《QU'EST-CE QUE C'EST QUE ÇA ?

— C'est un pigeon, j'affirme. Il bouffe une flèche. C'est mignon, non ?

— ENLÈVE ÇA TOUT DE SUITE, C'EST UNE FAUTE DE GOÛT ÉNORME.》

Je soupire en levant les yeux au ciel.
Ma mère et les vêtements... c'est elle plutôt qui a mauvais goût.

《Allez, va me mettre une jolie tenue, on part aux Hunger Games d'ici dix minutes.》

Une jolie tenue ? Hors de question que je me zigouille le ventre en enfilant une de ces robes qui t'empêche de respirer, en plus j'ai mes règles, donc LAISSEZ MON BAS DE VENTRE TRANQUILLE.

Et puis, un jogging, c'est parfait, c'est beaucoup mieux...

En plus, y a écrit 《Wesh》 dessus, vraiment, une perle rare...

Je passe donc mon jogging et un sweat, sous le regard noir de ma mère, mais j'ai plus le temps de me changer, puisqu'on doit partir.

《NICK !! crie ma mère dans la maison. ON PART !!

— NICK !! TA MÈRE DEMANDE DE PARTIR !!》 Je hurle à mon tour.

Mon petit frère se pointe immédiatement. Pour lui, les Hunger Games, c'est un pur délice, et il espère un jour pouvoir y participer.

《Hein, maman, dit que je serai l'élu du District douze ? Supplie Nick.

— On verra, on verra, souffle ma mère, visiblement très fatiguée.

— De toute façon, c'est marrant de voir les gens pleurer.

— NICK !!!

— OK OK...》

On va jusqu'à la place de la ville, en rang. On nous prélève un peu de sang (comme si j'en perdais pas déjà assez...), et on attend.

On attend.

...

...

Bon, c'est pas super agréable de rester planté là dans la boue, si les gens pouvaient se bouger un peu...

ENFIN, une femme, qui ressemble à une poupée vivante, arrive devant le micro.

Elle fait flipper. Mon dieu.

《Bonjouuuuur ! Fait-elle de sa voix hautement perchée. Bienvenue aux Hunger Games ! Et puisse le sort vous être favorable !》

J'entends Nick marmonner un peu plus loin :
《Ça fait quatre ans que le sort, il m'en...

— NICK !》 rouspète ma mère, quelques rangées derrière nous, qui décidément a des oreilles très développées.

La poupée continue son discours :
《Bon, vous connaissez un peu le délire, on envoie vos gosses s'entretuer dans une arène, arène hostile bien entendu, pas dans le royaume des Bisounours, les gens acclament ceux qui ont buté le plus de monde, ET PASSONS À PRÉSENT AUX VOTES !!》

Ah ! Enfin quelqu'un qui a compris que ce discours ne servait plus à rien ! Ça doit être la cinquantième saison des Hunger Games, et on a tous compris qu'il fallait mieux ne pas être tiré au sort.

La poupée s'approche des bocaux remplis de petits papiers, puis retourne soudainement sur ses pas, avant de lancer au public :
《Au fait, je m'appelle Elvis, comme le chanteur, oui oui, ne faites pas de blague là-dessus, parce que franchement, c'est dépassé ! Merci !》

Elle s'avance de nouveau vers les bocaux de verre, et plonge sa main dans celui des filles.

Elle en ressort...
Bah un papier. Logique.

Elle l'ouvre, s'humecte les lèvres, puis sa voix s'élève :
《KITKAT !!!》

Une bonne partie de la foule soupire de soulagement, dont moi. Ouf, c'est pas moi ! En plus, la fille a vraiment un prénom pourri...
Ah ah, la pauvre, je la plains. Moi, en entendant, je vais pouvoir retourner à la maison bouffer des racines.

Elvis répète :
《Kitkat ?》

Je fronce les sourcils. Quoi ? Pourquoi Nick est juste pété de rire ? Et pourquoi ma mère me regarde d'un regard noir ?

... ah, mais peut-être parce que c'est moi, Kitkat.

Ah ah.

Hein, quoi ?!

J'ai été appelée ??

Je m'avance vers l'estrade, un peu surprise quand-même.

《Vous êtes sûre qu'il y a écrit Kitkat sur la feuille, madame ? Je demande à la poupée.

— Oui oui.

— C'est quand-même bizarre...

— Fallait bien que ça tombe sur quelqu'un, puppy !》

Nick est mort de rire, limite il est allongé par terre, dans la boue.

Je le fusille du regard.

《Bon ! Clame Elvis, remettant sa perruque sur sa tête. Y a t-il un volontaire, sinon ?》

Personne ne daigne à répondre. En fait, plus personne n'écoute : ils sont clairement en train de parler de ce qu'ils vont manger ce soir.

Ça m'énerve. Je crie :
《EH LES GENS, C'EST PAS SYMPA ! DÉJÀ QUE J'AI PAS UN NOM DE FIFOU, EN PLUS J'AI MES RÈGLES, EN PLUS LA MÈRE N'A AUCUN GOÛT, ET EN PLUS LA PRÉSENTATRICE DE CETTE ANNÉE RESSEMBLE CLAIREMENT À BARBIE PRINCESSE !》

Les gens se taisent.
Puis m'adressent respectueusement le signe de notre district : un gros, gros doigt.