24 : Romain

La sonnerie annonçant leur libération avait enfin retentit et tous les élèves se précipitaient vers la sortie à la manière de bêtes sauvages ayant retrouvé leur liberté. Romain rangeait lentement ses dessins et ses cours, s'amusant par la même occasion du spectacle qui se déroulait devant ses yeux. Malgré qu'ils ne soient rentrés que depuis quelques jours, élèves comme professeurs avaient déjà l'irrésistible envie de retourner en vacances. Le haut de son corps presque totalement enfoncé dans son casier, le jeune homme farfouiller dans son carnet de dessin pour trouver le portrait qu'il avait promis à Lise. Il était tellement absorbé par sa recherche qu'il ne se rendit pas compte de la présence d'une fille à côté de son casier avant qu'elle ne l'interpelle. Sous l'effet de la surprise, il se redressa promptement en se frappant violemment le haut du crâne contre l'acier. Romain s'extirpa maladroitement de sa capsule de fer, renversant des papiers qui vinrent voleter à ses pieds. Lorsqu'il aperçut le visage de la jeune fille, il se figea, ses doigts se resserrèrent sur son carnet et ses membres se mirent à trembloter. Malgré qu'il la dépasse d'une bonne tête, Romain avait l'impression de se liquéfier sur place.

-J'ai besoin de ton aide.

Le garçon haussa les sourcils et écouta sa requête. Lorsqu'elle eut fini, il fut encore plus troublé qu'il ne l'était au début. Cette fille, l'une des plus populaires du lycée, venait lui demander de l'aide pour séduire Paul, à lui, le pauvre mec qui n'arrivait même pas à demander un morceau de pain aux dames du réfectoire. Étant un peu gêné d'être fixé ainsi par la fille et ne sachant pas trop quoi répondre, il se baissa lentement pour ramasser les papiers tombés à ses pieds.

-Eh bien, bafouilla-t-il en fixant les baskets de la jeune fille, je ne crois pas que je te serais d'une grande.. Arhg !

Il ravala un cri de douleur alors que pour la deuxième fois en moins de dix minutes, l'arrière de son crâne rencontrait une surface en acier. Sous le coup de l'impact, il lâcha les objets qui lui encombraient les mains et, dans sa chute, son carnet rependit l'ensemble de ses dessins sur le sol. Yseult lui demanda s'il allait bien, mais le garçon ne l'écouta pas. Paniqué, il se jeta sur les feuilles étalées parterre et se précipita de les rassembler en prenant garde de ne pas les froisser. Devant son air affolé, la jeune fille s'accroupit pour l'aider à ramasser ses dessins. Elle saisit délicatement une feuille et s'arrêta lorsque ses yeux se posèrent sur le visage représenté. Romain releva la tête et la vit en train de regarder ses dessins, une expression effarement plaquée sur son visage. Il voulut lui récupéré des mains, mais il se tapa de nouveau la tête contre la porte de son casier. Alors qu'il pestait en gémissant contre tous les casiers du monde, Yseult sortit de sa torpeur et retourna le dessin de façon à ce qu'il puisse le voir.

-C'est moi ? Lui demanda-t-elle, ses yeux bleus si écarquillés qu'ils semblaient envahir tout son visage.

Sans même attendre sa réponse, elle se mit à retourner tous les papiers, découvrant un nombre incalculable de portraits et d'esquisses de femmes. Il n'y avait que trois modèle, une femme à lunettes et aux lourdes boucles brunes, une Asiatique avec une frange et elle. Romain planta son regard dans le sien, ses mains tremblantes sur ses genoux et sa poitrine se soulevant lourdement.

-Je, je peux tout t'expliquer, bégaya-t-il à mi-voix.

La jeune fille haussa les sourcils puis lui tendit les feuilles avant de se relever et de s'épousseter, attendant ses explications. Le garçon finit de les ramasser sans un mot, son regard fuyant avec soin celui d'Yseult. Il finit par se remettre debout et toussota dans sa main.

-Je promets de t'aider à te rapprocher de Paul. Mais, je t'en pris, fait comme si tu n'avais rien vu, ne parle à personne de ça, dit-il en désignant d'un coup de menton son carnet, et après ça, ne m'approche plus jamais.

Le visage de la fille se figea sous le coup de cette dernière demande qui parut l'étonner. Puis elle sembla réfléchir quelques instants avant de secouer négligemment la tête.

-Bien, conclut-elle en sortant un morceau de papier froissé de sa poche, voilà mon numéro, appelle-moi ce soir, je te dirai plus précisément ce que j'attends de toi.

Sur ses derniers mots, elle se détourna, récupéra son sac et sortit d'une démarche nonchalante du bâtiment. Romain ne sut pas encore dans quelle sorte d'ennui il venait de se fourrer.


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