2 - Réunion 🌓

Quand nous entrons dans le bar, mon cœur se serre dans ma poitrine et j'ai l'impression que le temps va s'arrêter ou bien que moi, je vais arrêter de respirer et mourir sur le champ. Je reconnais la chevelure blonde et lisse de Jess, le chignon brun de Rebecca, la carrure maigrelette de Darius... puis Max, il est appuyé contre le bar, debout, les deux coudes contre le comptoir, un verre entre ses mains tatouées.

Nous les rejoignons et ils se tournent tous vers nous. Jess enlace Sam pour l'accueillir. Visiblement, ils s'entendent bien, Max lui fait une accolade et moi, je préfère rester en retrait.

Je ne peux m'empêcher, en regardant Jess, de la revoir en train de courir, cette dague en argent dans les mains et de tout son poids, se jeter sur Marius pour la lui planter entre les omoplates. Je détourne le regard et me concentre sur Max. Je croise ses yeux ténébreux. Il a coupé ses cheveux et sa barbe est toujours bien présente et parfaitement taillée. Je lui adresse un faible sourire puis croise les mains devant moi.

— Merci d'être venu, et un joyeux anniversaire Monroe, dit-il.

— Merci...

Tu parles d'un anniversaire. Je m'assois sur le tabouret à ma gauche et les écoute parler. Sam leur explique rapidement où nous en sommes, son travail comme assistant dans un cabinet d'avocat et le mien, qui consiste à donner des cours de musique dans une école primaire. Ils sont tous à l'écoute, il a l'air à l'aise avec eux, heureux de les voir. On dirait qu'il retrouve sa bande d'amis perdue de vue depuis des années.

— Travailler avec les enfants, c'est vraiment cool.

Je tourne la tête pour voir Jess s'installer à côté de moi. Je détourne le regard aussitôt et fixe les bouteilles face à moi, dans la vitrine du bar.

— Je sais qu'on est parti sur de mauvaises bases toi et moi mais...

— Je t'arrête tout de suite Délia ou Jess ou peu importe ton nom, toi et moi, on ne sera jamais amie.

Je lui jette un regard électrique et je la vois qui soupir et laisse s'affaisser ses épaules.

— Tu peux me haïr et je le comprends, si on a fait tout ça, c'était pour notre bien à tous et ça a fonctionné.

Je ne réponds pas, car je n'ai pas envie de reparler de tout ça. Max attire alors notre attention, je me retourne vers lui. Je vois qu'ils sont tous à son écoute, visiblement complètement fascinés par leur Alpha.

— Si je vous ai réunis ici ce soir, c'est pour une bonne raison et je ne voulais pas en parler tant que nous n'étions pas au complet.

— Où est Lizzie ? Demandé-je.

— Elle est à la maison avec Lola, elle va a l'école maintenant et demain, elle se lève tôt pour son cours de gymnastique, répond Rebecca.

— Je vois...

Max se concentre de nouveau sur ce qu'il voulait dire.

— Lola est déjà au courant mais pas Lizzie et j'aimerais qu'elle ne le soit jamais, si possible.

Il marque une pause et tourne sa langue dans sa bouche. Visiblement, il cherche ses mots.

— Je vais pas passer par quatre chemins ... Mon frère est en vie.

Je ne dis rien mais mon cœur saute un battement. J'observe aussitôt la réaction de chacun. Visiblement Jess ouvre de grands yeux et manque de s'écrouler quand Sam demeure impassible. Rebecca et Darius ont tout aussi l'air troublé par cette nouvelle. Max vient juste de larguer une bombe.

— Comment tu peux savoir une telle chose ? M'enquis-je.

Max se tourne vers moi.

— Parce qu'il n'y avait plus aucune attaque de loup dans la région.

— Peut-être que l'un de tes fidèles serviteurs ne s'est pas tenu à la dernière pleine lune.

— On est tous ensemble, à chaque pleine lune, se défend Max.

— Comment c'est possible... il est tombé de haut et même s'il avait survécu à cette chute, il avait une dague plantée dans le dos, une balle dans le ventre... souffle Jess.

— J'en sais pas plus que toi pour le moment mais je sais que c'est mon frère et les Chasseurs sont déjà prêts à nous traquer à nouveau. Ils pensent que c'est nous. Ils pensent que la trêve n'en est plus une.

— Ce peut être d'autres loups, interviens-je.

Max secoue la tête négativement, se mord la lèvre puis boit la fin de son verre cul sec.

— On doit rester souder, reprend-il.

Je le fixe, je sais qu'il cache quelque chose. Sam s'avance vers lui et lève le menton l'air fier.

— Je suis avec toi, dit-il.

Il lui voue son entière loyauté, il est dévoué à son Alpha, je le vois. Je baisse les yeux, notamment quand tous les autres le rejoignent. Je sais une chose à ce moment précis : je ne suis pas prête de rentrer chez moi.

Alors je commande un verre, puis un autre et encore un autre. Je bois, encore et encore pendant qu'ils discutent de milles et une théorie sur la survie de Marius.

Légèrement saoule, je décide de quitter mon tabouret et de sortir prendre l'air. Le calme de l'extérieur me soulage aussitôt. Il n'y a plus cet air de guitare électrique répétitif assourdissant dans mes oreilles et les blablas de tout le monde dans ce fichu bar. Je ferme ma veste et croise mes bras dessus tout en fixant la forêt face au bar.

Je me souviens parfaitement de cette soirée d'Halloween quand Sam m'avait forcé à venir boire un verre avec lui. J'avais eu la stupide idée d'aller me promener seule en forêt, en pleine nuit, le jour de la fête des morts. L'automne approche d'ailleurs, avec elle, tous pleins de souvenirs.

J'entends la porte qui s'ouvre à côté de moi, le brouhaha de l'intérieur qui agresse mes oreilles une seconde puis se dissipe quand elle se referme. Je n'ai pas besoin de regarder la personne pour savoir. Je reconnais son odeur, le rythme de ses battements de cœur, sa prestance...

— Qu'est-ce que ça te fait de le savoir ? Demande Max en se postant à côté de moi.

Je suis ivre, ma tête me tourne, ma bouche est pâteuse, je risque de ne pas mâcher mes mots et je le regretterai ensuite.

— J'ai pas envie d'en parler avec toi, bredouillé-je.

— Pourtant il le faut.

Je me tourne vers lui, je lui sors mon plus mauvais regard, du moins j'essaie. Il est si beau, grand, mince, tatoué, barbu... doux... et il sent tellement bon.

Bon Dieu, reprends toi Monroe !

— Je ne voue loyauté à personne, articulé-je.

— J'aimerais qu'on se parle comme deux vieux amis plutôt.

Je ne dis rien, je suis pendue à ses yeux ténébreux qui renferment tant de douceur, tant de souvenirs...

— On va marcher ? Propose-t-il.

Je grogne et commence à avancer, tout en gardant les bras croisés. Il marche à côté de moi, les mains enfoncées dans les poches de son manteau. Nous suivons le chemin qui nous mène à l'orée de la forêt. Là où il m'avait attaqué presque quatre ans plus tôt. L'odeur fraîche des sapins m'avait manqué, celle de la terre grouillant de vie aussi. L'ambiance de Hellbound est particulière mais j'avais toujours aimé ça.

— Donc quel est ton plan, Max ? Demandé-je en tentant de mettre un pied devant l'autre. Tu vas rassembler toute ta meute pour lutter contre un Marius que tu as inventé de toutes pièces ?

Il s'arrête et se tourne vers moi, alors je fais de même. Heureusement que j'arrive à mieux voir dans le noir, car nous sommes dans l'obscurité la plus profonde.

— Je ne l'ai pas inventé, Monroe... même si j'aurais préféré.

— Comment tu peux en être si sûr ?

— Il m'a mordu... et j'en garde encore une belle cicatrice.

Il se penche et relève le bas de son pantalon pour me dévoiler une cicatrice blanchâtre et boursouflée sur son mollet. En effet, Marius n'y avait pas été de main morte, la marque de ses dents y reste imprégnée encore trois ans plus tard.

— Et ? Il te suffira de te faire un tatouage pour dissimuler une cicatrice de plus.

Il remet bien son pantalon et se redresse alors je le suis des yeux pour sonder son regard. C'est si calme ici. Si paisible.

— J'ai vu...

Il soupire et se pince les lèvres.

— J'ai vu à travers ses yeux, y'a à peine deux jours Monroe.

J'arrête mon sarcasme et je demeure silencieuse un instant. Alors il a bel et bien survécu ? Je n'avais pas rêvé et pendant trois ans, il était en vie ? J'ai tellement de mal à y croire, notamment après ce que j'ai vu. En soit, Jess a raison, il est tombé du haut du précipice mais il se peut aussi que l'eau ait amortie sa chute. Cependant, Max voir à travers les yeux de Marius ? Pourquoi ? Comment ? Est-ce dû à la morsure ? Comme moi ?

— Bizarre... soufflé-je toujours enivrée d'alcool.

— Il est à Hellbound.

Je relève les yeux vers lui et déglutis difficilement. Si proche de nous mais à la fois si loin ? C'est possible ?

— Alors je le répète... quel est ton plan ? Soufflé-je.

— Je vais devoir me défendre, on va tous devoir se défendre.

Je hausse les sourcils, soupire et me frotte le visage. Je sens Max qui se rapproche de moi, quand je le regarde, il n'est plus qu'à quelques centimètres de moi. Je ne bouge pas, bien que dans ma tête, tout tourne et je le fixe.

— Il n'est pas revenu pour une trêve, il n'est pas non plus revenu pour discuter et ça tu le sais, assure-t-il.

— Je ne lui ai rien fait, ça ne me regarde pas...

— Dès ton arrivée tout a changé, ça te regarde, car il va se venger, de nous tous.

Je pose ma main sur sa joue, ce qui semble le surprendre. Moi aussi ça me surprend mais cette sensation au toucher m'avait manqué. Ce lien électrifiant, ces décharges qui parcourent nos membres quand on se touche.

— Tu as peur, Max, déduis-je. Comme tu avais peur de ton père.

Il saisit mon poignet fermement et me fixe un instant. Je n'arrive pas à décrypter son regard, à savoir ce qu'il tente de me dire à travers ses yeux. Je suis ivre, ça joue aussi beaucoup. Mais je sais une chose, sous l'emprise d'alcool ou non, Max a peur de son petit frère.

Finalement, il ne me prévient pas et ne me lâche pas non plus le poignet mais il presse ses lèvres contre les miennes. C'est un baiser surprise, un baiser plutôt brutal et sur le coup, je ne sais pas réagir. L'alcool m'enivre, les lèvres de Max me capturent et je sens mon corps devenir fébrile.

Je suis donc si faible que cela ?

Je pose mes mains sur son torse alors que le goût du whisky sur ses lèvres me plaît mais je le repousse néanmoins. Je le regarde, ma bouche me brûle, j'aimerais me jeter sur lui, là tout de suite, lui arracher ses vêtements et le sentir sur moi, en moi.

— Non... soufflé-je. Tu ne peux pas...

Il me toise sans un mot. Moi, je passe mes cheveux derrière mes oreilles et tente de retrouver un semblant de dignité.

— J'en rêvais tellement, tu ne peux même pas imaginer... marmonne-t-il.

Je le regarde les sourcils haussés.

— Tu ne peux pas faire ce que tu veux de moi.

— Je te respecte Monroe, arrête de croire que je joue avec ce lien et avec toi.

— Je suis avec Sam maintenant et c'est vraiment quelqu'un de bien, il est gentil, attentionné, il m'aime et il ne me ment pas.

Max hoche la tête et enfonce ses mains dans son blouson tout en poussant un profond soupir.

— Et je préfère largement te savoir avec Samuel qu'avec mon frère.

J'ignore aussitôt sa remarque. Comment pourrais-je être avec Marius ? Il a disparu de la surface de la Terre, il est froid et distant et quand bien même, je ne pense pas qu'il puisse m'aimer autant que Sam... tout comme Max d'ailleurs, ce n'est que la lune qui fait ça. Sam lui, c'est sincère.

— Et toi ? Reprends-je. Où en es-tu avec Jess ?

— Ça va, grommelle-t-il.

Je me rapproche de lui, j'ai l'impression que son baiser a extirpé tout l'alcool de mon corps et que la sensation d'être ivre juste avant a totalement disparu.

— Je suis curieuse... commencé-je, dans les souvenirs de Marius, j'ai cru comprendre que tu avais tué Jess...

— Oui c'est vrai, répond Max aussitôt. Marius t'as menti aucunement sur ses souvenirs. Mais... j'ai pas réussi à la tuer.

Je hausse les sourcils et mime l'air étonnée d'une façon peut-être trop théâtrale.

— Tu ne parviens pas à tuer la petite amie de ton frère mais ton frère lui... tu y arrives ?

Il s'approche d'un pas alors je recule. C'est moi qui décide s'il peut m'approcher ou non, sinon, je ne contrôlerai rien. Il soupire mais s'arrête tout de même.

— Est-ce que tu acceptes que je te montre, moi aussi ? Demande-t-il.

J'hésite un instant, je pèse le pour et le contre. J'ai besoin de savoir ce qu'il s'est passé quand ils étaient plus jeunes. J'ai laissé la chance à Marius de me montrer ce qui l'a marqué. Je vais faire pareil avec Max, parce que je joue la carte de l'égalité. Alors je m'approche de lui, Max attrape mon bras et me tire vers lui. Je me retrouve collée contre son torse non sans un gémissement de surprise. Cependant, je suis si bien dans ses bras, si bien enveloppée de sa chaleur. Puis il me fixe un instant avant de coller ses lèvres contre les miennes, encore une fois.
Chaque frère a sa façon de montrer les choses.

Je suis prise d'une violente vision.
Il est temps de connaître ton passé, Jess.

Cette semaine, les chapitres seront le soir étant donné que j'ai repris le travail. Mais on continue les 1 jour 1 chapitre !

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