Tombe la pluie dans les torrents
Déverse tes larmes dans les océans
Peu importe le temps
Jamais un coeur n'attend

Cerise Allegria s'époumonait à chanter dans le poste.Près de ce dernier,debout devant un mannequin,un jeune fille chantait en travaillant.Elle inspectait le tissu qui recouvrait le mannequin,épinglant certains côtés,coupant quelques fils,se plaignant du tissu.Ses cheveux bruns relevés en chignon emmêlés prouvait qu'ils la gênaient pour travailler.Elle mit une dernière épingle dans le tissu avant de se relever en souriant.Elle inspecta la tenue qu'elle venait d'achever.L'habit lui plaisait.De sa main droite,elle appuya sur le poste,coupant court à la nouvelle chanson qu'entamait Cerise Allegria.Elle soupira tout en souriant.Son travail était enfin fini.Ça faisait deux mois qu'elle travaillait sur ce modèle que lui avait commandé sa patronne et le voir achevé la remplissait d'une joie sans pareille.Elle inspira profondément comme si elle avait été sous l'eau.Puis,son sourire au visage,elle attrapa sa veste et sortit.Le soleil timide du printemps lui caressa le visage.Gaëlle sourit davantage.Elle sortit de sa poche son portable tout en marchant vers le centre commercial.Il lui fallait du tissu pour créer un nouveau modèle.En ouvrant l'objet,elle se rendit compte qu'un mail lui était parvenu.Ne connaissant pas l'adresse,elle ouvrit tout de même le courrier pour lire ces mots.

Gaëlle,
Je te propose qu'on se rejoigne près du pont Sud au-dessus du Loir lundi à 3h.J'ai des choses à te dire.
Bien à toi,
Célindra

"Encore une personne à qui j'ai donné mon adresse sans le savoir",pensa la jeune femme.Regardant le cadrant de l'horloge,elle remarqua qu'il n'était que deux heures.Sans doute arrivera-t-elle en avance.Elle referma son portable tout en se dirigeant vers le dit pont.Bien qu'elle fouillait dans les tréfonds de sa mémoire,le nom de Célindra lui restait inconnu.Un peu curieuse de savoir qui était cette jeune personne,Gaëlle continua sa marche.Elle arriva enfin sur le pont.S'accoudant à la barrière,elle se mit à contempler le Loir.L'étendue bleue reste tranquillement dans son lit.Scintillant quelques peu au soleil,elle permettait à la jeune femme de voir les poissons nageant dans l'eau claire.L'eau polie les rochers qui la bordaient,claquant doucement contre les roches.Tandis qu'elle regardait tranquillement ce spectacle,une envie irrésistible saisit Gaëlle.Elle souhaitait voir l'eau de plus près,connaître la source du bruit qui clapotait dans l'eau.En se penchant encore un peu,la jeune femme commit une erreur.Suspendue au-dessus de la barrière,une seule secousse lui permettrait de rejoindre le liquide.Elle vit tout de même l'origine du bruit,un poisson qui sautait dans le Loir.Un seul coup de vent souffla alors.Léger mais assez puissant pour faire basculer la jeune femme.Sans comprendre ce qui lui arrivait,la jeune couturière tomba.Le vent releva tous ses vêtements,mais malgré ce parachute improvisé,la jeune femme sentit un froid lui percer les os.Un instant,une grande sérénité s'empara d'elle.Un calme immense.Dans l'eau,elle voyait mieux les poissons qui la fuyait,la mousse qui s'accrochait aux roches.La beauté du lieu était incomparable.Des sortes de bleus magnifiques et des animaux aquatiques qui brillaient sous les rayons du soleil.Les mêmes rayons de cet astre qui faisaient luire le liquide de sorte à lui donner des teintes splendides.Gaëlle sentit une paix incommensurable la saisir.Elle ne voulait plus quitter ce lieu merveilleux.Elle voyait réellement que la nature regorgeait de bienfaits et elle ne voulait pour rien au monde s'arracher à cette contemplation.Mais la jeune femme avait omis deux détails.L'être humain devait respirer et elle ne savait pas nager.La sérénité la quitta pour laisser place à la panique.L'eau devint de plus en plus noire et froide.Ses habits pesaient comme un poids mort et ses poumons réclamaient de l'oxygène.Elle se débattait de toutes ses forces contre cette malédiction invisible.Mais autour de ses membres,seules des bulles ressortaient de ses efforts.Elle stoppa net tous mouvements inutiles,perdue.Non,non et non!Elle ne pouvait pas mourir.Surtout comme ça.C'était impossible.Elle avait la vie devant elle.Pourtant,on l'emportait au fond du Loir,dans le noir.Tout était froid,distant et non-humain.Inconsciemment,elle ouvrit la bouche et aspira de l'eau.Elle s'étouffa.Mais pour recracher ce qui ne passe pas,il fallait au préalable inspirer,ce qui lui était impossible.N'ayant plus de force,elle sentait simplement le liquide lui percer la peau et se répandre dans son corps tel un poison.Elle tendit une dernière fois la main,faiblement.Un dernier appel au secours,un cri du désespoir.Tout ça à cause d'un mail et d'un poisson saute dans l'eau.La vie était une traîtresse.Le noir vint entamer sa vison et bientôt,son esprit quitta son corps.Elle eu tout de même le temps de formuler une dernière pensée.

"Me réveillerais-je?"