9 - Une pleine lune differente 🌕

Je suis chez Marius depuis six jours environ. Après être tombée dans les pommes, j'ai dormi trois jours. À présent, ça fait trois autres jours que je suis ici.

C'est un petit loft, une sorte de grange réaménagée et vraiment jolie. C'est spacieux, soft, cosy. Il y a un canapé, un poêle à bois, une cuisine ouverte sur le salon... nous avons vu sur le lac de Hellbound non loin de l'Est de la forêt. C'est un endroit paisible et agréable. Marius et Max vivent avec l'argent de leurs parents depuis toutes ces années. Ils n'ont jamais travaillé, ou du moins, une seule fois pour Marius, quand il avait été banni. Ils ne se sont pour ainsi dire, presque jamais mélangé aux humains, à cause de toute cette peur liée aux chasseurs.

— Frappe ce sac comme si c'était ton ennemi en face ! Crie Marie.

Les poings serrés, le corps enduit de sueur, je frappe le sac aussi fort que je le peux. Seulement, chaque coup que je mets dans le sac réveille mes douleurs.

J'arrête, essoufflée, mes cheveux collés à mon visage dégoulinant de transpiration. Je laisse pendre mes bras alors que mes phalanges sont rougies par les coups.

— J'ai trop mal...

— Tu diras ça quand tu te retrouveras devant un ennemi ?

— Non...

— Alors ne lâche pas !

Je me replace correctement et je me remets à frapper le sac sans m'arrêter. Il faut que j'apprenne à faire mal, réellement mal. À côté, Dickon et Marius s'entraînent, pompes, tractions, tout y passe. D'après Marie, il est important que nous ayons une condition physique hors normes. Alors on fait de notre mieux.

La force que nous donne le loup n'est pas suffisante, il faut aussi savoir se canaliser, centrer son pouvoir, se défendre et se renforcer. Les chasseurs sont entraînés, nous devons l'être nous aussi.

Je m'arrête, épuisée, mes plaies endolories, mon pouls se centre à deux endroits à la fois : le dos et l'estomac. Je m'assois contre le mur et colle ma tête contre celui-ci. Je regarde les garçons travailler. Dickon a pris un petit peu de muscles et Marius... Marius a retiré son t-shirt pour faire du sport. Marius laisse apparaître ses muscles dessinés, il laisse deviner sa force. Ses abdos sont gainés, visibles, fiers, à tel point qu'on souhaiterait les toucher.

Dos à moi, il fait des tractions. Ses muscles se bandent à chaque fois qu'il lève son corps. Entre ses omoplates, la cicatrice du poignard ne se fait pas discrète, elle se mêle aux autres qu'il porte dans son dos mais on devine facilement qu'elle est bien plus récente.

Je rêve de toucher ce corps sculpté mais il ne veut pas de moi et au fond, on ne peut être amoureux de deux personnes à la fois. Alors qu'est-ce qu'il m'a fait ? Est-ce seulement la morsure ? Est-ce bien avant ?

Il lâche la barre et étire ses épaules. Il se tourne vers moi, croise mon regard. Finalement, il s'avance vers moi, je reste assise contre le mur mais lève la tête vers lui.

— Tes blessures guériront.

— J'ai l'impression que ça prendra une éternité... soufflé-je.

Quelques mèches de ses cheveux retombent sur son front. Il est terriblement sexy. Je pourrais lui sauter dessus. Il passe sa main dans ses cheveux puis me la tend.

— Allez debout.

Je l'attrape, il m'aide alors à me relever. Je me retrouve près de lui et plonge mes yeux dans les siens.

— Est-ce que toi... ça a pris longtemps ?

Il plisse les paupières et lâche ma main.

— Je ne veux pas en parler, grogne-t-il.

🌕

Sous le jet d'eau de la douche, j'y reste de longues minutes. Les deux mains sur le mur, les yeux fermés, l'eau qui détend chaque muscle de mon corps. Je songe à beaucoup de choses. Mais ne contrôle pas ce qui suit.

À travers les yeux de Max, je ressens de la colère, de la frustration et du désespoir.

On la retrouvera, assure Jess.

Max semble bouger. Je crois bien qu'il fait les cents pas.

Qu'est-ce que t'en as à faire toi, hein ? Grogne-t-il d'un ton agressif.

Je ne déteste pas Monroe, souffle Jess.

Mais tu ne l'aimes pas non plus.

Je sais qu'elle compte pour toi et je le respecte, vous êtes liés, c'est normal.

Je me fiche de ce lien ! Tu entends ?! Lui hurle-t-il.

Il pose ses mains sur la table et regarde Jess. Elle semble fatiguée et peinée de le voir dans un tel état.

Mon frère l'a enlevée... sous mes yeux et je n'ai rien fait...

Il l'a sauvée.

— Il va la corrompre.

Bien-sûr que non, Monroe est liée à toi, elle tient à toi...

Max relève ses yeux vers Jess. Je vois tout à travers ses belles prunelles brunes. Je ressens tout. Il se sent mal. Terriblement mal.

Marius a mordu Monroe.

Jess ouvre de grands yeux étonnés.

Comment tu le sais ?

Sam me l'a dit.

Max marque une pause.

Je t'ai mordu moi aussi et regarde ce que ça a fait ?

Ce n'était pas pareil, Max...

Si ça l'était. Il l'a mordu. Il l'a fait exprès ! Il ne supporte pas le fait que j'ai pu la mordre, que j'ai pu transformer quelqu'un sans son autorisation d'Alpha de pacotille. C'est comme ça depuis le début. Depuis qu'elle est entrée dans nos vies et maintenant... il va la manipuler, parce qu'il est fort à ça. Il va vouloir me toucher.

— Il n'y a qu'à toi qu'elle sera loyale.

Max secoue la tête et d'un coup brutal, fait valser la table. Jess recule et le fusille du regard.

— Elle a plus de raisons de suivre ce monstre de Marius que moi ! Dit-il en se tournant vers Jess. Moi j'ai fait l'énorme connerie de croire en la bonté des humains mais regarde-les ! Ils sont comme mon frère !

Jess s'approche doucement de lui, les larmes aux yeux.

— Je sais ce que tu ressens... elle s'éloigne de toi et tu en souffres...

— Oui, évidemment que j'en souffre !

Elle pose ses mains sur ses épaules puis l'enlace. Max se laisse faire, fixe un point droit devant lui.

Qu'est-ce qu'il a de plus que moi... souffle-t-il.

Elle semble caresser ses cheveux car je crois le ressentir moi aussi.

Rien Max, vous êtes égaux.

Il a toujours su avoir le cœur des femmes.

Jamais pour longtemps...

Max se détache d'elle et sonde son regard. Jess essuie la larme qui coule sur sa joue.

Pourquoi tu dis ça ? Tu l'aimes encore ?

Oui je l'aime mais je t'aime plus encore. J'ai fait mon choix et je te l'ai prouvé. Je t'aiderai à retrouver Monroe. Mais sois intelligent Max, à l'heure qu'il est, Monroe est le réel point faible de ton frère. Alors réfléchis, trouve quelque chose, il n'y a que comme ça que tu l'atteindra et si on y arrive, on aura peut-être une chance de gagner la confiance des Chasseurs.

Je ne sais pas si je veux de nouveau leur faire confiance... En tuant Lizzie, ils nous ont fait comprendre que la guerre est déclarée.

Je rouvre les yeux et passe ma main sur mon visage pour éviter que l'eau ne me les brûle. Je sors de la douche, m'enroule dans une serviette puis me poste devant le miroir. Comment veut-il se servir de moi pour atteindre Marius ? Je ne suis pas certaine à cent pour-cent d'être son point faible.

Je reste plantée devant la glace. Je regarde mon ventre, le bleu commence à s'estomper doucement mais pas suffisamment pour que je sois totalement guérie.

C'est la pleine lune aujourd'hui et je la crains depuis mes blessures. Ils se préparent tous les trois, ils se détendent, ne comptent pas non plus s'attacher pour éviter de blesser quelqu'un. Moi, pendant trois ans, je m'enfermais pour blesser personne.

J'ai toujours détesté ce que je suis. J'ai toujours peiné à accepter le monstre qui sommeil en moi. Alors comment suis-je censée réagir le jour où il ne se montre pas alors qu'il le devrait ? Ils se transforment, j'entends leurs os se briser, j'entends leurs cris de douleur et moi... moi rien ne se passe.

Je sens mon cœur qui commence à battre fort, à accélérer et frapper ma poitrine. Marius s'avance vers moi, lui n'a encore aucun symptôme, même si je vois que ses yeux brillent et que sa peau luit.

— Je... je ne comprends pas...

Je commence alors à paniquer, je n'arrive plus à respirer, ma gorge se serre, l'angoisse prend le dessus. Je m'appuie contre le mur, pose ma main sur ma poitrine et je tente de reprendre mon souffle.

— Pourquoi il n'est pas là ? Pourquoi je ne me transforme pas ?!

— Ça va aller Monroe, souffle Marius, c'est...

Il ne termine pas sa phrase et s'écarte de moi alors que son bras se tord. Nous sommes à l'extérieur, Dickon et Marie ont déjà disparu et Marius continue de s'éloigner de moi. Il détache rapidement sa ceinture et se ôte de son jean, moi je me laisse glisser contre le mur et ramène mes jambes contre ma poitrine.

— Monroe... Vas-t-en ! Hurle Marius alors que sa colonne vertébrale ressort et qu'il tombe sur ses deux genoux.

Je ne peux ni respirer ni bouger. Je panique à tel point que ma gorge est serrée comme si l'on m'étouffait. Je mets mes mains sur mes oreilles car les hurlements de Marius ne cessent de heurter mon cœur déjà déchiré.

J'ai encore plus mal de ne pas comprendre ce qu'il se passe. De ne pas comprendre pourquoi mon loup ne se montre pas. Comme s'il avait totalement disparu depuis les blessures. Comme si l'argent l'avait tout simplement tué.

Je pleure en silence et ma respiration commence alors doucement à reprendre un rythme normal. Cependant, quand je n'entends plus que des grognements, je relève doucement la tête, mon corps entier tremble comme une feuille.

Je me paralyse quand je fais face à un loup. Il est grand, gros, fort, son pelage gris brille sous les reflets de la pleine lune et ses yeux jaunes me toisent avec une intensité indescriptible. Il grogne à nouveau, dévoilant ses crocs aussi grandes que des petits couteaux et de la bave dégouline de ses babines. Il n'est qu'à quelques centimètres de mon visage. Je suis immobile. J'ai l'impression qu'il pourrait me croquer à  n'importe quel moment.

— Marius... ? Soufflé-je.

Il fait claquer ses mâchoires sous mon nez avant de me tourner le dos et de partir droit sur la forêt. Je laisse mes épaules s'affaisser et colle ma tête contre le mur tout en fermant les yeux. C'était... intense. Je me demande si Marius parvient à rester conscient dans ces moments là, s'il s'en souviendra demain.

Quand je rouvre les yeux, la lune est pleine, ronde, brillante, étincelante, juste face à moi et je la fixe, sans bouger.

Qu'est-ce que tu veux de moi ?
Qu'est-ce que tu attends de moi ?
Qu'as-tu fait de mon loup ?
Où est-il ?
Reviendra-t-il ?

Je pensais détester ce que je suis mais... j'ai fait face à la bête ce soir et sa beauté m'a hypnotisé.

Je pensais le détester lui, le loup.
Au final, je me rends compte que je l'aime.
Je me rends compte que j'ai besoin de lui pour exister.

S'il te plaît, toi puissante lune, rend moi ma moitié.

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