Chapitre 8_1
Eliott & Tiago
Sur le trajet les menant vers l'internat, les jumeaux réfléchirent aux différentes solutions leur permettant de sortir la nuit. Simuler une maladie pour pouvoir aller à l'infirmerie, un lieu moins surveillé. Simuler une crise de somnambulisme. Ils eurent plein d'idées mais aucune ne les satisfaisait. Arrivé devant l'internat Tiago eu une illumination : s'ils voulaient pouvoir ressortir tranquillement, ils ne devaient pas rentrer ! Ainsi, ils retournèrent sur leurs pas et trouvèrent refuge dans les fauteuils du coin berceuse de la grande bibliothèque.
Quelques minutes avant l'heure fatale, les jumeaux se trouvaient devant la grande tour de Mirina. Ils attendirent que les clochettes finissent de sonner l'hymne de l'île, puis ils entrèrent. Ils se trouvaient dans une petite pièce avec une tapisserie décorée d'arc de cercle de différentes couleurs, l'une des couleurs était un peu plus effacé que les autres comme si quelqu'un avait voulu effacer toute trace de celle-ci mais n'y était pas arrivé. Sous ces arcs de cercles, des enfants se tenaient la main.
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Une fois le décompte fini, les jumeaux entendirent une voix venant de nul part.
"Devant vous se trouvent deux portes, une pour chacun de vous, choisissez-en une, puis résolvez les énigmes avant la fin de la nuit, attention, si l'un de vous échoue, vous échouez tous les deux au test ! Réfléchissez avant de vous engager, une fois entré vous ne pourrez plus sortir, et si vous échouez à certaines épreuves certains dommages collatéraux peuvent vous être mortel ! Vous pouvez toujours faire demi-tour et abandonnez vos réponses ici, ainsi que la prophétie ! Mais si vous souhaitez avoir des réponses à vos questions, la seule façon d'y arriver est de réussir le test ! Réfléchissez bien et si vous tentez le parcours : Bonne chance à vous..."
Les deux frères se regardèrent perplexe, ils n'étaient plus très sûr d'avoir envie de faire ce test, ni d'avoir des réponses. Cependant ils sentaient que si ils ne tentaient pas le test alors ils seraient malheureux et auraient l'impression d'un manque.
C'est la boule au ventre que Tiago choisi sa porte, et que Eliott entra dans l'autre.
Une fois la porte traversée, Tiago atterrit dans une petite salle, au milieu, un grand écran illuminait la pièce. Dessus était indiquée une question, et trois boutons permettaient de répondre à la question, il y avait dix questions. En haut de l'écran un nombre était affiché, en bas un icône indiquant start clignotait. Tiago appuya délicatement sur le bouton et s'attendit au pire. Il fut agréablement surpris. Pour les premières questions il n'y avait aucun challenge. Quel était son passe-temps favori ? De quel couleur était son animal préféré ? Quel était le dernier livre qu'il avait lu ? Quel était sa chanson du moment ? La dernière question était plus étrange : s'il pouvait choisir, avec quelle personne sortirait-il ? Tiago eu du mal à décider de sa réponse. Puis il opta finalement pour la vérité. Au moment de passer à la sixième question, un message d'erreur apparu : " Question en cours de construction... Veuillez patienter...".
Tiago eu un mauvais pressentiment. L'écran finit par afficher une nouvelle question avec cette fois-ci trois réponses possibles.
Quel est le passe-temps favori de Eliott ?
* Regarder son amoureuse
* Regarder les étoiles
* Regarder les gens en ville
Tiago opta pour la première réponse, mais il vit le compteur en haut de l'écran afficher -1, il restait maintenant 14 essais. Après un rapide calcul mental Tiago repris confiance, il pouvait tester à chaque fois toutes les réponses !
Soudain, le compteur afficha de nouveau -1, il n'avait touché à rien... -1 de nouveau ! Le temps ! Tiago devait se dépêcher plus il mettait du temps à répondre, moins il avait de chances ...
Il testa la deuxième solution : -1. Il finit donc par choisir la dernière option. Il accéda à une nouvelle question.
De quel couleur est l'animal préféré d'Eliott ?
* Vert
* Bleu
* Violet
Tiago vu le compteur descendre encore d'un alors que cela ne faisait même pas une minute depuis le dernier -1, il se dépêcha donc. Violet. -1. Vert.
Quel était le dernier livre lu par Eliott ?
* Pensée et liaison
* Pouvoir de divination
* La science et le pouvoir des doublons
Tiago essaya de réfléchir afin de choisir la bonne réponse du premier coup... -1. -1. Tiago ne comprenait pas pourquoi le compteur descendait si rapidement, il descendait aléatoirement. La science et le pouvoir des doublons.
Alors qu'une nouvelle question s'affichait, le compteur perdit encore deux points. Il était désormais à 5. Et il lui restait encore 2 questions. -1. -1. Soudain il entendit "T'es pas sérieux mec ! Vraiment "Par-delà les montagnes il y a un petit village" tu pouvais pas choisir une chanson plus classique ! J'hallucine t'as vraiment des goûts horrible question musique !"
Tiago se figea, il n'avait pas parlé et pourtant il avait entendu une voix très claire, une voix ressemblant étrangement à la sienne.
Quel est la chanson du moment d'Eliott ?
* Dans les airs
* Voltige pour une as
* Allongé le regard vers les cieux
"... un peu funambule, un peu clown, un peu poète... Dans un dernier saut, dans une dernière pirouette..." Quelqu'un fredonnait dans la tête de Tiago, celui-ci dû s'asseoir, avant de voir un -1, s'afficher et de se relever pour continuer le test.
Il n'était pas aussi bien calé en musique que son frère mais il avait reconnu de quelle chanson provenait la mélodie chantonnée. Voltige pour une as.
S'il pouvait choisir, avec qui Eliott sortirait-il ?
* Espionne
* Voltigeuse
* Roselia
-1. Le compteur affichait désormais 1. Il avait le droit qu'a une seule erreur. Maintenant, il espérait pouvoir réentendre la voix qui lui avait soufflée la bonne réponse. Comme le compteur ne bougeait plus, il attendit...
"Pff ! Qu'est-ce qu'il fabrique ? Youhou Tiago ! Si tu veux rencontrer la personne que tu n'as pas encore rencontrée ce serait bien de te bouger !!!" Tiago piqua un fard en entendant sa réponse à la dernière question... Mais d'où venait cette voix ?
Pour Tiago, seul deux choix lui paraissaient probables, il en choisit un. Voltigeuse.
BRAVO afficha l'écran, puis une porte dans le mur se découpa et le jeune homme sortit de la petite pièce qui commençait à l'oppresser.
Il atterrit dans une plus grande salle séparée par un rideau de fer.
— Eliott ? Se risqua à demander Tiago.
— Enfin c'est pas trop tôt, lui répondit une voix de l'autre côté du rideau. D'après ce que j'ai compris on doit maintenant arriver en haut de cette salle.
Tiago leva la tête mais le plafond assez bas le surprit : qu'avait voulu dire son frère ?
— Bon, vu que ça fait un bout de temps que je suis là, je suis monté dans l'ascenseur mais il ne veut pas bouger j'ai déjà testé tous les boutons... T'en aurais pas un de ton coté par hasard ?
— Euh... Attend ! Si j'en vois un t'es prêt ?
Tiago appuya sur un gros bouton rouge, il entendit un mécanisme se déclencher, mais il entendit surtout Eliott crier : « Ça maaarche ! ».
— Tiago à ton tour de monter ! Essaye de grimper quelque part, essaye de venir me rejoindre ...
— T'es bien drôle toi ! Le plafond est très bas, et y'a aucune sortie, je ne sais pas comment faire !
— Et y a aucun bouton de ton côté ?
— Ben si y'a bien un autre bouton qui vient de s'allumer ! Je le teste ?
Il n'attendit pas la réponse de son frère ... Il enfonça le bouton bleu.
— Espèce d'abruti ! Idiot ! Je suis redescendu à cause de toi ! Tu aurais dû me laisser tester les boutons qu'il y avait en haut !
— Désolé ! Mais peut-être que tu devrais re-tester les boutons d'en bas ...
— Umm ! T'as peut-être raison mais le problème c'est que si tu montes, ensuite je ne pourrais plus monter !
Cependant, les garçons décidèrent de tester les boutons du côté d'Eliott. Le premier bouton n'eut aucun effet, ils entendirent seulement un mécanisme se mettre en marche, comme une porte qui s'ouvre. Mais ils ne virent rien, ni d'un côté, ni de l'autre. Au bouton suivant, Tiago vit le plafond s'ouvrir et une échelle apparaître. Avec prudence, Eliott testa le dernier bouton. Une plateforme en haut de l'échelle sortit du mur.
— Voilà, ce qu'on va faire : tu montes dans l'ascenseur, je te le met en route, ensuite je monte jusqu'à la plateforme et ensuite on avisera.
Lorsque Tiago mit le pied sur la plateforme, l'échelle se replia, et un passage dans le rideau de fer s'ouvrit. Il appela son frère pour lui demander ou l'ascenseur l'avait déposé. Cependant, il eu beau hurler de toutes ses forces, aucune réponse. Ne sachant que faire sur ce petit bout de bois sortant du mur, il entra dans le passage. Il arriva de l'autre côté du rideau de fer, et en levant la tête, il pu voir le haut plafond dont parlait son frère un peu plus tôt. Lorsqu'il regarda en bas, il fut pris de vertige et s'assit, en effet le sol était de verre.
Toc ! Toc !
Tiago se pencha et vit son frère dans une pièce similaire, mais Eliott était à l'étage en dessous de lui. Dès que son frère le vit, celui-ci se mit à lui crier quelque chose. Cependant les salles étaient isolées de sorte que ni l'un ni l'autre ne puisse entendre ce que disait l'autre. Une fois que les jumeaux eurent compris que crier ne servirait à rien, ils essayèrent de communiquer en langue des signes. Tiago réussit à faire comprendre qu'il ne voyait aucuns voyants, ou autre élément qui aurait pu leur servir. Au contraire, de son côté Eliott avait toujours autant de boutons mais cela ne lui changeait rien. Comme la fois précédente, Eliott testa les différents interrupteurs. Au bout du troisième essai Tiago entendis un bruit de l'autre côté du passage : la plaque venait de se replier. Heureusement qu'il n'était plus dessus ! Le quatrième bouton fit monter l'ascenseur d'Eliott et Tiago vit le sol s'éloigner de plus en plus... Il était sur l'ascenseur. En voyant le plafond se rapprocher dangereusement, il tapa contre le sol pour prévenir Eliott. Celui-ci ne réagit pas, trop occupé à comprendre comment abaisser la dernière poignée. Tiago tapait de plus en plus fort à mesure que le plafond s'approchait. Il commençait à paniquer. Eliott commençait à s'énerver sur la manivelle qui ne voulait pas descendre, il essayait de toutes ses forces, aucun résultat.
BANG !
L'ascenseur venait de se stopper, Tiago était allongé au sol, incapable de bouger, il avait fermé les yeux et n'osait plus bouger. En voyant son frère dans cet état Eliott culpabilisa, ils avaient frôlé la catastrophe. Tiago se remit doucement de ses émotions, quand il fut certain qu'il ne risquait plus rien, il rassura son frère.
Cette fois-ci l'ascenseur avait déposé Eliott au niveau d'un passage. Celui-ci l'emprunta, il se retrouva dans une autre salle légèrement plus grande et aussi haute que la première, en haut on pouvait voir apparaître les vingt-huit clochettes de la tour. Ils leur restaient environ une heure pour s'y rendre. Lorsque Tiago vit son frère disparaître dans le passage, la porte de l'ascenseur se ferma et le plafond s'éloigna de lui, laissant apparaître une corde ainsi qu'une petite passerelle. Tiago tenta de communiquer avec son frère en criant, mais celui-ci ne répondit pas. Ils ne pouvaient désormais ni se parler, ni se voir. Le jeu se compliquait.
Tiago s'attaqua à la corde. Il n'avait jamais été très fort à ce jeu, il admirait beaucoup son frère qui y grimpait avec facilité. Pourquoi ce genre d'épreuves lui tombaient elles dessus ? Même avec toute sa bonne volonté, Tiago fut incapable de franchir les quatre mètres qui le séparaient de la passerelle. Il essaya de sauter, mais à son atterrissage l'ascenseur perdit quelques centimètres de hauteur, il ne réessaya donc pas.
— Mais quelle merde ce truc !
Tiago se retourna, personne. Pourtant il n'avait pas rêvé, il avait bien entendu une voix. La même voix que lors du premier test, la même voix qui l'avait aidé, puis qui s'était moqué... Qui était cette mystérieuse personne ?
— Stoooooooooop ! Je te dis de t'arrêter abruti !
Tiago qui n'avait pas bougé, ne comprenait pas ce qui se passait.
— Hé ho ! Il y a quelqu'un ? Excusez-moi ? Qui êtes-vous ?
Il n'eut aucune réponse. Puis cinq minutes plus tard :
— Imbécile ! Idiot ! Abrutit ! Crétin ! Tu vas marcher foutu ascenseur ? J'ai déjà testé tous les boutons ça ne fonctionne pas, mais je vais en venir à bout ! Je te promets saloperie que je vais réussir à te faire fonctionner maudit truc de merde !
En entendant cela, Tiago fini par comprendre. La personne en question n'était personne d'autre que ... son frère ! Seulement lui était capable de dire autant de gros mot contre une simple machine.
—*Bon je me calme, je vais tester tous les boutons dans l'ordre de la plaquette, peut-être qu'il suffit de réaliser le numéro de série de l'ascenseur avec les différents voyants pour que celui-ci se mette en marche !*
Tiago hallucina, son frère était un génie, il n'aurait jamais eu cette idée. Il devait être à la hauteur lui aussi, il reprit la corde dans ses mains et commença par faire un gros nœud au bas de celle-ci, puis il en fit un le plus haut possible. Ainsi peut-être il parviendrait plus facilement à la passerelle.
—*8 7 5 9 6 4 2 3 3 6 4 8... et dernier bouton... attention heure de vérité...5*
Tiago qui venait de monter sur le premier nœud vit la corde s'élever vers la passerelle. Un mécanisme permettait de la faire monter doucement. Il se félicita d'avoir fait un assez gros nœud pour pouvoir tenir sans trop de difficultés. La montée de la corde avait-elle un lien avec le code que venait de réaliser Eliott ? Il ne pouvait pas en être certain mais quelque chose lui disait que tout cela était lié.
—*Maudit truc, j'abandonnerais pas si c'est ce que tu crois ! Même si tu descends ! J'ai réussi à te faire descendre, je vais bien réussir à te faire monter !*
Tiago en était désormais persuadé : la montée de la corde était directement lié à Eliott et la descente de sa "machine". Une fois arrivé sur la passerelle, Tiago découvrit un clavier à neuf touches avec de gros numéro représenté dessus. Il était persuadé que le code était le même que celui d'Eliott mais il n'arrivait pas à s'en souvenir !
—*Mais tu vas marcher oui ? Pourquoi maintenant quand j'appuie sur les voyants plus aucune lumière ne s'allume ? J'ai peut-être quand même fait une bêtise ? *
Tiago perçu de la peur dans la voix de son frère. Il essaya de communiquer avec lui, il pensa très fort à ce qu'il voulait lui dire et ferma les yeux. Aucun résultat. Il réessaya en disant sa phrase à voix haute. Aucun résultat.
—*Allez s'il te plaît fonctionne maudite machine, je m'en fiche si je réussis le test mais je veux revoir le ciel, je veux retourner vivre ma vie, promis je chercherais plus les mystères de l'île, promis j'arrêterais de poser des questions dérangeantes... Mais s'il te plait laisse-moi rentrer à la maison en vie. *
En entendant cela, Tiago essaya de formuler le message le plus rassurant et le plus bref possible. Il s'imagina son frère à côté de lui, le regardant avec des yeux plein de peur. Le rassurer d'abord, en priorité !
—*Hey n'ai pas peur, on va s'en sortir ne t'inquiète pas. Tu es trop fort, et tu n'as pas fait de bêtise. *
—*Qui est là ? Qui parle ? Tiago ? *
Tiago n'en revenait pas... il avait réussi à communiquer avec son frère et celui-ci avait deviné en deux secondes seulement qui parlait dans sa tête. Il avait aussi compris son erreur des premières fois : il ne pensait pas assez à son frère et trop au message. S'imaginant toujours son frère à côté, il continua.
—*Oui c'est moi. C'est Tiago ! Et tu n'as pas fait de bêtise frérot, en faisant ce code tu m'as permis d'atteindre une passerelle en hauteur. Sur cette passerelle il y a un boîtier avec des numéros, je pense que le code pour faire monter ton ascenseur est le même que pour le faire descendre, seulement c'est moi qui doit le rentrer. Enfin ce ne sont que des suppositions...*
—* D'accord, ça se tient, tu me dis quand tu as fini de le taper que je me prépare psychologiquement ! *
—* Mmm, je vais avoir besoin de ton aide ! J'ai besoin du code, je ne m'en souviens pas. *
Eliott lui dicta le code, Tiago prenait bien soin de répéter ce qu'il entendait afin d'être sûr qu'il ait tout bien entendu.
...5
Cricht, cricht, cricht, cricht, cricht...
L'ascenseur montait doucement, Eliott remercia mentalement son frère.
Lorsque l'ascenseur s'arrêta celui-ci paniqua un peu. Mais lorsqu'il vit Tiago sortir de l'autre côté du mur pour venir le rejoindre, il se calma. Il n'avait jamais eu autant envie de revoir son frère. Quand les jumeaux furent à nouveau réunis, ils se serrèrent dans les bras. De l'extérieur on aurait pu croire qu'ils ne parlaient pas, mais en réalité un dialogue mental entre les deux frères faisait rage ! Chacun racontait à l'autre ce qu'il venait de vivre, et aucun d'eux ne remarqua que l'ascenseur montait doucement en direction des clochettes.
Ils avaient réussi le test.
Kathlina, Aline & Jules
Ce n'est que le soir, qu'ils arrivèrent enfin à se rendre à Amoni. Puisque Aline voulait en apprendre plus de son peuple, ils décidèrent de se rendre une nouvelle fois à la bibliothèque de Mirina. Le soulagement fut donc double lorsqu'ils se trouvèrent à trois dans un endroit qu'ils connaissaient déjà. Jules fut tellement heureux de voir Kathlina en bonne santé qu'il n'osa lui parler de son état dans l'autre monde. Il ne voulait pas parler du désespoir qu'il avait éprouvé, ni de sa peur. Il se contenta donc de sa présence et décida de prendre en main la suite de leur aventure. De plus, il se promit qu'il resterait dans ce monde, ou qu'au moins il ferait tout le nécessaire pour que Kathlina ne retourne pas sur Terre où, il l'avait bien compris, elle était proche de la mort. Avec cette idée en tête, il cacha bien son pendentif azur sous ses vêtements bleus et se dirigea une nouvelle fois vers les étagères du coin "Mythes et Légendes".
Quelle fut sa surprise lorsqu'il se rapprocha du rayon correspondant au peuple Sorn, et que celui-ci resta flou, alors que juste avant il était passé à une étagère et qu'il avait pu déchiffrer Walan. Puis ce fut au tour de Kathlina et Aline, aucun des adolescents n'arriva à se rapprocher des étagères sans que celles-ci disparaissaient. Qu'est-ce qui avait changé depuis la dernière fois ? Ne sachant quoi faire, et étant en quête de réponses les trois jeunes allèrent voir le bibliothécaire de la salle. Lorsque Kathlina avait cherché du regard quelqu'un à interroger, elle avait aperçu des nombreux dessins au plafond : c'étaient des animaux bien étranges qui lui donnèrent une impression de déjà-vu. Elle n'eut pas beaucoup de temps à se questionner sur leur sujet car le vieux bibliothécaire attira toute son attention après que Jules lui eut demandé pourquoi ils n'avaient plus accès aux mythes de Lothon :
— C'est normal jeune homme, chacun ne peut avoir accès qu'aux mythes de son peuple.
Aline leur avait déjà expliqué cela, toutefois Jules insista :
— Pourquoi alors la dernière fois avons-nous pu voir et lire Le Peuple Partagé ? Qu'est-ce qui a changé depuis la dernière fois ? De plus, même si moi et Kathlina on ne fait pas parti du peuple Sorn, Aline en fait partie, elle devrait donc pouvoir accéder à ces légendes !
Pour prouver ce que Jules avançait, Aline se transforma en tankilo. Mais cela n'impressionna nullement l'ancien bibliothécaire :
— La dernière fois je vous ai laissé l'accès à l'ensemble des mythes de Lothon. Mais c'était une occasion unique que je ne peux répéter. Vous devez donc vous contenter de ce que vous avez trouvé la dernière fois. Vos réponses, vous devez aller les chercher autre part.
Sur ce, il leur tourna le dos et alla s'occuper de mettre en rayon des ouvrages. Jules enregistra, que malgré ce qu'il avait dit, cet vieil homme avait accès à tous les rayons. Cela devait être grâce à son statut de bibliothécaire. Mais les trois voyageurs ne comprenaient toujours pas pourquoi Aline n'avait plus accès aux mythes. Ne sachant à qui demander conseil, et ne pouvant rien faire dans ce rayon de la bibliothèque, celui-ci ne leur étant pas accessible, ils prirent l'ascenseur pour se rendirent à l'accueil.
Arrivés en haut, ils décidèrent d'aller découvrir Mirina. La jeune Sorn en avait toujours eu envie et n'était pas prête à retourner dans sa ville natale. Ainsi, au lieu de prendre un sas pour Lothon, ils sortirent à l'air libre. Tout d'abord ils allèrent à Mirina le Haut. Depuis que Aline l'avait vu dans un prospectus elle ne rêvait que d'une chose, s'y rendre pour voir l'ensemble des écoles et l'université : Tasakol. Le campus semblait très accueillant avec l'abondance de sa végétation. Aline avait qu'une hâte, avoir dix-sept ans et entrer dans cette école réservée aux filles. S'ils avaient voulu visiter le campus, Jules aurait été obligé de se faire passer pour une fille, car sur l'ensemble du terrain, aucun garçon n'était autorisé. Puisqu'il n'avait toujours pas envie de se déguiser, ils se dirigèrent vers le port de Mirina, qui constituait la deuxième plus grande partie de la ville. À la place des habitations que l'on pouvait observer à Mirina le Haut, ici on trouvait toutes les usines et un port d'échange gigantesque. Jules admira des bateaux de toutes tailles et formes, et plus particulièrement les bulles transparentes flottant au milieu des cargos. Le port lui rappela celui de la plage d'Isil. L'adolescent avait l'impression que cela faisait une éternité que lui et son amie s'étaient trouvés perdus au milieu de la forêt et au bord de la plage de cette île. En effet beaucoup de choses s'étaient passés depuis.
Un commerçant capta le regard admiratif de Jules et lui proposa de voyager avec une des bulles. Celui-ci se tourna vers ses deux accompagnatrices pour leur demander leur avis, et remarqua qu'il les avait perdus dans la foulé. Pris de panique il tourna sur lui-même et essaya de retrouver leurs visages parmi la foule. Après quelques minutes folles de recherche, il les trouva devant un des multiples stands du marché entrain de contempler le travail d'un artisan qui ne fabriquait que des objets brillants de mille et une couleurs. Cet artisan était en train d'expliquer à qui voulait bien l'entendre :
— Mesdames, messieurs, devant vous se trouve un bijou fait de la matière la plus précieuse qui existe ! Venez admirer cette boucle d'oreille fait d'os de Meduliz ! Cet objet issu tout droit des légendes peut vous appartenir, vous posséderiez alors un ornement fait de la même matière que la couronne de la reine de Shaniri !
Les cris du commerçant attiraient de plus en plus de monde. Certains pour admirer le joyau rare, d'autres pour écouter les légendes qui se racontaient concernant son origine, et d'autres encore pour contester ce que racontait le commerçant. Parmi eux, se trouvait un vieux connaisseur :
— Arrêtez de répandre ces conneries ! L'os de Meduliz ne ressemble pas à cela ! Je l'ai déjà vu de mes propres yeux et c'est mille fois plus beau ! Et croyez en ma parole, si cela en était vraiment un, personne ici pourrait se le payer. Cet homme est un arnaqueur ! Les derniers Meduliz sont sous protection, si vous affirmez donc de posséder l'un de leur os, je vous accuse de braconnage ! Êtes-vous sûr de vouloir continuer à répandre le mensonge que ce rubis est un os de Meduliz ?
La tirade du marin n'avait pas seulement impressionné les trois aventuriers et le marchand, mais l'ensemble de la foule. Tout le monde échangeait des regards interrogatoires : Qui croire ? Comme beaucoup de jeunes qui traînaient dans le port, les trois étrangers suivirent le marin pour écouter ce qu'il avait à raconter. D'humeur maussade celui-ci les envoya promener. Un conteur vit son occasion venue, et invita l'attroupement de jeunes curieux devant son étal. Il ne fit pas attendre longtemps ses spectateurs, avant d'entamer son récit. Jules avait la tête ailleurs, il observait les personnes autour de lui et rata ainsi le début de la légende, et par conséquent il n'arriva pas à comprendre la suite. Lorsque le conteur eut fini, et que tout le monde repris son chemin, il demanda un peu honteux aux filles un résumé de la légende :
Il apprit que cela faisait des générations que parmi les prêtresses une légende circulait au sujet des Meduliz. Selon la légende, lors de la création d'Amoni, la déesse créa une première reine des mers à partir de sa volonté et d'un joyau blanc. Elle forma l'animal à l'image de ce qui deviendrait la première Meduliz : une créature presque transparente nageant à la surface de l'océan. Sa transparence était telle qu'en présence de rayons de soleils, sa peau brillait de toutes les couleurs. Elle créa ensuite une multitude de plus petites Meduliz possédant des os de tous les couleurs imaginables. Mais en vérité, jusqu'à aujourd'hui on n'a découvert que sept couleurs différentes : jaune, orange, bleu, rouge, vert, violet et indigo. Personne n'avait jamais capturé une Meduliz possédant l'os blanc. Le mystère de la première reine des mers n'ayant toujours pas été résolu, personne ne savait si elle existait ou a même existé.
Dans tous les cas, puisque ces animaux étaient d'origine divine, ils étaient très respectés par les prêtresses. Cependant, ils étaient menacés d'extinction à cause de l'augmentation sans précédent du braconnages ces dernières décennies. En effet, les braconniers espéraient obtenir d'important pouvoirs grâce à leurs os. À présent ils étaient devenus tellement rare, qu'à part la famille royale de Shaniri, personne n'oserait posséder des bijoux fait de cette matière. Les bijoux apportaient pouvoirs et chance à leur porteur. Cependant, portés par de mauvaises personnes ils n'apportaient que malchance et désespoir. Ces ornements étaient supposés être directement relié à la déesse d'Amoni ainsi, celui ne respectant pas sa volonté en ferait les frais. Pour cette raison, personne n'osait toucher ces pierres à moins d'être prêtresse, braconnier, fou, ou encore la reine Isis.
Lorsque le conteur fit la description de l'os de Meduliz, les deux filles écoutèrent avec encore plus d'attention. La description correspondait exactement au pendentif de Jules et fit penser aux filles à des objets qui leur appartenait. Mais au lieu de parler de cela, les aventuriers devaient trouver un moyen de rentrer, il commençait à se faire très tard. Aline acheta leur dîner au premier marchand venu : des sortes de crabes jaunes à l'huile. Ces crabes s'appelaient Krebas et avaient vraiment un goût particulier, très huileux. Mais, en comparaison à la nourriture d'hôpital c'était vraiment bon, et ça changeait. Toutefois, puisqu'ils avaient pris leur temps à traîner dans le port, les sas étaient encore une fois déjà fermés. Se décidant à retourner près de la grande bibliothèque, leur seul repère dans cette énorme ville, ils réalisèrent qu'ils ne savaient pas quelle direction prendre. Pour commencer ils s'éloignèrent du port en direction de Mirina le Haut. En cherchant un point d'orientation le regard des trois fut attiré par une tour imposante. Avec sa grande hauteur elle était un bon repère. Une fois arrivés devant, ils ne purent toutefois s'empêcher de rentrer. Au moment où ils franchirent le seuil de la porte, ils furent séparés :
Kathlina remarqua tout de suite qu'elle avait changé de position, car elle eut l'impression de flotter dans le noir. Frénétiquement elle regarda autour d'elle mais ne vit rien. Il ne fallut pas longtemps à ses yeux pour s'habituer au noir, quand ce fût le cas, elle pu voir qu'en réalité elle n'était pas dans le noir complet : il y avait des points lumineux tout autour d'elle. Même si cela avait quelque chose de reposant et rassurant, elle ne savait pas ce qui se passait, et surtout elle n'avait aucune idée d'où étaient ses amis. Et comment avait-elle fait pour être téléporté dans un lieu pareil ?
Puis une idée lui vient : et si elle, elle pouvait se téléporter de son propre choix ? Avec beaucoup d'espoir elle pensa fortement à Jules. Lorsqu'elle entendit la voix surprise de celui-ci l'appeler, sa joie fut énorme. Pourtant, avant de pouvoir lui répondre et le questionner sur ce qui s'était passé, elle devait se concentrer pour nager. En effet, les deux adolescents se trouvaient dans l'eau, et aussi loin qu'ils pouvaient voir, ils ne voyaient que de l'eau. Mais que faisaient-ils ici ? À bout de force car cela faisait déjà une dizaine de minutes qu'il nageait sans but et ne sachant quoi faire, Jules choisi, cela commençait à devenir une habitude, la sortie de secours qui était son pendentif.
Kathlina se retrouva à nouveau toute seule, cette fois pas dans le noir mais dans l'eau. Autant juste avant elle avait eu l'impression de flotter, autant maintenant elle se sentait couler. Mais qu'est-ce qu'il s'était passé ? Pourquoi était-elle à nouveau toute seule ? Où était passé Jules ? Était-il retourné sur Terre ? Mais pourquoi était-elle toujours ici ? Il avait pourtant bien tenu sa main, pourquoi ne s'était-elle pas téléportée avec lui comme les fois précédentes ? La nage la fatiguait. Décidément elle n'avait aucune endurance. Ne voyant d'autre solution, elle se remit à penser fortement à Jules. Mais ça ne fonctionnait pas, il ne se passait rien. Elle se trouvait toujours au même endroit, devant battre des pieds et mains pour se maintenir sur la surface de l'eau. Pourquoi cela ne marchait pas ? Au moment où elle sentit toutes ses forces l'abandonner et qu'elle était en train de couler, elle sentit un fond en dessus de ses pieds. Enfin ! Ce n'était pas trop tôt ! Elle se trouvait de nouveau à leur point de départ dans la grande tour. Toutefois elle était toute seule. Jules était parti, et Aline aussi. Où pouvait bien être son amie ? Était-elle aussi quelque part au milieu de l'océan ? Mais que pouvait-elle bien faire maintenant ?
Alors qu'elle voulait sortir de la tour, toutes les clochettes se mirent à sonner. Sans savoir d'où cette envie lui venait, Kathlina essaya de distinguer les vingt-six différents sons. Fatigué et perdu elle se laissa emporter par la mélodie qui lui procura une paix intérieure. Mais celle-ci n'était pas seulement harmonieuse, elle était aussi envoûtante. Sans savoir pourquoi et comment, Kathlina s'approcha des clochettes. Jamais elle ne se serait crue capable de monter autant de marches après les escapades de sa journée. Mais ce n'était ni la fatigue ni son esprit qui guidaient ses pas. C'était son cœur envoûté. Face à la plus petite des clochettes qui laissait entendre les dernières notes de la mélodie, elle s'arrêta.
Dès que le dernier son fût joué, elle entendit un DING venant de derrière elle. La jeune fille se retourna et vit un ascenseur s'ouvrir, dedans à travers une lumière verte elle pouvait distinguer deux hommes se serrant dans les bras. Les deux ne semblaient pas la voir. Kathlina pris son courage à deux mains et s'approcha des deux étrangers. Dans un silence presque sacré les inconnus avaient l'air de vivre un moment profond, elle n'osa donc pas les interrompre. Cependant elle ne pouvait s'empêcher de les observer : Ils avaient un air familier, et malgré leurs yeux fermés, elle pouvait distinguer qu'elle s'était trompée : ces deux devaient avoir environ son âge. De plus, sa première pensée que c'était un couple, fut remplacé d'une évidence : les deux garçons étaient des frères, voir même jumeaux !
Kathlina pu observer comment les deux s'écartèrent et se dévisagèrent. Ils étaient tellement absorbés l'un par l'autre qu'ils ne l'avaient toujours pas remarqué. Elle hésitait à se faire remarquer, mais alors qu'elle voulait s'approcher d'eux, elle sentit ses jambes se dérober. Il n'y avait rien ni personne pour la rattraper.
La douce mélodie des cloches réveilla Kathlina quelques heures plus tard. En se frottant les yeux, elle aperçut avec soulagement qu'elle se trouvait toujours en haut de la grande tour de Mirina. Elle ne s'était donc pas téléportée en dormant ! Les garçons qu'elle avait aperçu avant de tomber de fatigue avaient toutefois disparus. Cependant elle n'était pas seule, car à ses côtés se tenait une silhouette blanche. Qui était-ce ? Doucement la dame blanche se rapprocha de la jeune fille apeurée et d'une voix douce commença à parler :
— Très bien, je vois que tu es réveillée. Ceci n'est pas un endroit où dormir pour une demoiselle. Viens avec moi, je vais t'emmener au couvent.
Sans que Kathlina réagisse, la bonne femme l'aida à se relever et la fit avancer jusqu'à l'ascenseur. Celui-ci se mit en marche après que la mystérieuse dame ait posé sa paume sur une surface dégagent une forte lumière blanche, attirant le regard de Kathlina et lui donnant le tournis. Soutenu par des mains fortes, la jeune fille sortit de la tour en posant une dernière fois un regard sur la tapisserie multicolore. En passant le seuil, Kathlina senti une vague de forces s'abattre sur elle et lui dérober ses dernières forces. Malgré les mots encourageants, chaque pas était une torture. Kathlina aurait bien aimé expliquer sa condition à la dame brune, mais elle en était incapable. Heureusement, le couvent se trouvait juste à côté de la grande tour ! À peine posé un pied dedans, l'adolescente sentit une chaleur accueillante l'envahir. Alors qu'elle jetait un regard submergé par cette chaleur autour d'elle, la grande brune fit sonner une clochette. Quelques secondes après elle entendit des pas légers se rapprocher, avant de voir deux filles de son âge entrer. Dans la lumière des bougies Kathlina les observa : elles portaient des tuniques en patchwork colorées. La plus grande des deux voulu remplacer la dame blanche, mais avec la chaleur qui l'envahissait, Kathlina arriva à se maintenir toute seule. En voyant que sa protégée était entre de bonnes mains, la dame ressortie. Les jeunes filles la saluèrent en cœur :
— Bonne soirée sieur Inésa !
Puis, juste avant qu'elle ne ressorte, l'une des deux la rattrapa pour lui demander :
— Qu'as-tu découvert dans la tour ? Pourquoi s'est-elle mise à sonner au milieu de la nuit ?
— J'y ai trouvé cette jeune fille. Elle était en haut de la tour ! Toutes les portes de la tour étaient ouvertes, il faut que j'y retourne de suite afin de tout remettre en ordre. Essayez de joindre soeur Setaal, il faut qu'elle rentre le plus rapidement possible !
Et sur ce, elle repartit laissant Kathlina seule avec les deux jeunes inconnues. Tout de suite l'une la questionna :
— Qui es-tu ? Qu'as-tu fait en haut de notre tour sacrée ? Comment as-tu fait pour y aller ? Peux-tu me montrer le passage que tu as pris ?
Kathlina s'apprêta à répondre aux questions, mais un éclat de rire l'en empêcha. Celle qui s'était rapprochée de l'adolescente gronda gentiment l'autre :
— Sheba, arrête de poser des questions !
— Mais Thil... essaya de répliquer celle-ci.
— Pas de mais ! C'est le milieu de la nuit, allez, viens toi ! On t'emmène à la salle de repos, on parlera du reste demain. J'ai envie de dormir moi !
Tout en parlant, elle prit Kathlina par le bras et la guida jusqu'à une salle sombre puis la poussa en direction d'un lit douillet. Celle-ci y tomba comme une pierre et s'endormit en trois secondes.
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