Que n'ai-je perdu de temps !
Aux envols des secondes
Succède le présent,
Retenu à sa ronde.
C'était il y a longtemps.
C'était encore hier.
Soufflait encore le vent,
Au bord de la rivière.

L'un à sa rêverie,
L'autre à son ouvrage,
Chacun mena sa vie,
Chacun vers son voyage.
Oh, rendez-vous manqués,
Tristes, c'est bien dommage,
Les années ont passé
Éloignant nos rivages.

Je m'en souviens toujours,
Horloge astronomique,
Elles faisaient leurs tours,
Leurs tic-tac mécaniques.
Pour moi, c'était un jouet,
Pour toi ; du travail, le fruit ;
Tournant comme un rouet,
Voitures en circuit.

Chacun a son moteur,
Pour tous, différent,
Certains égrènent l'heure,
Métronomes du temps.
D'autres ont leurs lenteurs,
Soudain s'accélérant
Fumant à leur vapeur,
Tournant à contretemps.

La rencontre parfois
Peine à trouver son heure,
Ce n'est pas faute à soi,
Ni à l'autre d'ailleurs.
J'en ai souvent souffert,
Ne sachant comment dire,
Que mon cœur est ouvert
Même au temps des soupirs.

Vienne le temps prochain
Où nous saurons parler,
Trouvant notre chemin
Enfin à sa croisée,
Pourvu qu'avant le soir
Ou bien la nuit tombée,
Parrain de mon histoire,
Nous nous soyons trouvés.

Aux temps de ma misère,
Autant de temps perdus,
Et de regrets amers
D'aveux jamais venus,
De ces entants lointains
Dont j'étais le filleul
L'instant est bien ancien.
Reviendra-t-il, où seuls
nous nous verrons enfin
Passant sous les tilleuls,
Montant dans même train,
Avant notre linceul ?

* À mon frère et parrain Luc, artisan mécanicien