Chapitre 38
La chatte rousse leva la tête. Elle resta silencieuse. Etoile Sanglante ne la reconnaissait que par son physique. Elle en était certaine que c'était elle !
« C'est toi ! J'en suis sûre ! insista la meneuse en espérant une réponse.
— Laisse tomber, Etoile Sanglante, elle ne te répondra pas, l'interrompit Lune de Braise. Elle est muette.
— Mais... elle était pas muette avant ! s'étonna t-elle, incrédule.
— Ce n'est pas la Cœur de Coquelicot que tu connais. Elle s'appelle Coquelicot Solitaire. »
Etoile Sanglante parut dévastée. Elle regarda Coquelicot Solitaire un moment.
« Mais... Elle était morte, non ?
— Ah là là... Vous me faites pitié. Tous les guerriers que vous voyez ici présents viennent du Sentier des Dernières Vengeances.
— C'est quoi ? C'est où ? Connais pas... fit la chef du Clan de la Plaine, perplexe.
— Pitoyable, une chef ne le sait même pas. Peut-être que quelqu'un qui connaît bien la Forêt Sombre pourrait nous donner un indice ? » lança la rouquine d'un ton venimeux.
Feuille Brisée se sentit offensée. Elle-même ne savait pas ce que c'était.
« Voyez par vous-même. Vous le dire serait trop facile, voyons. » Sur ses mots, Lune de Braise s'éloigna en passant à côté des rangs.
« Alors, ça fait quoi d'apprendre qu'on t'a trahie, petite peste ? » susurra t-elle à Feuille Brisée.
Celle-ci grogna et son échine se hérissa.
« Et c'est toi qui dit ça ? feula t-elle en la foudroyant du regard.
— A ton avis ? Ce n'est pas moi qui a tenté de tuer qui que ce soit. J'ai décrété que je n'avais pas de parents, ni de frères. Pas même une famille. J'ai pleuré au début, puis j'ai décidé que je serai l'ennemie de tout le monde. La liberté, ça ne te dit rien ? D'être libre de ce que tu fais sans avoir qui que ce soit pour te contredire ? N'est ce pas...
— Ferme-la... Et on appelle ça un chat ?! Tu ne mérite pas ce titre. »
Lune de Braise montra les crocs et la gifla violemment d'un coup de queue, puis commença à s'éloigner avec un sourire moqueur.
« Viens te battre si ça te chante, espèce de cœur de souris ! cracha Feuille Brisée, rouge de colère face à cette attaque.
— Calme-toi, Feuille Brisée... » murmura Pelage D'écureuil en lui passant sa queue sur le dos.
Lune de Braise partit sans se retourner, mais semblait rire de ses paroles. Quel sarcasme ! songea la guerrière brune. Elle est détestable... Dire que Flèche de Silex avait tout tenté pour la retrouver. Elle ne méritait même pas qu'il s'inquiète pour elle.
Nuage Mortel regardait sa mère depuis sa place de devant. Elle semblait être moins fatiguée, mais cela n'atténuait pas sa colère pour autant... Elle l'avait toujours connue agressive, puisqu'elle était née après la révélation d'Etoile Sanglante. Un silence s'installa.
Etoile de Frayeur sortait de son antre. Les deux Clans étaient intimidés et terrifiés, personne ne bougeait. Elle était assez imposante et un peu massive, au pelage touffu gris presque noir faisant penser aux ténèbres, et ses yeux verts émeraudes brillants de malice. Mais le plus effrayant, c'était son sourire cruel en permanence collé à ses lèvres, et des traces de sang séché sur son pelage... Au bout de ses pattes, le sang semblait récent, puisqu'il colorait le sol d'un rouge vermeil.
L'apprentie brune fut horrifiée en voyant Nuage Perfide sortir de l'antre avec un œil qui saignait. Qu'est ce qui a pu lui arriver ?! Son cœur battait aussi vite que le sang coulait dans ses tempes. Elle se demandait si ce n'était pas Etoile de Frayeur qui lui avait fait ça... Pourquoi, dans ce cas ?
« Je pense que votre visite est terminée pour aujourd'hui, » décréta t-elle.
Les deux chefs n'osèrent pas prononcer un mot. Elles se contentèrent d'acquiescer d'un hochement de tête et firent demi-tour. Nuage Mortel regarda derrière elle avant de partir. Nuage Perfide était affalé au sol, son œil saignant encore un peu. Son flanc se soulevait lentement. Elle hésitait à aller le voir. Son Clan la prendrait sûrement pour une traîtresse si elle s'inquiétait pour un apprenti d'un clan adverse, alors elle préféra ne pas y aller. Elle espérait seulement qu'ils se reverraient un jour.
Une fois sortit du camp des Cendres, les deux meneuses parurent soulagées. Elles avancèrent ensemble, suivies de leur Clan respectif. Le retour jusqu'au Camp fut calme. Etoile Sanglante s'écroula de fatigue sur le promontoire tandis qu'Etoile des Vagues s'installa pour prendre un bain de soleil. Nuage Mortel se demanda ce qui avait pu fatiguer les deux chefs. La terreur, sûrement.
« Dis, Nuage Mortel... ? commença Nuage de Chinchilla.
— Quoi ?
— Tu voudrais bien qu'on s'entraîne ensemble c't'aprèm ?
— Ce serait bien, faut que Vent Mauvais soit d'accord...
— Y s'ra d'acc t'en fais pô ! Mon mentor est d'accord pour moi ! »
Nuage Mortel sourit, amusée. Ils étaient encore en début d'après-midi. Le soleil brillait toujours, et Nuage de la Pénombre restait toujours seule dans la tanière. Heureusement que son mentor n'insistait pas pour l'entraînement.
La femelle brune se hâta d'aller à la tanière des guerriers, mais son amie la stoppa en posant sa queue sur son dos.
« J'peux t'dire un truc avant ? demanda Nuage de Chinchilla, l'air plus timide.
— Aucun problème.
— Euh... je... je t... te trouve trop sympa !
— Euh d'accord merci... »
Nuage de Chinchilla lui adressa un sourire. Nuage Mortel le lui rendit malgré elle et rentra dans la tanière des guerriers. Après quelques secondes, elle en ressorti.
« Il est d'accord !
— Chouette ! » s'exclama l'apprentie grise en sautillant sur place.
Les deux apprenties se hâtèrent de partir à l'entraînement.
~°~ Crépuscule ~°~
Elle était couchée dans la tanière, la tête entre les pattes. Elle ne pleurait pas. Elle se demandait qu'elle était cette pulsion, cette envie de sentir ce sang âcre sur ses pattes... Son sang coulait si rapidement dans ses veines qu'elle ne sentait plus ses pattes. Elle devait se lever. Une petite voix lui murmura :
« Ne te laisse pas avoir par tes envies, contrôle-les... »
Mais elle ne pouvait pas résister plus longtemps. Elle ne pouvait pas rester à souffrir toute sa vie. Alors elle se redressa avec difficulté sur ses pattes, avec l'impression que son corps entier s'était consumé. Une voix parlait dehors. Plume de Granit nommait ceux qui venaient à la patrouille nocturne. Elle s'avança et lança :
« J'y participe.
— D'accord, allons-y, » répondit le lieutenant d'une voix calme.
Trois chats les accompagnaient. Elle regarda l'un d'eux. C'est le moment parfait, songea t-elle alors qu'ils quittaient le camp en rang.
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