Chapitre 15 - Une histoire de Sauveurs

Hello !

On se retrouve avec le chapitre 15 ! Finalement on avance...doucement mais sûrement 😊

Un chapitre essentiellement centré sur Daryl et qui a été difficile à écrire, je m'en excuse d'avance je n'en suis pas pleinement satisfaite 🙈

J'espère malgré tout qu'il vous plaira !

***

Chapitre 15 – Une histoire de Sauveurs

DARYL

Deux jours. Ça fait deux jours que mes potes m'ont retrouvé. Et qu'ils m'ont ramené à Alexandria. De gré ou de force...j'en sais plus rien. A part ce vide qui pulse dans ma poitrine, j'ressens pas grand chose. Deux jours. Deux jours que j'suis dans ce putain de lit d'infirmerie. Deux jours que j'mate l'extérieur depuis la fenêtre. Deux jours où j'ai l'impression qu'elle va apparaître. Que j'vais me réveiller pour réaliser que ma gonzesse est toujours là. Qu'elle est pas morte. J'me fait l'effet d'être pitoyable. J'me raccroche à ces conneries. Parce que j'encaisse pas.

J'entends la porte qui s'ouvre. Hershel et la binoclarde s'approchent de moi. Ils prennent ma tension. Parlent de mes constantes. De mon état qui s'améliore. Mon cul. Le physique s'améliore p't'être. Pour ce qui est du reste...Le vieux essaye de m'faire avaler de la bouffe.

- Il faut manger Daryl, il me réprimande avec son air paternaliste.

J'réponds rien. J'me contente de me perdre dans ses yeux pâles. Il a vieillit. Vraiment vieillit. Ou alors c'est moi qui part en couille pour de bon ? Mais depuis que j'suis rentré, depuis que Lola est plus là...j'ai l'impression que les choses changent autour de moi. Un peu comme si les couleurs s'estompaient pour faire place à un monde en noir et blanc. Dénué de sens. De vie. D'elle. Putain d'merde voilà que j'me transforme en foutu poète. Barry déteint sur moi. L'colosse est venu m'voir hier. Il m'a apporté des pancakes à la myrtille...Et j'ai fondu en larmes. Comme un môme.

- Daryl, reprend la blonde d'une voix apaisante, je vais vous faire une injection. Ça devrait vous aider à dormir encore aujourd'hui...

- Mais ? je l'interromps.

- Mais...ça ne peut pas être une solution à long terme, elle répond à voix basse.

Le vieux s'éclipse avec son assiette. Pourquoi il me laisse seul avec elle ? J'la connais pas. J'ai pas envie de rester seul avec elle. Tout c'que j'veux...c'est rester seul avec moi-même. Parce que c'est à ça que va ressembler ma vie maintenant. Plus d'attachement. Plus d'amitié. Plus d'foutu sentiment. C'est terminé tout ça.

- Au fait, je m'appelle Denise. Au cas où ça vous intéresserait.

Rien à foutre. Elle peut bien être n'importe qui, je m'en cogne. Je l'observe pendant qu'elle remplit une seringue. Son regard est bienveillant. Presque tendre. J'y lis pas forcément de pitié. Mais j'sais bien ce qu'elle veut. Ce qu'ils veulent tous. Que j'tourne la page. Que j'avance. Que j'reprenne ma vie en main.

- J'ai perdu mon frère il y a quelques temps, elle déclare.

Ah d'accord. J'me suis planté sur toute la ligne. Elle veut juste faire ami ami. Nous trouver des points communs. Et qu'on épanche notre douleur ensemble ? Connasse. J'en ai rien à branler de ces histoires. J'ai pas envie de ça. J'veux juste qu'on m'foute la paix.

- C'était mon frère jumeau, elle ajoute en désinfectant le pli de mon bras.

- Et alors ? j'marmonne. Ça fera pas d'nous des potes Blanche-Neige.

- Je ne suis pas stupide Daryl. Tout ce que je veux dire, c'est que...je sais ce que vous êtes en train de traverser.

- Nan, t'en sais rien, je grogne. Fais-moi cette putain d'injection et barre-toi.

***

Une semaine. Les jours traînent en longueur. L'hiver est finalement arrivé. L'hiver. Casse-Noisette adorait cette saison. J'revois son air de chien battu le jour où elle avait voulu faire un bonhomme de neige et que celui-ci avait fondu en deux heures. Elle avait quoi seize ans ? Dix sept ? « La vie est tellement nulle ! ». Elle avait pleurniché pendant des plombes sur le sort tragique de Monsieur Bibendum comme elle l'avait surnommé. Bordel de merde. J'peux pas m'empêcher de sourire en la revoyant renifler à grand renfort de larmes. Et brusquement, ma gorge se noue. Parce que...j'en peux plus. J'attrape mon paquet de clopes dans la poche arrière de mon jean et j'mate la maison face à moi. Merde. Qu'est-ce-que j'fous devant la baraque du bellâtre ? J'étais censé retrouvé Rick et les autres à l'église. J'étais censé les aider à finaliser le plan pour dévier la horde. Ouais. J'étais censé...aider. Comme toujours. Sauf que cette fois, j'en ai pas envie. J'ai plus envie d'aider qui que ce soit. Encore moins en sachant que ce trou du cul d'Aiden et le clan Monroe seront là. Vaut mieux pas que j'le croise. Elle est morte à cause de lui. J'rumine. Encore. Et encore. Et enfin, la colère que j'ai attendu depuis que ma gonzesse est morte, s'insinue dans mes veines. Quand je pense que cet enculé se balade tranquillement en ville. Quand j'pense qu'il l'a abandonnée à son sort. Quand j'pense que sans lui elle s'rait encore sûrement en vie...

- Daryl ?

Nick me ramène à la réalité. Il s'tient là, devant moi. Les bras croisés sur une veste en jean déchirée. Ses yeux sont creusés. Le type a maigri.

- Une bière ? il propose.

J'acquiesce. Sans trop savoir pourquoi. Et j'le suis dans le studio de danse. Ça sent le parquet. La magnésie. Et j'perçois un reste de fraise de bois. Cette odeur qu'elle trimballait partout avec elle. J'repère son gilet noir. Abandonné sur la barre. Orphelin de sa propriétaire. Comme moi. Et j'pose les yeux sur une paire de pointes accrochées au mur, juste au dessus du piano. J'me laisse tomber sur le sol. J'retiens mes larmes. J'ai pas envie de pleurer maintenant. Pas encore. Et encore moins devant ce mec que j'connais à peine. Il décapsule deux bouteilles en verre et m'en tend une avant de s'affaler à son tour. Il me parle pas. Il se contente de mater le plafond en tirant sur les fils de son jean. J'avais oublié qu'ils avaient les mêmes manies tous les deux.

- Elle t'aimait beaucoup, j'finis par dire sans trop savoir pourquoi.

Ouais. J'comprends pas pourquoi j'lui dit ça. Il a l'air aussi décontenancé que moi. Aussi paumé. Bizarrement, je l'aime bien. Il va pas chercher à m'réconforter. Il va pas m'forcer à parler. Ça a pas l'air d'être son genre. Il se frotte les yeux. L'air complètement hagard.

- Elle...me faisait beaucoup penser à...ma fille, il finit par répondre.

- Ta fille ? j'répète.

Merde. Le bellâtre avait une môme ? Merde. Merde.

- C'était avant tout ça, avant ma rencontre avec Aaron. Je vivais à Washington...avec Lana.

Ses yeux se remplissent de larmes quand il prononce son prénom. Les miens aussi. Parce que c'est comme ça qu'il appelait Lola. Et parce que pour la première fois depuis qu'elle est morte...j'ai l'impression d'être face à quelqu'un qui comprend. Qui comprend vraiment ce que ça fait de perdre une partie de soi. Je l'observe pendant qu'il croise les jambes. J'vois qu'il fait ce qu'il peut pour garder un minimum de contenance. Mais j'suis pas dupe. Ce type est sur le point de s'effondrer.

D'habitude, je m'en tape dans les grandes largeurs des histoires des autres. Mais avec lui c'est différent.

- L'année de mes vingt deux ans, ma sœur est tombée gravement malade, il reprend. Son mec s'était barré à la naissance de Lana cinq ans avant. Alors, quand Kim est entrée en phase terminale, je l'ai adoptée.

Je déglutis. Ce type est un putain de héro. J'sais pas pourquoi son histoire me touche autant. Mais j'crois que Lola aurait aimé savoir...Le fait qu'il me parle. Et que je l'écoute. Quelque part, ça m'soulage un peu de toute cette merde. Ouais. Ça m'fait du bien. Bordel de merde. A vingt deux ans je passais mon temps à m'défoncer et à picoler. Et lui se retrouvait seul à élever une gosse de cinq ans après la mort de sa mère. Respect.

- Bref, je te passe les détails de sa crise d'ado et de ses premiers mecs, il s'esclaffe, nostalgique. Quand l'épidémie a débarqué, on a dû fuir Washington et on a erré. Pendant pas mal de temps avant de tomber sur un groupe. Ils se font appeler les Sauveurs.

- Les Sauveurs ? je répète, intrigué.

- Au début, ça se passait plutôt pas mal. On était logé, nourris, Negan et...

Quoi ?! Putain de bordel de merde c'est quoi ce délire ?!

- Attends, t'as dit Negan ?

Il s'interrompt un instant et boit une gorgée de bière avant de reprendre.

- L'autre soir...quand vous êtes rentrés de votre périple, Lola m'a dit que vous étiez tombés sur des hommes à lui.

- Ouais, un moustachu et un black qui terrorisaient un gosse.

- C'était sûrement Simon et Derek. Deux ordures, il ajoute en fronçant les sourcils.

- Ouais, ça avait pas l'air d'être des enfants de cœur.

Il soupire et pose sa bière sur le parquet. Il hésite à poursuivre. J'le vois bien. Mais quelque chose me dit, qu'il est allé trop loin dans son récit pour faire marche arrière. Et il faut que j'en sache plus sur ce Negan. J'revois l'air terrorisé du gosse dans les bois à l'évocation de ce nom. Nick se frotte l'arrière du crâne.

- Negan et ses hommes assuraient notre protection...une aubaine par rapport à tout ce qu'on avait connu depuis que le monde était parti en vrille.

Il replonge dans le silence. Les yeux braqués sur son jean troué. Putain de merde. J'ai l'impression que ce type a vécu l'enfer. Je m'impatiente. Mais j'veux pas l'brusquer. Il est abîmé. J'y avais jamais vraiment prêté attention avant. Mais aujourd'hui, j'me rends compte qu'on n'est pas si différents tous les deux. Nouveau soupir. Il me fixe sans réellement voir, et poursuit :

- Il y a un peu moins d'un an, Lana a eu vingt ans. Et ce cinglé s'est mis en tête de faire d'elle l'une de ses femmes.

- C'est quoi ce délire ?

- Ouais, il a...un harem. Certaines sont volontaires...

- Comment on peut être volontaire pour ça ?! je l'interromps, écœuré.

- Il peut se montrer très persuasif, il réplique sombrement.

- Il a surtout l'air d'être un connard misogyne.

Putain de merde. J'sais pas pourquoi, mais j'sens que c'est pas le pire dans toute cette histoire. Va vraiment falloir que Rick prenne les choses au sérieux. J'ai un putain de mauvais pressentiment.

- C'est plus compliqué que ça, il réplique, beaucoup plus compliqué.

- Comment tu t'es retrouvé ici ? A Alexandria ?

Un soupir s'échappe de ses lèvres tandis qu'il secoue la tête comme pour chasser un souvenir particulièrement douloureux. Je l'observe se battre en silence avec ses pensées.

- On a réussi à se barrer et...ces enfoirés nous ont pris en chasse. Negan était complètement obnubilé par Lana. Sans exagérer, je pense qu'elle l'obsédait. Il la voulait. Plus que n'importe quoi.

J'ferme ma gueule. J'suis même incapable de prononcer le moindre mot. Negan. Ce type me fait froid dans le dos. Littéralement. Et pourtant, j'suis pas une mauviette. La merde j'la connais. Elle a définit ma vie toute entière. Mais là...là c'est autre chose. Le monde a changé. Et tous les cinglés de la terre sont libres d'assouvir leurs fantasmes les plus tordus.

- Le plus ironique dans tout ça, c'est qu'on a fui en oubliant comment c'était à l'extérieur. On était tellement focalisé sur les Sauveurs qu'on en a oublié le plus élémentaire.

- Les rôdeurs, j'marmonne.

- Les rôdeurs, il acquiesce. Lana s'est fait mordre après deux jours passés à fuir.

J'dis rien. Qu'est-ce-que j'pourrais dire de toute façon ? Que j'le comprends ? Ce serait déplacé. Il a son histoire. J'ai la mienne. Mais quelque part, notre souffrance est la même. Parce qu'à cause d'un connard, on a perdu une partie de nous.

- Elle est morte. Elle est morte par ma faute. Parce que j'ai été incapable de la protéger.

- C'est des conneries ! Elles sont pas mortes à cause de nous, j'explose. Elles sont mortes à cause de deux putains de dégénérés.

Il répond rien. Il culpabilise. Comme moi. Ouais. On est pareil lui et moi. Les minutes défilent, lentement. J'torche ma bière. Lui aussi. On se tait. Et pourtant, on est sur la même longueur d'ondes. On communique. Sans même s'en rendre compte.

- C'est Aaron qui t'a trouvé ? j'finis par demander.

- Il m'a sauvé, il répond sans en dire plus.

La porte s'ouvre sur Rick. Le shérif reste immobile un instant. Il nous détaille en silence, les mains sur les hanches.

- On aurait besoin de toi, il déclare après une seconde. Tu peux venir au portail ?

- Il s'passe quoi ? j'grogne.

- On va commencer à faire la déviation pour la horde.

- J'arrive, j'réponds, pas franchement emballé.

- Je viens aussi, réplique Nick.

L'shérif acquiesce et sort de la pièce. J'me tourne vers le musicien pendant qu'il s'étire.

- Il faut que tu lui parles de Negan, j'marmonne.

- Pourquoi ? il demande dans un bâillement.

- Si ce type doit nous tomber sur la gueule, t'es le seul à avoir suffisamment d'info à son sujet.

- Ok. Je le ferai. Et Daryl ? il m'interpelle avant que je sorte.

- Merci.

- Pas d'quoi.

***

LOLA

- Elle est là depuis combien de temps ? entendis-je depuis un demi sommeil comateux.

- Trois semaines, répliqua une voix masculine.

Hein ?! Trois semaines ? TROIS SEMAINES ?! Je végétais depuis trois semaines ?! Merde c'était plus une sieste ça ! C'était un foutu coma !

- Gregory est au courant ?

- Je ne lui ai encore rien dit.

- Tu sais ce qu'il va dire quand il verra que tu l'as ramené ici ? reprit la femme à voix basse. Ta bonté finira par te tuer, ajouta-t-elle avec un soupir teinté de reproches.

L'homme se tut un instant tandis que je tentais désespérément d'ouvrir les yeux. C'était sans compter sur la désagréable sensation que ceux-ci avaient été collé à la glue.

- Elle était mal en point Bertie, je me voyais mal la laisser en plan, se justifia celui que je reconnus comme étant le type du centre commercial.

Celui que j'avais pris pour Daryl durant ma phase de délire. Bordel de merde. Daryl ! Je me redressai brusquement, ouvrant les paupières au prix d'un effort incommensurable avant de me retrouver à moitié aveugle tant la luminosité de la pièce me semblait vive après ces trois semaines passées à jouer les Belles au bois dormant.

- Je suis où ? m'écriai-je au bord de la panique en constatant que mon bras droit était relié à un goutte à goutte et que ma poitrine uniquement vêtue de mon soutien gorge en dentelle noire, se retrouvait pour je ne sais quelle raison, recouverte d'électrodes.

Jetant des regards affolés dans toutes les directions, je suffoquais, paniquée par le bip strident d'un moniteur qui ne cessait de s'intensifier. L'homme aux cheveux longs se rapprocha du lit dans lequel j'avais passé plus de temps que nécessaire, pendant que mes mains fébriles s'affairaient à retirer tous les corps étrangers dont je m'étais retrouvée affublé.

- Je vais chercher le Docteur Carson, annonça l'afro américaine que j'identifiai comme étant la dénommée Bertie.

- On est où ? Putain de merde mais on est où ? Et vous êtes qui ? Et où est Daryl ?! Bordel de bordel de chiottes de merde il doit être mort d'inquiétude, débitai-je en tentant de me mettre debout avant d'être sauvée de justesse d'une chute mémorable par mon sauveur à la chevelure soyeuse.

Je clignais des yeux plusieurs fois inconsciente de mon corps ankylosé qui pesait de tout mon poids contre lui.

- Du calme, dit-il d'une voix posée tout en m'aidant à me rasseoir.

- Sans vouloir vous vexer, je ne vous connais pas, je ne sais pas où je suis, j'ai faim, j'ai soif, j'ai une migraine carabinée, je suis à moitié à poil pour une raison que j'ignore et...c'est quoi votre marque de shampoing ? demandai-je avant d'éclater d'un rire nerveux.

Merde. Ce type devait me prendre pour une cinglée hystérique ravagée du bulbe, doublée d'une exhibitionniste à juger par mes sous vêtements somme toute assez suggestifs. Ne semblant pas du tout atteint ni même un tantinet troublé par la vue plongeante que lui offrait mon décolleté pourtant tout à fait honorable, Raiponce, en référence à sa chevelure d'une beauté saisissante, m'aida à me rasseoir avant de me servir un verre d'eau. Pendant que je réhydratais ma carcasse desséchée, il tira un tabouret pour s'installer face à moi, un regard malicieux chargé de bonté braqué sur mon visage planqué derrière mon godet salvateur.

- Tu te sens mieux ? s'enquit-il en récupérant le contenant avant de me resservir.

- C'est toi, déclarai-je alors d'un ton grave, le type du centre commercial.

Il sourit. Un sourire agréable, rassurant et une nouvelle fois empreint d'une bonté qui se faisait de plus en plus rare en ces temps d'apocalypse.

- On a pas été correctement présenté, je m'appelle Paul, mais mes amis m'appellent Jesus.

- Ah...et euh...on est amis ? Nan parce que bon...on se connaît pas. Mais je t'aime bien Raiponce...euh...Paul...euh Jesus...enfin bref...désolée j'ai pas les idées très claires, me lamentai-je en remontant le drap sur ma poitrine. T'aurais pas vu mes fringues ? Je dois absolument retrouver Daryl.

- Jesus, ça ira, s'esclaffa-t-il, dévoilant une dentition parfaite et un rire mélodieux.

Bordel de merde ! Y avait-il seulement un truc qui déconnait chez ce type beau comme un dieu ?!

- Moi c'est Lola.

- Je vais t'apporter des vêtements propres Lola. Je suis au regret de t'annoncer que les tiens étaient dans un triste état quand je t'ai trouvé.

Je me rappelais vaguement avoir dû déchirer mon débardeur histoire de bander ma cuisse qui, à mon grand soulagement, ne me faisait presque plus souffrir.

- Pour ce qui est de ton ami...

- Daryl, grimaçai-je, affolée par l'état dans lequel devait se trouver mon archer.

- Il faudrait que je sache d'où tu viens pour pouvoir te raccompagner.

Méfiante, je l'observai du coin de l'œil, essayant de distinguer le moindre signe d'entourloupe chez mon sauveur...en vain. Je me mordillai la lèvre inférieure, indécise quant à ce qu'il convenait de faire. Retrouver Daryl était primordial. Persuadé que j'avais rendu l'âme, une évidence s'il avait retrouvé ma Doc Marten orpheline de sa jumelle, ce dernier devait être dans une colère noire teintée d'une tristesse abyssale. Ma gorge se serra à cette pensée tandis que des larmes remontaient dangereusement mon canal lacrymal qu'elles connaissaient si bien. Je soupirai, tentant d'épargner à mon sauveur le mode arrosage automatique qui au fil des mois, était devenu ma marque de fabrique. Dire que la première impression était souvent la bonne ! Quelle image avais-je dû lui renvoyer ?! L'observant intensément, je me posai mille et une questions, m'imaginant un instant dans la peau de Rick. On m'avait souvent reproché d'accorder ma confiance trop facilement...mais aujourd'hui ? Avais-je réellement le choix ? Je n'avais aucune idée de l'endroit où je me trouvais, mes amis devaient penser que j'étais morte, et quant à mon interlocuteur, il transpirait tellement la bonté et la bienveillance que la possibilité qu'il puisse être un putain de psychopathe me sembla absurde tant elle était ridicule. Après avoir pesé le pour et le contre encore une demie seconde, je me mis dans la peau du shérif, réprimant un fou rire au passage et me lançai :

- Combien t'as tué de rôdeurs ?

***

Quelques minutes plus tard, après avoir discuté avec le Docteur Carson au sujet de ma blessure par balle, je retrouvai le dénommé Jesus à l'extérieur. La luminosité de cette fin de journée m'éblouit tendrement, tandis que resserrant les bras autour de ma poitrine je réprimai un frisson. Merde. L'hiver était vraiment là. Je songeai un instant à cette saison que j'aimais tant. A tous les Monsieurs Bibendum auxquels j'avais donné vie avant de les voir mourir à petit feu, la gorge nouée d'assister à leur destin hydraulique. Un sourire se dessina sur mes lèvres en repensant à celui que Daryl et moi avions fait l'année de mes seize ans. Dire qu'il s'était foutu de ma gueule lorsque je m'étais mise à pleurnicher quand il avait commencé à fondre était un euphémisme !

- Les vêtements te vont ? s'enquit mon sauveur, m'arrachant de ma rêverie enneigée par la même occasion.

- C'est parfait, souris-je en m'asseyant à ses côtés, sur les petites marches du préfabriqué dans lequel l'infirmerie avait élue domicile. Alors, voilà La Colline, soupirai-je en détaillant les lieux.

Outre la bâtisse coloniale d'une taille imposante, l'endroit était plutôt rudimentaire avec ses murs en bois, sa forge et ses baraquements. J'avais un peu l'impression d'avoir atterri dans une autre dimension...ou d'avoir voyagé dans le temps. Il ne manquait plus que Charles Ingalls et son violon pour rajouter la touche bucolique à ce paysage d'un autre temps. Mais bizarrement cette nouvelle communauté n'était pas désagréable. A condition bien entendu de faire abstraction du vieil homme vêtu d'un costume un brin ringard qui avançait dans notre direction, un air mauvais collé sur ses traits hautains.

- Jesus ! lança-t-il avec un engouement un peu trop exagéré pour être naturel. Qui est-ce ? ajouta-t-il en me désignant du menton.

- Gregory, voici Lola, répliqua mon compagnon avec un sourire.

-Salut, déclarai-je quelque peu intimidée.

L'homme me foudroya du regard sans se départir de son air suffisant. Merde. C'était quoi son problème à lui ? Aux dernières nouvelles je ne lui avais pas bouffé son goûter...alors quoi ?

- Enchanté très chère Eleanor, vous venez d'où ?

Je me retournai, cherchant des yeux une autre femme aux alentours avant de réaliser qu'il s'adressait à moi. Nick m'avait souvent appelé Lana. Je ne m'en étais jamais réellement formalisée. Mais dans la bouche de ce type, c'était autre chose. J'y voyais un manque flagrant de respect. Voire même, de provocation. Assurément, il l'avait fait exprès.

- Lola, le corrigeai-je, les sourcils froncés. En quoi ça vous intéresse ? Je ne compte pas rester, précisai-je en haussant les épaules.

- Et vous partez quand ?

- Dès que le Docteur Carson aura donné son feu vert, intervint Jesus.

- Bien, bien. Parfait. Le plus tôt sera le mieux. Chacun chez soi, il n'y a pas meilleure devise, reprit le dénommé Gregory avant de tourner les talons.

Abasourdie, je le regardai s'éloigner avec une grimace.

- Fais pas attention à lui.

- Ouais. Je vais essayer. Alors, quand est-ce-que tu pars pour Alexandria ?

- Ce soir, répliqua-t-il.

- Je tuerais pour venir avec toi, soupirai-je.

- Qu'a dit Carson ?

- Que je dois éviter les longs trajets à pieds tant que la blessure ne sera pas totalement cicatrisée, me lamentai-je.

Mon interlocuteur ne répondit rien, se contentant de garder ses yeux azurs braqués sur l'horizon. Bordel de merde. Je voulais rentrer chez moi. Et par dessus tout...je voulais retrouver mon chasseur. Je n'avais rien contre cet endroit. Ni contre ses habitants...hormis peut-être le fameux Gregory. Mais ma famille me manquait. Douloureusement. Quant à Daryl...je n'avais même plus de mots pour exprimer le vide qui se creusait dans ma poitrine à mesure que les heures défilaient. J'avais besoin de lui. C'était vital. Et puis...j'avais un sérieux compte à régler avec le fils Monroe.

- Au fait, repris-je, je ne t'ai même pas remercié de m'avoir sauvé la vie.

- D'ailleurs, comment tu t'es retrouvée avec une balle dans la jambe ? s'enquit Jesus.

- Un ex en colère, m'esclaffai-je sombrement.

***

DARYL

Trois putains de semaines. Affalé derrière l'église, j'mate ce foutu monticule de terre. J'arrive pas à l'quitter des yeux. Elle est pas là dessous. J'sais même pas où elle est. Parce qu'on a pas retrouvé son corps. L'odeur du sang, de la barbaque brûlée, des rôdeurs a envahit Alexandria en même temps que cette saloperie de horde. On y a pas coupé. Putain de nuit d'horreur. Les mômes du chirurgien et leur mère sont morts. C'est moche. Mais pour être honnête, je m'en cogne. J'suis vivant...même si je m'en serais bien passé. J'commence sérieusement à penser au sens de la vie. Ça m'avait jamais effleuré avant. J'avançais parce qu'il fallait avancer. Je me battais parce qu'il fallait se battre. Mais aujourd'hui ? Aujourd'hui à part ce foutu pendentif que j'serre dans mon poing à m'en faire saigner la paume, il m'reste que dalle. C'est dégueulasse pour mes potes. J'le sais. Mais qu'est-ce-que j'peux faire ? Continuer de prétendre que ça en vaut la peine ? Pour quelle foutue raison ? J'soupire en attrapant mon paquet de Morley...le dernier de la cartouche qu'elle a dégoté dans cette bicoque quand on s'est retrouvé que tous les deux. Il en reste qu'une. Plus qu'une. La dernière. La toute dernière clope de ma gonzesse. J'ravale une montée de larmes. J'peux plus chialer. J'en peux plus. Mes nerfs m'ont abandonné. J'aperçois Aiden un peu plus loin. Il parade au bras d'une gonzesse, avec sa tronche ravagée par mes coups. Fier. Vivant...et depuis trois semaines, j'ai qu'une envie...lui faire la peau. Ce connard l'a laissé se faire dévorer. Rien que pour ça il mérite tout le mal que j'me suis donné à lui refaire le portrait avant hier soir. Ça me la ramènera pas...j'le sais. Mais pendant quelques secondes, ça m'a soulagé.

- Va falloir que tu calmes le jeu avec le fils Monroe, déclare Rick en s'laissant tomber à côté de moi.

Merde. Il est arrivé quand ? J'pensais qu'il serait encore au chevet du gosse. Bordel. Ce môme ne sera plus jamais l'même. Un des fils du chirurgien lui a tiré dessus dans la panique cette nuit. Une balle dans la tête. Comment on peut survivre à un truc pareil ? Et pourtant, Carl l'a fait. Il a survécu. Parce que c'est un foutu survivant. Comme son père. Comme nous tous. Il a perdu un œil mais...putain de bordel de merde c'est un miracle qu'il soit vivant. Il est pt'être là mon espoir finalement ? S'il s'en sort après ça, est-ce-que je pourrais réellement tout laisser tomber ? J'soupire. A vrai dire, j'en sais rien. J'suis paumé. J'ai mal. Comme jamais j'ai eu mal de toute ma putain de vie. Lola et moi, c'était plus qu'une histoire d'amour de fin du monde. Lola et moi c'était...Lola et moi. Deux putains de phœnix. Deux putains survivants. Mais maintenant qu'elle n'est plus là...y a plus qu'moi. Et j'souris. Pour la première fois depuis trois semaines. Pourquoi ? J'en sais foutrement rien.

- Comment va Carl ? j'marmonne en rangeant ma dernière clope dans l'paquet.

- Denise s'occupe de lui, il soupire. Michonne a pris le relais pour que je puisse venir te parler.

- De quoi ? D'Aiden ? Tu te plantes si tu crois que j'vais laisser cette ordure s'en sortir comme ça.

Mon pote baisse les yeux sur la tombe de Lola. Il l'adorait. J'le sais. Ils discutaient souvent tous les deux. Ouais. Rick et ma gonzesse s'entendaient bien. Y avait beaucoup de respect entre eux quand j'y pense. Et ma gorge se noue en repensant à la façon qu'elle avait de l'appeler Shérif à tout bout de champ.

- Si ça ne tenait qu'à moi, j'aurais bannis ce type il y a une éternité, il réplique finalement. Mais je ne suis pas en charge ici. Deanna est encore aux commandes.

- Plus pour longtemps, je grogne.

- T'es au courant ?

- Les gens parlent ici, alors ouais, j'suis au courant.

La vieille Monroe s'est fait mordre. Finalement, Lola avait raison avec ses histoires de Karma. Tout finit toujours par se payer. Ça m'rappelle cette histoire qu'elle m'avait raconté à propos d'une de ses amies. Le type l'avait largué pour une autre à trois mois de leur mariage. Et pour couronner le tout, il avait mis sa nouvelle gonzesse enceinte alors qu'il était toujours avec l'ancienne. Trou du cul. Des types comme ça méritent pas de vivre. Et j'suis sûre que les rôdeurs ont fait ce qu'ils avaient à faire. En tout cas, je l'espère. Ouais. J'divague. Mais pas tant que ça. Le clan Monroe s'éteint. Reste plus que les rejetons. Et quand maman s'ra plus là, cet enculé d'Aiden va vraiment comprendre le sens du mot douleur.

- J'vais buter ce type, j'reprends en me mettant debout. Et ce sera pas la peine d'essayer de m'ramener à la raison. Elle est morte à cause de lui.

- Ce qui est arrivé à Lola c'est...c'est à peine si je peux imaginer ce que tu es en train d'endurer mon frère, mais...tu la connais. Tu sais qu'elle ne voudrait pas que tu agisses de manière inconsidérée.

- J'en ai plus rien à foutre maintenant de qu'elle voudrait ou pas. Lola est morte. Elle est morte. Et à part une foutue vengeance y a rien qui pourra m'soulager.

- C'était un accident, déclare mon pote à voix basse. Tu le sais aussi bien que moi.

- C'est des conneries. Elle était aussi débrouillarde que n'importe lequel d'entre nous. Si ce n'est plus. Tu vois pas qu'il y a un truc qui tourne pas rond dans ce qu'il a raconté ?

- Je pense que tu n'as plus les idées claires et que tu as besoin de trouver un responsable, il répond en se levant à son tour.

J'le comprends pas. C'est quoi son foutu problème ?! La colère commence à prendre le dessus sur le peu de contrôle que j'avais encore sur moi. J'espérais avoir un minimum de soutien. Mais non. Parce que Rick et sa moralité à la con font toujours ce genre de choses. Mais sa moralité il l'a laissé aux oubliettes le jour où il a massacré ce biker dans les bois. Le jour où le gosse a failli passer à la casserole. Alors qu'il vienne pas me faire un putain de sermon !

- A d'autres, je grince entre mes dents. J'vais le buter, fin de la discussion. Et ne t'avise pas d'essayer de m'en empêcher, j'ajoute d'un ton menaçant. T'es p'têtre mon pote, mais là, faut pas trop m'en demander.

Je m'éloigne. En silence. Conscient qu'un fossé est entrain d'se creuser entre nous. J'ai plus envie de m'contôler. J'ai plus envie de garder mon sang froid. J'ai plus envie de fermer ma gueule. J'suis pas un putain de clébard. La vérité c'est que le shérif fait toujours les choses quand ça l'arrange. Par contre, quand il s'agit des autres, il se ramène avec sa morale à la con à essayer de jouer les petits chef. Sauf que là. Ça marchera pas. Parce qu'on parle de Lola.

***

J'tourne en rond. J'essaye de m'rendre utile. De débarasser les rue des cadavres. Pourquoi ? J'en sais rien. Pour arrêter d'penser ? Connerie ! J'fais ça parce que j'ai rien d'autre à faire. Et que finalement, on m'fout la paix. Ils se sont tous relayés aujourd'hui. Avec leurs yeux larmoyants et leurs sourires compatissants. Ça m'emmerde. Ils ont pitié de moi. Sauf que leur pitié, j'en veux pas. J'sais qu'ils s'inquiètent tous pour moi. Mais cette foutue colère me dévore de l'intérieur. Elle est sombre. Abyssale. Elle est en train de m'engloutir. Ce sera toujours mieux que d'me lamenter. Lola voudrait pas que je réagisse comme ça. Elle voudrait que j'reste humain. En l'état actuel des choses...ce qu'elle pourrait penser j'en ai plus rien à branler. Parce qu'elle m'a abandonné. C'est plus qu'un foutu cadavre aujourd'hui. Et le responsable continue de vivre tranquillement. J'peux pas l'encaisser. J'y arrive pas. Et c'est en train de tuer ce qu'elle avait réussi à faire naître en moi. Tant que cette crevure continuera de fouler les rues d'Alexandria, ma rage se dissipera pas.

- Daryl ?

J'me retourne pour tomber nez à nez avec Nick. C'est le seul dont j'apprécie la compagnie ces derniers jours. Parce qu'on partage quelque chose. Quelque chose de puissant. Et de destructeur.

- Je peux te parler ? il demande à voix basse.

- Qu'est-ce-que tu m' veux ?

- En privé, il ajoute en désignant du menton les habitants d'Alexandria. C'est à propos d'Aiden.

Génial. Il a décidé d'me prendre la tête lui aussi ? C'est quoi ? Un foutu complot ? Bordel de merde mais foutez-moi la paix !

- Si c'est pour me faire la morale sur c'que je dois faire ou pas tu perds ton temps.

- Ça n'a rien à voir, il soupire avec son air blasé.

J'le mate une seconde. J'me suis peut-être énervé un peu vite. Il a pas la tronche de quelqu'un qui va essayer de me ramener sur le droit chemin. Au contraire. Plus je détaille la lueur dans ses yeux, plus j'me rends compte qu'il prépare un truc. Intrigué, j'le suis dans une ruelle, un peu à l'écart. Il s'adosse contre une des plaques de tôle et mate le ciel une seconde. Il se paume dans la contemplation des nuages. Et encore une fois, j'suis saisi par la ressemblance qu'il entretient avec elle.

- La vieille Monroe est morte, il déclare finalement.

Ok. Bon débarras. Cette bonne femme me manquera pas.

- Et devine qui a pris la tangente en apprenant que maman n'était plus de ce monde ?

- Cet enculé d'Aiden, j'marmonne en attrapant mon paquet de clopes.

- Tu sais, j'ai pas mal réfléchi depuis que...depuis que Lola est partie et j'en arrive toujours à la même conclusion.

Là, il commence vraiment à m'intéresser. Je chope ma dernière cigarette. La toute dernière. Et j'la porte à mes lèvres.

- C'est déjà arrivé qu'Aiden revienne de mission avec une histoire à dormir debout au sujet de son héroïsme et d'une mort tragique.

- Attends...t'es en train d'insinuer quoi là ?

- Que je ne serais pas étonné qu'il se soit volontairement débarrassé de Lola pour sauver sa peau. Tu ne trouves pas ça étonnant qu'il se tire d'ici au moment même où sa mère passe l'arme à gauche ?

- Putain d'merde. Si t'as raison...alors on devrait p't'être...

- S'occuper de son cas, rétorque Nick.

Merde. Finalement ce type en a dans le froc.

- Une expédition ça te branche ? il demande pendant que j'allume ma clope.

Un peu que ça m'branche. La fumée qui s'insinue dans mes poumons me réveille enfin les neurones. L'adrénaline se déverse dans mes veines. Et toute ma rage se concentre là, au creux de mes tripes.

- Allons buter cet enculé.

A suivre...

Voilà voilà...bon désolée hein 😶💩 !

A très vite pour la suite ! ❤

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