Chapitre 3

« I hope he takes your filthy heart and then he throws you away someday. »

Je ne m'habituerai jamais aux couloirs de ce lycée gigantesque, ni même aux salles dont le papier peint s'arrachait un peu plus chaque jour, encore moins au corps enseignant et surtout pas aux élèves. Je ne les détestais pas, non... Ce n'était seulement pas mon monde. En réalité, je me sentais à ma place nulle part. Le fait de cotoyer d'autres adolescents me rapellait sans cesse comme ma vie était différente à la leur, comme ma vie était anormale. Je subissais à longueur de journée les gémissements de ces filles brunes naturellement belles mais qui se défiguraient avec des tonnes de maquillage ou les cris de joie de ces superbes filles blondes qui sautaient dans les bras de leur copain ou encore plus douloureux, les sourires de ces centaines d'adolescents, qui surmontaient leurs divers problèmes et qui se contentaient de profiter de leur vie quoiqu'il leur arrive. Moi j'en étais incapable, je faisais juste semblant pour ne pas devenir la cible des moqueries, des insultes en tout genre... Question de survie ! Finalement je ne savais pas trop là où je préferais être, là où j'étais réellement en sécurité, là où l'on voulait bien de moi... Le regard des autres me tuaient. On pourrait presque dire que je rolais la phobie sociale, malheureusement ce n'était pas le cas car moi j'avais peur d'être chez moi autant que j'avais peur d'être dehors. Tout comme je voulais avoir une vraie bande d'amis et je voulais être seule en même temps ou encore je voulais que l'on m'aide et je ne voulais rien réveler... J'étais un paradoxe à moi seule.

Une pression autour de ma taille me fit sursauter et je me sentis légèrement soulevée de la table en bois sur laquelle j'étais assise. Mon coeur s'apaisa lorsqu'au toucher délicat de mon interlocuteur, je remarquai que ce n'était que Caleb qui prenait ma place à présent et qui me posait sur l'une de ses jambes. Là encore je n'étais pas sûre de me sentir en sécurité ou non. Il posa sa tête dans le creu de mon épaule et attrapa les boites posées sur la table dans lesquelles il y avait mon déjeuner toujours intact. Il le constata d'ailleurs lorsqu'il les ouvrit et il se râcla la gorge.

- Je pourrais avoir un bisous avant que les mecs n'arrivent ? Fut tout ce qu'il demanda.

Qu'est ce que je croyais ? Pourquoi remarquerait-il, lui, que je ne mangeais presque plus ? Ou même s'il l'avait remarqué pourquoi m'en ferait-il la reproche ? Il s'en fichait, tout ce qu'il voulait lui c'était d'une copine non gênante.

- Joy ? Reprit-il, en balandant ses lèvres dans mon cou. T'es en colère pour hier ?

Je roulai des yeux, le fait de ne pas l'avoir vu la veille était le moindre de mes soucis après ce que j'avais vécu. Ses prunelles noisettes cachés par quelques mèches brunes aux reflets châtains me fixaient avec intensité. Ses sourcils bien taillés se pliaient tandis que sa langue faisait rapidement son passage sur ses lèvres charnues, sous l'impatience. Il finit par esquisser un sourire et je tournai la tête à l'opposé, pour ne pas craquer.

- Quoi ? J'ai fais quelque chose ? S'exaspéra-t-il. Joyce, réponds...

- Non, t'as rien fait.

C'était bien cela le problème justement !

- Alors quoi ? Qu'est-ce que tu me reproches ?

Quand apprendrait-il que le monde ne tournait pas autour de lui ?

- C'est pas toi... J'ai passé une nuit difficile, à cause de mon épaule douloureuse. C'est tout. Inventai-je à moitié.

Je le regardai pour voir sa réaction et son visage parût se détendre, tant que ça ne le concernait pas, après tout... Sans grande tendresse de sa part, il m'embrassa. Ca allait bientôt faire 8 mois que nous étions ensemble et pourtant tout avait déjà changé entre nous. J'étais en train de me lasser, voire me dégouter de Caleb alors que mon amour envers lui restait fidèle. C'était un sentiment plutôt étrange...

Il finit par coller mon dos contre son torse costaud et peu confortable mais j'appréciais cette sensation. De plus c'était la seule chose qu'il arrivait à m'offrir sans trop d'efforts... Dans ces moments là, je retrouvais le Caleb qui avait tout fait pour me séduire, celui attentionné. Dorénavant, il ne montrait et ne disait plus rien pour me montrer qu'il tenait à moi et j'en venais souvent à douter. Ca pouvait sembler très scénarisé mais c'était exactement ce qu'il se passait...

J'avais rencontré Caleb, il y'a un an, lorsque le lycée passait le casting pour les pom-pom girls. Cette année peu de filles étaient venues se proposer alors l'équipe de football accostait différentes filles qui passaient devant le stade. Ce jour là, je n'étais vraiment pas d'humeur, au bord des larmes, et je n'avais pas prêté attention à Caleb qui tentait de m'interpeller depuis un bon moment du terrain de football. Il était alors venu devant moi, tout heureux, et quand il s'était aperçu de ma mine, son sourire avait fâné. Je me souvins encore m'être dit silencieusement que j'adorais ses traits de visage, pourtant si carrés, mais en harmonie. Ses yeux un peu en amande, ainsi que son nez fin et légèrement épaté au niveau des narines. Et sa peau bronzée, grâce au soleil pimpant du Texas, sans imperfections, m'avaient procuré quelques envies inexplicables. A cette période là, Caleb n'était pas du genre à prendre soin de lui... Ses cheveux n'avaient aucune coupe définie, ses lèvres étaient gersées et quelques poils de barbes poussaient ici et là. Néanmoins c'était ce qui m'avait plut. Maintenant ces petites défauts qui le rendaient paradoxalement plus parfait avaient disparues. Adieu les t-shirts trop amples, les pantalons mal taillés, les cheveux en désordre ou la semi-barbe. Là encore je ne parlais que du physique car la personnalité c'était pire. J'étais tout de même toujours amoureuse, peut-être parce qu'il était un des seuls à me le rendre un minumum en retour. Ma vie ne tournait qu'autour de ma mère insupportable et aveugle, de mon grand frère indescriptible, de son ami, Preston, puis de mon copain peu attentioné et enfin de ma meilleure amie Lydie, qui, à mon plus grand regret, habitait assez loin de moi à Houston. Amis ne faisaient pas partie de mon vocabulaire, il y avait seulement des camarades, des connaissances, des gens à qui l'on dit bonjour et à qui on demande si ça va sans même écouter la réponse. En clair, ma vie était pathétique, tellement pathétique qu'on aurait pu en faire un stupide roman dramatique.

- Au fait, je ne pourrais pas te ramener ce soir, je rentre pas directement chez moi. J'ai des heures de colle à faire. M'annonça-t'il en butant sur ses mots.

Encore un mensonge...

- Depuis quand est-ce que tu fais tes heures de colle ? Relevai-je.

Il pencha la tête et se mordit la lèvre inférieure.

- Et bien depuis que mon père a apprit toutes les heures que j'avais à faire et le renvoi du lycée qui plane au dessus de ma tête. Il m'a obligé à sa manière de faire ces foutues colles.

- Tu sais pourtant que je déteste ce bus.

- T'as pas le choix bébé. Avisa-t'il.

Je grimaçai à ce surnom alors qu'il me donnait une légère tape sur la cuisse pour que je me lève. Je le fis sans grand entrain, il s'assit à mes côtés et quelques secondes plus tard toute la table fut envahie de ses amis qui, comme toujours, m'ignorèrent et discutèrent avec Caleb. Ils ne comprenaient certainement pas pourquoi Caleb sortait avec moi, et bien moi non plus. Pourquoi restait-il avec moi s'il ne semblait pas m'aimer autant ?

Au bout d'une quinzaine de minutes, j'en eu marre du bruit et de leur discussion débile, vulgaire et puérile alors je m'ecplisai et me dirigeai vers un endroit calme, où je pourrais peut-être téléphoner à ma meilleure amie. A peine quelques pas faits que Caleb m'appella et vint à ma rencontre, scruté par ses sept amis aux muscles plus gros que l'intelligence.

- J'ai oublié de te demander, j'ai ma maison pour moi seul ce week-end alors ça serait cool si tu venais. Je sais que ta mère est chiante sur ça, alors peut être qu'en demandant maintenant, ça pourrait le faire. Enfin si tu en as envie...

Il rejetta maladroitement une de ses mèches sur le côté de son visage et me sourit. Il savait se montrer convaincant quand il le voulait, je devais l'avouer.

- Je lui demande dès que je peux, mais je te promets rien...

- Ca me va, arrange toi avec ton frère au pire. Insista-t'il.

- Mmh, c'est pas aussi facile après l'accident tu sais qu'elle te porte pas trop dans son coeur et même Nathan n'arrivera pas à la faire changer d'avis. Mais j'essaye ok ?

Il acquiesa et se pencha rapidement vers moi pour déposer un baiser au coin de mes lèvres avant de repartir vers ses amis à grands pas. Ca me faisait déjà pas mal de choses à demander à ma mère, enfin deux mais chaque demande se révélait comme une lourde épreuve. J'étais tiraillée entre l'envie d'être avec Caleb et l'envie de passer le week-end " seule et tranquille " chez moi. Alors peut-être bien que je me contenterais de dire à Caleb que ma mère avait refusé, sans même lui avoir demandé en réalité. Ca avait du bon d'avoir une mère sevère... quelques fois.

***

A la fin de la journée, quand le car me déposa enfin à la station la plus proche de chez moi c'est en trainant des pieds que je me dirigeai vers ma maison. Ma mère était au bureau alors je devais trouver un moyen d'éviter Nathanael qui serait certainement allongé dans le canapé occupé avec ses jeux vidéos. Il ne faisait plus rien de ses journées car il avait été accepté dans aucunes des facs, et s'était fait viré de tous les travails qu'il avait tenté au cours de l'année.

Quand je poussai enfin la porte de la maison, j'entendis les plaintes de Nathanael qui provenait du salon et j'essayai de faire le moins de bruit possible pour pas qu'il me remarque. Il fallait seulement que je passe devant le salon discrètement ce qui se révelait impossible... Je pris alors mon courage à demain et avançai vers les escaliers mais il m'interpella très vite, quand je fus dans son champ de vision.

- Joyce ! S'exclama-t'il d'une voix plutôt joyeuse.

Je tournai la tête vers lui et croisai ses yeux si déroutants. Il continua de me regarder avec un air mi-étonné mi-content et c'était dans ces moments là que je ne pouvais pas lui en vouloir plus longtemps. Il semblait tout avoir oublié mais insconsciemment et je me disais qu'après tout ce n'était pas de sa faute et qu'il subissait autant que moi de sa violence. Le problème venait de ma mère qui ne voulait pas avouer que son fils avait un problème et que quelqu'un devait l'aider.

- T'as passé une bonne journée ?

- Ca peut aller. Et la tienne ?

- Parfaite, je commence à croire que c'est ma maison. Rigola-t'il.

Je ne pus retenir un sourire, dont il sembla fier. Il me tendit un papier sur lequel il semblait y avoir pas mal de gribouillis donc je m'avançai dans le salon et finis par m'asseoir à ses côtés, avant de saisir le bout de papier chiffoné.

- J'ai besoin de l'avis de ma petite soeur. Ajouta-t'il en se penchant vers moi.

Je fermai les yeux et automatiquement, me mis à trembler. J'ouvris les yeux seulement quelques secondes plus tard, assurée qu'il ne voulait pas me faire du mal cette fois-ci. Mon regard se posa sur le dessin miniature que j'avais entre les mains, il représentait un coeur humain vraiment détaillé qui, entouré de multiples flammes, commençait à carboniser.

- Je me suis dis que moi aussi je méritais mon petit tatouage.

- Tu voudrais que je te dise quoi Nathan ? Pestiferai-je. Que je l'aime bien ? Oui le dessin est superbe, mais je comprends pas pourquoi tu te complais dans ce monde où tu détruis tout ce qui t'entoure et où tu te détruis toi même ?

Il m'arracha le papier des mains et le déchira en plusieurs centaines de morceaux, sur les nerfs tandis que moi je restai immobile au coin du canapé. Et alors que je m'attendais à ce qu'il s'en prenne à moi, il s'allongea à nouveau et reprit son jeu de simulation de guerre.

- Tu comprends jamais rien de toute façon... Marmonna-t'il.

- Peut-être parce que c'est bien impossible de te comprendre. Rétorquai-je.

- Ferme là.

Me taire c'est bien la seule chose que je savais bien faire alors comme toujours je lui obéis, et après un moment silencieux, il tourna la tête vers moi. Ses yeux avaient changés de teinte, plus clairs, plus joyeux... Quand je disais que c'était impossible de le comprendre, voilà de quoi je parlais ! Il pouvait changer de comportement ou même d'avis d'une seconde à l'autre, ce n'était pas qu'une simple expression, il le faisait vraiment.

- Qu'est ce que voulait Kenneth hier ? Me quémanda-t'il comme si ça le préoccupait vraiment.

- Seulement de mes nouvelles.

- Ah. Bon tu fais une partie ? Dit-il en me lançant rapidement une manette que j'eu le reflexe d'attraper à temps.

Je le regardai avec de gros yeux, essayant de comprendre pourquoi il se comportait ainsi. Mais il ne fallait pas chercher bien loin, tout ce qu'il voulait c'était se faire pardonner. Et il savait bien qu'il réussissait à chaque fois, que je mettais toujours ma haine de côté pendant un instant pour pouvoir passer un paisible - court - moment avec lui.

- Tu sais que je suis nulle à ça, et puis j'aime pas les jeux vidéos. Déclinai-je.

Il rigola doucement tout en se murmurant quelque chose à lui même. Ses yeux se fermèrent pendant plusieurs secondes et lorsqu'ils se réouvrèrent j'eu l'impression qu'ils avaient encore différents. Même de loin j'arrivai à capter l'intensité de son vert nacré.

- Une partie et je fais tout ce que tu veux. Me lança-t'il comme pari.

- Tout ce que je veux vraiment ?

Je relevai un sourcil, ne souhaitant qu'une seule chose de lui. Et il le comprit car il se pencha vers moi et me pointa du doigt avant de murmurer :

- Fais attention à ce que tu demandes, Joy.

- Ce n'est pas tout ce que je veux alors ! Ralai-je.

- Si... Tout ce que tu veux, si je le veux bien. Affirma-t'il avant de me lancer un clin d'oeil.

Je laissai échapper un soupir.

- Faisons cette partie. Déclarai-je finalement.

Il me sourit, vainqueur, et démarra le jeu auquel il était déjà en train de jouer. Je n'y comprenais rien, alors je me contentais d'appuyer sur toutes les touches... Et finalement je m'en sortais pas mal mais j'étais bien plus préoccupée à chercher ce en quoi Nathanael pourrait m'aider. Tout ce que je voulais c'était qu'il arrête d'être violent avec moi, il le savait aussi.

Puis ça me vint à l'esprit, et je m'étonnai moi même de ne pas y avoir pensé plus tôt. Ca m'arrangeait peut-être bien de passer le week-end avec Caleb, ainsi je ne supporterais ni ma mère ni mon frère.

- J'ai trouvé Nathan ! M'exclamai-je.

Il tourna la tête vers moi sans pour autant abandonner le jeu, arborant une expression perdue.

- Je veux aller chez Caleb ce week-end.

- Elle ne voudra jamais l'autre folle. Secoua-t'il la tête.

- Sauf... si c'est toi qui lui demande.

- Comme si j'allais te laisser aller faire la pute avec ce mec. Je n'aurais vraiment aucune morale si je te poussais même à le faire... Feignit-il.

Je penchai la tête sur le côté, prenant tout de même quelques unes de ses paroles pour vraies. Je savais qu'il me considérait comme une pimbêche, pensant que je couchais avec Caleb et ceux depuis que j'étais avec lui. S'il savait... mais bien sur il ne voulait pas savoir la vérité, il préférait vivre dans son monde et croire ce que lui pensait.

- Je lui en parle ce soir. Conclut-il.

Et sur ces derniers mots, on finit notre partie de jeux vidéos et je partis dans ma chambre. Là où j'aurais dû me sentir à l'aise comme bon nombre d'adolescents mais ce n'était pas le cas. Je ne considérais même pas cette chambre comme la mienne. Tout semblait m'échapper.

***

Nous étions Jeudi dorénavant et je n'avais toujours pas demandé la permission à ma mère pour mes vacances chez mon père. Et il fallait peut-être que je commence à préparer le terrain... Car il m'en faudrait du temps pour la convaincre. Concernant mon week-end chez Caleb, elle n'avait rien dis face à Nathanael puis était venue me faire la moral pendant quelques minutes pour finir par accepter, fortement obligée d'une certaine manière. Ca l'arrangeait que je ne sois pas là non ?

- Ton frère est vraiment pas mal. Me glissa une fille en me donnant un coup de coude.

C'était une grande blonde aux yeux noisettes avec qui je partageais mes cours de littérature et c'était tout ce dont je savais à propos d'elle car même son nom m'était inconnu. Et j'étais incapable de dire si c'était elle qui ne me l'avait jamais dis ou si c'était moi qui avait oublié... Nos conversations n'étaient pas d'une grande qualité.

Elle me sourit et partit de son côté. Je posai mes yeux sur mon frère, un peu plus loin, près de sa voiture. Il était occupé à regarder les étudiants passer, enfin les étudiantes devrais-je dire. J'avançai vers lui tout en me demandant les raisons pour lesquelles il pouvait bien être là. Je n'avais rien fait " de mal " depuis Dimanche et aujourd'hui était un jour comme un autre. Donc j'arrivai à ses côtés sans avoir trouvé aucune excuse valable.

- T'en as mis du temps, soeurette. Maugréa-t'il en regardant sa montre.

- Je ne savais pas que tu venais...

- Dois-je comprendre que tu ne m'écoutes pas quand je parle ?

Nous nous regardâmes en même temps et alors que j'attendais qu'il continue de parler, il se contenta de me regarder de haut en bas avec une lenteur agacante. Puis il secoua la tête, comme pour chasser les mauvaises idées qu'il avait en tête, et plongea ses prunelles dans les miennes.

- Je t'ai dis, Lundi, que je viendrais te chercher aujourd'hui pour que tu viennes au studio avec moi. M'expliqua-t'il d'un air faché.

- J'ai juste oublié... On y va ?

Il fit un léger mouvement de tête en guise d'approbation avant de s'installer au volant de sa voiture, un pick up noir dans lequel j'avais toujours du mal à monter. Oui, il semblerait que je ne sache rien faire ! Une fois qu'il eut finis d'envoyer un message, nous partîmes en direction de son studio de danse qui se trouvait en plein milieu d'Angleton.

Pendant que nous étions en train de rouler, je posai mes yeux sur mon reflet dans le rétroviseur pour le regretter aussitôt... Toutes les marques de fatigue - ou tristesse - possible barraient mon visage. Ma peau pâle faisait ressortir mes cernes bleues, violettes et quelques marques qu'il me restait des agressions de Nathanael. Ce matin avait fait partie de ces matins où j'avais la flemme ou non le temps de prendre un minimum soin de mon apparence. J'avais fais un chignon rapide à mes cheveux noir, bien trop nombreux pour que j'arrive à les rassembler et je m'étais glissé dans des habits légèrement trop grands. Ils m'allaient sûrement il y a un mois ou plus, mais je perdais du poids à une vitesse folle et impossible d'aller m'en acheter d'autres. Ma mère disait que je ne méritais pas qu'elle me fasse plaisir en me permettant d'aller faire les boutiques... Alors je me contentais de ce que j'avais. Et puis j'avais d'autres choses plus importantes à me préoccuper.

La voiture s'arrêta après un quart d'heure de trajet, me sortant ainsi de mes plaintes silencieuses. Il me laissa à peine le temps de sortir de la voiture qu'il se précipita à la salle de danse. Je le rejoignis non sans traîner des pieds et non sans prier pour qu'il ne me demande pas encore une fois de danser avec lui. Je me sentais ridicule quand je " dansais " à ses côtés, comme lorsqu'il s'en prenait à moi par la violence. Je prenais ça comme une autre manière de me montrer que j'étais inférieure... Mais j'éspèrais tout de même que là n'était pas son intention et qu'il faisait uniquement cela pour passer du temps avec moi. Avant de poser un pieds dans la salle, j'entendis déjà sa musique résonner. J'entrai et le vis en train d'effectuer un salto arrière avant de continuer sa chorégraphie. Il était plus qu'énervé, ça se ressentait autant à travers ses gestes que dans l'air. Si Nathanael avait bien un don c'était de pouvoir transmettre ses émotions à tout le monde, juste par le fait d'être là. Il suffisait qu'il soit content pour que les gens qui étaient dans la même pièce, qu'importe le nombre, soient plus à l'aise. Et inversement... Il ressentait tellement tout avec intensité, c'était soit très triste soit très joyeux avec lui. Ca me fascinait et m'effrayait à la fois comme pour beaucoup de personnes.

Plus d'une heure et demie passa sans que l'un de nous s'en rende compte. Nathanael bien trop concentré sur ses pas et moi absorbée par sa danse si magnifique. Il se déplaçait d'un coin à l'autre de la pièce si vite qu'il semblait presque se téléporter. Et il s'arrêta de danser seulement lorsque sa compilation de musiques personnelles termina. Il retira son t-shirt, bus quelques gorgées d'eau et se redressa dans ma direction.

- J'avais pas finis de t'apprendre Vendredi dernier... Jouit-il d'avance.

- Tu vas pas finir aujourd'hui, je te le dis. Rigolai-je.

- Mais si allez, Joy ! Pleurnicha-t'il en penchant la tête sur le côté. Je vais pas te voir du week-end tu me dois ça.

- Bon d'accord, mais pas longtemps je suis fatiguée !

- J'ai remarqué ça ! Allez mamouth...

Je soufflai un bon coup avant de me lever et d'aller près de lui. Il me fit signe d'enlever mes chaussures, je le fis trop lentement pour lui car il me bouscula. Je perdis l'équilibre et tombai sur mes fesses à la manière d'un bébé qui apprendrait à marcher.

- Ca commence. Rit-il en me relevant sans difficulté.

Je levai les yeux au ciel, pas trop d'humeur pour relever ses moqueries. Une musique énergique démarra, du genre funk des années 70 et Nathan se mit à sauter sur lui même tout en me souriant. Puis il tourna autour de moi pendant plus de cinq minutes avant de s'arrêter enfin à ma droite, face au miroir. Je le regardai à travers celui-ci et je crus apercevoir un clin d'oeil, mais je n'étais pas sûre. C'est sous un semblant de bonne humeur que mon deuxième cours de danse avec mon grand frère débuta. Je partis au début de mauvaise foi, insultant ses capacités de danseurs à chaque fois que je ratais un pas, mais peu à peu je me pris au jeu. J'étais alors passée des rochignements aux rires ce qui semblait faire plaisir à Nathanael.

- Bon et voici le dernier pas... Me dit-il en me montrant un geste compliqué.

- C'est quoi ça ? M'exclamai-je perplexe.

- Commences par tendre tes bras.

Je m'executai d'un seul bras puisque l'autre était toujours bloqué tandis qu'il me regardait immobile.

- Tendus ! Reprit-il.

- Je peux pas avec l'autre.

Il éclata de rire puis se rapprocha de moi à grands pas pour se placer dans mon dos. Il posa délicatement ses doigts autour de mon poignet droit. Automatiquement, mon coeur s'emballa et j'eu d'énormes frissons... Les rares fois où Nathanael me touchaient c'était pour me faire du mal et même quand il essayait d'être délicat, ça m'horrifiait plus qu'autre chose.

- Joyce, concentre toi. Souffla-t'il d'une voix dure.

Je le regardai dans le miroir et vit qu'il faisait de même. Il ramena mon bras droit contre mon ventre et m'expliqua en même temps :

- Quand tu ramènes ton bras, tu balayes ta jambe sur la droite.

Il parlait d'une voix très basse et menaçante. J'avais l'impression que si je ne faisais pas ce qu'il me demandait, encore une fois, j'allais le regretter. Là où il y'aurait pu y avoir du plaisir, s'installait encore cette méchanceté. Comme une épée de Damoclès, elle planait au dessus de ma tête et menaçait de tomber à chaque mauvaises actions. L'air était lourd, chargé de plomb et j'avais du mal à bouger. Soudainement Nathan passa son pieds par dessus ma jambe droite et la fit glisser sur le côté... Je n'avais plus aucun moyens de m'en sortir et je sentais qu'il avait une mauvaise idée en tête. Ses deux bras se resserrèrent autour de ma taille et sa tête se laissa tomber dans mon cou.

- Tu t'es bien débrouillé pour une fois. Me complimenta-t'il.

Dans sa voix sonnait une pointe d'ironie. Je fermai les yeux, ayant peur que d'un moment à l'autre le " mauvais Nathan " s'en prenne à moi. Ses bras se serrèrent un peu plus autour de moi, et l'un d'eux se fit plus pressant contre mon épaule ce qui réveilla lentement ma douleur.

- Tu vois que c'est tellement mieux quand on s'entend bien ? Railla-t'il.

Son parfum aussi violent que son comportement envahit mes narines comme s'il venait tout juste d'arriver près de moi. Il me secoua légèrement et j'ouvris les yeux, le souffle court à cause de la peur.

- Réponds, t'es pas d'accord ?

- Si... Chuchotai-je. Je préfère quand on s'entend bien, c'est normal.

- Bon alors tu dois comprendre que ce qui se passe entre nous reste entre nous Joyce. Et même Preston ne doit pas être au courant. Haussa-t'il le ton, toujours les lèvres collées à mon oreille.

Il considérait vraiment ses agressions comme un joli secret de famille ?

- Oui, je pensais ju-

- Tu penses très mal Joyce, je te l'ai déjà dis. Me coupa-t'il.

Alors que je ne savais pas quoi répondre pour essayer de le calmer, son téléphone vint à ma rescousse lorsqu'il sonna. Il se détacha de moi à toute vitesse et se précipita vers son sac pour répondre à l'appel. Je respirai à nouveau mais étrangement j'avais froid et je me sentais faible. Je m'assis sur le sol en tentant de reprendre mes idées et mes forces.

« Y'a quoi ? » S'écria-t'il à son interlocuteur.

« Ouais bah j'ai pas vu l'heure c'est tout, me saoule pas. » Continua-t'il.

« C'est ça, salut. »

Il raccrocha et rangea brutalement son portable dans son sac. Ça faisait aucun doute, Nathanael comptait passer ses nerfs sur moi mais la personne, qui devait être ma mère, l'avait coupé dans son élan. Ce qui apparemment l'énervait encore plus...

- Joyce, on rentre. M'annonça-t'il. Il est déjà 21 heures passées.

- 21 heures ? M'exclamai-je étonnée.

Nous étions restés plus de trois heures ici sans voir le temps passer. Le plus étonnant était qu'on avait passé plus de temps à danser tous les deux que lui à danser et moi regarder. Etrange, étant donné que j'étais la première à vouloir partir d'habitude dès qu'il voulait que je danse.

Nous rentrâmes à la maison, muets par la tension ou par la fatigue. Pendant qu'il conduisait, Nathan était occupé sur son portable ce qui nous avait maintes fois approcher d'un accident. Mais au dernier moment, il avait réussis à dégager sa voiture avant qu'elle ne fonce dans un autre véhicule, dans un trottoir, une poubelle ou encore un arbre. Tout était bon pour me faire peur, ou se faire peur à lui même, accro à l'adrénaline.

Quand nous entrâmes dans la maison, nous partîmes immédiatement dans nos chambres sans même parler à notre mère. Lui se préparait pour sortir avec ses amis, tandis que moi je pris seulement une douche pour ensuite enfiler des habits décontractés. Quand j'eu finis Nathanael était déjà partis ce qui me laissait le champ libre pour aller parler à ma mère... Elle était toujours à la cuisine, en train de manger et de lire le journal en même temps. Elle n'avait pas l'air autant de mauvaise humeur que tout le long de la semaine alors peut-être que je pourrais établir un dialogue. Je savais d'avance sa réponse, négative, alors j'avais prévu les arguments nécessaires.

Je m'assis en face d'elle mais elle ne sembla pas le remarquer alors je me raclai la gorge. Là, elle posa le regard sur moi... Elle parût étonnée puisqu'elle se redressa et quitta la lecture de son journal.

- Joyce... Ca va pas ? Avança-t'elle.

- Si, si ça va...

- Ah. Tu veux manger quelque chose ?

- Non merci, j-j'ai pas faim. Mentis-je en y ajoutant un petit sourire.

- T'es sûre ?

J'hochai la tête, mal à l'aise. J'avais pas l'habitude d'avoir de vraies conversations avec ma mère. Enfin avec personne. Même avec Caleb je parlais très peu, de moins en moins en fait. Plus on me montrait que j'avais pas ma place, plus je me tassais dans l'ombre. Les yeux rivés sur mes multiples bracelets, je bafouillai quelques mots à l'intention de ma mère avant de formuler une phrase compréhensible.

- Je dois te demander quelque chose..

- Et bien je t'écoute.

- Je veux pas que tu t'énerves maman, ni que tu le prennes mal. Papa m'a proposé de venir passer les vacances chez lui, et j'ai vraiment envie d'y aller.

- Hors de question. Déclara-t'elle.

Je lui lançai un regard dur, empli de haine. Les larmes me vinrent aux yeux, encore plus énervée de devoir garder mon calme et de ne pas pouvoir lui crier dessus. Je m'y attendais mais j'espérais qu'elle voit comme j'avais besoin de m'éloigner d'ici et surtout de voir mon père.

- Pourquoi ? M'egosillai-je. J'ai envie de revoir papa, j'ai le droit !

- Tu en as le droit, si je te le donnes. Ça marche comme ça tant que tu es mineure.

- Ca ne marchera pas comme ça avec la justice. Retorquai-je. J'espère qu'on finira par me confier à Papa, je partirais loin de toi au moins.

- Ton père ne veut pas de toi et il fait passer ça sur le dos de la justice. Rigola-t'elle.

Je fis semblant de ne pas avoir entendu mais ça me brulait petit à petit, tel l'effet d'une claque.

- On verra. Mais je peux t'assurer que j'irai chez lui pour les vacances...

- Je suis déjà assez gentille de te laisser passer le week-end chez ton amoureux, n'en demandes pas trop Joyce. Conclut-elle en recommençant à manger.

Je me levai, en faisant tomber ma chaise et remontai dans ma chambre. Je mis mes écouteurs, m'allongeai dans mon lit et me laissai calmer par la musique. Demain serait peut-être un jour meilleur, le début de mon week-end avec Cal. Le soir il avait organisé une fête mais le lendemain, il m'avait dit avoir planifié une petite après-midi entre nous. Je devais profiter de Caleb lorsque ses amis étaient loin, c'était les seuls moments où il se montrait proche. Je souhaitais au plus profond que ce week-end nous permette de nous rapprocher... J'aimerais tellement lui faire assez confiance pour lui confier ce qu'il se tramait, malheureusement ce ne serait jamais le cas. Il ne connaîtrait à jamais qu'une partie de moi.

***

J'avais mis de côté mon écharpe. J'avais enfilé une robe beige aux manches mi-longues qui me permettait de cacher mes cicatrices, et des bracelets pour cacher la plupart de mes mutilations. C'était une robe assez prêt du corps et même un mal voyant pouvait remarquer ma maigreur mais ici personne ne le ferait. Ils étaient bien trop occupés avec leur propre apparence. Et du moment que l'on était pas " gros " on ne se faisait pas critiquer. Donc j'avais tenté de soigner davantage mon look. Je m'étais donné un teint plus coloré, j'avais laissé mes cheveux bouclés le long de mon dos et j'avais mis en avantage mes yeux marrons si banals, mais que j'étais tout de même contente d'avoir hérité de mon père. Aussi étrange que cela puisse paraître j'avais eu envie de faire des efforts pour Caleb, pour lui plaire un minimum et peut-être pour redevenir pendant un temps la fille qu'il avait connu. Celle qui arrivait encore à faire semblant à la perfection.

Après avoir attendu plus de cinq minutes devant la maison de mon copain, je sonnai. Je soufflai une dernière fois, arrangeai mes cheveux et la porte s'ouvrit, sur un jeune homme aux dreadlocks. Je savais qu'il traînait énormément avec Caleb et qu'il sortait avec la meilleure amie de celui-ci mais je ne connaissais pas son nom. Il paraissait géant à côté de mes 1m66, me regardant de haut avec ses pupilles éclatés. La fête ne commençait que dans une heure, mais lui était déjà bien ailleurs. A croire qu'ils passaient leur temps à faire ça dans son groupe d'amis...

- Salut, tu es ? Me demanda-t'il en me pointant à l'aide de son majeur.

- Joyce. Dis-je avec mépris.

- Ok, At-attends.

Il ferma légèrement la porte et se pencha vers le salon.

- Cal, y'a une Joyce à l'entrée ! Cria-t'il. Je la laisse entrer ?

J'entendis des rires puis Caleb débarqua, toujours en train de rigoler. Il ouvra la porte, me fit un regard désolé puis tapota l'épaule du garçon aux dreads.

- Hugh, c'est ma copine. Tu te souviens de Joyce ? Sourit Caleb.

- Ah merde, ouais. Je... Désolé hein. Eut-il du mal à articuler.

- C'est ça, retourne au salon.

Il s'exécuta les bras le long du corps, se déplaçant comme un caramel mou. Cette image me fit sourire puis laisser échapper un léger rire qui ne passa pas inaperçu aux yeux de Caleb. Il attrapa mon sac, me prit la main et me tira à l'intérieur. 

- T'es de bonne humeur ? Releva-t'il. 

- Ca se peut. 

- Tu me promets de pas rester côté ce soir ? Quémanda-t'il. 

- Si tes amis veulent bien de moi... 

Il rit et m'entraîne au fond du couloir, puis dans sa chambre. 

- Ils t'aiment bien, c'est toi qui t'imagines l'inverse. Dit-il en ouvrant la porte. 

Sa chambre était, pour une fois, rangée, il en était fier à en juger son regard. Il déposa mon sac sur son bureau, me plaqua contre le mur et m'embrassa. Il empestait déjà l'alcool et le tabac... 

- C'est bien que tu puisses être là, Joy. Me chuchota-t'il. 

Il emprisonna mon visage avec ses mains et déposa une dernière fois ses lèvres contre les miennes. Finalement, c'était mieux quand il avait bu...

- Allons rejoindre les autres. 

Il entrelaça à nouveau ses doigts aux miens et m'emmena au salon, là où sa meilleure amie était enlacée dans les bras du fameux Hugh. Je l'avais toujours trouvé très classe et on pourrait presque dire que j'étais à la limite de l'admiration. Elle était grande et mince semblable à une mannequin, dotée d'une épaisse chevelure blonde. Les tâches de rousseurs qui décoraient ses pommettes et son nez lui donnaient un certain charme et son arme infaillible était sa seule faussette à la joue droite. Parmi tous leurs amis, c'était de loin celle qui paraissait la plus agréable mais je n'avais jamais eu le temps d'approuver cela. Elle s'appellait Olivia, mais personne ne prenait la peine d'utiliser ce prénom et se contentait d'Oli. Quand nous nous asseyèrent autour de la table, en face d'eux, elle s'éloigna de son copain et m'adressa un sourire. 

- Joyce, Olivia et Hugh. Nous présenta Caleb. Même si je pense que les présentations sont inutiles. 

Cal commença à me servir un verre de bière et le posa violemment contre la table, me faisant sursauter. 

- Je vais chercher mes joins, moi. Prétexta Hugh en sortant de la pièce. 

- Il devrait surtout s'arrêter... Marmonna Olivia. 

- C'est pas pire que toi, qui carbure aux ciragettes. Se moqua Caleb. 

- Toi je t'emmerde. Bon Joyce, qu'est-ce que tu racontes ? On en sait pas beaucoup sur toi, Calebounet est muet comme une carpe à ton sujet. 

Je l'entendis souffler bruyamment alors je tournai la tête vers lui. Il me regardait un sourire aux lèvres et m'adressa un signe de la tête, m'indiquant de parler. Qu'est-ce que je pouvais bien dire ? Rien n'était intéressant dans ma vie. Aucun hobbies, aucune expérience... 

- Je sais pas quoi vraiment raconter... Répondis-je d'une toute petite voix. 

- Tout d'abord c'est un honneur d'entendre ta voix. Rit-elle tout en roulant son tabac dans une feuille. 

Son rire avait quelque chose de chaleureux qui me fit sourire. 

- Il me semble que tu as un grand frère, c'est ça ? 

J'acquiesai. Mon frère... C'était la seule chose que les gens connaissaient à propos de moi. Mon prénom ils s'en fichaient, ils savaient juste que j'étais la soeur de Nathanael Lewis. 

- Ma soeur le connaît. M'expliqua-t'elle. Il est cool selon elle, alors j'imagine que...

- Cal ! Ramènes toi. Brailla Hugh de la chambre.

Le concerné souffla pour la énième fois mais se leva tout de même. Avant qu'il ne sorte, Olivia lui dit de ne pas donner les joins à Hugh. Puis le silence retomba entre nous. Elle roulait ses cigarettes et moi je jouais avec le verre que j'avais entre les mains. 

- Alors comment ça se passe avec Caleb Stewart ? Me questionna-t'elle. 

Elle affichait un grand sourire comme si elle avait attendu ce moment depuis longtemps. C'était certes la première fois que l'on se retrouvait toutes les deux seules dans une pièce, ou même la première fois que l'on se parlait réellement. 

- Ca se passe plutôt bien. Affirmai-je en lui souriant à moitié. 

- Te laisse pas impressionnée par ce grand gabarit ! Je le connais depuis toujours et je peux t'assurer qu'il n'est pas ce qu'il veut bien te montrer. 

J'hochai simplement la tête, ayant du mal à croire ses mots. Après tout c'était son " rôle " de meilleure amie de donner une bonne image de lui... Ou bien, elle était la seule à voir les bons fonds de Caleb car elle le connaissait depuis son plus jeune âge sans doute. 

- Et puis il t'aime vraiment bien... 

Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase car les deux garçons revinrent dans le salon, les mains chargées de boites en métal. Il les posèrent sur la table et de là commença la séance de joins. Ils parlèrent entre eux et encore une fois je m'effacai de leur monde tout doucement... Sans que l'un d'eux ne le remarque. Ils avaient l'habitude de la Joyce silencieuse, timide. Enfin timide, c'était sur quoi j'appuyais pour cacher ma tristesse. Ne pas parler parce que l'on n'osait pas était très différent de ne pas parler parce qu'on en avait pas envie. Environ deux heures plus tard, les invités se firent de plus en plus nombreux et la fête commença petit à petit. Caleb m'abandonna pour aller discuter avec plusieurs de ses potes et comme à chaque fois je n'existais pas aux yeux de ses amis. 

Dévastée, je partis m'enfermer dans sa chambre, la seule pièce libre car interdite d'accès. J'entendais la musique, les rires, les cris, ce qui m'enfonçait encore plus dans ma solitude. Je devrais faire des efforts et aller m'intégrer mais au fond, je n'en avais pas envie. Nathanael m'avait dégouté des relations humaines non ?  

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