Les premiers signes
Je me réveillai en sursaut, le cœur battant à tout rompre. Pendant un moment, je ne sus plus où j'étais. Les ombres qui dansaient sur les murs de ma chambre semblaient m'étrangler, me maintenant prisonnière dans cette nuit sans fin. Ce n'est qu'en inspirant profondément que je réalisai que j'étais bien chez moi, allongée dans mon lit.
Le silence qui régnait autour de moi avait quelque chose d'inquiétant. L'air était lourd, presque oppressant, comme si une présence invisible m'observait dans l'obscurité. Je me redressai doucement, mon souffle encore irrégulier, essayant de reprendre mes esprits. Mon regard se posa sur les rideaux, tirés comme à mon habitude pour bloquer la lumière du matin, mais cette fois, ils semblaient plus sombres, plus menaçants. Une sensation étrange flottait dans l'air, et la nuit dernière me revint soudain en mémoire : la clairière, le rituel, ce vent surnaturel qui semblait répondre à l'incantation de Nina. Et cet éclat de lumière, furtif, que j'avais cru voir.
Je me levai, mes pieds nus touchant le sol froid, et je frissonnai malgré moi. Quelque chose était différent aujourd'hui, je pouvais le sentir. Une part de moi tentait de rationaliser ce que j'avais vécu hier. Ce n'était qu'un jeu, pas vrai ? Rien de sérieux. Nina et moi avions juste essayé de nous amuser pour changer les idées... mais une autre part de moi, celle qui refusait de se taire, me disait que ce n'était pas si simple. Ce que j'avais ressenti n'était pas qu'un simple frisson de peur.
Je passai une main dans mes cheveux en désordre et m'avançai vers la fenêtre. Derrière les rideaux, une lumière grisâtre perçait à peine, comme si même le soleil refusait de briller complètement aujourd'hui. Un frisson parcourut ma colonne vertébrale. Rien n'allait. Depuis que je m'étais réveillée, tout semblait décalé, comme si je vivais dans une autre réalité.
Je quittai ma chambre et me dirigeai vers la cuisine pour me servir un verre d'eau, espérant que cela m'aiderait à me sentir plus ancrée. Mais alors que je traversais le couloir, une étrange sensation de malaise me prit. Mon cœur s'accéléra, mes pas se firent plus hésitants. C'était ridicule. Je n'avais aucune raison d'avoir peur dans ma propre maison. Pourtant, cette impression d'être observée me collait à la peau, comme si quelque chose – ou quelqu'un – m'épiait, tapi dans l'ombre.
En arrivant dans la cuisine, je me dirigeai vers le placard pour prendre un verre, mais une chose étrange se produisit. La lumière au-dessus de moi vacilla. Je clignai des yeux, pensant que c'était une simple panne, mais non. Elle s'éteignit complètement, plongeant la pièce dans une semi-obscurité.
Mon cœur manqua un battement. Immobile, je restai là, figée, fixant la lumière éteinte. Ce n'était qu'un problème électrique, me dis-je. Rien de plus. Pourtant, quelque chose en moi savait que ce n'était pas normal.
Soudain, je sentis un courant d'air froid traverser la pièce, soulevant quelques mèches de mes cheveux. Un vent glacial, semblable à celui qui avait soufflé dans la clairière la nuit dernière, me caressa la peau. Comment était-ce possible ? Les fenêtres étaient fermées, il n'y avait aucune raison pour qu'un tel courant d'air se produise. Mon souffle se bloqua dans ma gorge. Je voulus m'en convaincre, me dire que ce n'était rien, mais la peur commençait à s'immiscer en moi.
Je m'avançai doucement, tendant la main pour attraper un verre, mais juste avant que je ne l'atteigne, un claquement retentit. Tous les placards s'ouvrirent brusquement, comme si une force invisible les avait frappés. Le bruit résonna dans la pièce, me faisant sursauter violemment.
« Non... » murmurai-je en reculant, les yeux écarquillés.
Mon souffle s'accéléra, mon corps se figea dans une posture de défense. Les portes des placards claquaient de plus en plus fort, encore et encore, créant une cacophonie angoissante. C'était impossible. Ce n'était pas réel. Mais chaque claquement de porte résonnait si fort dans mes oreilles que je ne pouvais pas l'ignorer.
Je reculai d'un pas, puis deux, mes jambes tremblantes. L'instinct me criait de fuir, mais je ne pouvais pas bouger. Et puis, aussi soudainement que cela avait commencé, tout s'arrêta. Le vent cessa, les portes restèrent fermées, et la lumière revint doucement, comme si rien ne s'était passé.
Je restai figée pendant un long moment, incapable de bouger. Mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine, mes mains tremblaient. Ce n'était pas une hallucination. C'était bien réel. Mais comment... comment cela pouvait-il être possible ? Est-ce que j'étais en train de devenir folle ? Ou... est-ce que cela avait un lien avec ce rituel ? Est-ce que nous avions réveillé quelque chose de bien plus puissant que ce que nous pouvions imaginer ?
La sonnerie de mon téléphone retentit brusquement, me faisant sursauter une nouvelle fois. Je me précipitai pour répondre, espérant que la voix de Nina me ramènerait à la réalité.
« Luna ? Ça va ? » Sa voix résonna dans le combiné, inquiète.
Je pris une profonde inspiration avant de répondre. « Je... oui, je crois. »
« Pourquoi tu dis ça comme ça ? » Elle semblait sur le qui-vive. « J'ai eu une sensation bizarre ce matin, comme si quelque chose n'allait pas. »
Je restai silencieuse un instant. Comment pouvait-elle savoir ? Est-ce que tout cela avait un lien avec nous, avec ce que nous avions fait la nuit dernière ?
« Il s'est passé quelque chose, » finis-je par dire, ma voix tremblante. « Les lumières... les placards... je crois que... quelque chose ne va pas. »
Nina garda le silence quelques secondes, et je pouvais presque l'entendre réfléchir. « Je passe chez toi tout de suite. »
Je raccrochai, ma main encore tremblante sur le téléphone. Rien ne me paraissait normal. Tout était devenu étrange depuis cette nuit dans la clairière. Mais qu'est-ce que nous avions fait ? Et pourquoi cela semblait-il... me suivre ?
Nina arriva moins de trente minutes plus tard. Lorsqu'elle franchit la porte, son visage habituellement souriant était empreint de gravité. Elle me fixa immédiatement, cherchant à lire dans mes yeux ce que je ressentais.
« Luna, tu as l'air... différente. » Sa voix était douce, mais inquiète.
Je haussai les épaules, incapable de trouver les mots pour expliquer ce que je ressentais. « Je sais pas ce qui m'arrive... »
Je lui racontai tout : les lumières qui vacillaient, le vent qui soufflait dans la pièce, et les placards qui claquaient sans raison. Elle m'écouta attentivement, son expression de plus en plus préoccupée à mesure que je parlais.
« Et si... » Nina marqua une pause, comme si elle n'osait pas dire ce qu'elle pensait. « Et si ce n'était pas un simple jeu, hier soir ? »
Je la regardai, incrédule. « Quoi ? Non, c'était juste un rituel idiot pour se distraire. Tu l'as dit toi-même. »
Nina secoua la tête, comme si elle rejetait sa propre idée. « Je sais... mais... j'ai ressenti quelque chose aussi. Comme si... comme si on avait réveillé quelque chose qui ne devait pas l'être. »
Je restai silencieuse, mes pensées s'entrechoquant dans ma tête. Ce qu'elle disait résonnait en moi d'une manière troublante. J'avais ressenti la même chose, mais je n'osais pas l'admettre. Admettre que ce rituel avait réellement eu un effet, que quelque chose s'était bel et bien produit... c'était trop effrayant.
« Peut-être que c'était juste une coïncidence, » dis-je, tentant de me convaincre autant que de la convaincre. « Rien de tout ça n'a de sens. »
Nina n'était pas convaincue. Ses yeux s'assombrirent, comme si elle réalisait quelque chose qu'elle n'avait pas encore osé formuler. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais la referma aussitôt, hésitant à partager ses pensées.
« Non, Lune. Ce n'est pas une coïncidence. » Elle secoua la tête, sa voix plus ferme maintenant. « J'ai ressenti ce vent aussi. Et... » Elle baissa les yeux, luttant contre sa propre peur. « Il y avait autre chose. Après le rituel, je ne t'ai pas dit, mais j'ai vu une forme... dans les bois, juste à la limite de la clairière. C'était fugace, mais c'était là. »
Mon souffle se bloqua dans ma gorge. « Une forme ? »
Elle hocha la tête. « Je pensais que c'était mon imagination, ou juste un jeu de lumière. Mais maintenant, avec ce qui t'arrive... je ne peux plus l'ignorer. Quelque chose a changé. »
Un silence tendu s'installa entre nous. La réalité de la situation nous frappait enfin de plein fouet. Ce n'était plus un simple jeu. Nous avions réveillé quelque chose, quelque chose qui dépassait tout ce que nous pouvions comprendre.
Je me levai brusquement, sentant la panique monter en moi. « Je ne peux pas... je ne peux pas rester ici. Pas avec tout ça. Il faut qu'on fasse quelque chose. »
« On va trouver une solution, » répondit Nina, se levant à son tour, déterminée. « Il faut juste qu'on sache à quoi on a affaire. Il y a forcément une explication. »
« Une explication ? » Je laissai échapper un rire nerveux. « Nina, on a réveillé je-ne-sais-quoi avec un rituel sorti d'un vieux livre poussiéreux. Comment on est censées comprendre ça ? »
Elle resta silencieuse, mais ses yeux brillaient d'une détermination nouvelle. « Peut-être que ce livre peut nous aider. On pourrait retourner à la librairie où je l'ai trouvé. Le propriétaire m'avait dit que c'était un livre ancien, qu'il contenait des rituels oubliés. Il doit en savoir plus. »
L'idée de retourner à la source de ce cauchemar m'effrayait, mais c'était peut-être la seule piste que nous avions. Je hochai la tête. « D'accord. Allons-y. »
La librairie en question se trouvait dans une petite ruelle, presque cachée entre deux bâtiments anciens du centre-ville. C'était une boutique que nous avions découverte par hasard, un lieu qui semblait figé dans le temps. À l'intérieur, l'odeur du bois ancien et du papier jauni envahissait l'espace, créant une atmosphère à la fois réconfortante et inquiétante.
Le propriétaire, un vieil homme à la barbe grisonnante, était assis derrière le comptoir, lisant tranquillement un livre épais. Lorsqu'il leva les yeux vers nous, un sourire énigmatique se dessina sur son visage.
« Je me demandais quand vous reviendriez, » dit-il d'une voix rauque.
Nina et moi échangions un regard surpris. Comment pouvait-il savoir ?
« Vous avez pris un livre ancien, n'est-ce pas ? Un grimoire, pour être plus précise, » continua-t-il en se levant lentement.
« Oui, » répondit Nina, un peu hésitante. « Mais... nous avons fait un rituel avec, et maintenant il se passe des choses étranges. »
Le vieil homme hocha la tête, comme s'il s'attendait à cette réponse. « Vous avez réveillé quelque chose. Un pouvoir ancien, endormi depuis longtemps. Ce grimoire ne contient pas des incantations anodines. Il est lié à des forces bien plus puissantes que vous ne pouvez l'imaginer. »
Mon cœur se serra. « Et qu'est-ce qu'on est censées faire maintenant ? Comment arrêter ça ? »
Le vieil homme nous regarda, ses yeux perçants semblant voir au-delà de ce que nous disions. « Vous ne pouvez pas l'arrêter. Pas encore. Ce que vous avez réveillé ne disparaîtra pas simplement en refermant le livre. Vous devez apprendre à comprendre ces forces, à les maîtriser. C'est la seule solution. »
Je sentis la panique monter en moi. Comment étions-nous censées maîtriser quelque chose que nous ne comprenions même pas ? « Mais... nous ne savons rien de ces forces ! Nous ne sommes pas des sorcières ou je ne sais quoi ! »
Le vieil homme eut un sourire triste. « Pas encore. Mais vous allez devoir apprendre. Ce pouvoir est maintenant lié à vous. Que cela vous plaise ou non. »
Un silence lourd s'abattit sur nous. Nina et moi nous regardions, incertaines de la marche à suivre. Ce que le vieil homme disait semblait impossible. Et pourtant, tout ce qui se passait autour de nous confirmait ses paroles.
« Vous devrez retourner à la clairière, » reprit le vieil homme. « Ce que vous avez réveillé est encore là-bas. Il vous attend. »
Le retour à la clairière s'annonçait encore plus terrifiant que ce que j'aurais pu imaginer. Nous savions que quelque chose nous y attendait, mais quoi ? Tandis que nous marchions vers notre destination, l'air semblait se charger d'une tension invisible. Chaque pas nous rapprochait de ce que nous avions réveillé, et je ne pouvais m'empêcher de ressentir cette peur viscérale qui ne me quittait plus depuis le matin.
Les feuilles, qui étaient restées figées plus tôt, recommencèrent à bruire autour de nous. Un vent glacé, semblable à celui de la nuit précédente, nous enveloppa à nouveau.
« Est-ce que tu penses qu'on peut vraiment contrôler tout ça ? » murmurai-je, à mi-chemin entre le désespoir et l'espoir.
Nina resta silencieuse, ses yeux rivés sur le sentier. Elle aussi devait se demander si nous étions prêtes à affronter ce qui nous attendait. Mais la vérité, c'était que nous n'avions pas le choix
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