22

"Alors ces dossiers, jeunes gens?Où sont-ils?"

Un silence de mort régna dans la salle, chacun regardait à sa droite, à sa gauche, un peu partout, mais en aucun cas en direction du professeur. Ce dernier soupira.

"Bon, je commence le cours d'aujourd'hui, mais il vous reste dix minutes pour me les rendre, sans quoi ce sera un F pour tout le monde."

Les élève remarquèrent soudain que quelqu'un brillait par son absence. En effet la Française n'était pas encore arrivée à l'université, elle se battait contre le retard de son métro. Des chuchotements se firent entendre çà et là "Tu crois qu'elle n'a pas réussi?" "Elle a honte d'avoir échoué?" "Je savais que c'était qu'une frimeuse!".

Le laps de temps supplémentaire fourni par le détective allait toucher à sa fin, la trotteuse se rapprochait de plus en plus du trois signifiant que le quart d'heure allait se terminer. On entendit des bruits de pas dans le couloirs, se rapprochant de plus en plus de la salle, puis la porte s'ouvrit sur la seule absente du jour.

"Pardon" fit-elle, "j'étais au tribunal, pour mon affaire."

Il ne restait que cinq secondes. Noah était vêtue d'une chemise blanche ainsi que d'une élégante veste noire. Mais à ses pieds trônaient toujours fièrement ses vieilles boots délabrées. Elle s'avança vers le bureau de son ancien amant. Quatre secondes.

"Verdict?"

Trois secondes.

Elle posa nonchalamment le dossier sur la table. Deux secondes. La rouquine alla s'asseoir à sa place.

Une seconde.

"Coupable.

-La jeune?

-La jeune."

Fin du délais.

Personne d'autre qu'eux ne comprit ces derniers mots. Le professeur reprit alors la parole, s'exprimant pour l'ensemble des étudiants cette fois-ci.

"Et bien, nous avons donc un A. Félicitations, bande d'inca... Hum. Le but de cet exercice était de pouvoir avoir des souffi..., disons des assistants, lors de mes prochaines enquêtes. Or vous avez tous -ou presque- brillamment échoué. Cela signifie donc que seule Miss Leblanc m'assistera lors de mes prochaines aventures.

-Comment on peut être sûrs qu'elle a réussi? On a aucune preuve que la personne accusée et condamnée soit vraiment coupable!" souleva un type du fond de la salle.

Un léger silence revint, puis des "c'est vrai ça" fusèrent un peu partout. Le professeur dû donc prendre une décision.

"Elle peut venir vous présenter les faits, si vous le souhaitez tant. Vous aurez même le droit d'essayer de résoudre l'affaire. Miss Leblanc, voulez vous nous faire l'honneur d'éclairer nos lanternes?" fit il alors en faisant une courbette, le regard malicieux.

"C'est trop facile, vous avez dit que c'était la jeune!

-Oui, mais pas laquelle c'était" intervint Noah, avant de prendre place au tableau armée de son dossier.

Une demi-heure plus tard, un gamin était allongé par terre, jouant le rôle du cadavre, un autre, du mauvais sexe mais de la bonne taille, était devenu le meurtrier et une jeune femme menue jouait le témoin. Dans la grande salle de cours, on n'entendit plus que les mouches voler, ainsi que Noah rassembler ses affaires. La cloche sonna, brisant à peine le silence étonné voire émerveillé qui s'était installé, tant ils étaient tous convaincus que le coupable était le bon. Puis, sans bruit, ils partirent, excepté celle qui les avait laissé perplexes.

"Tu es toujours aussi douée.

-Merci.

-Tu ne rejoins pas Tom?" osa demander son ancien amant, surpris qu'elle reste à parler avec lui.

"C'est la rentrée. Il est avec ses élèves.

-Ah.

-Oui."

Le calme plat refit son apparition. L'étudiante était assise négligemment sur sa chaise tandis que le professeur bouclé avait prit place sur la petite table, regardant intensément une certaine rouquine.

"On dirait bien qu'on va passer pas mal de temps ensemble, maintenant." fit le détective l'air sournois. "On prend un chocolat et je te ramène?"

Un "volontiers" résonna après un bref temps d'hésitation.

Ce fut avec entrain que les deux comparses passèrent le pas de leur immeuble.

"Je suis sincèrement désolé" déclara soudain l'homme, la mine soucieuse.

Une gêne se fit ressentir entre eux. Ils se faisaient face, devant la grande porte de l'immeuble, au pied de l'escalier en bois grinçant. Ils étaient relativement proche, Noah avait ses mains bien plantées dans ses poches, Sherlock laissait pendre ses bras le long de son corps.

Une étincelle jaillit dans les deux regards, vert fade et bleu charmant. L'un fit un pas, l'autre le second. Mais il ne se passa rien, par manque de temps, coupés par l'intrusion soudaine de leur logeuse commune dans le hall froid.

"Les enfants, il y a un inspecteur qui vous a demandé, enfin, plutôt le "fameux détective". C'est pour une sorte d'enquête secret défense dont je n'aurais soi-disant pas le droit de connaître les détails. C'est un con. Je les connaîtrais, de toute façon, n'est-ce pas?" lança-t-elle l'air inquiet.

"Bien sûr Martha, comme toujours, serait-il possible que vous nous fassiez des boissons chaudes?

-Ton chocolat est déjà en haut, la théière est sur le plateau. Il ne reste plus qu'à remplir les tasses!

-Merci, Madame Hudson" termina sèchement Holmes qui n'avait jusqu'alors pas remarqué ce rapprochement entre les deux femmes.

Sur la chaise réservée aux clients, un homme d'origine asiatique se tenait bien droit, mais avait une fâcheuse tendance à laisser ses jambes s'agiter sous sa chaise.

"Doooonc, c'est pour une histoire de simple héritage?" s'enquit la rouquine. "Mais je croyais que c'était secret défense?

-Mais ça l'est! On parle du maire de Maiden Bradley tout de même!" s'insurgea leur invité.

"Vous êtes en train de me dire que vous venez de faire quatre heures de train pour que je décode le testament du maire d'un village paumé de moins de 400 habitants! Vous auriez pu m'envoyer un mail, un fax, un sms, ou même un pigeon voyageur, que sais-je!

-Sherlock. Calmes toi. Reviens t'asseoir. Je t'en prie."

En effet, ce dernier s'était brutalement levé du fauteuil sur lequel il était assis, se mettant à tourner en rond derrière la chaise du malheureux client.

"Puis-je voir le fameux papier?

-Bien sûr!" fit-il en sortant ledit testament de sa poche. "Ce n'est qu'une photocopie, l'original est resté chez le notaire.

-Tu m'étonnes, je te dis pas l'honoraire qu'il va se prendre dessus" grommela le détective dans sa barbe, ce qui lui attira les gros yeux de sa douce coéquipière.

La feuille A4 était quasiment vide. Seules deux lignes étaient noircies, avec des chiffres et quelques lettres, dans l'ordre suivant:

(13-25) (6-15-18-20-21-14-5) (9-19) (9-14) (1) (3-8-5-19-20) (15-6) (20-8-5) (2-1-14-11) (15-6) (5-14-7-12-1-14-4). (13-1) (1-3-3-5-19-19) (3-15-4-5) (9-19) (CFJEAH).

"Et pourquoi est-ce si important, cet héritage, d'abord? Il ne s'agit que d'un simple vieil homme, après tout!

-Détrompez-vous, monsieur. C'était la personne la plus aisée de la ville. Du village. Avec cette suite de chiffre, il y avait un papier, qui disait que nous avions moins d'une semaine pour déchiffrer le code. Le cas échéant, toute sa fortune serait pour ses neveux.

-Et si je le déchiffre?

-Alors la ville... le village en héritera.

-Et à combien s'élève ce patrimoine?

-Plusieurs millions, monsieur.

-Et combien de temps nous reste t-il?"

L'homme souleva la manche de sa chemise impeccablement repassée, laissant paraître une montre assez luxueuse mais plutôt ancienne.

"Moins d'une heure, hélas."

Les yeux de Sherlock se tintèrent d'une touche de défi. Il allait déchiffrer ce testament en moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire!

Mais c'était sans compter sur sa magnifique assistante qui avait le papier dans les mains depuis un peu moins d'un quart d'heure. Elle reconnaissait quelque chose dans ce code, quelque chose qu'elle avait apprit en première année de fac. C'était une simple épreuve de logique, un peu de bon sens suffisait largement. Elle avait attrapé un stylo et griffonnait sur la feuille, comptant sur ses doigts.

Lorsque Sherlock s'empara du code, il afficha une moue contrariée.

Il ne pourrait pas s'accorder le mérite d'avoir résolu cette enquête digne d'un gamin de primaire.

"My fortune is in a chest of the Bank of England. My access code is 259407." était écrit en fines lettres noires. Il rendit la feuille à sa comparse, dépité.

"Banque de Londres. Le code est 259407." annonça la jolie jeune femme.

"Comment a-t-elle fait? J'y ai passé plus d'une heure!

-Ça en fait déjà une de trop" marmonna le détective qui partait dans sa chambre.

"Il m'a suffit de remplacer les nombres par les lettres correspondantes, et de faire de même pour les lettres" avoua Noah.

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