4 : Raphaël

Les regards se retournaient sur lui ou elle , personne ne le savait vraiment , pas même le dit intéressé. Raphaël était beau mais pas d'une beauté banale , comme tous les mannequins sur les affiches de pubs. Non , son visage était d'une beauté fascinante , ses traits à la frontière du masculin et du féminin. Son être était bien dessus des cases qu'avait dressées la science vue qu'il ne rentrait dans aucune d'elles. Raphaël était un garçon, mais il possédait un troisième chromosome sexuel, ne lui permettant pas d'être totalement considéré comme tel . A cause de lui , il était imberbe , plus petit qu'une grande partie des garçons de son âge. Sa voix était presque semblable à celle qu'il avait enfant. Ses traits n'étaient ni féminins , ni masculins et il avait tellement peur de prendre du poids et de se voir affubler de formes féminines qu'il ne mangeait presque rien. Mais le pire était qu'il ne pourrait jamais avoir d'enfant.

Depuis l'adolescence où sa différence était subitement apparue au grand jour , sa vie était devenue un enfer. Chaque jour il devait affronter le regard interrogateur des gens , leurs yeux lui rappelant sans cesse combien il était anormal. Trouver un emploi relevait presque du miracle et avoir une petite amie n'était plus qu'un songe irréalisable à ses yeux. Qui voudrait donc sortir avec quelqu'un comme lui , qui ressemble presque à une femme ?

Raphaël n'avait pas d'amis ,enfin , pas vraiment. Il s'entendait très bien avec Kelly , sa correspondante anglaise. La jeune femme était sa confidente depuis bien longtemps. Elle était venue passer une semaine chez lui lorsqu'ils avaient douze ans , seulement quelques années avant que l'on remarque qu'il n'était pas comme les autres. Ils étaient restés proches pendant tout ce temps bien que la jeune femme habite à Oxford. Elle avait toujours été un pilier pour Raphaël , elle l'avait de nombreuses fois aidé à ne pas s'écrouler grâce à sa bonne humeur , à sa gentillesse et au fait qu'elle le traite toujours de la même façon.

Raphaël s'assit sur un banc près de la mare pour déjeuner. Normalement il devait manger avec sa petite sœur avec qui il habitait mais la pauvre était tellement débordée par sa paces qu'il ne la voyait passer qu'en coup de vent. Il préférait donc le calme du parc à leur petit appartement vide. Il plaignait sa sœur mais en même temps il l'enviait , lui qui n'avait jamais fait de grandes études de peur d'échouer ou de subir les moqueries et les questions gênantes de ses camarades. Il aurait énormément aimé faire médecine comme elle mais se voir attribuer l'étiquette d'erreur génétique était l'une des pires choses qui pouvait lui arriver. Il préférait largement rester un anormal plutôt que de devenir une erreur. Il avait donc fait un CAP pour devenir auxiliaire de vie mais personne n'avait voulu l'embaucher.

Il regarda d'un air mélancolique les enfants qui couraient plus loin. Il aurait tant aimé être comme eux , rigoler pour un rien , courir en criant comme un fou et être accepté malgré sa bizarrerie. Mais Raphaël n'était plus un enfant , il était un adulte entouré de personnes qui vous jugent , vous rejettent ou vous catégorisent. S'il avait su que c'était ça vieillir , il aurait tout fait pour rester un bambin. Son téléphone vibra dans sa poche et le sortit de sa rêverie , il le sortit d'un air las , mais esquissa un petit sourire lorsqu'il vit les caractères noirs.

"Bon appétit Raph ! T'inquiète ce soir je ramène des sushis pour me faire pardonner."

Sa sœur était d'une gentillesse innée , Raphaël pensait qu'elle se sentait un peu coupable d'être normale comparée à lui. Il renversa sa tête en arrière pour profiter des rayons doux de l'automne. Qu'aurait pu être sa vie s'il avait été autrement ? Il se mit alors à rêver d'une vie parfaite , il aurait un groupe d'ami soudé , une petite copine qu'il aimerait plus que tout et quoi qu'il entreprenne il réussirait. Il voyait les îles inconnues , des voyages exotiques accompagnés de saveur d'orient , des plages de sable blanc bordant la mer à l'eau cristalline. Est-ce l'amour et l'argent qui nous donnaient des ailes ou nous nous les coupons nous-même ? Le jeune homme soupira et se laissa bercer quelque temps par ces pensées utopiques.

Tels étaient les rêves de Raphaël.


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top