26/ Confessions
Nuage d'Obsidienne marchait dans la pinède aux côtés de Regard Voilé.
Les deux chattes ne disaient rien, avançant sans un bruit sur le tapis d'aiguilles.
Depuis quelques jours l'apprentie était beaucoup moins prise...
En effet Langue de Vipère la fuyait comme le mal vert depuis l'affrontement avec Étoile Ardente. La lieutenante préférait l'envoyer patrouiller et chasser seule. De ce qui était de l'entraînement au combat, depuis trois jours déjà, elle s'entraînait avec Sombre Énigme. La novice, plus noire encore que le plumage d'un corbeau sentait que, de nouveau, son mentor l'évitait. Leur relation se dégradait de part la mort de Griffe d'Ours. Le trépas prématuré de l'ancien second d'Étoile Ténébreuse avait été un coup dur pour tout le monde.
Les grands guerriers meurent rarement dans leur litière...
L'Assemblée était pour demain, la première depuis la bataille entre l'Ombre et le Tonnerre. Quoi qu'il en soit, Nuage d'Obsidienne avait décidé d'employer son temps libre pour passer un petit moment avec la vieille doyenne acariâtre.
Il faisait nuit et pourtant la chaleur était encore pesante et omniprésente. Seule une légère bise, presque imperceptible, portant les senteurs de la mousse et de la sève, rafraîchissait quelque peu la chaude soirée.
Le hululement d'une chouette masquée résonna à travers les conifères et l'écho de la cavalcade d'un daim ou d'un chevreuil se répercutait à l'infini entre les hauts troncs charbonneux.
Les blêmes rayons de la belle d'argent striaient la pinède de rayures blafardes.
d'Ébène et d'ivoire, la forêt aux mille et un conifères paraissait jouer sur les contrastes à l'aide des clair-obscures.
Toutes deux finirent pas s'arrêter sur un talus surélevé qui dominait une partie de la pinède. Les longs rameaux épineux oscillaient lentement sous les douces bourrasques estivales.
Et devant elles, entre les branches sinueuses, s'ouvrait un ciel saupoudré d'étoiles. Rien ne venait troubler cette surface chatoyante et, au milieu de ce calme apparent, les bruits de la nature s'agitaient malicieusement dans la pénombre aux pâles reflets.
« Le ciel est clair ? demanda simplement l'ancienne qui regardait l'horizon de ses yeux voilés.
- Oui, il est magnifique et tout incrusté d'étoiles »
L'ancienne et l'apprentie se turent, savourant l'absence des feux ardents du soleil.
Nuage d'Obsidienne partait dans ses pensées, trop absorbée par ses souvenirs pour aller de l'avant. Elle avait envie de dire à Regard Voilé qu'elle s'en voulait. C'était en partie pour cela que la cadette avait proposé à son aînée une escapade nocturne.
Elle en avait assez de cette constante culpabilité, pourtant la novice sentait qu'elle le devait bien à Regard Voilé :
« Je suis désolée pour Griffe d'Ours, vraiment »
La plus âgée ne broncha pas et répondit sobrement :
« Aucune mère ne devrait avoir à enterrer son enfant »
Cette réponse voulait tout dire. La fourrure blanchâtre de la vieille femelle, subtilement mouchetée de gris, luisait à travers les ombres comme une luciole mourante.
« En revanche Belle d'Érable doit t'en vouloir, elle attendait une deuxième portée de mon fils »
Un silence coupable lui répondit.
« Je ne t'en veux pas, petite. D'ailleurs pourquoi t'en voudrais-je ?
- Tu es bien la seule à voir les choses ainsi ! répondit la plus jeune dans un ronronnement forcé.
- Il est facile d'en vouloir aux autres pour fuir ses choix et ses torts.
- À qui fais-tu allusion ?
- À ton avis ? Ils sont plusieurs à te rendre malheureuse ce soir... répliqua Regard Voilé avec une douceur peu commune.
- J'ai cessé d'être triste. Mon cœur est sec et dur. Seules mes erreurs me pèsent.
- Ne jouons pas sur les mots. J'ai perdu suffisamment de proches pour savoir que la douleur est toujours aussi déchirante même quand on dit être insensible.
- Tu souffres toujours autant ?
- Évidemment... C'est la façon de gérer cette souffrance qui évolue, pas la souffrance elle-même.
- Tu as beaucoup perdu ? demanda timidement Nuage d'Obsidienne, les yeux braqués sur les cieux sombres.
- C'est le prix de la longévité ! ironisa-t-elle amèrement.
- Est-ce-que tu estimes que ta vie fut difficile par rapport aux autres ?
- J'ai eu une vie avec ses joies et ses peines. J'ai fait des choix, des erreurs et des rencontres. J'ai vraiment vécu pour moi et non pour quelqu'un d'autre, ce qui fait que beaucoup de mes rencontres se sont soldées par des adieux. Ma franchise était ma plus grande qualité et mon plus grand défaut mais pourtant j'ai dévoué ma vie à la vérité. Cette bataille d'une vie fut d'ailleurs ponctuée par autant de réussites que d'échecs.
- Tu ne t'en veux pas d'avoir parfois échoué dans ta vie ?
- C'est un interrogatoire ? demanda Regard Voilé, un tantinet agacée. J'imagine que sur le moment on s'en veut toujours, mais avec le recul j'ai compris une chose...
- Quoi ? s'empressa de demander la plus jeune.
- Si tu pouvais te taire je pourrais répondre... J'ai compris qu'on ne juge pas un chat pour ses succès ou ses échecs, mais pour ses actions.
- Je crois comprendre... répondit doucement Nuage d'Obsidienne, dont l'esprit s'efforçait à saisir toutes les subtilités du discours de la doyenne.
- Que penses-tu de la vie, petite ? Ça m'intéresse...
- Mon père est mort. Pleurs de Louve et Fleur de Lierre pensent que je suis maudite. Mon mentor m'évite car elle ne supporte pas la perte de Griffe d'Ours et Fumée du Ciel. Quant à Étoile Ténébreuse il me reproche la mort de Sort Funeste. Je pense que la vie me déteste pour me pourir autant l'existence.
- Cesse de croire que la vie t'est redevable. Elle ne te doit rien. Elle est comme elle est, à savoir injustement immuable.
- Mais c'est si cruel ! Je n'ai jamais voulu la mort de ces chats ! Je ne peux pas revenir en arrière !
- Les félins que tu m'as cités sont simplement perdus. Ils avancent comme ils le peuvent dans ce noir marasme qu'est la culpabilité. Ils se reprochent tous quelque chose. Tous possèdent une histoire, tous souffraient avant toi et tous souffrent encore aujourd'hui.
- C'est une raison ?
- Aucunement, c'est une explication. La vraie question petite c'est...
"Qu'attends-tu d'eux exactement ?"
- Je veux de... du respect pour commencer !
- Vraiment ? Je pense que tu veux plus que ça petite, je crois que tu veux ce que jamais tu n'obtiendras... Tu attends des excuses, or c'est précisément là où ça coince. Tu souhaites même plus, idéalement tu voudrais de l'affection !
- Où est le mal ?
- Petite, ce n'est pas ça la vie. Tu ne peux pas vivre dans l'attente de quelque chose. Tu dois trouver en toi la force d'avancer, la force d'abandonner aussi, car la quête que tu poursuis inlassablement est vaine, pire encore, elle te détruit.
- La quête qui me pousse à espérer de la reconnaissance et de l'affection dans les yeux de mes proches ? demanda la dénommée "petite" qui savait pertinemment la réponse.
- Celle-là même.
- Tu as abandonné toi aussi ?
- J'ai eu ton âge. J'ai eu des doutes, pas les mêmes que toi certes mais j'ai subi bien des dilemmes. Lorsque les choses ne sont pas comme tu le souhaites ne force pas le destin. Peut-être que ta quête se résoudra d'elle-même quand tu cesseras de ne vivre que pour elle.
- Ce n'est pas dans ma nature d'abandonner. répliqua Nuage d'Obsidienne avec conviction.
- Ne confonds pas détermination et obstination c'est tout ce que je te dis. Apprends à reconnaître ce qui est essentiel de ce qui est superflu. Apprends à trouver les faits sur lesquels tu peux agir.
- L'amour d'une mère c'est superflu ? La cingla-t-elle.
- Pleurs de Louve a eu une vie que tu ignores avec des joies et des erreurs qui lui sont propres. Tu ne peux pas la forcer à t'aimer comme tu voudrais qu'elle t'aime. En revanche, sur d'autres sujets, tu dois pouvoir agir »
La jeune chatte réfléchi avant de murmurer comme pour elle-même :
« Le pacte. Elle ne peut pas briser le pacte »
Un ronronnement satisfait monta dans la gorge de Regard Voilé :
« Je ne vois absolument pas de quoi tu parles mais j'imagine que tu as trouvé quelque chose.
- Peut-être oui, merci pour tout. Lui répondit-elle avec une reconnaissance éternelle au fond des prunelles.
- Pas la peine de me remercier pour si peu petite, ton profond manque d'expérience et ton sens naturel pour l'autoflagellation avaient bien besoin de soutien. »
La plaisanterie résonna dans le bois obscur comme un carillon d'argent et les deux félines s'installèrent dans la mousse, entre les racines d'un sycomore, pour finir calmement la nuit.
Juste avant de s'endormir, Nuage d'Obsidienne demanda sur une petite voix craintive :
« Tu penses que je suis maudite ? »
Les moustaches de Regard Voilé frémirent avec affection et amusement avant que l'ancienne ne réponde dans un doux murmure :
« Et toi petite, qu'en penses-tu ? »
~~~O~~~
« Pourquoi maintenant ? »
La voix de Héron Cendré le tira de ses songes.
Nuage d'Azur regardait pour la première fois la tombe de sa mère. Bien des jours étaient passés depuis sa mise en terre et déjà, la surface était tapissée de fleurs aux effluves et aux couleurs aussi subtiles qu'éclatantes.
La brise de la lande sifflotait autour d'eux et la blancheur laiteuse de la lune les enveloppaient avec douceur.
Nuage d'Azur, la queue basse et l'air désappointé, secoua la tête avant de répondre :
« Probablement parce que j'en avais besoin. C'est comme si tout mon être ressentait à nouveau à sa perte.
- À nouveau ? répéta son ami, peu convaincu. Je pense surtout que le barrage vient d'exploser. Tu avais bloqué tes émotions. Qui les a débloqué ?
- Moi je pense, j'ai accepté la vérité. Mais maintenant je me sens perdu et terne. Comment as-tu fait pour supporter la mort de Tornade Cendrée ? »
Le mâle gris tigré de noir se redressa et regarda droit devant lui, ses prunelles vertes semblaient emplies de nostalgie.
« Ma mère était fantastique, aimante et énergique ! Elle aimait courir, chanter, vivre tout simplement. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi enjoué sans pour autant être candide. Pour ma mère la vie était un jeu dangereux mais un jeu tout de même. Elle nous disait souvent à ma sœur et moi :
« Vivez selon vos propres règles et jamais le jeu ne prendra le dessus sur vous !
- Ça a marché ? »
La douleur et l'affection envahirent tout l'être de Héron Cendré mais un ronron chaleureux s'évada tout de même de son poitrail :
« Je vis pour elle et je vis pour ma sœur. Voilà les règles que je me suis fixé et jamais je n'abandonnerai de jouer »
Nuage d'Azur regarda tristement la tombe de Vol de Colombe et se dit que la vie était bien compliquée...
« Et toi, pourquoi vis-tu ? Qu'est-ce qui te fait avancer ? l'interrogea Héron Cendré.
- En ce moment j'ai l'impression de rater tout avec tout le monde. Je ne sais plus où je vais et qui je suis vraiment. Je ne sais pas ce que j'attends d'aujourd'hui et je ne sais pas où mes pattes me guideront demain. Tout est flou et je... je crois que ça me fait peur.
- Nuage d'Azur, savoir qui on est au fond de soi est à la fois la chose la plus dure et la plus instinctive. Tout dépend du chat. Et ce "qui l'on est" évolue constamment en fonction des épreuves que l'on traverse. Je t'ai connu plus confiant dans l'avenir ainsi je pense que tu ne me dis pas tout. Voudrais-tu m'en parler ? »
La voix de Héron Cendré était coupante mais ses yeux brillaient de bienveillance. Sa douceur désintéressée lui faisait du bien. Le jeune chat blanc avait besoin de parler même si cela pouvait lui causer du tort :
« Je suis le fils de Plume de Harfang »
Le silence de son ami le poussa à continuer :
« Vol de Colombe a trompé Plume de Cygne le temps d'une nuit. J'ai aussi appris que Plume de Cygne avait été pendant un temps l'amant d'Étoile Hurlante avant qu'il ne la quitte pour retrouver Vol de Colombe et ainsi fonder le couple parfait que tout le monde connaissait.
- La perfection n'existe pas ! ricana Heron Cendré avant de retrouver son sérieux, Plume de Cygne le sait ?
- Personne ne sait rien c'est pourquoi je compte sur ta discrétion.
- Ne t'inquiète pas je trouverais bien comment te faire payer mon silence un jour ou l'autre. plaisanta le matou aux poils lustrés, sarcastique.
- Je ne sais plus où aller, Héron Cendré.
Ma famille n'est qu'un tissu mensonger.
- Je vais dire une grande banalité qui est pourtant bien juste : On ne choisit pas sa famille. Tu as de la chance que personne ne soit au courant, tu peux fonder ta propre identité. Tu es toi avant d'être tes parents. Tu as tes rêves et tes envies et tu peux les réaliser sans eux. On ne se définit pas qu'a travers nos géniteurs et heureusement.
- Autrefois je voulais devenir chef. C'était un rêve de grandeur que mon père trouvait formidable. Le père cocu trouvait la progéniture de son frère formidable, cracha soudain Nuage d'Azur.
- Je suis persuadé qu'il te trouve toujours formidable. Il n'y a d'ailleurs pas de raison que cela change un jour. Plume de Harfang est peut-être ton géniteur mais ton père reste Plume de Cygne. C'est lui qui était présent pour toi et qui t'a donné des défis et des rêves dans ton enfance.
- Je ne dois pas lui dire ?
- Tu es libre de faire ce que tu veux de cette information mais selon moi, certaines vérités doivent rester sous silence. La franchise est une arme redoutable.
- Pourquoi ma mère et Plume de Cygne ne pouvaient pas se satisfaire de ce qu'ils avaient au lieu d'aller voir ailleurs ?
- Avant d'être des parents ils étaient et sont toujours des individus à part entière Nuage d'Azur. Ce que tu ne comprends pas c'est qu'ils ont eu une vie avant toi. Une vie dans laquelle ils ont développé une personnalité et des envies. L'amour est le sentiment le plus trouble qui existe. Les petits peuvent voiler une vérité mais pas éternellement. Les nuages finissent toujours par s'éclipser et la lune apparaît, dure et irrévocable.
- Je ne comprends rien avec tes métaphores hasardeuses...
- La lune c'est la vérité qui était cachée par les nuages.
- Si Plume de Cygne avait eu des petits avec Rafale Hurlante ils seraient restés ensemble par exemple ?
- Peut-être oui. Les petits sont des liens solides entre deux chats mais ils ne peuvent pas toujours préserver un couple d'une séparation. Mes parents venaient tout juste de se séparer quand ma mère est morte tuée par une patrouille adverse. Mon père en a été très marqué, il ne pouvait pas ne plus rien ressentir pour la chatte avait qui ses rejetons sont venus au monde. Tout ça pour dire que tu ne peux pas te miner la santé pour des choix qui remontent à avant ta naissance.
- Pourquoi ai-je l'impression de payer pour leurs erreurs alors !? hurla Nuage d'Azur dont le cœur et l'esprit étaient en miettes.
- Parce que tu es perdu et que tu refuses de laisser tout cela derrière toi. Il te faudra du temps, et je te conseille de te trouver un autre but que de ressasser sans cesse les décisions du passé.
- Les erreurs du passé », rectifia Nuage d'Azur, ses prunelles bleues paraissaient comme assombries par les tourments et sa queue battait l'air avec colère.
Héron Cendré jugea plus pertinent de se taire.
Les deux chats se couchèrent sur la cime d'Éphémère et se laissèrent bercer par la douce fragrance des coquelicots.
Nuage d'Azur prit du temps à trouver le sommeil.
Il était perdu dans la brume, perdu entre sa raison et son cœur.
~~~O~~~
Les yeux de Nuage d'Obsidienne s'ouvrirent sur une lande où les vents hurlaient à la mort à travers la lune et les nuages vaporeux.
Elle était perchée sur haute colline à l'herbe brûlée et cramoisie qui se perdait dans les cieux noirs.
Aucune étoile ne brillait et la lune était voilée.
« Ravi de te revoir, la salua poliment un solide mâle noir qu'elle faillit confondre avec son père.
- Où suis-je Soleil Cendré ?
- Te voilà sur Sanglante, la colline sur laquelle j'ai trouvé la mort »
~~~O~~~
Nuage d'Azur sentit comme un regard sur sa fourrure. Cette gêne le poussa à ouvrir ses prunelles et il tomba truffe à truffe avec une frêle femelle blanche qu'il faillit confondre avec sa mère.
Il était dans la lande, aucun doute la dessus, mais certains éléments étaient troublants :
Les fleurs d'Éphémère étaient toutes fanées sans exception et les cieux n'étaient éclairés que par un astre défaillant.
« Heureuse de te revoir ! le salua gaiement la petite chatte nacré.
- Où suis-je Nuit Claire ?
- Cela importe peu, ce qui compte c'est où nous allons.
- Et où allons-nous ?
- Nous allons sur Sanglante, la colline sur laquelle j'ai trouvé la mort »
~~~O~~~
Celui qui pose les bonnes questions.
Celui qui cherche émotions et sensations.
Celui qui comprend que la vie est ce qu'elle est.
Celui qui essayent de se battre pour ce qu'il est.
Celui qui croit en lui.
Celui qui aime les choses simples comme les oiseaux ou la pluie.
Celui ou celle-là gagne un temps fou.
Apprenez à vivre pour vous et non pour quelqu'un d'autre.
N'ayez pas peur de vivre.
Vivez tout simplement.
~~~O~~~
Hey,
Ce chapitre vous a-t-il plu ?
N'hésitez pas à me donner votre avis.
Quoi qu'il en soit j'aurais aussi bien pu appeler ce chapitre :
"Séance chez le psy"
En tout cas je voulais encore faire un duo Regard Voilé/Nuage d'Obsidienne parce qu'il fonctionne bien.
Héron Cendré/Nuage d'Azur commence à se mettre en place même si il manque encore de solidité et de sensibilité.
Le prochain chapitre sera un peu plus vivant avec moins de blabla.
Mais je pense que ce blabla était important pour nos deux personnages principaux.
~ Bise ~
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