Chapitre 1

Il s'approchait du fleuve à grande enjambée, il devait être de retour pour manger. Remarquant une forme sombre inhabituelle sur le sol, il s'arrêta. Il posa son seau et s'approcha silencieusement. Quelqu'un était allongé par terre... il tenta d'appeler la personne mais n'eut aucune réaction. Elle était inconsciente. Il s'accroupit près d'elle et la fit rouler sur le dos. Elle était blessée, une profonde plaie lui traversa l'épaule droite. Il regarda l'eau, elle avait dû tomber dedans et s'est échouée ici. Ni une, ni deux, il hissa le blessé sur son dos, surpris par sa légèreté, et l'emmena dans une cabane non loin. C'était son repère secret. Puis il alla récupérer son seau, le remplit et le ramena lui aussi à la cabane. Ça lui rappelait la fois où il avait trouvé Deryn, mais ça s'était mal fini. Cette fois, il devrait pouvoir sauver l'autre. À première vue, il pouvait tout soigner sans trop de problèmes. Il sortit de sa sacoche un tas de pots remplis de produits tous différents. Il les appliqua sur l'épaule meurtrie ainsi que sur toutes les autres plaies qu'il voyait. Au passage, il retira le manteau et l'écharpe du blessé et les mit à sécher.

Une fois les soins finis, il regarda la position du soleil. Il était largement en retard ! D'un bond, il sortit de la cabane avec son seau, reparti chercher de l'eau et se pressa de rentrer. Il allait passer un sale quart d'heure encore mais peu importe ! Si ça pouvait permettre à la personne qu'il avait trouvée de rester en vie...

***

Il entrouvrit les yeux, sentant une agitation inhabituelle. Il leva le nez et remarqua que la personne qui l'avait ramassé préparait une attaque magique. Elle pointa de son index sa cible et claqua des doigts. Une boule de feu jailllit et fonça droit vers une autre personne qui se tenait à la porte. Il n'arrivait pas à voir de qui il s'agissait mais le sort que celle-ci utilisa pour renvoyer l'attaque lui était familier. Il donna un coup dans les jambes de son sauveur qui se tenait juste devant lui. Celui-ci, déséquilibré, tomba sur le blessé, évitant au passage l'attaque qui lui avait été renvoyée. Il lâcha un petit grognement de douleur et l'autre descendit et le regarda.

« Ça... ça va ?! Je suis désolé !... »

Il le regarda sans lui répondre. Ses cheveux mi-longs rouges lui cachaient l'œil droit mais le gauche suffisait à montrer qu'il était inquiet. Apparemment, c'était un sorcier puisqu'il lançait des boules de feu. Un jeune sorcier d'environ  quatorze ans...

L'autre sorcier qui avait renvoyé l'attaque s'approcha. Le blessé n'eut aucun mal à discerner sa longue chevelure verte et son habituel sourire moqueur. L'adolescent se releva et lui barra à nouveau la route.

« Je ne vous laisserai pas le toucher sans savoir qui vous êtes !
- Laisse-le... c'est... un ami, articula faiblement le blessé. »

Les deux sorciers échangèrent un regard avant de s'accroupir auprès du garou. Le visiteur posa sa main sur la poitrine et l'autre sur le front de l'albinos et concentra sa magie pour lancer un sort de soin.

« C'est rare de te voir dans un pareil état, Ren. Ça me rappelle quand on était gamins.
- Ferme la...
- Tu es dans une mauvaise position pour donner des ordres, rit le sorcier à la chevelure verte.
- Et toi, t'es pas en position d'être malpoli, tu t'invites comme ça et tu te permets de te moquer de quelqu'un qui n'a pas la force de se défendre ! gronda l'autre sorcier.
- Mêle-toi de ce qui te regarde !
- Ça me regarde ! Tu es chez moi !
- Pas pour longtemps, rassures toi !
- Tu m'en vois ravi.
- Il est presque aussi insolent que moi, ma parole... »

Le visiteur se redressa, ayant fini d'exécuter son sort.

« Bon rétablissement Ren, j'ai fait ce que j'ai pu.
- Merci Sorah.
- C'est avec grand plaisir. À bientôt ! »

Le sorcier sourit et s'éclipsa, laissa les deux autres seuls. Ren toussa, ce qui réveilla l'inquiétude de son sauveur.

« Ça va ?
- Oui, articula le garou un fois en mesure de répondre.
- Je suis content que vous vous soyez réveillé ! Vous m'avez vraiment fait peur à des moments !
- Désolé.
- C'est pas votre faute ! Et puis je m'inquiète souvent pour pas grand-chose, vous savez !
- ...
- Je m'appelle Illë en fait ! Vous c'est Ren c'est ça ?
- Oui.
- Enchanté ! Je vais peut-être me montrer indiscret, mais comment vous vous êtes mis dans cet état ?
- Je suis tombé... dans le fleuve.
- C'est bien ce que je pensais.
- Où sommes-nous ?
- Près de Sazu. Vous connaissez ?
- Oui.
- C'est vrai ? C'est pourtant un sacré coin paumé ! J'habite là-bas ! Vos affaires sont chez moi, j'avais peur qu'elles prennent l'humidité. Je vous les ramènerai demain !
- Merci. Tu as... ?
- Regardé dans le sac ? coupa Illë, non ! Il fallait ?
- Non.
- Tant mieux alors ! »

Ren était surpris par l'entrain d'Illë. Il ne savait donc pas qui il était ? Où alors il s'en fichait ?

« Illë ?
- Oui ?
- Pourquoi tu m'as aidé ?
- Hein ? C'est quoi cette question ? C'est évident pourtant ! Je vais pas laisser quelqu'un en détresse alors que je peux l'aider !
- Tu aides tous les inconnus ?
- Bien sûr ! Sauf quand ils me veulent du mal... mais si je ne leurs veux pas de mal, il n'y a pas de raison qu'ils m'en veuillent !
- Personne ne s'inquiète pour toi ?
- Pourquoi ?
- Parce que c'est dangereux de faire confiance au premier venu.
- Je sais bien. Mais pourquoi vous me dites cela ?
- Pour rien...
- Bon. »

Ren le regarda ramasser ses affaires et les ranger dans sa sacoche. Il ne s'inquiétait vraiment pas de ses fréquentations. Voilà quelqu'un de bien inconscient...

« Je dois y aller. Si vous avez un soucis, le village est de ce côté-ci ! J'habite la première maison à droite ! »

Le garou le remercia d'un hochement de tête et le regarda s'éloigner silencieusement. Depuis quand Ren n'avait pas vu un sourire aussi franc que celui du jeune garçon ? Depuis combien de temps, à part Sorah et les autres, les gens l'avait aidé comme Illë venait de le faire ? Depuis " qu'il " est mort, qui lui avait déjà porté autant d'attention ? Qui lui avait déjà offert un toit ? Qui l'avait déjà protégé comme il l'avait fait ? Personne. La surprise devant cet étrange personnage lui avait fait oublier la haine qu'il vouait aux autres. Qui était-il vraiment ? Il le perturbait, une personne comme ça n'existait pas ! C'était impossible ! Qui ne se méfiait pas des inconnus ?! Qui aidait le premier venu !? Qui souriait comme il faisait ?! Les sourires sont fait pour tromper la confiance des autres, pas pour avoir l'air joyeux ! Ce gamin remettait en cause tout ce qu'il s'était dit depuis le début !...

***

Il se leva et se vêtit des habits propres que lui avait donné Illë ainsi que son manteau et son écharpe. Puis, il vérifia que toutes ses affaires étaient dans son sac. Tout était bon ! Il n'osa pas sortir ses armes devant l'adolescent, il le ferait plus tard.

« Vous devez avoir faim, fit remarquer Illë.
- Non merci, déclina Ren.
- Mais si ! Venez ! »

Il attrapa le garou par le bras et le tira dehors. Celui-ci n'osa pas se débattre, c'est vrai qu'il avait faim, mais il n'aimait pas la trop grande gentillesse du sorcier. Il se contenta donc de le suivre silencieusement.

Il remarqua trop tard qu'Illë l'emmenait vers le village. On allait le reconnaitre et on les chasserait tous les deux. Il plaça sa capuche sur sa tête en espérant que ça suffirait même s'il avait l'air encore plus louche comme ça...

Illë l'entraina dans un petit commerce tenu par une vieille dame.

« Bonjour Madame ! salua gaiement le sorcier !
- Tiens Illë ! Qu'est-ce qui t'amène ?
- Est-ce que ce serait possible d'avoir deux paquets de gâteau s'il vous plait ?
- Tu as un sacré appétit ! remarqua-t-elle en attrapant deux sachets.
- C'est pas que pour moi, c'est pour lui aussi ! rit-il en désignant Ren.
- Qui est-ce ? demanda-t-elle en levant un sourcil.
- Il s'appelle...
- Reri, le coupa l'intéressé.
- C'est ça, affirma Illë, lançant un regard interrogateur à "Reri".
- Eh bien enchantée mon garçon !
- Moi de même, renvoya le garou, toujours caché sous sa capuche. »

Illë prit les deux paquets et salua la marchande avant de s'éloigner avec Ren.

« C'est quoi cette histoire ? Pourquoi tu changes de nom ?
- Il ne vaut mieux pas pour nous que les gens sachent qui je suis.
- Parce que t'es qui ?
- Quand on sera seuls.
- On est seuls, les rues sont désertes.
- Les murs ont des oreilles.
- Mais bien sûr... »

Illë conduisit Ren chez lui.

« Mes parents rentrent pas avant ce soir, on est tranquilles. Si tu m'expliquais maintenant ? fit-il en donnant un paquet de gâteau à Ren.
- Merci, fit-il en récupérant le paquet, puis il fit signe à Illë de s'asseoir. Tu ne connais pas quelqu'un qui s'appelle Ren ?
- Hm... non, répondit Illë en s'exécutant. Pourquoi ? Je devrais ?
- Je suis pourtant déjà passé par Sazu l'année dernière pour tuer le chef du village...
- Tu es... ?! sursauta l'adolescent.
- Je vois que n'est pas aussi ignorant que tu prétends l'être.
- Mais... tu... ? balbutia le sorcier sans pouvoir terminer sa question.
- C'est pour ça que je disais de ne pas faire confiance au premier venu. J'imagine que tu regrettes de m'avoir soigné à présent que tu sais qui je suis...
- Non ! le coupa Illë.
- Hm ?
- Peu importe ce que tu as fait et ce que tu feras, je n'ai fais que mon devoir ! Maintenant, tu suivras la voie qui te semblera juste.
- Illë... tu parles sérieusement ?
- Bien sûr ! J'ai un rêve : je veux que tout le monde puisse vivre heureux et ait une chance d'atteindre son rêve.
- Je prends des vies... je m'oppose à tes objectifs et tu m'aides quand même ?
- Mon rêve est irréalisable, Ren. Les gens souhaitent des choses différentes, des choses qui finissent par s'opposer. C'est impossible de satisfaire tout le monde.
- Illë, tout est possible...
- J'aimerai pouvoir te croire.
- ...
- Et toi, tu as un rêve ?
- Je... c'est compliqué.
- Hm ? Compliqué ? Comment ça ?
- J'aimerais... revoir quelqu'un qui est mort.
- Toi aussi... ton rêve est irréalisable.
- Tu crois ?...
- Je peux te poser une question ?
- Laquelle ?
- Pourquoi es-tu devenu assassin ? Quelle satisfaction as-tu à tuer ?
- C'est une longue histoire... trop longue.
- J'ai tout mon temps.
- Pas moi.
- J'attendrais que tu l'aies alors.
- Comme tu voudras. »

Ren regarda le soleil qui commençait son déclin.

« Je vais devoir y aller.
- Déjà ? J'espérais que tu restes un peu plus longtemps !
- Désolé, fit Ren en se dirigeant vers la porte.
- Tant pis ! »

L'assassin sortit suivi de Illë. Le sorcier tendit sa main vers Ren qui le regarda surpris puis la serra. Soudain un cri attira leur attention. Par reflex, le garou sortit son poignard de son sac.

« C'est lui !! »

C'était la marchande de gâteau ! L'assassin avait replacé sa capuche avant de sortir. Elle l'avait facilement reconnu. Elle était accompagnée d'un groupe d'homme. Avait-elle eut un doute sur son identité et prévenu les autres ? C'est ce qui était le plus probable. Ren serra sa lame, il ne pouvait pas s'approcher sinon il serait blessé avant d'avoir pu porter un coup, les hommes possédaient des lances pierres magiques.

« Qui que tu sois, les mains en l'air et avance doucement vers nous ! »

L'assassin jeta un coup d'œil furtif derrière lui.

« Bloquez la route ! »

Aussitôt, un autre groupe d'homme apparu. Il était prit au piège. Mais ce n'était pas ça qui l'inquiétait le plus. Il regarda Illë qui s'avançait au milieu des deux groupes.

« Qu'est-ce que vous lui voulez ? Il n'a rien fait de mal !
- Ne te mêle pas de ça Illë !
- Trop tard... je l'ai aidé, il ne m'a rien fait ! Si vous le laissez, il ne vous fera rien !
- Et lorsqu'il est passé la dernière fois, et qu'il a tuer l'un des nôtres, tu peux me dire ce qu'on lui avait fait ?
- Ren... dis-leur que tu leur feras rien !
- Tu crois sincèrement qu'ils vont me faire confiance, Illë ? Tu te mets en danger inutilement. Donne leur raison et va les rejoindre ! Tu crois gagner quoi à me protéger ? Ça ne va pas me laver de mes crimes.
- Si ça peut t'empêcher d'en commettre d'autres, je veux bien prendre le risque.
- Pardon ?
- Je n'aime pas voir les gens tous seuls. J'ai bien vu que tu étais étonné que je te porte secours, je sais que tu traines tout seul. Ça ne t'arrive jamais de te sentir seul ? Je ne sais pas pourquoi tu tues exactement, mais je suis persuadé que c'est lié. Et puis, je veux entendre ton histoire !
- Illë... tu es complètement...
- Je sais. Je peux te demander une faveur ?
- Je t'écoute.
- Emmène-moi avec toi ! »

Ren sursauta. Il voulait... l'accompagner ?

« Tu n'es pas sérieux !
- Je laisse les choses sérieuses aux adultes ! Je suis encore un gamin et souhaite le rester !
- Illë...
- Allez accepte !
- Je... je ne peux pas.
- Hein ? Pourquoi ?
- Vous avez fini tous les deux ?! s'écria un homme. Les mains en l'air immédiatement ! Sinon nous ouvrons le feu ! »

Ren et Illë se regardèrent, s'affrontant silencieusement du regard.

« Feu !! »

Les deux groupes chargèrent leurs lance pierres et tirèrent. Les cailloux s'enflammèrent avec l'effet de la magie et se dirigèrent droit vers les deux. Ren attrapa le bras de Illë et le jeta à terre. Il dévia les projectiles qui lui étaient destinés avec son poignard et ordonna à l'adolescent... non, l'enfant, de rentrer dans la maison. Celui-ci obtempéra sans discuter. L'assassin le couvrit, interceptant tous les projectiles dirigés vers eux. Une fois à l'abri, Ren bloqua la porte avec une chaise et grimpa à l'étage suivi de Illë.

« Qu'est-ce qu'on fait ? demanda celui-ci.
- On va sauter par la fenêtre et filer dans la forêt ! On avisera s'ils nous poursuivent !
- Par la fenêtre du haut ?! Sérieux ?! »

Ren ouvrit ladite fenêtre, attrapa Illë et le poussa à l'exterieur, ne lui laissant pas le temps de se débattre. Puis, il sauta, sans lâcher son allié. Il s'accrocha de sa main libre à la gouttière et amortit ainsi leur chute. Puis, il releva le sorcier et lui fit signe de courir. Celui-ci fila vers la forêt sans demander son reste. Ren le suivait de près, surveillant leurs poursuivants qui venaient de se rendre compte qu'ils avaient sauté.

Ils atteignirent la forêt, et c'est là qu'Illë commença à ralentir progressivement.

« Plus vite, ils vont nous rattraper Illë ! »

Mais l'enfant finit par s'arrêter et s'appuya contre un arbre pour rester debout, haletant. À vrai dire, on l'entendait presque respirer à des kilomètres à la ronde.

« Illë ?! Ça ne va pas ? Répond ! »

La main tremblante, le sorcier fouilla dans sa sacoche et sortit un pot contenant une sorte de pâte verdâtre. Il en avala un peu et sa respiration commença à se calmer. Ren soulagé, soupira. Mais un cri au loin lui rappela que la bataille n'était pas fini. Mais avec Illë, il ne pouvait pas aller bien loin... il lança un regard circulaire à la forêt qui les entourait.

« Tu sais grimper aux arbres ?
- Je peux voler...
- Cache-toi dans ce cas ! Je vais détourner leur attention ! Surtout tu ne bouges pas, je reviendrais te chercher !
- Attends !
- Pas le temps ! »

Ren fonça droit vers les cris, laissant Illë seul. L'assassin courut jusqu'à ce qu'il aperçoive un groupe d'homme. Il attendit le dernier moment pour s'enfuir dans la direction opposée au sorcier, manquant d'être rattrapé par une pluie de caillou enflammé. Heureusement que c'était du feu magique, sinon ils auraient bien fait cramer la forêt...

Soudain, un cri de détresse arrêta Ren. C'était Illë ! Le garou serra les dents, qu'est-ce qu'il avait ? Il espérait simplement que ça pouvait attendre le temps qu'il en termine avec le groupe qui le poursuivait. Il allait essayer de faire vite...

***

Du haut de son arbre, le sorcier observait avec impuissance les hommes grimper peu à peu jusqu'à lui. Il ne pouvait pas aller plus haut et les autres branches étaient trop loin pour qu'il puisse prendre la fuite. Ren devait sûrement être trop loin pour revenir à temps... c'était fini pour lui. Il arracha des branches et les envoya sur ses poursuivants, espérant tout de même les ralentir. Ça laissait un peu de temps au miracle d'arriver... et puis ce n'était pas son genre de désespérer ! De toutes façons, il lui restait toujours une solution si la situation devenait réellement critique mais s'il pouvait éviter de l'utiliser, ça l'arrangerait.

Soudain, il vit l'homme le plus près de lui lâcher prise et s'écraser sur ses voisins d'en dessous. Un filet de sang s'échappait de son ventre, comment... ?

« Désolé de t'avoir fait attendre.
-Ren ! fit Illë de surprise en se tournant vers l'assassin qui s'était posté juste derrière lui, un poignard ensanglanté à la main. C'était lui qui avait tué l'homme.
-Ça va ?
-Oui !
-Dans ce cas, on file ! »

Ren attrapa Illë part le poignet et sauta dans le vide, entrainant le sorcier dans sa chute. Comme lorsqu'ils avaient sauté de la fenêtre, l'assassin amortit leur chute en se rattrapant aux branches, sous une pluie de pierre enflammée. Par chance, aucune ne les toucha. Ils retombèrent sur le sol, c'est là que l'enfant remarqua que le vêtement de son acolyte était rouge de sang au niveau de l'épaule droite. Sa blessure s'était rouverte !

« Fonce Illë ! Je te rattrape !
- Mais tu... !
- Grouille-toi ! le coupa Ren à bout de patience. »

Le sorcier obtempéra, n'osant pas s'opposer à l'assassin qui semblait avoir perdu son calme. Sans se retourner, il courut droit devant lui.

Ren se tourna vers ses poursuivants, décidé à en finir avec eux. Par chance, il était gaucher, il n'allait pas être trop gêné par sa blessure pour porter les coups. Cependant, il devait rester prudent aux attaques venant de la droite... il se changea en chat et bondit vers le groupe. Il allait tous les réduire en charpie pour son plus grand plaisir ! Le félin blanc évita agilement les tirs et bondit sur le premier homme à sa portée, reprit forme humaine le temps de lui asséner un coup mortel et enchaina avec le second, évitant sans problème chaque coup qu'on tentait de lui porter. Rien ne pouvait l'arrêter tel un démon en pleine danse folle, et les derniers survivants prirent la fuite en le comprenant. Le matou au pelage maculé de sang n'eût aucun mal à les rattraper et à leur faire subir le même sort que les autres.

Le carnage terminé, une violente douleur le mit à genoux. Il porta une main à son épaule blessée, à force de prendre appui dessus sous sa forme féline voilà ce qui arrivait, et se releva péniblement. Maintenant, il devait rejoindre Illë. Chaque pas lui arrachait un gémissement de douleur. Il avait tué vingt-quatre personnes aujourd'hui, il s'en sortait bien pour quelqu'un qui venait de passer plusieurs jours au lit. C'était sa seule satisfaction au milieu de la fatigue qui l'envahissait peu à peu... il perdait trop de sang. Il devait tenir, il avait dit à Illë qu'il le rattraperait !

À force de détermination, Ren finit par retrouver Illë qui s'était arrêté et s'était caché dans une cavité dissimulée par de la végétation. En le voyant arriver, l'enfant s'empressa d'aller l'aider à marcher jusqu'à la petite grotte. Il y avait juste assez de place pour eux deux. Le sorcier l'aida à s'asseoir, en d'autres circonstances Ren aurait refusé mais il était vraiment à bout. Il n'eut même pas la force de protesté lorsqu'Illë lui retira son écharpe, son manteau et son t-shirt pour le soigner, trop occupé à rester conscient. Peu à peu sa vision devenait floue, et ses pensées confuses firent place au néant le plus total.

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