrêta d'un geste et lui tendit son devoir de potions à la place :

- On fait un marché : tu me laisses t'aider, et en échange je mets mon propre orgueil de côté et je te laisse corriger mon devoir.

Le visage impassible, il la considéra un silence quelques instants avant d'émettre un râle agacé.

- Très bien.

Emmeline dissimula son sourire vainqueur derrière ses cheveux, toujours penchée sur son parchemin. Aider Benjy était sa manière de se disculper pour le peu d'attention qu'elle portait au monde en temps normal, et elle ne le laisserait pas lui enlever ça.

***

Le jeudi suivant, l'entraînement de Bavboule eut lieu comme d'habitude à l'extérieur. Le club s'efforçait de s'entraîner par tous les temps afin d'être capable de faire face à toutes les situations. Emmeline retrouva ses quelques camarades du club avec plaisir, dans l'air froid de novembre. Ils se trouvaient dans un coin de la cour principale du château, endroit que la foule d'élèves avait l'habitude d'éviter. Personne ne souhaitait être la victime malencontreuse d'une bavboule en pleine défaite. La petite Miranda Blewett, première année, se proposa pour tracer le cercle au sol, en guise d'entraînement pour ses cours de sortilège. Mélusine Salathiel, une Serdaigle de septième année, annonçait les opposants pour les matchs d'entraînement. Emmeline n'écoutait que d'une oreille et surveillait le chemin qui menait aux serres. Si Chourave ne terminait pas son cours en avance comme il lui arrivait parfois, les Sixième années de Serpentard et Poufsouffle devraient passer par là environ une demi-heure plus tard.

Du coin de l'oeil, Emmeline aperçut Benjy qui se dissimulait dans un coin de la cour, le nez plongé dans un livre volumineux. Le plan de la jeune fille n'avait pas demandé beaucoup de préparation ; après avoir vérifié l'emploi du temps de Macnair, elle s'était arrangée avec Mélusine pour jouer au bon moment puis s'était efforcée de mettre sa fierté de côté. Elle en était parfaitement capable dès lors qu'elle souhaitait absolument obtenir quelque chose. Benjy ignorait ce qui allait se passer ; elle lui avait seulement ordonné d'être là.

L'entraînement de Bavboule commença, sans Oliver Bletchley, leur meilleur joueur, qui se trouvait en cours de botanique. Alors que Miranda perdait lamentablement contre Mélusine, puis Mélusine contre Eustace Fawley, en quatrième année à Poufsouffle, Emmeline peinait à prêter attention à l'entraînement. Elle ne pouvait s'empêcher de consulter sa montre, nerveuse à l'idée que leur programme ne coïncide pas avec le plan qu'elle avait prévu. C'était sans compter sur Mélusine, qui n'hésitait pas à interrompre une partie pour rester dans les temps. Alors que la cloche de Poudlard sonnait dix-huit heures, des élèves commencèrent à remonter le chemin qui menait aux serres. Mélusine n'avait plus que cinq minutes pour prendre sa revanche sur Eustace. Emmeline, le cœur battant, se tourna vers le chemin. Elle ne tarda pas à apercevoir Walden, entouré de sa bande d'amis. Elle avança à grands pas vers le chemin, tandis que derrière elle Eustace poussait un cri alors que la bavboule de Mélusine lui crachait dans l'oeil. Emmeline ramena une mèche de cheveux derrière son oreille, afficha un sourire qu'elle espérait aguicheur et s'exclama :

- Wouhou ! Walden !

Le Serpentard tourna machinalement les yeux vers elle, en même temps que tous ses camarades. Emmeline se sentit rougir mais ne se démonta pas et avança un peu plus vers eux. Curieux, la petite bande s'arrêta. La jeune fille, de taille moyenne, se sentit minuscule par rapport à ce gorille de Walden, qui n'était pas batteur pour rien, et ces trois amis tous plus grands qu'elle. Elle s'efforça de ne pas leur prêter attention et adressa un sourire éclatant à Macnair. « Merlin, prendre tous ces cognards dans la figure ne l'a pas arrangé », songea-t-elle.

- Salut, Walden. Je suis Emmeline, Emmeline Vance.

Elle lui tendit une main qu'il serra machinalement, l'air stupide. A croire qu'aucune fille ne lui avait jamais adressé la parole. A dire vrai, Emmeline y comptait.

- Tu vois, je suis une fan de Quidditch, et j'admire tellement ton jeu.

Sa voix de midinette lui donnait envie de grincer des dents. Elle semblait avoir complètement assommé Walden.

- Ah. Ben. Merci ?

Elle gloussa comme s'il était hilarant et replaça une nouvelle fois une mèche de cheveux derrière son oreille. Walden suivit le mouvement de sa main, comme hypnotisé. Ses amis ricanèrent lui assénèrent une tape dans le dos et déclarèrent qu'ils allaient continuer sans lui. Walden ressemblait à un condamné à mort. Un instant, Emmeline songea que cette conversation était peut-être une torture suffisante. Mélusine, qui la réclamait à grands cris, la ramena à son plan d'origine.

- Écoute, moi aussi je pratique un peu le sport. Tu voudrais jouer un peu avec moi ? On pourrait apprendre à se connaître un peu !

Nouveau large sourire. Walden cligna plusieurs fois des yeux, hébété. Emmeline décréta que son silence était un acquiescement et lui attrapa le bras sans façon pour le tirer vers le terrain de Bavboules. Mélusine fit une grimace de dégoût. Emmeline l'ignora et lança d'un ton joyeux :

- Je vais initier Walden aux Bavboules ! Ça ne vous dérange pas, hein ?

Mélusine consulta son plan, répondit du bout de lèvre que puisque Bletchley était un retard, elle pouvait, et s'écarta du terrain.

- Quelqu'un peut prêter ses Bavboules à Walden ? Ah, super, merci Eustace. Alors, Walden, tu connais un peu les règles ?

Comme le Serpentard secouait la tête, toujours mutique, Emmeline entreprit de lui expliquer. Elle n'osait tourner la tête du côté de Benjy, de peur d'attirer l'attention de Walden sur lui. Les règles étant plutôt simple, ils commencèrent bientôt à jouer. Par un coup de chance aberrant, Walden remporta tout d'abord deux points qui valurent à Emmeline de se faire arroser par ses Bavboules. Cependant la chance du débutant cessa bien vite et la jeune fille sortit plusieurs Bavboules du cercle, coup sur coup. Walden esquiva la première giclée (grâce à son entraînement de joueur de Quidditch sans doute), mais les deux suivantes le frappèrent droit dans l'oeil. Il jura la première fois, jura plus fort encore la seconde. La troisième fois, il fut si surpris qu'il trébucha, roula sur ses propres Bavboules qu'il envoya valser hors du cercle, tomba au sol et se fit asperger par toutes les billes qu'il avait sorties sans le vouloir. La petite Miranda ne put s'empêcher d'éclater de rire. Oliver Bletchley était arrivé au milieu de la partie et considérait son camarade avec un amusement non dissimulé. Quant à Mélusine, elle faisait semblant d'être penchée sur son sac de billes pour cacher qu'elle riait.

Emmeline prit un air catastrophé, secrètement ravie de la tournure que prenaient les événements, et se précipita sur Walden pour l'aider. Couvert du liquide pestilentiel que dégageaient les Bavboules, Walden la repoussa avec un juron et se releva tout seul.

- Stupide jeu ! Cracha-t-il. Mauvaise... Mauvaise idée !

- Je suis désolée ! s'exclama Emmeline. Tellement désolée, je voulais juste... Je voulais juste qu'on apprenne à se connaître, je...

- Mauvais idée ! Répéta Walden encore plus fort avant de se précipiter vers l'intérieur du château, humilié.

- Moi qui pensais que tu étais une fille intelligente, Vance, commenta Mélusine. Quelle idée de s'enticher de cet idiot de Macnair ?

Emmeline prit sur elle pour cacher son sourire triomphant et répondit d'une voix aussi piteuse que possible :

- Il est si bon au Quidditch.

Mélusine et Oliver la dévisagèrent d'un air atterré. Les deux Troisième années du groupe, des jumeaux répartis à Gryffondor et Poufsouffle, tentaient de se faire entendre pour savoir s'ils pouvaient jouer. Comme Emmeline sentait qu'elle ne pourrait jouer son rôle bien plus longtemps, elle rassembla en vitesse ses Bavboules, déclara qu'elle abandonnait l'entraînement pour ce soir-là et s'enfuit sans demander son reste. Elle rentra dans le château et monta lentement l'escalier principal. Au bout de quelques marches seulement, Benjy la rejoignit.

- Merlin, mais quelle idée absurde ! s'exclama-t-il avant de partir d'un grand rire.

Emmeline ne put retenir celui qu'elle réprimait depuis cinq minutes. Ils s'arrêtèrent sur le palier du premier étage, incapable de continuer plus loin, essoufflés. Ils étaient seuls, la majeure partie des élèves étant dans leur salle commune ou à la bibliothèque. Comme le concierge, Apollon Picott, passait au rez-de-chaussée et les gratifiait d'un regard surpris, ils s'empressèrent de disparaître dans un couloir afin d'éviter les questions.

- Je ne sais pas où tu es allée pêcher une idée pareille, rit Benjy alors qu'ils passaient devant le portrait d'une petite fille en robe rose sur une balançoire qui se mouvait toute seule.

Emmeline haussa les épaules, amusée.

- J'aime les Bavboules, je pense Bavboules. Ça m'a paru évident. La première chose que tu apprends lorsque tu commences ce jeu, c'est à supporter l'humiliation. Si si peu de personnes l'apprécient, c'est qu'ils ont l'impression de se ridiculiser à la moindre erreur. Je me doutais que Macnair était de ce genre-là.

Ils s'immobilisèrent devant la salle d'étude des runes et Benjy se laissa glisser au sol, le dos appuyé contre la porte. Emmeline fit de même, le dos appuyé contre le mur opposé. Elle sourit au jeune homme, dont le visage s'était ouvert. Ses yeux pétillaient, ses lèvres étaient légèrement retroussées, prêtes à sourire.

- Tu n'as pas peur qu'il t'en veuille ? Interrogea-t-il.

Elle haussa les épaules.

- Au pire, il m'évitera. Pourquoi m'en voudrait-il ? Tout ce que j'ai fait c'est manifester de l'admiration pour lui. Je ne vois pas comment il pourrait faire le lien entre nous, on ne traîne pas ensemble.

A ces mots, l'expression joyeuse de Benjy se fana quelque peu.

- C'est vrai. Pourquoi tu as fait ça pour moi ?

Emmeline ramena ses genoux contre sa poitrine, le temps de trouver une réponse adéquate. Elle fit tournicoter une mèche de cheveux entre ses doigts puis répondit lentement :

- Ma mère me reproche souvent de vivre un peu dans mon petit monde, de ne pas faire attention aux autres. Je sais que c'est vrai, et j'aimerais changer ça. Alors c'était une manière de m'investir, j'imagine.

Consciente que sa réponse donnait l'impression que Benjy en lui-même ne l'intéressait pas, elle continua :

- Et puis ça me sidère que Macnair ait insulté ta mère comme ça. Il méritait d'être puni.

Benjy hocha gravement la tête puis baissa les yeux, silencieux. Emmeline avait eu le temps de constater que son visage s'était à nouveau fermé. Paniquée à l'idée de l'avoir blessé, elle balbutia :

- Je suis désolée, je ne suis pas très douée pour... pour tout ça. L'amitié. Je... Je n'ai pas beaucoup d'amis, en dehors du club de Bavboules...

Elle rougit furieusement en l'avouant et ramena ses cheveux devant son visage d'un mouvement d'épaule pour se cacher derrière eux. Le rire de Benjy la tira de sa cachette. Elle osa jeter un coup d'oeil dans sa direction. Il lui souriait, l'air légèrement sardonique.

- C'est quoi cette amitié basée sur des billes qui crachent du pus ? Drôle de relation.

- Ce n'est pas du pus, s'insurgea Emmeline.

Il rit à nouveau, se leva et lui tendit la main pour l'aider à faire de même.

- C'est vraiment toute ta vie les Bavboules, hein ?

- Eh bien, ça et mes études, oui, avoua-t-elle, sans trop savoir si elle devait être fière ou gênée.

- Et un certain sens de la justice, apparemment, compléta Benjy en fourrant ses mains dans ses poches. Ravi de te rencontrer enfin, Emmeline Vance.

La jeune fille lui adressa un sourire franc et désigna l'escalier tout proche d'un mouvement de la tête.

- Tu viens ? Ça va bientôt l'heure de dîner et j'aimerais déposer mes Bavboules au dortoir avant.

Ils prirent donc le chemin de leur salle commune respective, côte à côte dans l'escalier, un sac de Bavboules entre eux.

Partie 2 : « Bavboule d'amour ! »

1979

- Où est-ce qu'on va ?

- Tu verras.

- Benjy !

Le jeune homme rit dans la nuit claire de Cornouailles et tendit la main à Emmeline, qui avait revêtu une belle robe de soirée de couleur pourpre pour l'occasion.

- On transplane. Je t'emmène.

Elle grimaça, les mains sur les hanches.

- Tu sais que chez les Moldus, on se rend au restaurant en voiture et l'homme peut ouvrir la portière de sa cavalière s'il veut être galant ? C'est bien moins violent que le transplanage d'escorte.

Benjy leva les yeux au ciel.

- J'y vais tout seul, si tu préfères.

- Pas maintenant que j'ai mis cette robe, non.

- Merlin, Vance, ce que tu es agaçante.

Elle lui sourit largement, pris finalement sa main et la secoua dans tous les sens.

- Alors ? On y va ?

Sans plus attendre, Benjy fit un pas en avant et pivota, Emmeline accrochée à sa main. Ils débarquèrent en plein Londres, dans une ruelle déserte qui débouchait sur une rue plus animée. Benjy guida la jeune femme vers un petit restaurant sympathique – et moldu – que lui avait conseillé Margaret. Il avait promis à Emmeline de l'emmener en restaurant pour qu'ils se changent les idées. Le contrat était clair : ils ne parleraient pas de la guerre. Ce soir-là, ils étaient deux vieux amis qui se retrouvaient pour partager un dîner, et non deux vétérans harassés.

Durant leur repas, Emmeline le harcela à propos des Bavboules. Il était le seul, au QG, à connaître sa passion pour ce jeu. Elle refusait d'en parler devant les autres, persuadée qu'ils se moqueraient d'elle. Elle en profitait donc dès qu'ils se trouvaient seuls, Benjy et elle, pour lui faire des compte-rendus détaillés de l'actualité Bavboules.

Tout en l'écoutant, il songeait avec tendresse à la jeune Serdaigle qu'il avait appris à connaître dix ans plus tôt. Après l'affaire Macnair, ils étaient vite devenus inséparables. Il l'avait sortie de son cercle exclusif de joueurs de Bavboules et Emmeline s'était rendue compte qu'elle appréciait la société des autres, plus qu'elle ne l'aurait pensé. Fidèle à sa volonté de s'investir plus dans le monde qui l'entourait, elle avait fait des efforts avec les amis de Benjy, qui étaient vite devenus les siens, mais aussi avec ses camarades de Bavboules. Elle avait appris à connaître autre chose que leurs qualités au jeu. Benjy l'avait regardée s'ouvrir avec bonheur, cette drôle de fille qui se fichait du regard des autres et adorait faire ses devoirs. Emmeline lui avait dit un jour que sans lui, jamais elle ne serait devenue préfète-en-chef. Trop renfermée sur elle-même, elle n'aurait pas fait une bonne candidate. Benjy lui avait ouvert des horizons nouveaux.

A ce jour encore, assis en face d'elle dans cette salle de restaurant moldue, Benjy ignorait ce qui l'avait poussé à s'attacher à elle, durant leur cinquième année. Peut-être était-ce plutôt Emmeline qui avait choisi de rester auprès de lui. Toujours là pour le harceler, pour le forcer à dire ce qu'il avait sur le cœur. Taciturne devant tous, il se laissait toujours aller devant Emmeline. Il aurait pu tomber amoureux d'elle si elle l'avait laissé faire. Mais Emmeline adolescente n'était pas intéressée par la romance. Ses quelques tentatives de flirt s'étaient soldées par des échecs retentissants, qui étaient vite devenus une blague entre eux. Par la suite, le cœur rongé par la vengeance, c'était lui qui s'était refuser à lui offrir plus.

- Ben ? Tu m'écoutes ?

Il sourit face à l'air agacé de la jeune femme et répondit docilement :

- Ils ont annulé le championnat d'Angleterre.

- Ça n'a pas l'air de t'attrister ! s'insurgea-t-elle. C'est une catastrophe !

Il se mit à rire et l'écouta énumérer tous les désavantages de cet événement pendant qu'il mangeait son dessert.

- Où est-ce qu'on va ?

- Tu as fini de me poser cette question en permanence ?

- Tu fais des mystères !

- Enjambe cette barrière.

- Quoi ?

Excédé, Benjy lui désigna la barrière du petit square londonien devant lequel ils se trouvaient. Emmeline lui jeta un regard circonspect, releva ses jupes et enjamba le petit portillon. Benjy fit de même puis l'entraîna au cœur du square, là où on ne les verrait pas de la rue.

- Donne moi ton sac à main, demanda-t-il alors qu'elle regardait autour d'elle, perplexe.

Elle le lui tendit, une mine méfiante sur le visage. Benjy farfouilla n'eut pas besoin de chercher longtemps pour trouver ce qu'il voulait. Il sortit un sac en toile, usé jusqu'à la corde, dont la vue fit rougir Emmeline.

- Je savais que tu les emmènerais, triompha-t-il.

La jeune femme lui confisqua son sac de Bavboules, l'air farouche.

- On ne sait jamais dans quelles circonstances on pourrait être amené à jouer !

Benjy s'abstint d'un commentaire sarcastique sur le fait que les Mangemorts la défieraient certainement pour se fendre d'un sourire vainqueur.

- Effectivement. D'ailleurs c'est ce qui nous amène ici.

Emmeline l'observa quelques secondes en silence pour vérifier qu'il était sérieux puis poussa un cri de joie. Elle s'empressa de préparer le terrain, ravie, tandis que Benjy se préparait mentalement à se faire recouvrir de jus pestilentiel. Emmeline revint vers lui en sautillant et lui pinça la joue avec humour.

- T'es vraiment une Bavboule d'amour, toi.

- Vance, geignit-il. Ne m'appellepas comme ça !

Elle éclata de rire, alla s'installer de son côté du cercle et entama la partie.

Après avoir raccompagné Emmeline chez elle, Benjy se rendit sur le lieu de sa garde de nuit. Il n'avait pas dit à la jeune femme qu'il ne rentrait pas directement au QG. Elle aurait tenu à rester avec lui. Appuyé contre un réverbère, caché sous une cape d'invisibilité d'assez mauvaise facture, il laissa la nostalgie l'envahir. La vie lui paraissait tellement difficile, lorsqu'il était adolescent. A présent, il aurait donné n'importe quoi pour revenir à la douce époque de Poudlard. Avant qu'il ne perde son âme dans la guerre.

Dans la nuit silencieuse, il se rappela l'horreur de l'assassinat de ses parents, la soif de vengeance, et le crime, le sang sur ses mains. Le noir désespoir d'Azkaban ensuite, puis Dumbledore lui expliquant qu'il n'était pas perdu à jamais.

Emmeline ne l'avait pas abandonné même pendant cette période de sa vie. Ce n'était pas faute de l'avoir repoussé. Elle s'était accrochée comme un Véracrasse à son aquarium. Elle était là à l'enterrement de ses parents, elle était là à sa sortie d'Azkaban. Elle était là lorsqu'il s'était enfin laisser aller à pleurer. Et quand il se détestait tellement qu'il avait souhaité se donner la mort, elle l'avait aimé assez pour deux.

Le lien qui les unissait allait au-delà de l'amitié, au-delà de l'amour romantique qu'ils auraient pu partager. Emmeline était le lien qui le rattachait à la vie. Ils s'étaient mutuellement sauvés plus d'une fois au cours de leurs années de guerre.

Benjy laissa aller sa tête contre le réverbère et à, travers le tissu invisible de sa cape, contempla les étoiles. Ce lien plus fort que tout était tout ce qui comptait.

Une brusque bourrasque de vent le ramena à la réalité et il se secoua. Il ne cessait de rappeler à l'ordre les nouvelles recrues afin qu'elles restent concentrées, ce n'était pas le moment de se laisser distraire. Il se redressa, serra ses doigts autour de sa baguette et commença sa garde pour de bon.

***

Mai 1981

Benjy fut réveillé en sursaut par quelqu'un qui tambourinait à la porte. Il ne se pressa pas, bien conscient que ce n'était pas dans le style des Mangemorts de s'annoncer de la sorte. Encore incapable d'ouvrir les yeux, il se retourna sur le dos, grommela, passa une main dans ses cheveux emmêlés et enfin ouvrit un œil. Emmeline dormait toujours à côté de lui, ses cheveux bruns étalés sur l'oreiller. Il était sûr qu'elle faisait semblant juste pour qu'il y aille.

Il grommela, ouvrit le deuxième œil et se redressa enfin. On venait de frapper pour la troisième fois à la porte. Avec un suprême effort, il sortit du lit, pensa à attraper sa baguette et tituba jusqu'à la porte d'entrée.

- Qui est là ? Grogna-t-il.

- Euh, Remus Lupin, annonça la voix étouffée du jeune homme.

Benjy s'adossa contre le battant de la porte, l'esprit embrumé. Aucune question de sécurité ne lui venait à l'esprit. Prit d'une subite inspiration, il interrogea :

- Comment s'appelle le chat des Potter ?

- Gandalf.

Il pouvait presque entendre le sourire dans la voix de Remus. Il ouvrit la porte, sa baguette sortit, au cas où et fit face à l'expression surprise de son jeune collègue. Benjy se rappelle soudain qu'il ne portait qu'un caleçon et qu'il était chez Emmeline. Oh, au diable les ragots.

- Maugrey m'a demandé d'apporter ça à Emmeline, expliqua-t-il en tendant une cape et un vieux grimoire, que Benjy prit sans broncher. Désolé d'être passé si tôt, ajouta-t-il, l'air vaguement gêné.

Benjy haussa les épaules et lui claqua la porta au nez sans plus de cérémonie. Il abandonna les objets par terre, devant la porte de la chambre, et s'y faufila sans bruit. Emmeline n'avait pas bougé. Il se glissa entre les draps et se pressa contre la jeune femme, un bras passé au-dessus de sa hanche. Lorsqu'il effleura son épaule d'un baiser, il l'entendit murmurer :

- Bavboule d'amour.

- Emmeline !

Elle rit tout bas, sa cala plus confortablement contre lui et replongea dans le sommeil. Benjy, le nez enfoui dans ses cheveux, ne put s'empêcher de sourire.

- Bavboule d'amour toi-même. 


Si vous vous ennuyez, allez lire les fanfics de Annabethfan ou PtiteCitrouille aussi :D 

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