Chapitre 1
Tout a commencé début septembre, le jour de la rentrée.
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Ariane
Je me réveille en sursaut. Mon réveil doit sonner depuis une dizaine de minutes. Oh non, je vais encore être en retard ! Contente d'avoir préparé mes affaires la veille, je m'habille en vitesse et attrape mon sac avec mon croissant, avant de courir la bouche pleine jusqu'à l'arrêt de bus. Charlotte m'y attend déjà, prête à me faire une réflexion.
— Encore en retard, s'exclame celle-ci.
Je pouffe de rire. Elle est tellement prévisible ! Il faut dire que je ne suis pas ce qui s'appelle une personne ponctuelle, mais bon, on fait avec.
Une fois dans le bus, l'ambiance devient plutôt pesante. On est toutes les deux très inquiètes. Passer dans la classe supérieure n'est pas toujours une mince affaire, surtout si l'on se retrouve séparé de sa meilleure amie pour la première fois de sa vie.
Arrivées au lycée, nous nous dirigeons vers l'attroupement de personnes. Tant bien que mal, nous nous faufilons devant le panneau d'affichage. Après quelques minutes de recherche, Charlotte trouve sa classe. Notre classe. Heureuse je me jette dans ses bras !
— On est ensemble !
Nos petits cris hystériques attirant trop les regards, nous nous éclipsons le plus vite possible pour rejoindre notre nouvelle salle de classe.
La journée se passe sans problème. Notre professeur principal, aussi enseignant de français, nous a gâtés : on se retrouve à devoir faire un stupide devoir. Je hais cette matière, à quoi bon apprendre une langue que l'on parle déjà ? Heureusement que Charlotte est là pour m'aider. Cette fille est un vrai génie. Quel que soit le travail à rendre, vous pouvez être sûr que mademoiselle Charlotte Gautier aura une excellente note.
C'est d'ailleurs dans des moments comme celui-là que j'aimerais être comme elle. Moi, je suis loin d'être l'élève modèle. Sans Charlotte pour m'aider, on pourrait même dire que je suis une catastrophe ! Enfin, j'ai quand même le sport, plus particulièrement l'équitation. Cependant, à mon arrivée au lycée, j'ai dû arrêter les compétitions. Mes parents ont jugé bon que je me concentre sur mes études, à mon plus grand regret...
Les seules fois où je monte ma jument Tyara, c'est lors de nos balades improvisées, avec Charlotte et Diabolo, l'étalon de mon frère. Lorsque mes parents nous les ont achetés, Charlotte passait tout son temps à la maison, dans l'espoir de le voir. C'était le bon vieux temps. Maintenant, Simon est parti sur Toulouse pour ses études dans l'aérospatiale et ne rentre que très peu à la maison. Ce qui la rend très vide, mes parents étant toujours en déplacement. Leur travail prennent tellement de place qu'ils en oublient même nos anniversaires... Avant, lorsque mon frère était encore à la maison, ça ne me faisait pas grand-chose, mais maintenant que je me retrouve seule, c'est une autre histoire ! Charlotte essaye d'être la plus présente possible, malgré tout elle ne peut pas rester tout le temps avec moi, elle a aussi une vie.
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Eliott & Tiago
— Allez avance ! On va être en retard !
— Calme-toi, on a encore une demi-heure pour faire cinq cent mètres...
— Il nous restait trente minutes, il y a déjà vingt minutes, je sais que tu n'es jamais stressé mais je ne veux pas être en retard le jour de la rentrée alors s'il te plaît, bouge-toi !
Il avait presque crié, son frère commençait à lui chauffer les nerfs. Eliott était d'un caractère habituellement calme mais la lenteur de son frère le faisait sortir de ses gonds. Il n'aimait pas arriver en retard, encore moins le jour de la rentrée. Il avait hâte de connaître sa classe. Les deux frères avaient toujours été dans la même, et ce fut Eliott qui en souffrit le plus. En effet, il ne possédait pas le génie de son frère. Ils étaient jumeaux, mais leur ressemblance s'arrêtait au physique. Alors qu'Eliott redoublait d'efforts, mais n'était pas excellent, Tiago ne travaillait jamais, mais s'en tirait globalement bien... C'est pourquoi il croisait les doigts pour que, cette fois, le lycée ait bien reçu sa lettre demandant à être séparé de son jumeau.
Ils arrivèrent à la sonnerie, Tiago regarda son frère, plus petit de quelques centimètres. Celui-ci était classe dans sa chemise, il faisait sérieux. Tiago quant à lui portait un t-shirt trois fois trop grand. Perdu dans ses pensées, il sentit qu'une chose, ou plutôt que quelqu'un lui rentrait dedans. Il venait de bousculer une jeune fille aux cheveux ondulés qui avait l'air complètement déboussolée !
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Ariane
Mon sommeil est agité, je me retrouve dans ce qu'il me semble être un autre monde au vu de l'étrangeté des lieux. Tout est si coloré, si vivant qu'on se croirait dans un conte de fée. De nombreuses plantes semblent sortir des murs et me plongent dans un profond sentiment de bien être. Je continue de marcher, émerveillée, dans l'immense couloir où trône un escalier en colimaçon entièrement boisé à l'allure d'un imposant chêne. Tout me semble si différent de chez moi. En regardant par une fenêtre, la beauté du paysage me subjugue. De magnifiques jardins entourés de bâtiments végétalisés se dressent devant moi. Je n'ai jamais vu pareille architecture. Au loin, on peut apercevoir une gigantesque cascade. Alors que je me retourne, je tombe sur un garçon qui semble très surpris de me voir. A son contact, tout disparaît.
Je me réveille en sueur dans mon lit. Tout me semblait si réel... Interrompant mes pensées, je sens quelque chose de froid dans ma main. C'est un splendide pendentif orné d'un cristal orange. Je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi magnifique et intrigant à la fois ! Deux questions fusent alors dans mon cerveau. D'où vient-il et comment est-il arrivé là ? Cela ne peut pas être un cadeau de mes parents, ils ne reviennent que dans l'après-midi.
J'oublie vite mes interrogations en regardant l'heure sur mon réveil. Si je ne me dépêche pas un peu, je vais finir par être en retard ! Une fois prête, je saisis le collier et pars en direction de l'arrêt de bus. Charlotte comme à son habitude m'y attend déjà. Une fois à sa hauteur, je lui montre ma trouvaille. Tout en continuant de parler de mon collier, nous montons dans le bus. Arrivées en classe, un garçon se présente. Il manquait quelqu'un hier ? Charlotte chuchote alors à mon oreille, me sortant ainsi de mes pensées.
— Regarde !
— Tu veux que je regarde quoi ?
— Son pendentif, c'est le même que le tien mais en bleu !
— Tu as raison. C'est une drôle de coïncidence !
— Personnellement je ne crois pas aux coïncidences. Faudra aller lui parler !
— Si tu veux. En plus il a l'air super sympa non ?
— Tu ne veux pas plutôt dire qu'il est mignon ?
Je deviens rouge de honte face au commentaire de mon amie. C'est vrai que le nouveau est plutôt pas mal, mais pas de quoi en faire toute une histoire !
Tout le long du cours je réfléchis à une façon de l'aborder mais en vain. Quand la sonnerie retentit, je juge préférable d'attendre qu'une occasion se présente, il manquerait plus que je me ridiculise dès mon deuxième jour. Je me dirige alors dans ma prochaine salle et le vois assis à la place de Charlotte. Voilà mon occasion ! Enfin... A cet instant j'ai plutôt envie de le dégager. Je vais passer pour une folle, mais pas pour les raisons que je pensais. Quelle ironie ! Je m'approche de ma place et lui dis :
— Euh qu'est-ce que tu fais ici ?
— J'ai cours...
— Je veux dire à cette place, normalement c'est la place de mon amie !
— Eh ben, plus maintenant ! C'est ma place. Je m'appelle Jules et toi ?
— Ariane. Tu es vraiment sûr de ne pas vouloir changer de place ?
— Sûr et certain. Après tout, ça te fera du bien de changer de voisin. Il y a toujours une première fois à tout.
— Premièrement tu ne me connais pas et deuxièmement je ne vais pas rester à côté de quelqu'un d'aussi prétentieux que toi !
Je me mets alors à chercher une place libre. Cependant, à mon plus grand regret tout le monde est déjà assis. L'unique place restante est à côté de cet abruti. C'est bien ma veine... Quand je tourne la tête je le vois afficher un sourire victorieux. Mais quel imbécile !
— Finalement tu restes à côté de moi. me dit-il avec un sourire en coin.
— Je n'ai pas le choix pour ton info...
— Du calme, je ne voulais pas te vexer.
— Trop tard !
— Et que puis-je faire pour me faire pardonner ?
— Changer de place !
— Tu es têtue dis donc.
— Et toi très chiant !
Je lui tourne alors le dos et me mets à écouter le monologue de notre professeur. Ce garçon me tape sur le système ! Mais pour qui il se prend ?! Vivement la fin des cours, j'ai besoin de me détendre. Je tourne alors la tête vers Charlotte pour lui expliquer que je ne l'attendrai pas à la sonnerie. Pour toute réponse, elle hoche la tête.
Quand la sonnerie retentit, je sors en trombe de la classe et cours jusqu'à chez moi, le bus aurait mis trop de temps. Une fois arrivée à la maison, je jette mon sac dans le couloir et attrape les clés de notre petit ranch pour aller seller Tyara et partir en direction de la forêt.
Arrivée à la lisière de celle-ci, Tyara part au galop. Le vent s'engouffre instantanément dans mes cheveux blonds me procurant un sentiment de bien-être et d'apaisement. Tous mes petits tracas avec Jules viennent de disparaître en un instant. C'est alors que le pendentif sous mon t-shirt se met à briller, avant de s'éteindre sans la moindre explication. J'arrête Tyara pour l'observer de plus près d'un air perplexe. Ai-je rêvé ? Sûrement pas ! Je suis encore capable de savoir ce qui est réel. Je décide alors de rentrer pour essayer de joindre Charlotte et tout lui raconter. En voyant le sac de ma mère dans l'entrée, je cours jusqu'à la cuisine et lui saute dans les bras :
— Maman !
— Coucou ma chérie ! Ta rentrée s'est bien passée ?
— Oui oui ça va, et toi le boulot ?
— Justement, je pars demain en Chine pour un reportage et je ne reviendrai que dans dans une semaine. Vu que ton père est aussi en déplacement pour un projet, tu vas encore rester seule quelques jours le temps que ton frère rentre à la maison.
— Ah... je pensais que tu ne partais pas avant le mois prochain.
Dépitée, je pars en direction de ma chambre. Pourquoi est-ce que je me retrouve toujours toute seule...
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Kathlina
Aujourd'hui était le premier jour des cours. Elle détestait ce jour. Pas parce que les cours commençaient, mais parce que c'était la fin des vacances. Toute autre personne aurait dit que c'était la même chose. Mais ce n'était pas le cas. Ses cours, elle pouvait les prendre quand bon lui semblait, cependant, lorsque les vacances finissaient, elle était de nouveau toute seule. Toute seule toute la journée. Toute seule toute la semaine, même le week-end. Elle ne pouvait jamais voir quelqu'un ! Il y avait seulement une personne qu'elle voyait pendant les vacances. Ce n'était pas de sa faute, en tout cas c'est ce qu'elle se répétait sans cesse.
Elle habitait dans son petit monde, exclue des autres, loin de tout et de tout le monde. Cela faisait plus de quatre ans qu'elle n'était plus allée voir une copine. Les seules fois où elle sortait de son petit monde, c'était pour aller là où sa mère voulait qu'elle aille, ce n'était donc pas elle qui choisissait ce qu'elle faisait. Elle était fatiguée de tout ça. Ce n'était pas qu'elle n'arrivait pas à comprendre sa mère, c'est normal qu'une mère se fasse du souci pour son enfant, surtout lorsque celui-ci est atteint d'une maladie grave. Mais tout de même, elle voulait avoir plus de liberté ! Kathlina n'en pouvait plus d'être enfermée, malheureusement avec sa maladie elle n'avait pas d'autre choix. Son corps ne lui permettait pas de découvrir le monde et de faire des rencontres autres que par internet.
Le pire pour elle, était le fait qu'elle ne puisse pas avoir une vie de lycéenne "normale". Cette année elle aurait dû entrer en seconde, mais elle n'était plus allée à l'école depuis les vacances de CM2. Pourtant ce n'était pas l'envie qui lui manquait. Bien sûr elle devait quand même suivre des cours, mais entre une classe avec une trentaine d'élèves et un enseignement avec seulement un professeur en ligne, il y avait une énorme différence. Et cette différence, Kathlina la ressentait tous les jours.
Son cauchemar avait commencé pendant les vacances d'été avant qu'elle ne rentre en sixième. Elle les avait passées à la plage avec ses parents. Ceux-ci avaient passé beaucoup de temps à chercher une nouvelle maison, puisque sa mère voulait à tout prix déménager dans le sud. Ainsi ils avaient passé leurs vacances à chercher LA maison parfaite, mais sans succès. Pour cette raison, Kathlina passa la plupart de ses vacances en compagnie de ses grands-parents à Aigues-Mortes. Elle adorait cette période de l'année ! Elle se sentait libre car ils ne lui imposaient jamais de programme et ainsi, elle passait ses journées en compagnie d'enfants de son âge. Ceux-ci lui montraient la ville avec ses recoins et ses secrets. Chaque année, ils se retrouvaient au même endroit, loin des adultes et du reste du monde. Dans ces moments, ils oubliaient tout et ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient. Quand ils se baladaient en groupe, ils se sentaient grands et pensaient que tout leur était possible. Jamais elle ne s'était imaginée qu'elle passerait le reste de sa vie enfermée.
Ils s'étaient promis des choses impossibles comme se revoir chaque année au même endroit. Aujourd'hui ce qu'espérait le plus Kathlina, c'était de pouvoir remplir cette promesse. Chaque année pendant les vacances elle pensait à ces moments heureux et elle maudissait sa maladie encore plus que d'habitude.
Un jour avec ses amis, ils étaient allés dans un de leurs endroits secrets, une salle souterraine dans les remparts de la ville. C'était leur meilleure découverte, mais le soir lorsqu'elle fut rentrée elle ne se sentit pas bien. Par la suite elle avait été malade jusqu'à la fin des vacances, et ses grands-parents lui avaient montré leur côté strict : ils ne l'avaient plus laissée sortir, ainsi elle n'avait pas pu prévenir ses amis de son absence. Elle n'avait même pas pu leur dire au revoir, et par la suite elle ne les avait plus jamais vus.
Kathlina se rappelait qu'elle avait passé plusieurs jours à l'hôpital sans comprendre pourquoi, car personne ne lui expliquait les choses et elle avait l'impression que personne ne savait ce qu'elle avait. Les médecins changeaient souvent, ils essayaient tout avec elle, mais ça ne servait à rien. Rien ne semblait pouvoir la soigner.
Aujourd'hui ils ne savaient toujours pas quelle maladie elle avait, et les médecins ne comprenaient pas comment elle l'avait eue. Elle était un mystère aux yeux de la science. Leur seule solution fut de l'isoler et de la mettre dans un milieu stérile, encore une fois sans lui demander son avis. Dans les années qui suivirent, ses parents et les docteurs essayèrent tout ce qu'ils pouvaient pour la guérir. Cependant, ils ne trouvèrent rien.
C'était pour cette raison qu'elle se trouvait isolée tout le temps, et que personne ne pouvait se rapprocher d'elle sans avoir peur de lui transmettre une maladie. Sa chambre était son domaine, personne ne rentrait et personne n'en sortait. Ainsi au fil des années cette pièce devint sa prison. Ses parents lui avaient fait construire une chambre dont l'air était constamment filtré avec une chambre froide à côté, car tout ce dont elle avait besoin devait passer plusieurs heures dans le froid afin de tuer les microbes. Un seul petit microbe suffisait à la rendre malade. Ses seuls visiteurs étaient ses parents, ses grands-parents paternels et les docteurs. Ses grands-parents maternels ne venaient plus car ils écoutaient, comme la plupart des personnes, sa mère. Celle-ci ne voulait pas que Kathlina reçoive de la visite.
Pour cette raison la seule visite intéressante lui était faite pendant les vacances, le fils du psychiatre de sa mère accompagnait son père au travail. Bien sûr sa mère était au courant, comment pouvait-elle ne pas l'être puisqu'elle la surveillait non-stop, mais puisqu'elle avait besoin de voir le père, elle ne pouvait pas lui interdire de voir le fils. Au début, Kathlina ne savait pas quoi penser de ce garçon qui pouvait parler sans s'arrêter et qui s'introduisait chez elle sans demander. Mais aujourd'hui, alors qu'ils se connaissaient depuis presque deux ans, il lui manquait dès qu'il partait.
Lorsqu'il venait, il lui racontait ses journées et elle faisait de même. Bien sûr, ses journées lui semblaient toujours plus intéressantes, mais elle appréciait aussi qu'il prenne le temps de l'écouter. Par ces expériences racontées, Kathlina avait l'impression de vivre à travers lui et de redevenir normale. Il lui racontait tout sur ses cours et ses amis et Kathlina avait la sensation de connaître ces gens qu'elle n'avait jamais vu et qu'elle ne verrait sûrement jamais. Pour le Brevet ils avaient pu réviser ensemble, puisque, pour une fois, leurs cours se ressemblaient. Par la suite ils avaient décidé que l'année de seconde, ils essaieraient de se voir chaque vacances.
Malgré le fait qu'ils s'étaient vus la veille, Kathlina ne pouvait pas attendre plusieurs semaines avant de le revoir. Il était sa seule compagnie et son seul ami. C'était grâce à lui, que par moment, elle arrivait à oublier sa maladie et toutes les contraintes que celle-ci imposait. En attendant d'avoir de ses nouvelles, elle prit ses écouteurs, choisit une chanson. Elle ouvrit ensuite son ordinateur et téléchargea les photos qu'ils avaient pris ensemble. Elle tria les images. Elle avait eu un appareil photo de ses parents, elle ne se rappelait plus si ça avait été pour l'un de ses anniversaires ou opérations, mais jusque-là elle n'en avait jamais vu l'utilité. Cependant, cette dernière semaine avec son ami, ils s'étaient amusés à prendre beaucoup de photos en faisant des grimaces et en essayant toutes les options. Ainsi pour se rappeler de cette semaine, où pour la première fois depuis longtemps elle avait eu de la compagnie non-stop, elle voulait faire un album photo avec toutes leurs idées folles.
Alors que Kathlina regardait ses photos, elle resta bloquée plusieurs secondes sur l'une d'entre elles. Elle ne savait pas ce qui avait attiré son attention. Mais il devait y avoir quelque chose sur ce cliché qui clochait. La jeune fille grossit l'image, la retourna, l'étudia plusieurs fois dans la journée, mais elle ne trouva rien.
Ainsi elle alla se coucher avec l'image en tête. Elle savait que celle-ci allait hanter ses rêves, puisque même lorsqu'elle voulait penser à autre chose, la photo réapparaissait encore et encore.
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Eliott & Tiago
Lorsque Tiago reprit ses esprits, il chercha du regard la jeune fille qu'il avait bousculée. Il regarda rapidement autour de lui, personne, regarda dans les couloirs voisins, toujours personne. Il en conclut qu'elle s'était malheureusement volatilisée ! Eliott regardait son frère à moitié dans les vapes chercher quelque chose et s'énerver.
— Tu cherches...? demanda Eliott.
— Je... Je suis rentré dans une fille, et elle s'est volatilisée je crois..., avoua son frère tout penaud.
— Une fille ? Ici ? Es-tu sûr de ne pas avoir rêvé ? Tu sais bien que c'est impossible puisque ...
— Je sais bien que c'est impossible ! Mais j'en suis sûr ! Le coupa Tiago.
Vexé, il continua :
— Elle était rousse et avait les cheveux bouclés, elle semblait complètement perdue !
— Oh ! Et bien si tu as vraiment vu une fille, logique qu'elle ait l'air perdue dans une école de garçons ! ricana Eliott.
Tiago ne répondit pas, mais son frère remarqua que cette rencontre le bouleversait. Alors il l'attrapa par les épaules, et le conduisit jusqu'à leur salle. Ils étaient de nouveau dans la même classe. Le lycée n'avait pas dû recevoir sa lettre, le Nithiel avait dû avoir un problème en chemin... En y repensant, il n'était toujours pas revenu, c'était étrange. Mais Eliott lui faisait confiance, de plus il avait d'autres choses à penser. Son frère n'était pas un lève-tôt, il avait donc du mal à être bien réveillé si tôt le matin. C'est pourquoi, Eliott le soupçonnait d'avoir rêvassé et d'être rentré dans un autre élève, le prenant pour une fille.
C'est la tête pleine de problèmes que les jumeaux rentrèrent en classe. Cette année, ils avaient dû choisir leur spécialité. Eliott avait choisi l'astronomie alors que Tiago voulait se spécialiser dans la botanique. Tous deux y avaient été acceptés sans problème. Et, à la grande joie d'Eliott, ils partageaient seulement quelques cours, les cours de langue et d'histoire. Pour le reste, chacun avait des matières spécifiques à sa filière. Après avoir reçu leurs emplois du temps, ils durent se rendre dans l'amphithéâtre afin d'entendre l'habituel discours du directeur. Puis vint le temps de la visite des nouveaux bâtiments de spécialisation. Eliott était excité par toutes les nouvelles machines que la salle d'astronomie comportait. Tiago le montrait moins mais son frère savait qu'il avait hâte de découvrir les différentes sortes de plantes qui poussaient sur l'île.
La matinée se finit, et les garçons durent s'installer dans les dortoirs. Bien qu'ils n'habitaient pas loin, les jumeaux étaient obligés de dormir à l'internat et de suivre le même mode de vie que tous les autres élèves. Ils devaient aussi respecter les règles strictes de l'établissement. Cependant, il n'y avait pas que des inconvénients. Par exemple, ils étaient certes obligés, d'être inscrits dans un des multiples clubs et de s'y rendre au moins trois fois par semaine, mais ce n'était pas seulement un prétexte pour que les jeunes ne sortent pas. C'était aussi un moyen de faire des rencontres et d'animer leur école. À la fin de chaque année scolaire, les quatre grandes écoles de l'archipel organisaient une rencontre lors de laquelle les clubs se défiaient dans une atmosphère ludique et agréable.
Cette année, les jumeaux partageaient leur chambre avec des nouveaux de la classe 1. Eliott tournait en rond dans la pièce en sautillant, il avait hâte de voir leurs têtes. Tiago assis sur son lit ne prêtait attention à rien : ni à son frère, ni à ce qu'il disait, ni à ce qui se passait autour de lui. Il était plongé dans ses pensées, une image lui revenait en tête : la fille, cette fille. Elle l'intriguait. Que faisait-elle ici ? D'où venait-elle? Mais surtout pourquoi... Pourquoi avait-elle disparu à son contact ? Se pourrait-il que ce soit parce qu'elle...? Non, impossible, il ne la connaissait pas !
— Tiagoooo ! C'est l'heure ! Il faut y aller !
Les cris d'Eliott le tirèrent de son questionnement, et calmement il reprit ses esprits. Eliott était surexcité, et Tiago était fatigué d'avance. Il plaignait leurs deux nouveaux colocataires.
Lorsque les jumeaux termineraient leurs études, ils laisseraient leurs badges et leur chambre à deux nouveaux élèves. Grâce à une sorte de tutorat, les membres des chambrées devenaient souvent très proches, et les plus jeunes se construisaient avec l'aide des plus grands.
Ainsi il n'était pas surprenant qu'Eliott s'agite. En réalité, c'était un moyen de noyer son stress, car même si dans la plupart des cas, les jeunes s'entendaient rapidement bien, parfois leurs dossiers étaient mal évalués et l'on se retrouvait avec des chambres où les élèves ne se sentaient pas à leur place.
— Tout va bien se passer, dit Tiago en posant sa main sur l'épaule de son jumeau.
Celui-ci le regarda, puis dans une grimace il laissa sortir son stress :
— Et s'ils ne m'acceptent pas ? Et s'ils sont tellement chiants que je n'arrive pas à les apprécier ? Et s'ils savent déjà tout ? Et si...
— Stop ! Ne t'inquiète pas avant qu'ils soient là ! Ce soir tu ne pourras qu'à peine les juger. Dans un mois, tu reviendras te plaindre si ça ne va pas. Mais pour l'instant suis-moi, on va les accueillir !
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