Chapitre 23 - Léxandre

— Tu vas me foutre dans la merde, grogne Michael en conduisant prudemment. Les témoins de l'accident vont parler. Tu t'en rends compte, deux secondes ?

Pourquoi m'engueule-t-il ? Ce n'est pas le moment.

— Louis a récupéré Jules.

— Ce n'est pas mon dos, mec. T'avais pas à m'appeler. Louis va me penser dans le coup. Sans parler des pompiers et des policiers. Nous sommes dans la merde, putain !

Je râle pour la forme. Le bord de mon haut entre mes doigts, j'inspecte les marques causées par la ceinture de mon véhicule. Elles sont immondes et douloureuses. Mes côtes et mon dos en pâtissent aussi.

— Louis s'en fout que tu sois allié ou non. T'es personne pour lui. Regarde-moi. Nous étions meilleurs potes. Il a oublié tout ce qu'on a vécu. Regarde sa sœur. Il s'en fout. Ce qui l'importe est son fric.

Michael braque à droite. Il suit attentivement le GPS nous mener à l'usine abandonnée.

Je lâche mon tee-shirt et observe en biais mon ami. Ses mâchoires sont serrées. Aller à l'usine lui est difficile. Je le remercie, à nouveau. Sans sa rapide venue, les pompiers m'auraient embarqué. Tout un bordel se serait mis en place. Les policiers seraient arrivés trop tard pour Jules.

— Putain, râle encore Michael. J'aime pas cet endroit et tu le sais !

Que Michael se livre est nouveau. En temps normal, il ne mentionne pas ses craintes. Il laisse son côté dragueur et bad boy à la vue de tous. Mais ce type, blessé avec des sentiments, est rare.

Le téléphone de mon ami vibre. Il l'attrape et vérifie l'écran.

— Oh... c'est quoi ce bordel ! s'écrit-il en me tendant son appareil.

Une image apparaît. On distingue clairement Jules de profil, nue, et les genoux au sol. La main identifiable de Louis est dans ses cheveux. Il maintient son visage vers lui.

Michael baisse la fenêtre. Je prends une bouffée d'air frais. J'en ai besoin. Voir Jules agressée par son grand frère est un supplice. Je rends le téléphone à son propriétaire et passe la tête par la fenêtre. J'inspire et expire. Mes doigts sont crispés, mes muscles tendus.

Si Michael roule à ce rythme, nous arriverons trop tard ! J'ai reconnu sans peine le sol ; celui de l'usine.

Au moins, nous sommes fixés. Louis a emmené sa petite sœur dans cet endroit infâme. Sa vie est en danger. Nous avons peu de temps pour la secourir.

— C'est quoi le plan ? Tu entres et ressors avec ta belle ? Tu tiens à peine debout, mec.

Je dégage mon visage de l'extérieur. La fenêtre remonte sous la pression du pouce de Michael sur le bouton. Mon cerveau se remet en marche. Cette micro-pause était essentiel. J'avais besoin d'évacuer toute la colère et la tristesse.

— J'attire l'attention de Louis et tu sors Jules. Ensuite, tu vérifies les pièces et fous le feu au bâtiment. Louis a de quoi créer un incendie au cas où il soit repéré.

Michael encaisse mes ordres sans broncher. Il suit la route, double une voiture, avant de griller un feu rouge.

— Et vous deux ? m'interroge-t-il en m'adressant un rapide coup d'œil.

Il est vraiment inquiet.

— Occupe-toi de Jules. Mets-la à l'abri. C'est le plus important.

La voiture s'engouffre sur une route sombre. Les arbres et leurs ombres sont menaçants. La tension qui règne dans l'habitacle est pesante. Je joue avec mes doigts, repensant en boucle à l'accident. Aux images incrustées dans mon cerveau. Pauvre Madeleine. Elle ne méritait pas cette fin.

L'usine se dévoile sous mes yeux. Le bâtiment abandonné est imposant. Les murs sont abîmés, les fenêtres brisées. ça n'a pas changé. L'endroit est toujours aussi glauque. Bien plus quand on sait ce qui se déroule à l'intérieur.

Michael gare le véhicule au beau milieu du parking. Il ignore les marques au sol et retire les clés du contact. Ma ceinture ne fait pas long feu. Je me précipite hors de la bagnole. Devant moi, celle de Stéphane est là. Cela ne me dit rien qui vaille !

Suivi de Michael, nous gagnons le bâtiment. Nous sommes attentifs au moindre bruit. Le lieu est calme. Trop calme pour que Louis soit ici. À moins que nous arrivons trop tard. Cela serait inimaginable ! Je regretterai toute ma vie.

La porte principale en bois est mal fermée. Ce qui ne change rien. Personne n'a les clés. C'est donc par effraction que Stéphane et Louis ont investi les lieux, dès années auparavant.

Nous pénétrons en silence. Peu de temps après, des pleurs nous sont audibles. Ils ne proviennent pas de Jules, j'en suis certain. Michael me dépasse. Il traverse cette grande pièce vide où les ventes sont effectuées. Quant à moi, je suis à la traîne. Mes côtes me font horriblement mal. Sans parler des coupures et des quelques bleus qui parsèment ma peau.

Mais rien de bien fou. Je peux tenir.

Michael pénètre dans la pièce de droite. Il se fige à l'entrée. Des voix féminines retentissent, mais sont masquées par une voix familière. Stéphane. Michael ne perd pas de temps. Il répond à l'insulte de criminel en se jetant dans la pièce. Quant à moi, je me dirige vers l'autre salle. Celle de gauche. Le bureau où Louis s'occupe des papiers et fait passer les genres d'épreuves aux femmes.

Entre mes doigts, la poignée de porte descend lentement. Je désire surprendre Louis, pouvoir me jeter sur lui et le stopper pour de bon.

La porte s'ouvre avec lenteur. Cette fois-ci, mon cœur cogne lourdement dans ma poitrine. Jules. Ses pleurs s'incrustent dans ma tête. À la vision de ma petite-amie, genoux au sol et nue, mon rythme cardiaque s'intensifie.

C'est rare quand ça arrive. Mais je suis interdit, incapable de bouger. Un haut-le-cœur me surprend. Louis tient avec force sa petite sœur au sol. Ses paupières sont fermées et son bassin s'ondule d'avant en arrière. Jules est bloquée. Louis la menace de son arme et retient ses cheveux.

Les mots me manquent. Cette scène est violente, dégoûtante. Elle me revoit aux cris de ma mère, lorsque mon père la tenait prisonnière. Lorsqu'il l'utilisait à sa guise.

Quand je retrouve l'usage de mes sens, je n'hésite pas une seconde. Je me jette sur Louis, l'attrapant à la gorge sans ménagement. Mon autre main saisit l'arme jusqu'alors braquée sur la tête de Jules. Il est contraint de lâcher ses cheveux. J'utilise toute ma force pour lever son bras en l'air. Il vise toujours Jules qui s'éloigne en sanglotant. S'il parvient à tirer, il la tuera.

Il en est hors de question.

Louis réplique en grognant. Il me donne un coup au niveau des côtes. Je me penche en avant. La douleur est impressionnante et se répercute dans tout mon torse.

— Vous pensez tout ruiner sans problème ? s'énerve Louis en esquivant mon coup de poing. Je ne vous laisserai pas faire !

Je serre sa gorge. Louis grogne et entortille son bras au mien. Il me le tord. Une insulte valse sous ce que je ressens. Je m'écarte en tenant mon coude. Mon ancien meilleur ami porte sa main à sa gorge. Il tousse, tandis que je serre ma mâchoire.

— Jules, sors ! sifflé-je entre mes dents.

Les yeux clairs de Louis tombent sur Jules. Je suis son regard et découvre le visage meurtri de ma copine. Ça me fend le cœur. Elle ne méritait pas ça. Louis est allé trop loin.

Jules tente de se redresser. Elle cache son corps en refoulant ses sanglots. Ses cheveux courts sont en batailles, ses yeux sont rougis et ses joues trempées. Je profite de l'inattention de Louis pour prendre son arme. Il crispe ses doigts autour et vise Jules. Mon corps se place entre l'objectif et la cible, pendant que je tords les doigts du bandit. Le pistolet tombe au sol. D'instinct, je donne un coup de pied et l'arme glisse sous le bureau en bois.

Louis enrage. Il m'adresse un coup de coude à la mâchoire. Je suis déstabilisé et recule de plusieurs pas. Mes dents ont claqué. Le coup se répercute à ma nuque.

Le temps de reprendre mes esprits, Louis fonce sur sa sœur. Sans arme, il a quand même l'ambition de la tuer !

Jules se relève, les jambes tremblantes. Elle recule en couvrant son corps du mieux qu'elle peut. La pauvre est tétanisée et pleure sans s'arrêter.

Je m'élance à la suite de Louis. Mon bras s'enroule autour de sa gorge. Je le serre, l'empêche de respirer sans même regretter. Il réplique. Son coude atteint mon ventre. Mais je le maîtrise. Son dos est collé contre moi, le creux de mon coude l'étrangle.

— Putain, Jules, pars !

Jules hésite. Elle quitte le bureau en se retournant au moins cinq fois. Son visage est pâle. Elle cherche dans mes yeux à être rassurée.

Vu son dernier regard, nous sommes sur la même longueur d'onde.

Louis sera arrêté aujourd'hui même. Elle ne le reverra plus jamais.

— Jules ! l'interpellé-je en resserrant ma prise. Trouve Michael et appelez la police !

Elle se retourne et hoche son menton. Lorsqu'elle disparaît, je relâche Louis qui tousse grassement. Les mains sur les jambes, le dos rond, il reprend une respiration convenable. J'en profite pour récupérer l'arme, pensant à Jules.

Il a osé la toucher. L'agresser. Il n'a eu aucune pitié. Je n'en aurais pas.

— Pourquoi t'en prendre à ta sœur ? Qu'est-ce qui ne tourne par rond chez toi ?

Louis pivote sur ses jambes. Ses sourcils bruns sont froncés. Il me foudroie de ses pupilles claires.

— Ma demi-sœur..., me reprend-il. On a pas la même mère.

Cette nouvelle est étonnante. Je n'étais pas au courant.

— Et... ? Ce n'est pas une raison !

Louis a l'air d'un fou. Non. Il est fou. Ses traits sont tirés par la colère. Ses cheveux blond platine sont ébouriffés.

— Vous m'avez trahi ! Vous n'avez aucune valeur. Elle est comme sa salope de mère !

Il me manque beaucoup trop de données pour comprendre. Qu'a pu faire sa mère ? Et où est la sienne ? Leur père a-t-il changé de femme sans regretter ? La mère de Jules était la maîtresse de leur père ?

— Louis, calme-toi. On va en parler, tous les deux.

Louis s'avance en grognant. Je braque instinctivement le pistolet dans sa direction. Ce réflexe est des plus idiots. Il trahit ma peur, mon désir de vivre et ma possibilité à l'abattre.

— Tu baises avec cette connasse, siffle-t-il avant approchant d'un pas.

— Je ressens un truc pour ta sœur, ok ! Que tu le veuilles ou non. Elle...

Louis grimace en sortant sa langue de sa bouche. Le nerf de sa joue tressaute. Sa main passe sur son visage comme pour le calmer.

— Tu m'as menti, Léxandre. Je ne te pardonnerai jamais.

Ses mots sont explicites. Il me pointe du doigt de façon accusatrice.

— Tu parles avec Jules depuis des mois..., balance-t-il. Vous vous envoyez des messages et des photos à poils. Vous êtes des traîtres.

Mon sang se glace. Il sait tout. Si la cause m'échappe, les conséquences non. Ma vision se trouble. Louis avance.

— Co-comment..., bafouillé-je en remuant ma tête.

Ma main tremble. Je vise son torse. Mais l'idée de tirer est à des années-lumière.

— Vos téléphones, putain de merde !

Je tombe sur le cul. Comment est-ce possible ?

Louis me désigne le bureau d'un mouvement de tête. J'hésite. C'est sûrement un piège pour me déstabiliser et reprendre l'ascendance.

— Dans le premier tiroir, ton téléphone.

Impossible. Il a été brisé avec l'accident.

Devant mon trouble, Louis baisse la tête. Sa queue ramollie est libre. Il la range dans son boxer, tandis que j'ouvre le tiroir.

Effectivement. Je découvre mon téléphone en très bon état. Sa vitre n'est pas en mille morceaux. Il s'allume même.

Un éclair traverse mon esprit. Louis m'a dupé. Il a remplacé mon téléphone par un cassé. Quel con ! Pourquoi n'ai-je pas eu l'intelligence de vérifier ? J'étais tellement perdu, sous le choc que j'ai foncé tête baissée dans son piège. Le coup que m'a fait Louis est bas. Digne de lui.

— T'as trouvé comment mon code ?

Je file dans mes conversations. Celle de Jules est toujours là. Tout y est. Message, mots d'amour, allusions, photos et vidéos.

Louis en a pris connaissance. C'est hallucinant, enrageant. Il a fouillé dans notre intimité, dans ma vie.

Je retourne dans la boîte de messagerie. Un nouveau message de Louis est arrivé quinze minutes auparavant. Étonné, j'ouvre la pièce jointe. Il s'agit d'une vidéo. L'audio est net, les images aussi. Il a filmé l'agression, que dis-je, le viol de Jules. Rien que d'y penser me file la gerbe.

— Louis ! hurle la voix grave d'un homme connu. Il y a Michael qui a libéré les gonzesses. Il est en train de... hé merde !

Je lève la tête et découvre Louis, près de la porte. Derrière lui, Stéphane dénudé, se tient droit, les épaules carrées. Il me toise et s'avance dans ma direction. Louis le retient par le bras en esquissant un sourire sombre.

— Laisse, je m'en occupe. Va retrouver Jules et rapporte-la-moi.

Mes doigts se contractent. L'arme toujours en ma possession, je range mon téléphone dans ma poche. La solution pour sortir est simple. Soit attendre la venue des flics, soit tirer sur les deux hommes qui me font face.

— Non, faut sortir d'ici, réplique Stéphane amèrement. Michael a foutu le feu et est avec Jules sur le parking. Nous avons peu de temps pour nous barrer.

Louis écarquille les yeux. Il est effaré par cette nouvelle. Elle change tous ses plans. Et les miens aussi.

Si le feu prend trop vite, nous serons coincés dans le bâtiment. Mourir brûler ne me dit rien.

— Ok. Sors et emmène Jules chez moi, ordonne Louis en braquant son regard sombre sur moi. Graziella devait passer après la vente. Dis-lui de rester chez elle.

Graziella ? Ce prénom me dit quelque chose. Je l'ai entendu au moins une fois. Ah ! J'ai trouvé ! Son amante.

— Je lui donne le même traitement que Rachel ?

— Joël l'a raté, annonce-t-il. Elle lui a filé entre les doigts. Mais il l'a récupéré à sa sortie de l'hôpital, il y a moins de trente minutes. Il doit nous la livrer ici. Donne-lui l'ordre de l'emmener chez moi. Attachez-les et attendez-moi. J'en ai pas pour longtemps.

Je dévisage les deux hommes. Mon cœur est broyé, mes nerfs à vif. Dans une poignée de minutes, le bâtiment sera en feu et Jules prisonnière de ses malades. Il me faut une solution. Et vite.

— Ça mérite un truc, non ? ose Stéphane en souriant.

Quel connard. Me fixer en balançant ça... Il sait que ça me met hors de contrôle. Ma réaction le réjouit, d'ailleurs. Il dévoile ses dents blanches.

— Vous avez carte blanche, le temps que vous me filmez tout. Mais laissez-les en vies.

Un grognement m'échappe. Je me fais violence pour ne pas me jeter sur eux.

— Ne t'inquiète pas, Léxandre. Si tu es gentil, tu vivras assez pour voir les vidéos.

Stéphane étouffe d'un rire gras en se retournant. Louis et moi sommes de nouveau seuls. Le criminel m'avise de ses prunelles dont le blanc est rougi. Les marques sur sa chair trahissent le débat de Jules.

— Si tu savais depuis combien de temps je patiente pour me la faire ! s'exclame-t-il en avançant vers moi.

Son corps est tendu, ses poings serrés. Sa haine est visible. Elle transpire de chacun de ses pores. Au fil de sa progression, je resserre ma prise sur l'arme. Ma main le vise encore en tremblant. Mon ancien ami a un plan ; celui que je me tais une bonne fois pour toutes.

J'hésite à tirer. En suis-je capable ? Pourrais-je vivre avec cette horrible vision ? La balle perfora sa peau. Louis tombera au sol en gémissant de douleur. Je verrais mon ancien ami mourir.

À contrario de Louis, je n'ai pas une force mentale incroyable. Le moindre choc s'incruste dans ma cervelle. Je ressasse des jours entiers, proie à mes démons.

— Qu'est-ce que tu attends ? Tire-moi dessus et va sauver Jules.

Louis écarte les bras. Il m'invite à le tuer. Le connaissant, je sais qu'il s'agit d'un test. Il sait que je ne l'abattrai pas pour rien. Pas s'il ne m'en laisse pas le choix.

— Stéphane va la retrouver et l'embarquer. Je crois que ton petit cerveau connaît la définition de carte blanche, n'est-ce pas ? Tu ne vas rien faire, encore une fois ? Tu vas laisser une nouvelle femme victime d'un homme ?

Mon sang bouillonne. Mon doigt presse la détente, avant de s'éloigner à temps. Je me ravise bel et bien. Un peu plus et je le laissais gagner. Les flics vont débarquer sous peu. Être accusé de meurtre n'arrangera rien. Je dois repousser Louis et récupérer Jules.

— Oublie ça, sifflé-je. Je ne te tuerai pas. Je veux juste sauver Jules et le récupérer le fric que tu me dois.

Les traits de Louis se défroissent. Ses lèvres tremblent avant qu'il se moque de moi. Sa main passe dans ses cheveux ébouriffés. Il calme son rire en lançant une insulte.

— Le fric pour ta mère, c'est vrai. Parce que tu penses vraiment que ça lui importe ? Qu'elle n'a pas appris à vivre sans sa main ?

Je déglutis en prenant conscience de ses mots. Bien sûr que ma mère vit sans depuis de nombreuses années. Même si nous en avons jamais parlé, je sais qu'elle en a besoin. Le regard des gens est compliqué. Lorsque nous sortons ensemble, elle se cache toujours en mettant son bras dans les poches de ses vêtements.

Je veux que ma mère se sente bien. Toujours. Quand elle est chez elle, quand elle sort. Je veux qu'elle ignore les autres, qu'elle profite de cette nouvelle vie loin d'un fou.

— Si, mais...

Je me tais. Aucun mot ne sort. J'ai beau réfléchir, les paroles de Louis donnent matière à réflexion.

— Mais... mais tu n'en sais rien, termine-t-il en se positionnant devant moi.

L'objectif vise son torse. Louis le touche de sa peau dénudée en souriant.

— T'es un mensonge à toi tout seul. Tu te donnes des airs, des bons comme des mauvais pour amadouer. Mais ça ne prend pas avec moi.

À la fin de sa phrase, Louis s'entreprend de me donner un coup de poing. Je l'arrête en levant mon bras. Le coup heurte mon avant-bras, puis un autre sorti de nulle part atteint mon bas-ventre. Je me penche instinctivement.

Louis profite de mon inattention pour m'adresser un nouveau coup. Il récupère même l'arme au vol et me braque en un rien de temps. Dire que j'avais des regrets !

Sans attendre, je réplique. Ma vie est en danger. Je ne le laisserai pas me buter sans me battre.

J'attrape son poignet droit et lui colle un coup dans la gorge. Rien de plus efficace. Louis lâche le pistolet qui tombe au sol à nouveau. J'ignore l'arme et fonce sur ce connard. Mon corps le percute et le pousse avec force. Je le plaque contre le mur et cale mon avant-bras à sa gorge.

— Attends ! hurle-t-il de toutes ses forces.

Une odeur chatouille mes narines. Louis réagit comme moi. Nous stoppons ce début de lutte.

— Ça sent le brûlé, grogné-je.

Le feu. L'ordre que j'ai donné à Michael me revient en mémoire. Nous devons sortir au plus vite d'ici.

Je lâche pour de bon Louis et me précipite hors du bureau. Sur mes talons, Louis crache une insulte destinée à notre ami en commun. Dans la salle principale, mes jambes s'immobilisent. Le spectacle est ahurissant. Le feu ravage la plupart de la pièce. Il gagne du terrain. Le sol, le mur d'en face et le plafond sont proies. Bientôt la porte d'entrée sera bloquée. Il sera impossible de sortir sans se brûler.

Je fais marche arrière. La chaleur est étouffante. Ma peau transpire et l'odeur de brûlée monte dans mon nez. Il doit bien y avoir une autre issue dans ce bâtiment. Louis n'a pas pu fermer toutes les fenêtres et les portes !

Avant que je puisse atteinte la gauche, Louis se fout en travers de mon chemin. Il tient le pistolet. Encore une fois, je suis visée. C'en devient pénible et long.

— Qu'est-ce que tu fous ? crié-je en le fixant.

— Je te laisserai pas tout foutre en l'air. Vous allez payer, les uns après les autres ! T'es le premier, puis ce sera au tour de Jules et de Michael.

— La police va arriver. S'ils trouvent mon corps avec une balle, il comprendra tout. Ce sera facile pour eux de remonter jusqu'à l'acheteur et te coincer.

Bien que mes mots soient logiques, Louis les ignore. Il hausse ses épaules et montre de son arme le feu qui ravage tout derrière moi. Pas besoin d'être devin pour comprendre. Louis fera passer mon meurtre pour un suicide ou un accident.

— T'es taré, me moqué-je en le fusillant du regard. Je me laisserai pas faire. Si pour sauver Jules je dois mourir avec toi, je n'en ai pas peur. Mais tu ne sortiras pas d'ici sans moi.

Ma menace n'a pas l'effet escompté. Pourtant, un léger espoir vit au creux de mon cœur. Si Louis voulait se débarrasser de moi, il m'aurait abattu depuis longtemps.

Cette pensée est balayée très vite par une nouvelle réflexion. J'ai donné la réponse auparavant. Il ne me colle pas de balle dans la tête pour être innocent.

— Réagir ainsi..., soupire-t-il en baissant sa main. Tu me déçois. Je pensais que tu comprendrais et te rallierai une bonne fois pour toutes à mes côtés. Mais non.

Lorsque Louis bouge, je lève mes bras pour couvrir mon visage. Un objet tombe au sol. Je rouvre les yeux. Louis se fout ouvertement de ma gueule. Il a balancé l'arme vers le feu. Il faut peu de temps avant qu'elle soit engloutie par les flammes.

— Avant que tu brûles sous mes yeux, sache que je ne toucherai pas à ta mère. Au contraire. Elle vivra avec la mort de son fils, c'est suffisant.

Louis s'élance dans ma direction. Il est déterminé à me pousser dans le feu. Je l'imite et nos corps se heurtent brutalement.

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