Lettre 4
Ma chère Lucile,
J'espère qu'ils te traitent bien là-bas et que tu reçois les lettres, même si je n'en ai aucune confirmation.
Avec Marie c'est de pire en pire. On s'évite et on s'ignore mais c'est dur... Séparées, on est rien. Des fois je reste avec Louise et Julie mais souvent je reste toute seule dans mon coin. J'en ai mare mais quand je l'ai dis à maman, elle m'a répondu que je m'y ferai. Moi, je pense que non. Tu ferais quoi à ma place ?
J'espère que le poème t'a plus. Tout ce qui est dit dedans est vrai.
À l'école, après le poème, la maîtresse avait espéré "que je me reprenne en main" comme elle a dit. Mais elle a vite été surprise. Les maths c'est toujours pas ça... L'histoire et la géographie non plus et je ne te parle même pas de l'orthographe.
Tu sais, je suis fatiguée de toujours devoir faire comme si tu n'existais pas. J'ai pas le droit de parler de toi, pas le droit d'y faire allusion... Alors quand je suis toute seule, je fais comme si je te parlais. J'invente des conversations. Tu me manques.
Comme tu ne réponds pas à mes lettres, je vais arrêter de t'écrire. Après tout, peut être que je te dérange... Et puis maman commence à se demander où est passé son stock de timbres. Je voulais juste te dire que je ne sais même pas pourquoi tu es partis. Tout ce dont je me souviens, c'est des policiers qui sont venus te chercher, avec les menottes et tout... Et puis je me souviens du monsieur qui a dit à maman que sa fille était en "garde à vue" ainsi que les cris de maman quand le marteau du juge s'est abattu sur le bureau en bois du tribunal, prononçant la santence finale. Les quelques mots sortient de sa bouches ont suffi à foutre ma vie en l'air en moins d'une minute.
Je ne sais pas ce que tu as fait pour mériter ça. Maman n'a jamais voulue m'en parler. Cette lettre sera la dernière que je t'écrirais si tu ne me réponds pas. Je t'aime et tu me manques énormément.
Ta petite sœur,
Victoria.
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