Chapitre 22 - Jules

Assise à côté de Louis. Je me débats en pleurant toutes les larmes de mon corps. Louis tient son arme entre ses doigts et braque mon estomac. Il parle. Il me dit ses plans. Du moins le plan qu'il a pour moi.

Il va me vendre. Ce n'est pas une blague ou une vulgaire menace. Il va me vendre au plus offrant. Il m'explique comment ça va se passer. Ce que je dois et ne dois pas faire, tandis que je pleure toujours.

Je suis bouleversée par la situation. Je revois Léxandre, inerte. Je me revois le secouer, lui parler et lui crier dessus. Il n'a pas réagi. Pas à temps et Louis m'a sorti avec une poigne spectaculaire de l'habitacle. Je revois mon homme blessé et en sang, pendant que Louis me traînait au sol.

Je suis bouleversée par la situation. Je revois Léxandre, inerte. Je me revois le secouer, lui parler et lui crier dessus. Il n'a pas réagi. Pas à temps et Louis m'a sorti avec une poigne spectaculaire de l'habitacle. Je revois mon homme blessé et en sang, pendant que Louis me traînait au sol.

Louis était hors de lui. Hors de contrôle. Il s'en foutait des autres. Il voulait abattre Léxandre. Il a failli. Et je me suis bêtement foutu entre son objectif. Si c'était à refaire, je n'hésiterais pas une seule seconde. Un coup ou deux ne m'effraie pas.

— Putain, arrête de pleurer, petite garce ! Ce n'est pas si dramatique. Ta nouvelle vie d'esclave te plaira, ne t'en fait pas.

Je vois Louis s'agiter sous mes émotions. Le revers de ma main passe sur mes yeux, séchant les larmes. Cela ne fonctionne pas. Le beau visage blessé de Léxandre apparaît sous mes yeux. Je murmure son prénom entre deux sanglots. La réaction de Louis est violente. Il lâche une insulte.

— Vous étiez prêt à me balancer à la police, c'est ça ? Tu allais fuir avec ce connard ? J'aurais dû le buter !

Le trajet est long. Mes pleurs se calment au fil des minutes. J'essuie plusieurs fois mes joues rageusement. Je ne sais pas ce qu'il m'attend. J'ai peur et souhaiterais fuir loin de mon frère. La boule qui serre mes tripes me prend à la gorge.

Le conducteur n'est d'autres que Stéphane, le meilleur ami de Louis. L'homme qui m'a agressée le soir d'Halloween. Je crois son regard pétillant et découvre un sourire au coin de ses lèvres. Il se joue de la situation. Il se joue de mon sort.

— Léonie met tout en place en attendant notre arrivée. Plusieurs filles sont arrivées. Il nous en manque deux pour ce soir. Et les tracts ont été envoyés aux clients les plus importants. Un a déjà réservé un créneau avant la vente.

Louis est ravi de cette annonce. Il replonge son attention sur son téléphone. Je lorgne sur l'écran ses messages. Il discute avec un certain Joël. Ce prénom ne me dit rien. Par contre, le prénom de Rachel est mentionné.

Joël : Rachel m'a filé entre les doigts, cette salope. Elle est à l'hôpital. Je suis certain qu'elle portera plainte. J'entre et la plante discrètement ?

Je suis entourée de psychopathes. C'est incroyable. La peur noue mon estomac de plus belle. La réponse de Louis est positive. Il veut que sa petite amie, ou ex, meure sans parler.

Je croise les doigts et prie que Rachel échappe à ce monstre. J'espère aussi qu'elle portera enfin plainte.

— Nous sommes arrivés.

Je lève la tête vers la fenêtre. Nous sommes sur un parking vide. Le bâtiment qui nous fait face est abandonné. Il s'agit d'une vieille usine en piteux état. C'est donc là où mon frère vend illégalement des êtres humains ? Plus j'en apprends sur lui, plus il me donne la nausée. Ce type est un monstre. Une pourriture que mérite de crever en enfer.

Louis attrape mon bras et me tire hors de la voiture grise. Je repousse un gémissement sous la souffrance que j'éprouve. L'accident de voiture a laissé des marques. Des coupures dues aux vitres brisées et des brûlures avec la ceinture de sécurité sont constellées sur ma chair.

— Avance, putain !

Louis râle par ma lenteur. Il me traîne comme une poupée de chiffon jusqu'au bâtiment insalubre. J'ai beau observer l'horizon, je ne connais pas cet endroit.

Dans la grande pièce principale, je m'étonne de l'état des murs. En très mauvais états. La peinture s'effrite et de la poussière s'accumule. Mais je ne suis pas là pour parler entretien.

Louis me tire jusqu'à une porte en bois. Stéphane ne nous suit pas. Il pénètre dans la pièce d'à côté d'où des pleurs sont audibles. Les filles sont là. Si je comprends bien, Louis va les vendre. Tout ça pour le fric. Il me dégoûte. Il n'a aucune morale.

Mon frère me pousse dans un bureau assez grand. Au centre trônent un bureau en bois et une chaise. Je zieute la pièce plus entretenue que l'autre. À ma gauche, je découvre un grand placard en bois. Il y a beaucoup de casiers, dont trois sont ouverts.

— J'ai répondu au questionnaire avant. Histoire de gagner du temps.

Louis s'installe comme un roi derrière son bureau. Il pose son pistolet sur le meuble à côté d'une pile de feuilles. Je reste debout, le cœur au bord des lèvres. Il attrape une feuille sur son bureau et entreprend de la lire à haute voix.

— J'ai rempli les informations de base. Nom, prénom, ta catégorie et celui qui t'a inscrit, donc moi.

J'avale ma salive. Mes muscles sont bandés, ma peau douloureuse. J'ai mal. Me tenir debout est difficile.

— Déshabille-toi pendant que je te fais un résumé.

Mon sang se glace. Mes dents s'entrechoquent sous ses mots. Je n'ose aucun mouvement. La peur me broie de l'intérieur. Louis plaisante. Le contraire est impossible. Il ne peut pas être autant déraisonnable !

— Louis..., commencé-je avant de me taire.

— Me force pas à employer les grands moyens, Jules. Ma patience à des limites.

En signe de refus, je croise bêtement mes bras sous ma poitrine. Louis lâche un rire désabusé avant de lire sa feuille.

— Lieu : Cave. Trois hommes par relation sexuelle. Rapport avec femme si le maître le décide. Punition à la moindre opposition, physique et psychologique dont excision si tentative de fuite.

Les prunelles azur de mon frère plongent dans les miennes. Il lâche la feuille en soupirant lourdement.

Les rouages de mon cerveau marchent à vive allure. Je veux m'enfuir. Ai-je le temps de courir à la porte et de traverser l'usine abandonnée ? Qui ne tente rien n'a rien. Je ne me laisserai pas faire sans me battre.

Mon courage prit à deux mains, je détale comme jamais. Ma main attrape la poignée sous un hurlement de Louis. Mon cœur bat lourdement comme un tambour dans ma poitrine. Mon souffle est faible, ma respiration saccadée. Je n'abandonne pas et cours à travers la pièce principale.

Une sortie ne m'a jamais parue aussi loin !

Ma fuite attire l'attention. J'entends des portes, des insultes et deux voix d'hommes. Un coup de pistolet résonne dans la pièce. Je hurle à m'époumoner en sursautant violemment. Mes jambes m'ont lâchée. Je ne ressens aucune douleur, mais la peur m'habite.

Je me reprends tant bien que mal. Je veux vivre. Loin de Louis. Je n'ai pas le choix que de me battre.

— Si tu sors de là, je t'abats, me menace Louis en s'approchant.

Je suis prise au piège. La porte est à quatre mètres de moi. Le moindre pas me conduira dans un cercueil. Mais je prends le risque, têtue comme une mule. J'ai bien compris un truc sur mon frère et je compte l'utiliser à bon escient.

— Tu perdras de l'argent en me tuant, sifflé-je en taisant mon affolement.

— Tu as raison, petite sœur. Mais prendre le risque que tu me dénonces, jamais. Je préfère encore perdre des milliers d'euros.

J'ai ma réponse. Si, il osera m'abattre.

De dos, j'entends Louis s'avancer. Stéphane réagit à la scène avec mépris. Il se moque de ma stupidité et de ma faiblesse. Je ne réplique pas. Pas besoin d'ajouter de l'huile sur le feu.

— Reviens dans le bureau et je ne te toucherai pas. Si tu bouges vers la porte, non seulement je te colle une balle dans la jambe, mais tu le regretteras.

Son chantage est digne de lui. Fourbe, manipulateur et insensible. Notre lien de sang ne change en rien mon destin. Je suis qu'un petit pion dans son jeu avec lequel il s'amuse sans pitié.

— D'accord, mens-je en claquant des dents. Je te suis.

Je me tourne, soumise à sa menace. Sous mes yeux, les deux hommes se détendent. Je découvre Stéphane torse nu et griffé. Son torse est peu développé. Des poils couvrent la plupart de sa peau, des pectoraux à son bas-ventre. Sans grande surprise, une bosse à son jean montre son excitation. Comment peut-il bander dans un moment pareil ?

Quant à mon frère, il se tient droit comme un i. Ses cheveux blond platine sont en pétard. Comme son fidèle ami, il a une abondance de marques, griffures et bleus sur le visage et ses bras dénudés. Sa tenue sobre contraste avec son côté psychopathe. Il porte un pantalon noir et une chemise grise froissée.

Son arme me braque, avant de retomber le long de son corps. Son menton m'indique de le suivre. Quant à son ami, il tourne les talons. Mes yeux le suivent. Stéphane pénètre à nouveau dans la pièce d'à côté. Pendant trois secondes, j'aperçois une femme nue et en larme.

La peur me foudroie. La vision de cette inconnue est affreuse. Elle me bouleverse. S'incruste dans mon esprit pour des heures et des jours à venir.

Si je m'en sors ! Ce qui n'est pas dit. Je suis prise au piège. Soit je meurs, soit je serais vendue à un inconnu.

La meilleure option est la deuxième. Je pourrais toujours m'enfuir ou prévenir la police. Il est impossible qu'on me garde jusqu'à la fin de ma vie dans une pièce isolée.

J'avance d'un pas. Louis fait mine de se retourner. C'est maintenant ou jamais. La porte est bien trop proche pour baisser les bras. Avec un peu de chance, je longerai le bâtiment et gagnerai la route. J'espère que nous ne sommes pas dans un endroit paumé. Marcher des heures avec un fou furieux aux trousses est inenvisageable.

Pas le temps d'hésiter. Je fais demi-tour en silence. Ma main ouvre la porte, mes paupières se ferment une micro seconde et je cours sur la gauche. Mes pas retentissent et déclenchent un hurlement de rage. Louis me course. Mes jambes me portent à travers le parking. Je zigzague pour échapper à un éventuel coup de feu.

Mais rien ne se produit. Plus je m'éloigne, plus mon cœur bat. Je risque un regard derrière moi. Louis me pourchasse hors de lui. Il tient son arme entre ses doigts, mais ne me vise pas.

Il ne me tuera pas. Du moins, pas pour l'instant.

J'atteins la route et la suis en courant comme une dératée. Je manque plusieurs fois de tomber en regardant derrière moi. Puis, je me stoppe. Louis a disparu. Je suis seule à des centaines de kilomètres de l'usine.

Bordel, où est-il ?

Tant pis, je ne ferais pas demi-tour pour avoir la réponse !

Je me décale sur le bord de la route et reprends une marche plus calme. Mon rythme cardiaque se calme. La panique dans laquelle j'étais plongée est désormais loin. Je fais le vide, mets de côté des pensées immondes.

Je fuis. J'ai réussi et en suis très contente. Mais je n'ai pas mon téléphone sur moi. Il est resté dans la voiture de Léxandre.

Léxandre.

Mon ventre se sert. Je veux le revoir, le toucher, l'embrasser.

Des larmes montent et roulent sur mes joues. Je suis en train de craquer. Tout ce cauchemar est réel. J'ai perdu Léxandre. Madeleine est sûrement morte. Je fuis mon propre frère qui veut vendre ma peau.

J'arrive à un croisement. Mes jambes sont lourdes, fatiguent. Je soulève mon pull et mon tee-shirt. Une grande marque rouge barre mon ventre. La trace de la ceinture est imprégnée dans ma peau. Elle a littéralement brûlé ma chair. Je suis stupéfaite et dégoûtée. Cette image me stresse. Je lâche mes vêtements et lève la tête.

Une voiture passe. Elle ne s'arrête pas, mais le conducteur m'a bien observée.

Je me demande de quoi j'ai l'air. Sûrement pas fraîche et prête pour aller en boîte ! Comment cet inconnu a-t-il pu ignorer mon état ?

J'avise la route des deux côtés. À ma gauche, la route tourne et disparaît de mon champ de vision. À droite, je vois au loin des maisons. J'opte pour la droite. Je trouverai sûrement de l'aide.

Une nouvelle voiture passe. Elle arrive derrière moi et me dépasse. Moins de deux mètres de fait, elle se gare sur le côté. Elle n'est pas grise, mais mes sens sont en alertes. Finalement, je préfère marcher seule que monter dans la bagnole d'un inconnu !

L'homme qui sort est petit, bedonnant. Ses cheveux bruns sont gras. Il porte des lunettes noires et une barbe très longue. Il s'avance dans ma direction en souriant.

— Vous avez un souci, mademoiselle ?

Mon côté féministe se tait. Le reprendre sur Mademoiselle alors que j'ai besoin d'aide serait idiot.

— Oui !

Ma voix est terne. Je me sens vidée de toutes mes forces.

L'homme m'attrape avec familiarité par les épaules et me guide à sa voiture. Je reste sur mes gardes, malgré la fatigue qui me gagne. Mes paupières sont lourdes. Mes yeux brûlent et ma gorge est oppressée.

L'inconnu m'aide à monter dans son pick-up noir. Il passe devant le volant et démarre sans un mot. Le silence laisse libre cours à mes pensées. Je retiens un sanglot. Il me faut à tout prix des nouvelles de Léxandre. Je dois retourner sur les lieux de l'accident.

— Vous...

Je me tais. J'avise la route. Nous sommes à l'opposé de la ville. Exactement là où je ne voulais pas me rendre. Putain, quand a-t-il fait demi-tour ? J'étais tellement plongée dans mes esprits que je l'ai oublié.

— Vous m'emmenez où ?

Le sourire de l'homme s'étire. Ça n'a rien de rassurant, au contraire. Il me fait peur. Je réitère ma question. Le type retire sa main de l'embrayage pour la glisser sur ma cuisse.

— Stop ! m'époumoné-je comme une folle. Laissez-moi sortir !

J'ouvre la portière et l'homme ralenti malgré lui. Sans attendre, je retire la ceinture et saute hors de sa voiture. Il tente de me faire changer d'avis. Me propose de le suivre. Je l'ignore et retourne sur mes pas.

Putain, je suis perdue. Combien de temps a-t-on roulé ? Trop, parce que nous sommes à la lisière d'une ville. Le panneau est très loin, impossible de lire le nom.

L'homme démarre sans demander son reste. Je suis de nouveau seule sur une grande route. Je marche. Encore et encore pour revenir au point de départ. J'enrage. Un peu plus je disparaissais pour de bon ! Mais à qui dois-je donc faire confiance ?

Derrière moi, un moteur vrombit.

Allons bon ! Sur qui vais-je tomber ?

Je me retourne et arrête tout mouvement. Le véhicule gris de Stéphane me fait face. Mais derrière le volant se trouve Louis. J'étouffe un hurlement quand son moteur ronronne de plus belle. Mes dents claquent violemment. Il m'a retrouvée. Je suis morte.

Je fais volte-face et cours de nouveau. Mes pieds décollent du sol et retombent lourdement. Je suis dépitée. Comment vais-je m'en sortir ?

— Jules !

La voiture gagne du terrain. Je suis pitoyable. Je n'ai aucune chance de courir plus vite, alors je bifurque sur la droite, dans le semblant de forêt. Mon sang bouillonne dans mes veines. Mes joues brûlent et des larmes coulent sur mes joues. Je vois mal où je vais. La peur a gagné. Louis a gagné.

Mes cheveux sont empoignés brutalement. La douleur me fait beugler. Mon cuir chevelu me brûle. J'ai la sensation qu'on arrache ma chair et mes cheveux.

— T'as cru que tu pouvais m'échapper ? Ta petite promenade t'a fait du bien ?

Je ne réponds pas à ses questions. Je suis déçue de moi. Pourquoi le destin se joue ainsi de moi ? Ma persévérance allait payer. Un peu plus et j'étais saine et sauve.

Louis saisit ma gorge et plaque son arme contre ma tempe. Il presse l'objectif sur ma peau en m'insultant.

— Tu me feras chier jusqu'à a fin, toi.

Ses doigts brûlants resserrent ma gorge. J'étouffe et me débats avec idiotie. Louis râle de plus belle. Il m'empêche de respirer convenablement.

Soudainement, Louis me lâche. Mon dos s'arrondit, mes mains se posent sur mes cuisses. Je tousse en tombant à genoux. Un peu plus et Louis m'ôtait la vie !

Ce n'était plus à prouver, mais le constater est toujours effrayant. Louis est un psychopathe dénué de sentiments.

Les pieds de mon frère s'arrêtent devant moi. Je relève le menton, les larmes aux yeux. Je n'en peux plus. Louis m'épuise. Toute cette situation m'épuise. J'aimerais tellement regagner ma vie d'avant. Retrouver Léxandre et que notre relation soit acceptée par mon frère.

Comment Louis a-t-il pu dégénérer à ce point ? Qu'a été l'élément déclencheur ? Une femme ? L'argent ou la drogue ?

Louis lève sa main et l'abaisse vite. Un voile noir passe dans mes yeux, pendant que je m'écroule au sol.

***

Mon corps chute sur le plancher. Mes coudes et mes genoux sont endoloris sous l'impact. Je suis perdue, incapable de faire le point. Que s'est-il passé ? Où suis-je ?

J'émerge petit à petit. La lumière de la pièce est agressive pour ma vision. Mes paupières clignent pour s'adapter. Je me sens faible, comme vidée de toutes mes forces. Des bruits autour de moi grouillent. Des rires d'homme, des pleurs, des grands coups. La peur résonne dans tout mon être. Je suis toujours proie.

Je réalise avec lenteur où je suis. Dans le bureau de l'usine abandonnée. À nouveau.

Louis apparaît devant moi. Il a l'air furibond ! Son aura est sombre. Il émane de lui de la haine et de l'agressivité. Sa main droite tient son pistolet qui vise ma tête.

— Tu ne m'as pas laissé le choix.

Mes jambes tremblent. Je repousse un sanglot en me redressant. Un froid caresse ma peau. Mon visage se baisse et je découvre mon corps nu. J'étouffe un cri et me recroqueville sur moi-même. Mes bras cachent immédiatement ma poitrine du regard de Louis.

Où sont mes vêtements ? J'ai beau les chercher des yeux, je ne les vois pas.

— Relâche-moi, Louis, s'il te plaît, l'imploré-je en l'affrontant du regard.

Louis, maître de lui-même, s'accroupit devant moi. L'objectif de son pistolet se presse contre mon front, puis descend le long de mon nez. Ma bouche s'entrouvre et je pousse un cri de souffrance.

Je déteste Louis pour m'affliger tout ça. Pour n'avoir aucun respect.

— J'adore qu'on m'implore, susurre-t-il en enfonçant son pistolet entre mes dents.

Je manque de me briser les dents en fermant la bouche. Mes mains saisissent les avant-bras de Louis et mes ongles s'enfoncent dans sa chair. J'ai dû mal à respirer. Même déglutir est compliqué.

— Alors, je te propose un marché. Tu me suces et je te laisse la vie sauve.

Impossible de répondre, mais ma réaction me trahit. Je grogne en me déplaçant. Cela n'a pas grand effet. Louis empoigne de plus belle mes cheveux. La violence dont il fait preuve est sauvage. L'objectif de l'arme se colle à mon palais. Il me blesse, ignore ma souffrance. Pour mon frère, je ne suis qu'une femme comme les autres. Une vulgaire victime.

J'ai honte. Honte de ma faiblesse, de ma stupidité.

Je hais Louis de tout mon cœur. Il m'inspire le dégoût. Ma haine envers mon frère n'est plus à prouver.

— Tu es partante ?

Des larmes coulent sur mes joues. Je suis à bout. Il retire l'arme de ma bouche. Immédiatement, je crache et essuie le filet de bave le long de mon menton.

— Tu mens, répliqué-je entre deux sanglots. Tu ne me laisseras pas partir.

Le rire de Louis hérisse mes poils. Il pose un genou au sol et relâche mes cheveux. Ma nudité ne le gêne pas. Contrairement à moi. Je me cache à nouveau, recroquevillée au sol.

— Tu es perspicace, Jules. Je pouvais bien essayer, non ?

Ouais, des fois que je sois folle !

Son comportement me répugne. Il se croit tout permis. Un jour, ça lui retombera dessus. J'espère qu'il payera le prix fort ! Au passage, si je pouvais assister sa chute, j'en serais heureuse ! Je ne désire pas mourir aujourd'hui ou être prisonnière d'un fou.

Je devrais m'échapper. Encore une fois. Mais ma chance a tourné. Si je réitère une fuite, il ne me loupera pas.

Louis tend sa main libre jusqu'à ma joue. Il essuie mes larmes, puis prend mon visage en coupe. Mes yeux se baissent sous son regard désorienté. Non, la pitié que je vois dans ses pupilles est fausse. Il veut me manipuler. Comme il le fait depuis le début.

Mon frère me ment, me manipule et m'utilise à ses fins. Je n'ose pas imaginer depuis quand il me raconte des bobards. Des semaines ? Des mois ? Des années ? Avait-il ce plan depuis le lycée ou sa sortie de prison ?

— T'as nouvelle vie sera très bien, tu verras. Si tu te soumets, tu vivras comme une princesse.

J'étouffe un rire méprisant. Sa tentative échoue laborieusement. Plus jamais Louis ne s'insinuera dans mon cerveau ! Plus jamais il ne me bernera. Je ne crois plus en ses mots.

— Dis-toi que tu retrouveras ta liberté lorsque tu seras inutile. Ton maître sera clément. Il te relâchera... Avec un peu de chance.

Rien n'est sûr. Mais une chose est certaine, si Louis voulait me buter, il l'aurait fait bien avant !

— Pourquoi faire ça ? Pourquoi donner la vie de femme contre de l'argent ?

Louis crispe ses doigts sur ma chair. Mes joues sont pressées. Je me libère de son emprise en reculant ma tête. Le soupir de mon frère est lourd.

— Parce que c'est drôle.

La réponse est ignoble. Son rire qui le suit aussi. Cette facette de Louis est gênante. Effrayante.

Ses mains glissent jusqu'à mes bras. Il serre ma peau, puis me plaque contre son torse. J'en reste hébétée et sur la défensive. M'apaiser ne fonctionnera jamais. Le lien qui nous unissait s'est brisé.

Louis presse ses mains sur mon dos. Immobile, j'attends qu'il me lâche. Les secondes s'éternisent et mes larmes cessent. Lorsque Louis s'éloigne, il prend mon menton entre ses doigts et plonge ses yeux dans les miens. Son fin sourire est remplacé par un rictus de colère. Ses doigts atterrissent autour de ma gorge en cinq secondes. La crainte revient en force. J'attrape les poignets de mon frère et tente de l'éloigner. Les beaux yeux bleus de Louis dévoilent sa haine. Ses doigts se resserrent. J'étouffe sous son emprise.

Les lèvres de Louis se faufilent à mon oreille droite. Son souffle chaud frôle ma peau. Je suis incapable de parler. Ma gorge est à la merci de mon frère.

— Je te déteste, Jules. De tout mon cœur. T'as niqué ma vie en venant au monde.

Il me lâche enfin. Je retrouve l'usage de ma respiration et de ma voix.

Sous le choc des paroles infâmes de Louis, ma mâchoire se décroche et mes yeux s'humidifient. Les mots sont crus. Ils heurtent mon cœur de plein fouet.

Mon frère me hait. Et c'est réciproque. Cependant, j'ai beaucoup de mal à entendre ça. Louis me déteste depuis ma naissance. Comment peut-il me balancer ça à la gueule ? Pourquoi ne jamais l'avoir dit ?

— Je te déteste, Jules. Autant que je t'aime.

Je secoue mon menton en toussant.

— Non, tu ne m'aimes pas, Louis, articulé-je avec complexité. Sinon, tu ne me ferais pas ça.

J'ai mal. Physiquement et psychologiquement. Ma gorge est toujours douloureuse. Je tousse pour que la gêne passe. La force de Louis n'est plus à démontrer.

— Ce que je commets est une faible vengeance envers ta salope de mère. Elle devrait être à ta place. Mais elle est à des milliers de kilomètres.

Louis me connaît. Je souffre toujours de l'absence de notre mère. Quand bien même elle nous a abandonnés, je ne l'insulte pas. Elle a décidé que sa vie était loin de nous. Tant pis pour elle.

— Je déteste ta mère et notre père, continue Louis en se levant. Je les déteste pour nous avoir liés.

Il s'approche de son bureau en soupirant. De dos, je vois ses mains se plaquer contre le bois. Le pistolet sous sa main gauche m'obnubile.

Et si je le récupérais ? Mission suicidaire ! Je répète. Mission suicidaire.

Je réfléchis à ses mots. Mais je ne comprends pas grand-chose. Pourquoi dit-il ma mère et notre père ? Ne devrait-il pas employer le mot parent ?

Je surpense. Encore une fois !

— J'ai pas le choix, tu comprends ? Te voir est dur, Jules. Savoir que tu es comme ta mère... putain. Tu vas reproduire ses conneries. Et tu as déjà commencé en me détestant.

Louis referme ses doigts sur son arme. Il se retourne vivement et lève son bras dans les airs. Mon cœur rate un battement. Mes paupières se ferment sur-le-champ, tandis qu'une grimace déforme mes traits.

J'attends en priant silencieusement. J'attends qu'il décide de mon sort. Qu'il m'abatte.

— Je te déteste pour m'infliger tout ça, Louis, hésité-je. Je te déteste, parce que tu ne m'as pas laissé le choix.

Louis éclate d'un rire gras et machiavélique. Il presse son arme sur mon frère.

Ça y est. Mon heure est arrivée. Louis ne veut plus me vendre. Il a décidé de me tuer pour que je me taise à jamais.

— Tu me détestes et tu m'as trahi avec Léxandre. Tu ne mérites pas de deuxième chance.

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