18 :Romain

Romain avançait lentement au milieu des étagères remplies de beaux livres de papier glacé, bien loin des vieilles pages jaunis des ouvrages du rayon psychologie. Précautionneusement, il sortit un lourd album à la couverture bariolé puis s'assit en tailleur et se mit a tourner les en prenant soin de décortiquer avec attention chacune des œuvres. Ce fut un défilé de corps nus, silhouettes grecques idéalisées, de courbes gracieuses soulignées de noir, de la blancheur immaculée d'une peau d'albâtre. Toute la perfection antique était là, entre ses mains. Submergé d'admiration, il observait scrupuleusement les jeux d'ombres et de lumières sur ces silhouettes peintes. Tout en admirant ces œuvres, il cherchait à découvrir toute la technique de ces peintres comme si tous leurs secrets se trouvaient là, au milieu de ces hommes et femmes dévêtus. Il commençait à percevoir les émissions de ces toiles, certes ce n'était que des petits fourmillements le long de sa colonne vertébrale. A force de les observer, il finit par être envahi par la jalousie, lui aussi aurait aimé être semblable à ces adonis, lui aussi aurait voulu pouvoir retracer avec perfection le galbe de ces corps. Mais il n'avait rien de tout ça, ni la beauté ni le talent, ses mains magnifiquement banales ne savaient rien faire d'extraordinaire. Romain n'osait pas se mettre au dessin, car il savait que le gribouillage maladroit qui apparaîtrait sous son crayon ne ferait que briser un peu plus son estime. Il finit par reposer l'album et se remit à parcourir le rayon. Il y avait de tout, de la méthode de dessin pour enfants au grand recueil de Monet, de la peinture la plus classique à la toile la plus avant-gardiste. Tant de choses se mélangeaient dans un charivari de couleur que pour pouvoir se retrouver dans tout ça, il allait avoir obligatoirement besoin d'aide. Pour la première fois, il se dessina à aller voir la petite bibliothécaire. Quand il arriva devant le bureau d'accueil d'un bois aussi sombre et austère que celui des grandes bibliothèques, il n'y avait personne appart une jeune fille pu devrait-on dire tordu dans un siège. Romain l'avait croisé depuis quelques jours, elle traînait souvent ici le soir. Tout en chuchotant, il lui demanda :

-Excusez moi, est-ce que Madame euh..

Il ne termina pas sa phrase, car la jeune fille venait de poser sur lui un regard incisif. Ses pupilles noires le détaillaient de haut en bas sans aucune gène. Ce silence pesant ne dura que quelque seconde, mais le garçon eu l'impression qu'une dizaine de minutes venait de s'écouler. Par chance, un bruit de porte les interpela. Lorsqu'il tourna la tête vers l'origine du bruit il vit apparaître de lourdes boucles brunes au milieu desquels se trouvait un visage étrangement petit au milieu de cette voluptueuse masse capillaire.

-Bonjour. Lança-t-elle joyeusement une pointe d'étonnement dans sa voix.

Elle rassembla une pile de papier coloré éparpillé sur son bureau et releva la tête.

-Besoin de quelque chose jeune homme ? 

-Euh, je voudrais avoir quelque conseil sur les livres d'art s'il vous plaît. Bafouilla-t-il.

La bibliothécaire sourcilla d'un air amusé et se tourna vers la fille dans tordue dans le siège qui maintenant semblait totalement absorbé a gribouiller sur son carnet.

-Lise ? Est-ce que tu penses que tu pourrais conseiller le jeune homme en matière de livre d'art ? Je crois que tu t'y connais mieux que moi dans ce domaine.

La prénommée Lise releva laconiquement la tête et sourit, pas d'un sourire aussi rayonnant que la bibliothécaire mais Romain le trouva tout aussi beau. Elle se leva et sans un mot se dirigea vers le rayon d'art. Le garçon la suivit un peu déconcerté sous le regard amusé de la bibliothécaire qui commençait à farfouiller dans ses piles de papiers. Il retrouva la jeune fille plantée en plein milieu de l'aller, les bras croisés sur la poitrine alors qu'elle semblait chercher quelque chose. Quand Romain l'avait vu recroquevillé sur son siège, il ne l'avait pas imaginé aussi menue. Il se sentait un peu gauche dans son corps trop grand et ses habits trop larges malgré qu'il la dépasse d'une tête. D'un air assuré, elle se mit à sortir plusieurs ouvrages comme si elle avait passé toute sa vie dans ce rayon. Lentement, le garçon s'approcha sans bruit, elle se retourna et lui plaqua contre sa poitrine les cinq livre qu'elle tenait dans ses mains pour l'obliger à les prendre.

-Ça, dit-elle en désignant la pile de livres d'un coup de menton, ce sont des supers manuels pour découvrir les peintres contemporains et classiques, les deux du dessus son uniquement de la théorie, ils t'apprendront à choisir les couleurs que tu utilises et à manier presque tous les ustensiles de dessin. Je t'en cherche un dernier qui est vraiment génial, j'espère qu'il n'a pas été emprunté ça serait embêtant.

Sans attendre aucune réponse de là par du garçon, elle se mit à parcourir le rayon. Elle finit par souffler en se retournant vers lui, lorsqu'il l'interrogea du regard, elle haussa négligemment les épaules.

-Pas là. Viens, je vais demander à Adélaïde si elle ne l'a pas vu.

Et sans qu'il ne puisse émettre aucune objection, il se fit entraîner par la jeune fille. Au fond de lui, Romain fut heureux, car étrangement, sa timidité maladive avait soudainement disparu en compagnie de cette Lise.

Oui, étrangement il l'appréciait déjà sans la connaître.


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