Reflet


Une silhouette sombre avançait lentement dans la pénombre du crépuscule sur un sentier de forêt, une démarche mal assurée, hésitant à tourner les talons à chaque pas. Sa longue cape noire couvrait tout son corps et la rendait presque invisible dans l'obscurité, seul son masque d'un blanc immaculé affichant une expression lugubre permanente tranchait avec les ombres et lui donnait l'air d'une âme en peine.

"Qu'est-ce que j'espère ? Pourquoi est-ce que j'y retourne ? Pourquoi est-ce que je veux le revoir ?" se demandait-elle mais pourtant elle continuait à avancer.

Elle se souvenait encore de sa réaction lorsqu'il avait appris qui elle était vraiment; elle se souvenait des bouteilles qui furent lancer avec hargne et qui la traversèrent avant d'aller s'éclater contre le mur le tintement de chaque minuscules morceaux de verres tombant au sol encore parfaitement net dans sa mémoire.

Elle se souvenait des cris et des injures, des accusations de trahison, de ses tentatives infructueuse de ce faire comprendre ou même entendre.... et surtout elle se souvenait de la bouteille qui avait finit par la toucher en plein visage.

Elle n'avais jamais compris pourquoi son habileté avait soudainement cessé, probablement parce qu'elle ne la maitrisait pas encore en ce temps là, mais sur le moment elle ne c'était pas posée la question. C'était le seul moment dont elle ne ce souvenait pas précisément, elle se souvenait juste de son état de choc, une sensation ignoble qu'elle ne pourrait même pas décrire. Elle se rappelait être tombé en arrière, son visage saignant, son nez cassé et l'homme en face d'elle en train d'ouvrir et fermer la bouche mais elle n'entendait pas ce qu'il disait, sûrement des aboiements de chiens apeurés comme d'habitude. Après ça elle avait prit la fuite, ne se souvenant même plus de si elle avait ouvert la porte pour sortir, et elle n'avait jamais regarder en arrière depuis plus d'un an maintenant.

Alors pourquoi prenait-elle ce chemin qu'elle avait déjà prit mille fois depuis toute petite ? Pourquoi retournait-elle à la mai-

Pourquoi retournait-elle chez lui ?

Est-ce qu'avoir quitté l'ordem sobrenatural l'avait bouleversé au point de lui avoir fait oublier toute logique ? Où étais-ce cette nouvelle découverte scientifique qui passait en boucle à la télévision et dont tout le monde débattait sur internet depuis des semaines qui l'avait convaincue ?

Un peu des deux probablement.

La silhouette quitta soudainement la route pour disparaitre entre les arbres sans la moindre hésitation, presque par automatisme. Il y a encore un an et quelques elle aurait dû se contorsionner pour éviter que son visage ne ce fasse griffer par des branches trop basse et aurait dû slalomer entre les arbres mais à présent elle pouvait juste avancer en ligne droite.

Que ça soit branches ou troncs elle passait simplement au travers, certaines partie de son corps se dissipant momentanément en une sorte de fine brume noir avant de se reconstituer dès qu'elle avait finit de traverser un obstacle.

Elle ne put retenir un léger gloussement en se rappelant à quel point il était autrefois laborieux de traverser ses bois. Son habileté était si pratique.

Enfin elle finit par avoir sa cible en vue, une petite maison oublié à l'orée des bois et à quelques kilomètres de la ville dont le gratte-ciel illuminé était visible au loin. Une jolie petite maison mais tout de même un peu trop grande pour un seul veuf.

L'individue masquée s'approcha et constata avec un mélange de curiosité et d'appréhension la voiture garé dans l'allée, il n'aurait pas dû être déjà rentrer du travail. Elle comptait arrivait avant lui pour le surprendre à son retour, ça n'avait pas grand intérêt alors ce n'était pas grave mais elle fut vaguement déçue.

Elle tourna autour de la maison, examinant chaque fenêtre couverte par des volets fermés avant de s'arrêter devant l'une d'entre elle et de passer au travers. Elle avança à tâtons dans l'obscurité avant d'allumer la lumière et d'examiner les lieux.

C'était une chambre semblant figer dans le temps, le lit était toujours défait, les posters de recrutement pour les forces spéciales était toujours au mur à côté de ceux de groupe de rock, une pile de vêtements était toujours sur le petit bureau, exactement dans l'état où elle l'avait laissé. Tout était pareil mais couvert d'une certaine couche de poussière...

Cette chambre... sa chambre lui donna un sentiment indescriptible à mi-chemin entre la nostalgie, la colère, l'envie de pleurer et de vomir.

Elle resta immobile  quelques instants jusqu'à ce que le bruit étouffé d'un poste de télévision venant de juste au dessus d'elle la sorte de sa torpeur:

"Un nouvel acte criminel odieux du groupe déviants l'Ordem Sobrenatural défraie la chronique, quelques semaines après la déclaration polémique d'un ancien employé du centre de recherche gouvernemental sur les déviants..."

Elle s'approcha des posters de recrutement et les arracha, et les déchira en petit morceau qu'elle jeta au sol sans se soucier de faire du bruit. Le vague sentiment de nostalgie s'était estompé, elle voulait rester le moins de temps possible ici.

Elle essaya d'ouvrir la porte mais elle se rendit compte qu'elle était fermé à clé depuis l'extérieur alors elle se contenta de la traverser. Elle se retrouva dans un couloir qui mena jusqu'à un salon dont elle alluma la lumière. Chaque meuble était couvert de photos dont beaucoup avait été posé face contre meuble comme par quelqu'un qui ne voulait plus les voir mais qui n'avait pas le cœur de les jeter.

Toute les photos de famille, toute les photos où elle apparaissait...

Elle en saisit une, la regarda quelques instants avant de la jeter par terre avec fracas, bruit qui fut vite suivit de bruit de pas précipité descendant les escaliers et d'un cris:

-Qui est là ? Je vous préviens je suis armé !

Il n'avait pas changé du tout on dirait... la silhouette se sentait bouillir de rage et de dégout, qu'il vienne avec son canon en avant, elle lui ferait regretter...

Mais lorsqu'elle le vit lui, l'homme que l'Ordem lui avait appris à détester, ce misérable chien du gouvernement qui voulait la voir morte... elle ne sentit plus rien.

Sa haine, ou tout autre émotion contradictoire qu'elle ressentait depuis son arrivé, aurait dû exploser mais il n'en fut rien. Elle ne ressentait plus rien, plus qu'un calme plat et désagréable, comme si la partie de son cerveau responsable de ressentir avait soudainement cessé de fonctionner.

Non  ce n'était pas ça... ses émotions était toujours là mais elle avait été enfouis au plus profond d'elle sous un voile de froideur alors qu'elle contemplait l'air pathétique de cet homme négligé et fatigué. Des nouvelles rides et des poches noires sous les yeux marquait son visage même si ce dernier était en partie dissimulé derrière une barbe dont il ne s'occupait visiblement pas, il portait toujours son uniforme de police qui était maintenant chiffonné comme si il n'avait même pas eu la motivation de le retirer en revenant du travail.

L'homme eut l'air inquiet et même effrayé en voyant la silhouette, ne la reconnaissant que comme un membre de l'Ordem.

-Mettez les mains en l'air... et pas un mouvement de travers !

Contre toute attente elle obéit et leva doucement les mains tout en faisant quelques pas dans sa direction ce qui fit poussa le policier à reculer de quelques pas tout en visant la tête de l'individue.

-N'approchez pas !

-Après tout ce temps c'est ça l'accueil que tu me réserve ? dit-elle d'un ton plat et froid, beaucoup trop formel, mais elle n'arrivait pas à en prendre un autre.

-De quoi est-ce que vous parlez, sale déviante ? interrogea-t-il  d'un ton méprisant alors que ses mains tremblaient sur son arme de poing puis, en voyant que la déviante portait les mains à son masque, il s'écria. J'ai dit ne bougez pas !

Mais c'était trop tard, le masque tomba au sol révélant enfin la personne qui se cachait derrière. Une jeune femme aux traits fins et juvénile qui ne semblait même pas être encore sortit de l'adolescence. Sa peau était plus pâle, ses cheveux blond était plus court que quand elle était partit et il y avait à présent une gravité inquiétante dans son regard, ses yeux émeraude semblant presque plus terne, mais l'homme la reconnut de suite malgré tout.

-Li... Lily...? balbutia le policier en baissant son arme, l'air de ne pas en revenir comme s'il avait un fantôme ou une hallucination en face de lui.

-Salut, papa... dit-elle d'une voix à présent éteinte, faisant de son mieux pour ne pas la faire trembler, les barrières qui empêchait ses sentiments d'affluer était tombé en même temps que son masque on dirait.

Ils restèrent tout les deux silencieux quelques instants, un silence qui devint rapidement pesant et que l'homme finit par briser d'un ton dur, dissimulant tout ce qu'il ressentait.

-Pourquoi est-ce que tu est revenu ?

Cette phrase eut l'effet d'une gifle sur Lily et sa rage remonta soudainement à la surface alors qu'elle regardait son père d'un air scandalisé.

-Ça fait plus d'un an que je suis partie et c'est tout ce que tu trouve à dire ? s'écria-t-elle en s'approchant de lui.

Il eut l'air surpris par ce ton, n'y étant pas habitué de la part de sa fille, il détourna le regard l'air de douté quelques instants avant de se remettre à aboyer :

-Tu à décider de fuguer c'est ton problème ! Visiblement ses terroristes de l'Ordem valait mieux que moi à tes yeux ! dit-il en faisant un signe de tête vers les habits de Lily, en particulier son masque au sol.

-N'essaie pas de te faire passer pour une victime ! TU NE M'A PAS LAISSÉ LE CHOIX ! hurla-t-elle soudainement sans même s'en rendre compte, son père sursautant légèrement et redressant son arme par réflexe, la jeune fille respira profondément pour essayer de se calmer avant de reprendre. Et l'Ordem je les ai quitté, ils m'ont déçu...

-C'est pas étonnant... marmonna l'adulte.

-Tout comme toi ! coupa l'adolescente.

La poigne du père tremblait de plus en plus sur son arme alors qu'il continuait d'éviter le regard de sa fille. Sa voix était de moins en moins rude et de plus en plus tremblante, continuant à essayer de se justifier pathétiquement.

-Tu n'a pas la moindre idée de ce que j'ai ressentit... apprendre que ma propre fille était une de ceux que je devais combattre... tu n'a pas idée du sentiment de trahisons que c'est ! Pourquoi est-ce que tu à choisit ça ?

-Je ne l'ai pas choisit ! Je suis juste comme ça... et je croyait que t'aurait put l'accepter... tu disait que tu serais toujours là pour moi, est-ce que c'était juste un mensonge ? dit-elle alors que sa voix faiblissait de plus en plus et que sa position devenait moins assuré. Je voulait être comme toi ! T'étais tout ce que j'avais et tu m'a rejeté ! Est-ce que tu m'aimais seulement au final ?

Il eut l'air pris de cour alors qu'il voyait sa fille, sa petite chérie,  l'air aussi désespérée et au bord des larmes, tout le ressentiment s'évaporant remplacer par de la honte. Le père en lui voulait lâcher son arme, prendre sa petite fille dans ses bras et que tout revienne comme avant... mais le flic en lui ne pouvait pas laisser ça arriver.

-Qu'est-ce que tu veux ? dit-il après une longue hésitation d'un ton bourru d'où transparaissait une émotion refoulé.

-Que tu m'écoute pour une fois... que tu comprenne...

-Impossible, dit-il d'un ton catégorique alors qu'il relevait son arme comme par automatisme.

-Mais... mais...

-Vous avez le droit de garder le silence...

-Non, non... s'il te plait... supplia-t-elle alors que les larmes coulait sur ses joues.

-Pour vos crimes contre l'humanité je vous arrête, ne faites plus le moindre geste...

-Je suis ta fille ! s'écria-t-elle en s'avançant. Tu n'oserait pas-

Le flic leva son arme vers le plafond et tira avant de viser l'adolescente à nouveau.

-Vous êtes une déviante, contre-nature, et par conséquent une ennemie de l'humanité toute entière.

Cette dernière phrase, ce coup de feu qui n'avait touché personne, blessa Lily plus profondément que tout le reste, que ses insultes, que ses bouteilles qui avait été lancé il y a plus d'un an. Elle baissa doucement le regard et essuya ses larmes avant de relever la tête, un air de détermination froide sur le visage.

-Tu a vu cette déclaration de l'ancien scientifique à la télé ? dit-elle soudainement sans raison apparente, ce qui lui valu d'être ignorer. Que tout les humains ou presque sont déviant et que ça ne se déclenche juste pas ? Et que c'est héréditaire ?

-Silence ! Tout ça n'est qu'un ramassis d'intox et de fake news.

-Et si on vérifiait ?

L'adolescente se rua alors soudainement sur son géniteur qui par réflexe encore une fois tira juste par dessus son épaule. Elle ne se laissa pas perturber et dans un enchainement d'une rapidité et d'une violence surprenante elle arracha l'arme des mains de l'homme et le mit au sol.

Elle écrasa son torse avec son pied  et pointa l'arme sur lui, il se remit à parler d'un air paniqué et hébété, probablement pour supplier mais Lily ne l'écoutait pas, elle visa son bras et un coup de feu retentit.

L'homme serra les dents, se préparant à l'impact... mais il n'y en eu aucun, il regarda son bras et il vit qu'il s'était décomposer en une fine brume noire, et que la balle l'avait traversé sans faire aucun dégât et c'était logé dans le sol.

Un air de panique encore plus grand s'installa sur son visage alors que tout son monde s'écroulait autour de lui. Sa fille recula de quelques pas et le laissa se relever et se prendre la tête dans les mains alors que son bras redevenait normal.

-Qu'est-ce que tu m'a fait, bordel ? Tu m'a contaminé ? dit-il d'une voix qui essayait de retrouver son ton rude mais ne faisait que transmettre son incompréhension.

-Non ça ne marche pas comme ça... tu est comme moi, tu l'a toujours été et tu n'a fait que te mentir à toi-même, dit-elle avec un léger soupir d'amusement ironique. On peut dire que c'était moi qui était comme toi. Tu est exactement ce que tu déteste le plus et que tu a combattu depuis des années.

Il ne trouva rien à répondre à ça alors que l'adolescente tournait les talons, se préparant à quitter cette maison maudite en passant au travers de la porte d'entrée.

-Pourquoi est-ce que tu est revenu ?

Cette question la fit se figer, l'exacte même question que son père avait poser lorsqu'elle s'était dévoiler, celle à laquelle elle n'avait pas répondu. Elle resta silencieux un long moment en lui tournant le dos avant d'enfin admettre:

-Je ne sais pas.

Elle se retourna vers lui d'un air plus attristé devant la chose pathétique et au fond du gouffre qu'elle avait créée.

-Peut être que je voulais te prouver quelque chose, ou même peut être te faire payer ce que tu m'a fait. Ou peut être que j'espérais que tu aurai changer, que les choses aurait put redevenir comme avant...

Elle devint pensive un petit instant et l'homme se releva et s'approcha doucement d'elle, se disant qu'il n'était peut être pas trop tard après tout. Il essaya de la toucher, de la prendre dans ses bras mais elle repoussa sa main et recula  un peu plus vers la porte.

-N'essaie même pas... ce qu'on avait est mort... je ne peut pas faire comme si rien n'était arrivé...

Le père s'éloigna alors, comprenant enfin la gravité de ce qu'il avait fait et dit, sa fille poussa un dernier soupir.

-J'ai passé toute ma vie à croire que tu était soit un héro auquel je devait ressembler ou un monstre que je devait combattre... mais tu est juste mon père, un raté complètement naïf... comme moi.

Elle poussa un profond soupir et regarda l'arme à feu qu'elle avait toujours dans les mains et la le jeta à ses pieds en disant:

-Est-ce que tu crois toujours que les déviants doivent être éliminer ? Alors vas y meurs pour tes convictions... ou commence une nouvelle vie, peu importe ce que tu fera ensuite n'essaie pas de me retrouver.

Elle se tourna à nouveau et commença à traverser la porte.

-Je t'aime, Lily.

L'adolescente sentit un pincement au cœur et poussa un profond soupir mais ne répondit pas alors qu'elle sortait de la maison et disparaissait dans la nuit.

L'homme frappa un mur de colère et de frustration envers lui-même, comment avait-il put rater à ce point ?

Il ramassa l'arme au sol et la regarda avec attention, hésitant.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top