C'était un soir de Novembre en 1952 au sein de notre douce France. Le vent glacé faisait valser les branches dénudées des platanes çà et là. La pluie commença à tomber, ce qui n'amplifia que plus mon envie de renter chez moi. 

     Le travail était terminé pour ce jour et peut-être même plus. Voilà un petit moment déjà que j'avais été embauchée en tant qu'agent secrète, mais ces derniers temps, plus aucun mystère à résoudre n'a été signalé. Alors j'étais en quelque sorte en 'vacances'. 

Tant mieux !

     Je me réjouissais à l'idée de rejoindre mon petit-ami qui, lui, fut lâché quelques heures plus tôt avant moi. Nous nous étions lancés en même temps dans ce métier un peu fou. Et de notre passion commune était né un amour tendre et pur.

     Bien à l'abris dans mon long manteau brun, je pressai le pas. J'aperçu bien assez tôt le seuil de notre maison. Mais alors que je m'apprêtais à y entrer, une voix attira mon attention. 

Une femme. 

     Ainsi ma curiosité aiguisée, je me revois coller mon oreille contre la porte dans l'espoir de grappiller quelques informations. Aussi silencieuse qu'une chouette, j'espionnais comme une reine car telle était ma profession. 

     Pas un membre de la famille de mon conjoint m'était inconnu, je les connaissais tous par cœur. Ses amis, les amis de ses amis, tout son entourage. Chacune de leur voix était gravée dans ma mémoire et pour le coup, cette voix féminine ne correspondait à aucun de tous ces sons. 

Mais l'autre personne présente dans la salle était bel et bien mon petit-copain.

Alors qui était-elle ?

     Ce n'est que lorsque j'eus entendu ce que je n'aurais jamais dû entendre que mes doutes se confirmèrent.

'Je t'aime mon amour, dorénavant plus rien ne se mettra au travers de notre relation'

     Sur ces mots, mon cœur se déchira petit à petit. Je n'avais que 19 ans, il s'agissait de mon premier amour. J'avais beau être mûre, mature, réfléchie, les sentiments étaient mon seul point faible, mon talon d'Achille. Moi qui étais si impatiente de pouvoir me blottir dans ses bras après une longue journée. Sentir son odeur mêlée à la mienne, la douceur envoûtante de la chaleur du feu de bois. 

     Les larmes commencèrent à se bousculer le long de mes joues rosées par le froid. Il était fidèle, il n'aurait jamais pu me faire ça à moi. Et pourtant les preuves étaient là, mon autoconviction ne me servait plus à rien. 

     La pluie me fouettait de toute part mais je n'avais plus le courage de rentrer à l'intérieur. Voilà ce qui se passait très certainement lorsqu'il rentrait plus tôt que moi. Effondrée contre le bois trempé de la porte, je ne pouvais me sentir plus pitoyable qu'à cet instant.

J'y avais cru dur comme fer.

Cru que quoi ?

Que notre amour était sincère et réciproque.

     Le fait de penser à ça me rendit folle de rage. Une rage qui succéda très vite à ma peine et me donna la force de les confronter. J'entrai avec un grand fracas, mouillée de la tête aux pieds. Il se tournèrent surpris. Ma respiration était saccadée par ces changements d'humeur. 

'Ce n'est pas ce que tu crois !'

     Ah oui ? Me croyait-il si naïve que ça ? Cette scène idiote passait tant de fois à la télévision, je n'aurais jamais pensé que ça m'arriverait un jour. Le regard de la femme jonglait entre lui et moi. Sa réaction fut sans appel ; une gifle partit sur le visage de l'homme puis elle s'enfuit en courant.

'Gérémy'

     Elle ne pris même pas la peine de l'appeler par son prénom. Quant à moi, je m'approchai de son oreille pour lui murmurer avec ma voix la plus calme possible

'Sors de chez moi, toi et moi c'est fini'

     Mes souvenirs s'arrêtent à la tête désespérée qu'il fit lorsque je lui eus annoncé ceci. Et de là, je ne préfère pas me remémorer ce qui a suivi...

A SUIVRE :)