Chapitre 17 - Conséquences
Un deuxième réveil difficile, consécutif au premier pour Eléa et, comme la veille, elle ne souhaitait pas se lever, n'en ayant pas le courage, préférant rester enfouie sous ses draps plutôt que d'affronter la situation qui lui faisait regretter sa gêne concernant Gabriel et leur baiser échangé.
Le réfectoire était plein lors de ce nouvel incident, presque tous les pensionnaires y avait assisté et les autres se l'étaient fait raconter. Il n'y avait pas une personne qui l'ignorait. Cela n'arrangerait guère sa réputation et la crainte que beaucoup manifestaient déjà à son égard à cause de sa magie.
Après que ses camarades l'aient convaincu de remonter du sous-sols, elle s'était réfugié dans sa chambre et n'en était pas ressortie de la journée, même pour le dîner, que Gabriel lui avait monté et avait partagé avec elle, assis au sol. Le jeune homme n'avait pas reparlé du baiser et Eléa n'y songeait plus vraiment, davantage préoccupée et inquiétée par cette nouvelle explosion incontrôlée de sa magie. Les autres lui avaient également tenu compagnie, s'efforçant de la rassurer, de la réconforter, de l'encourager, de la soutenir ou encore de la faire rire, avec moyennement de succès.
En effet, ce nouvel incident ne faisait que renforcer son avis négatif sur ses pouvoirs et donc surelle-même, tout comme il avait éveillé le souvenir d'Eve totalement ensanglantée dans son esprit. Si bien qu'elle avait cauchemardé et pleuré une grande partie de la nuit, forçant Marianne et Roxanne à rester à côté d'elle jusqu'à ce qu'elle se calme. Pourtant, aucune des deux jeunes filles ne s'étaient plaintes et elles s'étaient montré d'un grand soutiens pour Eléa, même si cela ne lui suffirait pas à ce qu'elle s'apaise réellement.
Même la voix douce et rassurante de sa mère à l'autre bout du fil n'avait pas pu le faire. Irina lui avait proposé de venir la chercher et de la ramener chez eux mais Eléa avait refusé. Elle était heureuse dans cette école prévue pour ceux comme elle et elle ne voulait pas fuir, elle souhaitait triompher de cette épreuve,ou au moins essayer, même si c'était fort difficile.
C'était donc éprouvée qu'elle se réveillait.
Alors que la sonnerie de son réveil s'élevait dans la chambre pour la quatrième fois, couvrant les paroles que Marianne et Roxanne échangeaient d'un ton bas, Eléa pensa qu'il était vraiment temps qu'elle se lève avant d'être en retard pour la première fois depuis son arrivée. Elle tenait à être présente et à suivre les cours normalement, ne serait-ce que pour s'empêcher de sombrer dans sa détresse et également pour donner une bonne impression, prouver qu'elle restait une élève comme les autres, aux autres ainsi qu'à elle-même.
S'encourageant mentalement en réunissant ses forces, elle repoussa sa couverture et se leva. À présent debout, elle remarqua que Marianne et Roxanne ne conversaient pas dans la salle de bain en se préparant mais, à côté de la fenêtre donnant sur le rue devant l'institut où elles désignaient régulièrement l'extérieur.
Intriguée et se demandant ce qui monopolisait ainsi leur attention, Eléa s'approcha. La remarquant, les deux autres jeunes filles la saluèrent et Marianne passa un bras réconfortant autour de ses épaules, s'apercevant bien qu'elle ne se portait pas réellement mieux que la veille.
À sa question silencieuse, manifestée par ses sourcils arqués, Roxanne lui dit de regarder à l'extérieur pour comprendre.
S'exécutant,elle s'approcha jusqu'à poser sa paume contre la vitre froide et constata que, massé devant le portail de l'école, se trouvait un groupe d'une trentaine de personnes brandissant des pancartes et hurlant injures et slogans. Cette scène rappela le jour où ses parents avaient choisi de l'inscrire à l'institut à Eléa car il s'agissait évidemment de militants anti-magiciens qui venaient clamer leur opposition à leur existence directement sous leurs fenêtres.
Bien que tous aient l'habitude de ce genre de réaction à leur égard, l'événement paraissait plutôt exceptionnel et préoccupant. Ils pouvaient remercier Marjorie pour cela car c'était son émission qui avait rendu l'institut Belforde célèbre et avait donné sa localisation. Sans compter que c'était certainement l'épisode de la veille qui avait poussé ces personnes à venir les accuser d'être des dangers pour tous, de les condamner au seul motif de leur différence.
En effet, ils avaient eu la forte mauvaise surprise, notamment Eléa, de découvrir, que, non seulement l'équipe de télévision avait enregistré l'incident au réfectoire mais que,surtout, elle s'était empressé de l'encodé et de le monter pour qu'elle soit diffusé dans la soirée. Toutes les personnes regardant le reportage avaient pu assister à la perte de contrôle d'Eléa, à l'explosion des bulles de sang et aux saignements des autres élèves.
Pour tous ceux qui avaient déjà un avis négatif sur les sorciers, cette scène servait d'arguments pour prouver la dangerosité et le manque de maîtrise des magiciens qui apparaissaient alors comme de véritables fléaux, des bombes à retardement, bien loin de la vision méliorative que cette émission était censée donner à la base.
D'ailleurs, Marjorie était demeurée invisible, craignant certainement de subir des représailles, aussi bien des élèves que de l'administration de l'établissement, à raison car tous étaient furieux. Léo avait même clairement menacé la jeune femme et il avait paru très sérieux. En revanche, Damien était venu trouver Marianne, piteux et la jeune fille avait transmis ses excuses à tous de sa part. Il avait apparemment tenté de dissuader Marjorie de diffuser cette séquence mais sans succès.
Eléa serra les poings en observant ces personnes qui les condamnaient sans chercher à comprendre et sans savoir et qui exigeaient leur enfermement, ou encore plus extrême, pour leur sécurité, sauf que sa colère n'était pas entièrement dirigée contre elles, ni même complètement vers Marjorie, mais également contre elle-même car c'était son incapacité à contrôler sa magie qui avait déclenché tout cela et provoqué cette réaction. Elle s'en voulait terriblement.
À cause de son manque de maîtrise, l'institut Belforde et sous ses pensionnaires allaient souffrir et devoir subir cela en serrant les dents car, si les habitants du quartier toléraient leur présence, ce n'était pas le cas d'autres qui venaient le faire savoir en déclamant leurs slogans haineux. Aujourd'hui, elle détestait encore plus ses pouvoirs et ce qu'elle était. Sans même le souhaiter ou y penser, elle blessait les seules personnes qui l'appréciaient et toutes celles qui partageaient son quotidien.
La jeune fille s'extirpa de ses pensées lorsque, depuis la rue, un homme les repéra derrière leur fenêtre et les indiqua à ses comparses. Ayant à présent des cibles tangibles à viser, le groupe se dirigea vers la façade où s'ouvrait la vitre en les invectivant et les pointant du doigt.
Eléa préféra reculer, supportant ces propos sans rien dire en serrant les dents comme elle en avait prit l'habitude durant ses années de brimades et Marianne l'imita en secouant la tête de gauche à droite, désapprouvant évidemment mais ne souhaitant pas leur accorder davantage de considération.
Contrairement à elles, Roxanne resta devant la fenêtre sous les invectives de ces individus. De toute évidence, elle brûlait de répliquer à ces attaques verbales et, pour répartie, elle se tourna et, baissant le bas de son pyjama, elle exposa son fessier, dévoilé par un étroit string noir, aux manifestants, leur signalant ainsi fort élégamment qu'ils pouvaient tous aller se faire voir. Apparemment satisfaite, elle remonta son pantalon pour se diriger vers la salle de bain en déclarant qu'elle sentait que ça allait être une bonne journée. Que ce soit effectivement la vérité ou non, elle eut au moins le mérite d'arracher un sourire à Eléa, amusée par la désinvolture de Roxanne, qui ne se gênait jamais pour se dévoiler.
Cependant, son sourire disparu bien vite pour céder la place à une expression perplexe lorsque quelques coups furent frappés contre la porte. Eléa et Marianne échangèrent un regard, se demandant de quoi ils pouvaient bien s'agir si tôt.
N'ayant qu'un moyen pour les avoir, elles allèrent toutes deux ouvrir, s'attendant à trouver l'un des innombrables petits amis de Roxanne mais, à la place, elle découvrirent Gabriel, habillé, mais semblant soucieux, chose qui se comprenait au vue de la situation en ce début de mâtinée.
« Salut les filles, commença t-il. Désolé de vous déranger si tôt mais le directeur veut te voir, Eléanora.
L'emploie de son prénom complet dans la bouche de Gabriel indiqua à Eléa à quel point la situation devait être grave et préoccupante avec ces manifestants aux portes de l'école.
La jeune fille baissa le menton en acquiesçant doucement, l'angoisse la saisissant.
Elle craignait de deviner pour quelle raison Monsieur Belforde souhaitait s'entretenir avec elle avant même la première heure de cours. C'était elle qui avait causé cela, certes involontairement, mais elle était responsable de ce déchainement de haine au pied de leurs murs. Si elle n'avait pas été là, qu'elle savait maîtriser sa magie, ces personnes ne se trouveraient pas là à les harceler et des problèmes plus graves ne se présageraient pas, il serait donc logique et sensé qu'elle soit renvoyée de l'établissement pour avoir provoqué tout cela et protéger les autres pensionnaires.
Elle comprenait mais elle ne désirait pas quitter cet endroit. Elle y était heureuse et acceptée comme elle ne l'avait jamais été, entourée de personnes qui comptaient pour elle, chose dont elle s'apercevait seulement maintenant alors qu'elle allait être obligée de les quitter. Il allait falloir qu'elle s'en aille.
À en juger par son visage sombre, Gabriel passait pensait la même chose et l'idée traversa également l'esprit de Marianne. Sans faire aucun commentaire sur le sujet, Eléa pria Gabriel de lui laisser quelques minutes le temps qu'elle se prépare, n'allant tout de même pas rencontrer le directeur en pyjama.
Refermant la porte, elle récupéra quelques affaires dans son placard qu'elle enfila directement dans la chambre, Roxanne monopolisant la salle de bain, sous le regard de Marianne qui ouvrit la bouche pour lui adresser quelques mots, une parole de soutiens pour la rassurer, mais elle l'en empêcha en secouant négativement la tête, refusant. Il n'y avait rien à dire ni à faire.
La jeune fille s'empara de son blouson et alla pour rejoindre Gabriel dans le couloir mais, prise d'un soudain élan et songeant que c'était certainement l'une des dernières fois qu'elle la voyait, elle revint sur ses pas et étreignit Marianne, surprenant cette dernière. Ne pouvant saluer Roxanne de la sorte, elle se contenta d'un regard vers la porte fermée de la salle de bain et quitta la chambre en prenant une grande inspiration.
Gabriel la regarda, les dents enfoncées dans sa lèvre inférieure, cherchant visiblement quelque chose à lui dire, comme Marianne, sauf que, lui, ne trouvait pas. C'était sûrement la première fois que le jeune homme perdait ses mots en matière de paroles réconfortantes mais il fallait reconnaître que la situation actuelle ne devait pas se présenter souvent et il devait y être confronté de façon inédite. Pourtant, Eléa aurait souhaité qu'il la rassure sur ce qu'il allait se passer, se blottir contre lui mais elle n'osait pas aller vers lui ou lui réclamer ce genre d'attention.
Le jeune homme vit son aura se tendre timidement vers lui avant de se rétracter, alors qu'elle se mettait en chemin pour quitter le dortoir, et qu'elle était troublée de vague d'angoisse.
En silence, il lui emboîta le pas en revenant à sa hauteur. Comme à son habitude, il lui tint la porte pour la laisser sortir. La jeune fille frissonna dans la fraicheur de cette mâtinée du début du mois de novembre et elle remonta son col vers son visage.
Ses yeux se posèrent sur le troisième étage du bâtiment principal qui, aujourd'hui, lui faisait l'effet d'un donjon où l'attendait le seigneur maléfique des lieux et son destin.
Elle prit une nouvelle profonde inspiration et commença à traverser la cour.
Alors qu'ils se trouvaient au milieu, Gabriel prit la parole avec une certaine incertitude qu'il n'avait jamais réellement manifesté :
« Tu sais, si Monsieur Belforde décidait de te renvoyer, se serait vraiment injuste.
- Tu penses que c'est ce qu'il va faire ? C'est vrai que ce serait logique.
- Je ne sais pas... Il est tellement étrange en ce moment... Mais je ne serais pas d'accord avec ça. Ce n'était qu'un accident, tu n'y es pour rien, ce n'est qu'une association malheureuse de circonstances pour lesquelles tu n'es pas responsable !
- Mais c'est quand même de ma faute ce qu'il arrive aujourd'hui.
- Non, pas de mon point de vue. Si tu te fais renvoyer, tu...tu vas me manquer. »
Eléa ne sut comment interpréter cette dernière remarque que le jeune homme prononça d'une voix basse sans la regarder, les yeux fixés sur le couloir du deuxième étage qu'ils venaient d'atteindre.
Elle se tourna brièvement vers lui, se demandant comment elle devait interpréter ces paroles, en quête d'un indice sur son visage mais il conservait la même expression sombre. Il semblait s'inquiéter autant qu'elle, comme si c'était lui qui était en cause et dont la place à l'institut Belforde était menacée. Cette empathie touchait Eléa, tout comme ces mots la troublaient plus que ses affirmations précédentes où il lui assurait qu'elle n'était coupable en rien pour ce qu'il se passait actuellement.
Pour commencer, elle ne les croyait pas vraiment. Il y avait forcément quelque chose qui avait provoqué cette haine qui était clamée sous leurs fenêtres et c'était sa perte de contrôle, son incapacité à maîtriser sa magie. En revanche, son avis était beaucoup moins catégorique que sa dernière phrase dont elle ignorait que penser. Elle ne voulait pas risquer de s'emporter dessus et d'en faire une interprétation exagérée en s'emballant mais, de toute manière, elle avait beaucoup plus préoccupant à se soucier pour le moment alors elle cessa bien vite d'y songer, surtout qu'ils arrivèrent devant la porte du bureau du directeur.
Gabriel y cogna quelques coups et ses mâchoires contractées témoignaient de la forte tension qui l'habitait. Eléa se tendit également, tous les muscles raidis et le cœur frappant violemment contre les côtes de sa cage thoracique alors que l'appréhension augmentait et elle était bien différente de celle qu'elle avait ressentit à son arrivée, qui était une angoisse teintée d'espoir et d'impatience. Aujourd'hui, elle souhaitait seulement se trouver ailleurs ou pouvoir effacer la journée de la veille, se réfugier sous sa couette et tout oublier.
La fébrilité la fit s'agiter d'un pied sur l'autre et elle se tordait nerveusement les mains en se mordant l'intérieur des joues. Gabriel se tourna vers elle, percevant son angoisse, par son attitude nerveuse mais également pour les mouvements de son aura autour d'elle. D'un geste amical, il lui serra l'épaule pour s'efforcer de la rassurer mais il se doutait que ce ne serait pas suffisant et que lui-même appréhendait grandement.
La voix du directeur de l'autre côté de la porte les autorisa à entrer et ils pénétrèrent dans le bureau, Gabriel cédant galamment le passage à Eléa comme toujours.
La pièce confortable était identique à sa dernière visite, tout comme Monsieur Belforde avec son bouc parfaitement taillé et ses yeux vairons. Il y avait également Monsieur Moreau, certainement présent en tant que professeur principal d'Eléa. Cette dernière déglutit, la présence du professeur confirmant son intuition.
Pourtant, ce fut un sourire bienveillant que lui adressa Monsieur Belforde en l'invitant d'un geste à prendre place sur l'un des fauteuils face à lui.
Le rythme cardiaque toujours plus affolé et s'éloignant de Gabriel à regret, se sentant un peu plus rassurée par sa proximité, et ayant préféré se serrer contre lui, Eléa s'installa. Le corps raidis, elle se tint extrêmement droite sans oser regarder personne. Gabriel hésita un instant à s'asseoir à côté d'elle mais, jugeant qu'il valait mieux pas qu'il ne s'implique que modérément, il resta finalement en retrait non loin de la porte, les bras croisés sur la poitrine.
Lui qui éprouvait une loyauté et un immense respect pour l'homme qui faisait tant pour les magiciens et qui l'avait accueilli, aujourd'hui, il le désapprouvait hautement et se sentait même furieux contre lui.
Cependant, il demeura silencieux en le laissant parler à Eléa :
« Eléanora, comment vas-tu ? Nous n'avons pas eu l'occasion de nous revoir depuis ton arrivée mais j'espère que tout se passe bien et que tu te plais parmi nous.
- ça allait jusqu'à aujourd'hui. Murmura Eléa.C'est vrai qu'il y a de quoi être soucieux. J'ai reçut des lettres aux propos assez véhéments et ces gens devant le portail... Mais je ne crois pas que la sécurité des élèves soit menacée. Revenons en au sujet pour lequel je t'ai convoqué. Ton contrôle de ta magie est inexistant.
- Et la scène a été filmée... Déplora Eléa.
- Ne t'inquiète pas pour cela. Je me chargerai de m'entretenir avec mademoiselle Saintclair. Ton problème à toi va être d'apprendre à contrôler tes pouvoirs.
- Vous ne me renvoyez pas ?
- Bien sûr que non ! Pour quel motif ? D'avoir été la victime d'un mauvais concours de circonstances ? Mon grand-père a fondé cet établissement pour permettre à tous les magiciens d'avoir un refuge pour vivre en paix et je compte bien respecter son but qui est aussi le mien. D'ailleurs, l'erreur d'attendre de trouver quelqu'un pour dispenser des cours de magie est la mienne, pas la tienne, mais nous avons constaté que attendre encore serait risqué et insensé. Cependant, le problème demeure inchangé et nous n'avons personne possédant les mêmes pouvoirs que toi alors, Monsieur Moreau s'est proposé de se charger de ce rôle.
- Vous n'êtes pas magicien. Remarqua Eléa en s'adressant au professeur.
- Non, en effet, mais je ne suis pas du genre à abandonner mes élèves et les autres professeurs, ceux qui sont magiciens, m'ont expliqué comment m'y prendre.
- Ça ne me rassure pas beaucoup.
- Allons, tout devrait bien se passer. Assura Monsieur Belforde.
- Alors, non seulement je ne vais pas avoir de problèmes pour ce qu'il s'est passé, mais, en plus, je vais apprendre à gérer mes pouvoirs ? Résuma Eléa sans y croire réellement.
- Oui, confirma Monsieur Belforde avant de vérifier l'heure indiquée sur sa montre. Bon, il est temps que vous alliez en cours, je pense. »
Un large sourire s'épanouit sur le visage d'Eléa alors que le soulagement la submergeait.
Elle n'était pas chassée de l'institut,elle faisait toujours partie de ses effectifs au même titre que les autres et elle allait apprendre à contrôler sa magie qui ne serait plus une menace endormie pour tous les autres qu'elle approchait et qu'elle gardait enfermé derrière des barreaux au fond d'elle. Peut-être même qu'elle serait capable de faire de véritables manipulations, comme Léo avec son oiseau de flammes, quoi que un oiseau de sang était beaucoup moins poétique. L'impression malsaine qu'elle sentait se dégager de ses pouvoirs s'atténuerait peut-être si elle s'habituait à elle et à s'en servir.
En tous cas, elle avait hâte de débute ces cours, à la fois pour ne plus mettre ses proches en danger et aussi pour découvrir la véritable étendue de ses capacités. D'après ce qu'elle savait et les quelques renseignements qu'elle avait glané sur le sujet, la maîtrise du sang était une magie puissante. Elle verrait bien lorsque ses cours particuliers commenceraient, ce qui la rendait impatiente et immensément soulagée.
D'ailleurs, Gabriel ne l'avait pas jamais vu sourire de la sorte depuis qu'elle était arrivée, ce qu'il trouva dommage car elle devenait très belle, comme lumineuse et il s'en sentit également comme déçu et peiné car, lui, n'était jamais parvenu à la faire sourire ainsi, bien qu'elle semblait l'apprécier. Le jeune homme s'empressa de se défaire de ces pensées qui n'avaient pas lieu d'être, se réjouissant uniquement pour Eléa et se reprochant d'avoir pu penser que Monsieur Belforde souhaitait renvoyer la jeune fille pour quelque chose dont elle n'était pas responsable.
Rassurée, soulagée, Eléa se leva du fauteuil en remerciant le directeur, se répétant en remerciements. Si elle s'était laissée aller à toute l'émotion qui la traversait, elle se serait mise à pleurer mais elle se contenait, n'étant pas du genre à ainsi manifester tant de sentiments devant autrui, surtout des personnes qui étaient de quasi inconnus.
À la place, elle se contenta de récupérer le papier sur lequel Monsieur Belforde venait de lui noter l'horaire de son premier cours de magie, dans deux jours, en le remerciant encore une fois. Il hocha le menton, lui assurant qu'elle n'avait pas à se répandre ainsi en remerciements, qui le gênaient un peu d'ailleurs, il n'avait fait que remplir son rôle et respecter l'objectif qu'il avait accepté en reprenant la direction de l'établissement.
Eléa glissa le papier dans sa poche et alla pour sortir. Passant devant Gabriel, ce dernier lui adressa un large sourire différent de ceux figés et conventionnels qu'il affichait quotidiennement. Il était davantage naturel, ravi et empreint de soulagement. Il était donc parfaitement sincère lorsqu'il avait affirmé qu'elle lui manquerait si elle était forcée au départ. Ce n'était pas vraiment qu'Eléa en avait douté mais plutôt que, plus préoccupée par l'idée de son hypothétique renvoie, elle ne s'y était pas attardée réellement or, à présent que les choses étaient réglées et qu'elle savait qu'elle pouvait demeurer à l'école encore autant que nécessaire, elle y songeait de nouveau et le trouble s'emparait d'elle avec plus de force,rougissant ses joues hâlées.
S'efforçant de chasser ces émotions qui faisaient monter la chaleur dans son corps, elle quitta le bureau après avoir poliment salué Monsieur Belforde en le remerciant une fois supplémentaire pour sa bienveillance et sans oser regarder Gabriel qui lui souriait toujours.
Une fois dans le couloir, elle soupira longuement, savourant son soulagement mais subissant également toute la pression et la tension de cet entretiens qui retombaient soudainement alors qu'il se terminait.
L'appréhension qui avait contracté son corps avait laissé quelque douleur dans ses muscles et toutes les émotions par les quelles elle était passée en seulement quelques minutes l'avaient éprouvée, provoquant une grande lassitude, qui pesa sur ses épaules. Sa seule envie était de retourner se coucher après cela mais Monsieur Moreau, qui la rejoignit dans le couloir, lui rappela qu'elle avait une heure d'Histoire, qui devrait d'ailleurs être commencée depuis une dizaine de minutes.
Les autres membres de la classe devaient se demander ce qui retenait leur professeur, à moins qu'ils ne soient entièrement focalisés sur l'idée qu'Eléa allait possiblement être renvoyée de l'école. Elle verrait en se rendant dans la salle de classe.
Accompagnée par Monsieur Moreau, la jeune fille se dirigea vers les escaliers pour gagner l'aile ouest du bâtiment principal vers la classe d'Histoire. Avant de tourner à l'angle du couloir, Eléa se retourna pour voir Gabriel sortir du bureau à son tour. Elle se pressa de se détourner avant que le jeune homme ne remarqua qu'elle l'observait mais, contrairement à lui, à côté d'elle, Monsieur Moreau s'aperçut de ce regard jeté par-dessus son épaule. Il leva les yeux au ciel, visiblement amusé.
Tentant de se donner une contenance, Eléa enfonça les mains dans ses poches et continua à avancer en feignant l'indifférence tout en grommelant tout bas contre elle-même. Elle ne savait même pas pourquoi elle s'était retourné exactement.
Elle s'obligea à changer de préoccupation en arrivant avant la classe d'Histoire d'où, par la porte ouverte, s'échappaient des bribes de conversations et des éclats de voix, pour la plupart aux accents contrariés et indignés.
Eléa entendit le même argument que celui avancé par Gabriel, qui n'était que ce n'était qu'un accident involontaire, revenir à quelques reprises, prononcés par les timbres de Roxanne, Irwan et Lison. Alana accusèrent le directeur de prendre une mauvaise décision et Marjorie d'avoir causé tout cela. Elle ne se priva d'ailleurs pas pour insulter la présentatrice et Salim renchérit d'un grommellement incompréhensible. Lucille déplorait la situation tout en réconfortant Sylvain qui sanglotait en se reprochant d'avoir cédé à Lavande et provoqué le départ d'Eléa. Lavande, d'ailleurs, qui en riait au fond de la classe, ce qui enragea Léo qui s'en serait certainement violemment prit à elle si, après un soupir de lassitude, connaissant la dissipation de ses élèves, Monsieur Moreau n'était pas entré en sommant chacun à se calmer.
Venant à sa suite, Eléa fut accueillie par des exclamations de soulagement et de joie. La jeune fille sourit, touchée par cette réaction, et elle se laissa étreindre par ceux qui étaient ses amis, chose dont elle s'apercevait alors qu'elle avait crut devoir les quitter définitivement.
Tout en rendant son étreinte à chacun,elle expliqua rapidement les raisons de sa convocation chez le directeur et résuma la conversation qu'ils avaient eu. Ils partagèrent son soulagement et son enthousiasme mais ils ne purent s'attarder sur cette nouvelle car leur professeur les rappela à l'ordre en leur signalant de son ton éternellement lassé que, si il y en avait que ça intéressait, le cours débutait.
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