Chapitre 25 - Effondrement - partie 2

Point de vue d'Audrey

Tout est blanc autour de moi, que ce soient les murs ou les draps. Partout où mon regard se pose, c'est toujours la même couleur. Olivier est parti il y a quelques minutes pour parler avec le médecin. Du moins, c'est ce que j'imagine. Au départ, je lui en voulais de me forcer la main mais je ne peux que constater qu'il avait raison. Que se serait-il passé si je n'étais pas avec eux quand j'ai eu mon malaise? Il aurait probablement fallu un certain temps avant qu'on ne me trouve. Un frisson parcours mon corps suite à cette constatation. Je ferme les yeux et soupire en passant mes mains sur mon visage. Il ne manquait plus que ça. C'est vraiment la totale. Quand vais-je enfin être tranquille? J'ai l'impression que ces derniers mois se sont passés comme si j'étais spectatrice de ma propre vie. Je ne contrôle plus rien. Même mon corps, c'est tout dire. Olivier rentre dans la pièce. Il essaie de faire bonne figure mais je peux voir son inquiétude.

- C'est si grave que ça? demandais-je tandis qu'il s'assied près de moi.

- Mais non. On va te remettre sur pieds, tu vas voir, me dit-il en frottant mon bras.

- Arrête de me prendre pour une idiote tu veux? Dis-moi ce que le docteur Henry t'a dit.

- Comme tu voudras, soupire-t-il. Il pense que c'est une dépression mais il doit attendre pour en être sûr.

- Attendre quoi?

- ...

- Attendre quoi Olivier? m'énervais-je.

- Il veut demander l'avis d'un de ses collègues. Un psychologue.

- De mieux en mieux. Je ne suis pas folle.

- On n'a jamais dit ça. Il pense simplement que son avis pourrait confirmer son diagnostic.

- Et la prise de sang? Ils vont quand même me la faire?

Sa grimace répond à ma question. Il sait que j'ai horreur des aiguilles.

- Oui, une infirmière passera te la faire demain matin.

Il prend ma main pour me réconforter. À moins que ce ne soit pour le rassurer lui, je n'en sais rien. Nous restons comme ça pendant quelques minutes, dans un silence complet.

- Tu vas prévenir Lucas? me demande-t-il.

- Je ne sais pas, soupirais-je. D'un côté j'ai besoin de lui mais il est lui même en train de se reconstruire. Je ne voudrais pas l'empêcher d'avancer.

- Si tu veux mon avis, il préférerait sans doute que tu le préviennes.

Je hausse les épaules, ne sachant pas quoi faire. Mon téléphone se met à sonner dans mon sac. Ce dernier est trop loin pour que je l'attrape. C'est donc Olivier qui me le passe. Quand on parle du loup!

- Allo?

- Salut ma belle.

- Oh Lucas. Ça me fait plaisir de t'entendre.

Je vois Olivier hausser un sourcil.

- J'avais besoin de t'entendre. Je ne te dérange pas?

- Non pas du tout. Je me reposais un petit peu.

- Tu es malade?

- Euh non non... tout va bien. Juste un petit coup de fatigue.

Olivier s'étrangle carrément avec sa salive. Je sais que je ne devrais rien cacher à Lucas mais je n'ai pas envie qu'il se rende compte de ma faiblesse. Notre conversation dure encore quelques minutes. Je n'ai pas vraiment menti, je suis complètement épuisée et la fatigue revient en force, m'obligeant à fermer les yeux. Olivier reçoit un appel et je l'entends vaguement dire qu'il doit sortir avant de sombrer dans le sommeil.

À mon réveil, je suis un peu désorientée. Il me faut quelques secondes avant de me rappeler que je suis à l'hôpital. Je regarde autour de moi et aperçois une silhouette assise devant la fenêtre. Ce n'est pas mon colocataire mais bel et bien Geoffrey.

- Salut la belle, me dit-il, me faisant sursauter.

- Salut. Olivier n'est plus là?

- Non, il est parti prendre son service.

- Son service? Mais il est quelle heure?

- 19H30 ma puce.

- Oh bon sang. On est quel jour?

Geoffrey me regarde comme si j'avais perdu la tête mais me répond cependant.

- On est mardi.

- Mince, dis-je en me tapant sur le front. Je devais aller voir Sylvie ce soir, commençais-je à paniquer.

- Ne t'inquiète pas. On a prévenu ton ex-belle-mère. Elle va expliquer à ta fille que tu n'es pas dans ton assiette mais qu'elle pourra te voir dans quelques jours.

- Qu'est-ce que je ferais sans vous? Merci... Je suis vraiment une mère indigne! J'avais complètement oublié que je devais voir ma petite chérie.

- Arrête de dire n'importe quoi. Tu as des circonstances atténuantes tu ne crois pas?

- Sans doute... Et je n'ai même pas eu l'occasion de dire merci à Olivier.

- Le meilleur remerciement que tu puisses lui donner est de t'en sortir jeune fille.

- Ce n'est pas comme si j'étais au seuil de la mort non plus.

- Tu n'as pas l'air de te rendre compte que ton état est sérieux.

- Ce n'est rien de bien méchant en tout cas.

- Assez inquiétant pour que je vienne te voir quand même.

Je me tourne rapidement pour voir qui vient de rentrer. C'est juste impossible, il ne peut pas être ici. C'est un cauchemar!

- Tu n'as pas l'air ravie de me voir, me dit-il.

- Heu si si bien sûr, dis-je gênée. Bonjour Lucas.

- Bonjour Audrey, me dit-il avec une moue sceptique.

- Je vais vous laisser, me dit Geoffrey. Vous avez beaucoup de choses à vous dire.

- Merci mon vieux, lui dit Lucas, et merci de t'occuper d'elle.

- De rien, il faut bien que quelqu'un se dévoue, rajoute Geoffrey en riant.

- Et je suis là je vous signale, dis-je en râlant.

- À demain et pas de bêtise hein, me dit-il content de lui.

J'observe l'homme qui se tient devant moi, debout, sur ses béquilles et non dans un fauteuil roulant. J'hallucine des progrès qu'il a fait.

- Tu vas beaucoup mieux. Je suis contente pour toi.

- N'essaie pas de noyer le poisson, tu n'y arriveras pas.

- C'est pas ce que j'essaie de faire.

- Ouais, à d'autres, me dit-il en s'asseyant près de moi. Ma visite ne te fait pas plaisir visiblement.

- Mais si, pourquoi tu dis ça?

- Ta bouche dit quelque chose mais ton corps montre le contraire ma belle. Tu préfères que je rappelle Geoffrey?

- Non, reste... C'est juste que je ne voulais pas que tu me vois comme ça. Pratiquement à chaque fois que tu m'as vue, j'étais faible et je ne veux plus t'infliger ça. D'ailleurs comment as-tu su que j'étais ici?

- J'ai téléphoné à Olivier.

- Le traître, grommelais-je.

- Non, il l'a fait parce qu'il sait que tu as besoin de toute l'aide possible pour t'en sortir. Et heureusement qu'il était là. Pourquoi m'avoir caché ton état? Tu as déjà oublié que le soutien est dans les deux sens?

- ...

- Audrey, regarde-moi, me dit-il en soulevant mon menton. Tu n'as pas confiance en moi?

- C'est en moi que je n'ai pas confiance. J'ai peur de te faire fuir à force d'avoir besoin de toi, lui confiais-je.

- Tu ne me feras pas fuir à cause de ça. C'est plutôt ta tendance à tout me cacher qui pourrait le faire.

- Que veux-tu dire par là? lui demandais-je en déglutissant.

- J'en ai assez que tu me mettes sans arrêt sur le côté. Tu es importante pour moi, tu m'entends? Je n'ai pas envie d'être là juste pour les bons moments. À quoi ça rimerait?

- Lucas...

- Non, cette fois, tu vas m'écouter. Et écouter tes amis. On ne va pas te laisser faire ma belle. On ne va pas te laisser te détruire sans bouger le petit doigt. On est pas comme Tom, compris?

- Je ne veux pas me détruire, murmurais-je.

- Et pourtant c'est ce que tu fais! s'énerve-t-il. Tu comptais faire quelque chose pour tes insomnies ou tes troubles alimentaires? Non. Même si c'est inconscient, j'appelle ça de l'autodestruction. Olivier a eu raison de te forcer à réagir. Imagine un peu que tu aies eu ton malaise en conduisant! Tu te rends compte un peu des dégâts que ça aurait pu causer? Ou si tu était seule avec Sylvie? Il faut arrêter de te voiler la face. Tu ne vas pas bien et tu as besoin d'aide.

Voyant que je pleure, il se rapproche de moi et me serre dans ses bras.

- Tom t'a détruite mais ne le laisse pas gagner. Au contraire, montre-lui que tu vaux mieux que ça. Montre-nous à quel point tu es forte. Montre-nous la vraie Audrey.

- Je ne suis pas forte, je ne suis qu'une moins que rien, dis-je tout en pleurant à chaudes larmes.

- Est-ce qu'une femme faible aurait tenu bon aussi longtemps? Est-ce qu'une moins que rien serait parvenue à retourner travailler après autant d'années? Non. Tu dois croire en toi et en nous. Tu dois te battre pour notre avenir mais surtout pour toi.

- Notre avenir?

- Je compte bien avoir un avenir avec toi ma chérie. Que ce soit en amitié ou plus. Tu vas devoir me supporter encore longtemps.

- Je ne veux pas...

J'essaie de respirer mais je n'y arrive pas. Il passe sa main dans mon dos pour me calmer et attend que ça passe.

- Même si ça fait mal à entendre

- Non, ce n'est pas... ce que tu crois, dis-je entre deux respirations. Je ne veux pas être amie avec toi Lucas. Je sais qu'il est encore trop tôt mais j'aimerais être tellement plus, lui avouais-je.

Il me serre plus fort contre lui mais ne dit rien. C'est ce que je disais, il est beaucoup trop tôt, j'ai encore foiré. Il s'écarte de moi. Pose son front sur le mien. Il garde les yeux fermés tandis que les miens se ferment aussi pour profiter de ce moment hors du temps. Une pression se fait sentir sur mes lèvres. Une douce chaleur se répand dans mon corps et des frissons apparaissent. Il m'embrasse. Je rêve de cet instant depuis tellement longtemps. Mes lèvres répondent à son baiser. D'abord un effleurement, une caresse. De tendre, le baiser se fait enflammé. Mon cœur est sur le point d'exploser. Ma respiration est coupée. Je manque d'air mais je m'en moque. Je n'ai besoin que de lui pour respirer.

Il s'écarte mais ne me lâche pas pour autant. Il se trouve dans le même état que le mien. Nous reprenons nos esprits peu à peu, nous rendant compte de l'étape que nous venons de franchir. Nous avons passé un cap... non?

- C'était... murmurais-je.

- Ouais, c'était... me dit-il chamboulé.

- Qu'est-ce que ça veut dire? demandais-je peu sûre de moi.

- J'en sais rien... mais je n'ai qu'une envie: recommencer, me dit-il en souriant.

Et c'est ce qu'il fit la seconde d'après, me foudroyant sur place. Mes émotions prennent le dessus et je me laisse emporter malgré moi dans un tourbillon de sensations. Quand le baiser prend fin, je suis encore plus retournée qu'avant.

- Ça veut dire qu'on est plus? osais-je en frôlant mes lèvres du bout des doigts.

- Qu'est-ce que tu en penses?

- Que je suis heureuse. Peu importe ce qu'on est.

Et je réalise que c'est vrai. Il me rend heureuse même si on ne sait pas mettre de mots précis sur notre relation.

- Moi aussi, me dit-il, un sourire aux lèvres. Allons-y pas à pas. Tu es mon «plus» ma belle.

- Et tu es le mien, lui répondis-je en me serrant contre lui.

«Chers visiteurs, l'heure des visites est bientôt terminée. Nous vous invitons à rejoindre l'extérieur et vous souhaitons une agréable soirée» dit soudain une voix dans les hauts-parleurs.

- Je vais devoir partir. Mais promets-moi une chose.

- Laquelle?

- Ne me tiens plus à l'écart, d'accord? Nous allons t'aider à sortir de là mais pour ça tu dois être honnête avec nous.

- Promis.

Il m'embrasse une dernière fois avant de s'en aller, me laissant rêveuse. Oui je vais me battre pour remonter. Après tout, ça vaut peut-être le coup, me dis-je en me touchant les lèvres.

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Vous l'avez attendu, le voici... enfin le premier baiser entre Audrey et Lucas.

Décidément, Lucas est toujours là quand elle va mal.

Audrey va devoir se battre. Mais a-t-elle vraiment le choix avec Lucas, Olivier et Geoffrey?

L'histoire entre nos deux tourtereaux se concrétise un peu plus. Quels chemins tortueux vont-ils devoir encore affronter à l'avenir?

Comment voyez-vous la suite de l'histoire?

Je ne sais pas pourquoi mais plus j'avance et plus j'ai l'impression que cette histoire sera plus longue que celle de Gabriella et Logan...

Chapitre corrigé le 11/10/18

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