Révélations familiales

Le vent s'engouffrait dans la maison, faisant bruisser les rideaux de la petite cuisine. Assise devant le grimoire que je n'avais pas touché depuis des jours, je me sentais dépassée. En face de moi, Nina buvait son thé en silence, mais je pouvais voir l'inquiétude dans ses yeux. Cela faisait plusieurs jours que nous essayions de contacter Gwenaëlle. Elle ne répondait à aucun de nos appels.

"Pourquoi elle ne répond pas ?" demanda Nina, rompant le silence lourd de la pièce. Elle avait déjà posé la question plusieurs fois, mais cette fois, sa voix était teintée de frustration.

Je savais pourquoi. Gwenaëlle nous avait enseigné un sort de protection, un sort si puissant qu'il isolait complètement du monde extérieur. Si elle avait choisi de l'activer, c'était pour une raison grave. Mais je n'avais pas le courage de l'expliquer à Nina une fois de plus.

"Elle doit se protéger," murmurai-je en fixant le grimoire. "Elle nous l'a dit. Quand les choses deviennent trop dangereuses..."

"Mais on a besoin d'elle !" s'exclama Nina, en posant brusquement sa tasse sur la table. "Comment on est censées gérer ça toutes seules ?"

Je n'avais pas de réponse à lui donner. Moi aussi, je me sentais perdue. Mes pouvoirs, bien que de plus en plus présents, restaient hors de contrôle, et sans l'aide de Gwenaëlle, je ne savais pas comment les maîtriser. Mais je savais qu'on ne pouvait plus compter sur elle pour le moment. J'allais devoir avancer, avec ou sans elle. C'est alors que la sonnette retentit, me faisant sursauter.

Je jetai un regard à Nina, qui haussa les sourcils, aussi surprise que moi. Qui pouvait bien venir à cette heure-ci ? Soudain, je me retrouvai figée, terrifiée par le bruit strident de la sonnette. Il me ramena brutalement à la réalité, me sortant de mes pensées. Mon regard se posa sur Nina, qui me sourit d'un air crispé.

"Ça ne doit être rien," murmura-t-elle, son sourire faible et incertain. "Je vais voir."

Elle se dirigea vers la porte avec précaution, jetant un coup d'œil par le judas avant d'ouvrir doucement. J'attendais, chaque muscle tendu, prête à agir en cas de danger. Mon cœur battait la chamade, chaque seconde s'étirant dans une tension insoutenable. Mais ce ne fut pas Gabriel. Pas une menace sombre ou surnaturelle.

Devant la porte, se tenait un homme ordinaire. Le facteur. Nina ouvrit davantage la porte, soulagée, mais toujours tendue.

"Luna, c'est pour toi," m'appela-t-elle avec un mélange de surprise et de soulagement dans la voix.

Je m'approchai, le cœur battant, et mon regard croisa celui de l'homme. Il me tendit une lettre, une simple enveloppe blanche, portant mon nom. Je pris l'enveloppe d'une main tremblante, sentant un étrange mélange de curiosité et d'appréhension monter en moi. Qui pouvait bien m'écrire maintenant, alors que je me sentais piégée au milieu de ce cauchemar ?

Je fermai la porte derrière le facteur, retournant lentement à la table avec Nina. Je passai un doigt hésitant sous le rabat de l'enveloppe et l'ouvris. À l'intérieur, un parchemin enroulé. Mon cœur se serra en voyant le symbole gravé à l'encre noire sur le papier. C'était un symbole familier... celui de ma lignée.

Je déchirai le rabat et tirai un parchemin soigneusement enroulé. Lorsque je le déroulai, mon cœur se serra en voyant le symbole familier inscrit en bas de la page. Le même symbole que sur le grimoire.

"Luna," murmura Nina, penchée au-dessus de mon épaule. "Qu'est-ce que ça dit ?"

Je lui jetai un coup d'œil, le parchemin toujours entre mes mains. "C'est... une sorte de lettre  .

Je mordis mes lèvres, anxieuse, avant de prendre une grande inspiration et de commencer à lire à voix haute.

"Luna,

Il est temps pour toi de connaître toute la vérité. Gabriel, celui que tu crains, était était l'un des plus puissants sorciers de notre famille, mais il a été corrompu par un pacte démoniaque, un pacte qui a défiguré son âme et l'a transformé en ce qu'il est aujourd'hui."

Je sentis mes mains trembler légèrement, mais je continuai à lire malgré l'angoisse qui montait en moi.

"Tu ne peux pas l'affronter seule. Je...je suis ton oncle , Matthieu. Gwenaëlle m'a forcé à me manifester auprès de toi et c'est aussi moi qui ta envoyé le grimoire de nos ancêtres . Elle sait que tu es douée, bien plus douée que tu ne le crois, et que tu es la seule à pouvoir déverrouiller les pouvoirs les plus puissants de notre grimoire familial. Mais pour cela, tu dois accomplir un sort, un sort que seule toi peux lancer. Ce sort te permettra d'accéder aux sorts les plus puissants qui ont été scellés pendant des siècles."

Je sentais Nina me regarder avec insistance, mais je ne pouvais détacher mes yeux du parchemin. Le poids de ces révélations m'écrasait, mais il y avait une certaine clarté dans les mots de Matthieu. Tout commençait à prendre sens.

"Je sais que tu as des doutes. Je sais que tu te méfies de moi, et tu as raison. Mais sache que je suis là pour t'aider, et que je viendrai te voir plus vite que tu ne le penses. Pour l'instant, concentre-toi sur ce sort. Il est la clé pour maîtriser le grimoire et, par extension, te préparer à affronter Gabriel."

Je marquai une pause, le cœur battant à tout rompre. Je n'arrivais pas à croire ce que je lisais. Cet homme, Matthieu, mon oncle, affirmait qu'il pouvait m'aider, qu'il savait tout sur moi et sur ce que j'avais à accomplir. Mais pouvais-je vraiment lui faire confiance ?

Je continuai à lire, la voix plus faible, presque tremblante.

"Ta mère biologique, ma sœur, croyait en toi. Elle savait que tu étais spéciale. Elle t'a protégée jusqu'à la fin, en scellant ces secrets pour que tu puisses les découvrir au bon moment. Ce moment est venu. Tu dois apprendre à puiser dans la force de ta lignée, et comprendre que le pouvoir qui coule dans tes veines est la clé pour restaurer l'équilibre.

Je te promets que tu n'es pas seule dans cette bataille. Je veillerai sur toi. Et je viendrai à toi plus tôt que tu ne l'imagines."

Je restai immobile, le parchemin tremblant entre mes mains. Mon esprit tourbillonnait sous le poids des révélations que je venais de lire. Mon oncle. Ma mère biologique. Et ce sort que je devais lancer pour déverrouiller les secrets du grimoire. C'était à la fois trop et pas assez d'informations. Je sentais un mélange de peur et de confusion m'envahir.

Nina, toujours à mes côtés, posa doucement sa main sur mon bras, essayant de m'apaiser. Sa présence me réconfortait un peu, comme un ancrage dans ce tourbillon d'émotions. "Qu'est-ce qu'on va faire ?" demanda-t-elle, sa voix douce me ramenant à la réalité.

Je fermai les yeux un instant, essayant de rassembler mes pensées. "Je... je ne sais pas. Peut-être qu'on doit juste attendre... Mon 'oncle' ne m'a pas donné le sort. Il a sûrement ses raisons, peut-être par peur ou pour me protéger."

Nina me sourit doucement et prit ma main, serrant mes doigts dans les siens. "On va trouver une solution, Luna. Il a peut-être laissé des indices sur le parchemin, quelque chose qu'on a manqué. Tu veux bien me le montrer ?"

Je hochai la tête et lui tendis le parchemin. Elle l'inspecta avec attention, ses yeux brillants de curiosité. Puis, un large sourire apparut sur son visage. Elle me montra le parchemin face à la lumière de la lampe. C'est alors que je vis ce qu'elle avait découvert. Sous la lumière, des lignes invisibles se dévoilèrent, formant une sorte de carte.

"Regarde," murmura Nina, excitée. "C'est une carte !"

Je restai bouche bée. Comment n'avions-nous pas vu ça avant ? Il y avait un endroit marqué au cœur de la forêt. Mon estomac se noua. La forêt. Je n'aimais pas cet endroit, surtout depuis que la magie s'était éveillée en moi. Chaque recoin semblait caché de sombres secrets.

"On doit y aller," dit Nina avec détermination. "C'est sûrement là que ton oncle veut te mener."

Je n'étais pas aussi sûre qu'elle. Une part de moi voulait rester ici, loin de tout danger, mais je savais que ce n'était pas possible. Mon destin, mes pouvoirs, tout semblait me pousser vers cet endroit. Je regardai Nina, qui tenait toujours ma main fermement, comme pour me dire qu'elle ne me laisserait pas affronter tout cela seule. Mon cœur battait plus vite à son contact. Il y avait quelque chose de plus dans ce lien entre nous, quelque chose que je n'osais pas encore nommer.

"Je ne suis pas très à l'aise avec cette idée..." murmurai-je, fixant la carte avec appréhension.

"Je sais," répondit-elle doucement. "Mais tu n'es pas seule. Je suis avec toi."

Sans un mot de plus, nous nous préparâmes à partir. La nuit commençait à tomber lorsque nous quittâmes la maison pour nous aventurer dans la forêt. Le trajet fut silencieux, mis à part les bruissements des feuilles sous nos pas et le souffle léger du vent. La présence de Nina à mes côtés m'aidait à garder mon calme, bien que je sentisse une angoisse grandissante à mesure que nous approchions de notre destination.

Nous marchâmes un moment, nos mains toujours liées, jusqu'à ce que nous tombions sur un vieux caveau abandonné, à moitié caché par la végétation. Le bâtiment, ancien et usé par le temps, dégageait une aura étrange et oppressante. Je m'arrêtai net, mon cœur tambourinant dans ma poitrine.

"C'est ici," murmura Nina, rompant le silence.

Je déglutis, tentant de calmer la panique qui montait en moi. Mes doigts tremblaient légèrement dans sa main, mais elle ne lâcha pas prise. Ensemble, nous nous approchâmes du caveau. La porte en pierre, à moitié ouverte, grinça légèrement lorsque Nina la poussa. À l'intérieur, l'obscurité régnait, mais une faible lueur vacillante se reflétait sur les murs de pierre.

C'est alors que nous entendîmes une voix grave et surprise.

"Luna ?"

Je relevai la tête, mes yeux cherchant la source du son. Matthieu se tenait là, debout au centre du caveau, visiblement étonné de nous voir si vite. Ses yeux passèrent de moi à Nina, puis un froncement de sourcils apparut sur son visage.

"Je ne m'attendais pas à ce que tu arrives si rapidement... et encore moins accompagnée."

Nina, avec son naturel habituel, leva la main et fit un petit coucou, comme une enfant prise en flagrant délit. "Salut !"

Je serrai les dents pour ne pas éclater de rire, mais je pris une grande inspiration pour rester concentrée. "C'est ma meilleure amie, Nina," dis-je calmement. "Elle m'a aidée à découvrir la carte."

Matthieu posa son regard sur Nina, puis sur nos mains toujours enlacées. Il ne dit rien pendant un instant, son regard se faisant plus perçant. J'eus l'impression que, dans cet échange silencieux, il essayait de comprendre quelque chose. Il leva un sourcil en signe de légère surprise, mais ne fit aucun commentaire.

"Je vois," murmura-t-il, son ton plus neutre cette fois. "Il semble que tu sois entourée de gens de confiance."

Ses mots me laissèrent un peu plus à l'aise, bien qu'il y ait une part de méfiance en moi. Matthieu semblait prendre en compte la présence de Nina, mais je me demandais s'il voyait cela comme une aide ou une faiblesse. Peu importait. Nina était à mes côtés, et cela me donnait la force dont j'avais besoin.

"Alors, maintenant qu'on est ici," dis-je, essayant de briser le silence tendu, "qu'est-ce que je dois faire ?"

Matthieu soupira légèrement, avant de s'approcher de nous. "Tu es venue plus tôt que prévu, mais il est temps de commencer. Il y a beaucoup de choses que tu dois apprendre, Luna. Et la première est de déverrouiller les sorts les plus puissants du grimoire." Ses yeux glissèrent une nouvelle fois vers Nina, hésitant. "Mais cela demandera de la concentration, et... cela pourrait être dangereux."

Nina serra ma main un peu plus fort, comme pour me dire qu'elle n'avait pas l'intention de partir, quoi qu'il arrive.

"Je ne la laisserai pas seule," déclara Nina, résolue.

Matthieu soupira, visiblement partagé entre la prudence et l'acceptation de cette solidarité. "Très bien, mais sachez que ce qui va suivre vous liera à un pouvoir ancien. Luna, tu es prête à affronter ce qui t'attend, mais ta décision de t'engager pleinement n'est pas anodine."

Je fis un signe affirmatif de la tête, mon regard fixant le sien avec détermination. "Je suis prête."

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