Chapitre cinq
Comment je vais réussir à faire ça ? Le patron me demande d'accorder ces deux tissus mais l'un est lisse et l'autre est rêche, c'est pas beau !
-JinHwan, regarde ce que le patron me demande de faire.
Mon collègue examina à la va-vite la demande du boss, assez perplexe. MinSeok se pencha au-dessus de mon épaule, je pouvais sentir son souffle s'échouer sur ma peau.
-J'avoue que c'est bizarre, murmura-t-il.
-Je dirais plutôt qu'il faudrait faire ceci.
JinHwan attrapa les deux tissus et les joignit de sorte à ce que le lisse recouvre une partie du rêche, en plaçant ce dernier en-dessous, comme s'il y avait deux plis. J'hochai de la tête puis me retournai vers MinSeok, déposant les tissus sur son bras.
-Quand il va marcher, le rêche va endommager le vêtement. Je verrais plus le lisse en-dessous pour qu'il soit à l'aise.
-Oui c'est vrai, tu as raison.
MinSeok se dépêcha de rejoindre le podium tandis que j'allais chercher le mètre pour prendre les mesures. J'allais commencer par faire les manches, puis je ferais le tronc. La collection était du style far-ouest, le tissu lisse était du cuir et le rêche était une peau de vache. Quant au pantalon, il fallait que j'utilise de la peau de bison. C'est pas tous les jours que j'ai des matériaux comme ceux-ci !
Mon mannequin se tenait tranquille, se laissant mesurer les bras, le cou, la taille, etc. JinHwan commençait déjà à faire la ceinture et le foulard qui allait accompagner la tenue. Il devait aussi faire la veste sans manche dans le même tissu que le pantalon, tenant absolument à m'aider.
-J'opterai plus pour une chemise en jean, pour éviter de tout faire dans les tons marrons. Est-ce que tu crois que le patron accepterait ?
-Faudra lui en parler, me répondit JinHwan.
-Hm... j'irai le voir à la pause ou bien je lui enverrai un email si on a trop de boulot.
MinSeok était bien silencieux. Je relevai la tête vers lui et rencontrai son regard. Je me reconcentrai sur mon travail, ne voulant pas le confronter à nouveau. Notre échange oculaire était à chaque fois électrisant, j'en perdais presque l'équilibre. En plus que là il était surélevé, alors qu'il était plutôt de petite taille. Ce détail de sa personne me fit sourire, parce qu'avec son visage poupon, il semblait être un enfant dans un corps d'adulte. Mais il ne semblait pas moins mature et attentionné.
-Voilà, j'ai fini les mesures.
-Qu'est-ce que je peux faire pour t'aider ?
-Oh, rien. Tu peux faire ce que tu veux, maintenant.
-Justement, je veux t'aider.
Derrière MinSeok, j'aperçus un petit regard amusé de la part de JinHwan. Je ne voulais sincèrement pas qu'il pense que c'est de la drague, on est ici pour travailler et seulement pour travailler.
-Eh bien... JinHwan pourrait peut-être avoir besoin d'aide.
-Quoi ?
-Je suis quelqu'un qui aime travailler seule, alors je pense que ton aide serait bénéfique pour lui. Parce qu'il est lent, en plus.
-Et le respect, il est où ?
-Barré au far-ouest.
JinHwan et moi nous tournâmes vers MinSeok, qui ne bougeait plus non plus. Nous éclatâmes de rire par la suite. Il prenait ses aises, c'était super, c'était ce que je voulais. Nous ne tenions pas à ce qu'il soit considéré comme étranger du début jusqu'à la fin, il fallait qu'il se sente chez lui à tout prix ! JinHwan lui proposa alors de coudre à la machine les petits détails de la ceinture, tandis que je m'occupais du découpage pour le pantalon. J'allais commencer par cette pièce, puisque je n'étais pas sûre pour le haut.
Puis vint la pause du midi, tant désirée par mon estomac qui criait famine depuis une heure. Et pourquoi ? Parce que je n'avais pas mangé, eh ouais ! Mais j'ai déjà eu la remarque de MinSeok ce matin, donc on se tait, s'il vous plait. JinHwan ferma la porte de l'atelier à clef tandis que MinSeok discutait de plusieurs astuces avec moi. Nous rejoignîmes tous les deux l'accueil avant de sortir au restaurant. Mais une fois arrivée dehors, je fus prise d'un vertige comme jamais je n'en avais ressenti. Je me rattrapai à MinSeok juste à temps, avant que je ne tombe en avant dans les escaliers.
-Emy ! Tout va bien ?
-Je... j'ai le vertige.
-T'as pas mangé ce matin !
Si JinHwan pourrait fermer sa gueule, ça serait bien. Ils m'aidèrent tous les deux à marcher jusqu'à arriver au restaurant, où nous commandions très vite. C'est limite si je me jetais sur mes baozis tellement j'avais faim ! Les garçons furent amusés par mon appétit et firent de même quant à eux. Nous passâmes alors un agréable moment, en-dehors de notre travail. On apprenait à se connaître un peu plus, et ça me réchauffait le cœur. J'aimais beaucoup le contact humain, mais étant timide, je ne savais jamais comment m'y prendre. Une fois que le repas fut terminé, nous rejoignîmes tranquillement notre agence. Je passai alors au bureau du boss pour lui parler de mon idée, à propos de la chemise. Sur sa porte était affiché "en réunion" alors je tournai les talons pour rejoindre l'atelier.
-Il est en réunion, je lui envoie un mail.
-Tu n'irais pas le voir ce soir ? demanda MinSeok.
-Après une réunion, le boss est plutôt fatigué alors je ne préfère pas l'embêter.
-D'accord.
-MinSeok, viens m'aider, s'il te plait !
Ce dernier rejoignit JinHwan et l'aida à ajouter la boucle de la ceinture. Ils étaient plutôt amusant à serrer les dents pour que ça marche. Puis JinHwan fit les trous avec la troueuse tandis que MinSeok le regardait comme un enfant qui apprend le métier. Je souris malgré moi puis tapai le mail sur le petit ordinateur avant de l'envoyer. Je le fermai puis continuai à confectionner le pantalon, avec toutes les précautions possibles. En plus que j'avais envie de faire une sieste, là. Mes yeux se fermaient d'eux-mêmes, c'est à peine si je voyais ce que je faisais.
-Emy, laisse-moi faire.
-Non... je vais... le faire.
Ma tête tomba lourdement contre quelque chose, je reconnus l'odeur de MinSeok. Une odeur boisée, une odeur d'homme viril. Qui cachait une personnalité très calme et apaisante. Il me souleva dans ses bras si forts et me déposa dans le canapé, où JinHwan avait précautionneusement déposé une pile de tissu en guise d'oreiller. La dernière image que j'eus avant de m'endormir fut les deux sourires de mes amis, bienveillants à mon égard.
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