10
Lila se sentit de plus en plus écrasée par le poids du passé qu’elle n’arrivait pas à fuir. Malgré l’apparente normalité de la vie extérieure, quelque chose de fondamental avait changé en elle. Chaque moment qu’elle vivait semblait être une illusion, une distraction de la réalité qu’elle ne pouvait plus ignorer.
Elle avait voulu oublier. Elle avait voulu croire que la maison, les ombres, les voix, tout cela n’était qu’un cauchemar. Mais tout dans sa vie désormais semblait lointain, distant, comme si un voile sombre recouvrait chaque instant qu’elle passait dans le monde réel.
Les jours passaient, mais la maison ne la quittait jamais. Chaque nuit, elle rêvait de la clé noire, de la silhouette de son frère, et de cette voix persistante qui lui murmurait son nom : « Lila... »
Elle ne pouvait plus échapper à l'appel. Le vide au fond d’elle grandissait, comme un abîme qui ne cessait de se creuser. La maison attendait, et elle savait qu’elle ne pourrait pas y échapper.
Un soir, après une journée sans événement particulier, Lila se retrouva, sans même y penser, devant la porte familière de la maison. Elle l’avait déjà quittée, mais maintenant, elle ressentait une irrésistible attraction, comme si la maison elle-même l’attirait, la possédait.
Elle posa la main sur la porte, et cette fois, elle ne s’arrêta pas. Le bois était froid, mais il ne résistait pas. Lila pénétra à l’intérieur, sentant immédiatement la présence des ombres. Les murs semblaient se refermer autour d’elle, l’enveloppant d’une chaleur lourde et suffocante.
Au centre de la pièce, l’autel était intact, les symboles gravés encore lumineux. Lila se dirigea instinctivement vers lui, son regard fixé sur la scène qu’elle avait déjà vécue. Mais cette fois, elle ne voulait plus fuir.
Elle s’agenouilla devant l’autel, le cœur battant, et déposa la clé noire sur la pierre froide. « Je suis prête, » murmura-t-elle, la voix brisée.
Les ombres s’éveillèrent lentement, leurs formes indistinctes se regroupant autour d’elle. Mais cette fois, il n’y avait pas de choix à faire. Aucun objet. Aucun sacrifice. La maison, elle le savait maintenant, ne cherchait plus qu’un seul prix : sa soumission complète.
Une voix, profonde et ancienne, s’éleva, résonnant dans toute la pièce :
« Tu as tout donné, Lila. La maison t’appartient maintenant. »
Les murs tremblèrent, et l’autel s’éteignit dans une lueur mortelle. Lila se leva lentement, ressentant un vide insupportable dans sa poitrine, mais aussi un étrange soulagement. Elle avait accepté. Elle était maintenant une partie de la maison, un écho parmi les ombres, une entité oubliée mais éternelle.
La maison ne l’avait pas laissée. Elle ne l’avait jamais laissée. Elle ne quitterait jamais les murs qui l’avaient façonnée, les visages qu’elle avait croisés, les voix qu’elle entendrait encore.
Et au bout du hall, dans la lumière mourante, une silhouette attendait.
Son frère.
« Tu es enfin là, » dit-il d’une voix douce, comme une caresse.
Lila sourit tristement, et la maison, dans toute sa grandeur sinistre, l’entoura de ses bras invisibles.
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