XXIX
C'est lui. Ses mains qui enserrent ma mâchoire, qui me forcent à le regarder. Ça a toujours été lui. Son odeur qui me rappelle chez nous, tout ce que nous avons sacrifié. C'était inutile. La terre est ronde, nos chemins sont identiques.
Il transpire, il a du courir. Sa poitrine se soulève presque aussi vite que la mienne. Je le touche, croyant encore à ces fantômes. Mais c'est bien lui, ou alors l'illusion est pire que toutes les autres.
L'atmosphère éclate. Les yeux brûlants, nos petites souffrances se heurtent. Je me vois dans ses yeux, et derrière. Nos armures s'essoufflent, les apparences s'estompent : il n'y a plus que nous, à genoux sur le sol de l'aéroport, s'accrochant à nos rêves. Et la douleur disparaît. Soudainement, brutalement, presque trop violemment. Mes épaules s'affaissent. C'est comme s'il avait aspiré l'univers entre ses lèvres, me soulageant de ce fardeau. Je prends conscience de ses mains qui s'agrippe à mes bras, si fort que j'aurai sûrement un bleu. Je sais, désormais, que je ne serai plus jamais seule. Je ne fuis plus, c'est fini. Ce n'est pas la fin dont les voix me parlaient, c'est celle que j'ai choisie, celle qu'il m'a offerte. Ses yeux fous m'implorent de respirer. Et je me rends compte que je le peux, enfin. Je n'ai plus aucune raison de me noyer, l'eau s'est évaporée sous le feu de son regard. Je ressens à nouveau cette chaleur. Je me jette contre lui en inspirant brusquement. Mes poumons s'embrasent sous l'assaut de l'oxygène. Mes bras entourent son dos large, il plonge son visage dans mes cheveux. Puis il se détache, presque imperceptiblement. Il murmure :
- Mon erreur, ça a été de croire que je pourrais m'arrêter de t'aimer.
Je ris aux éclats. Et cette fois, ce sont des larmes de joie qui coulent sur mes joues. Malicieuse, je réplique :
- C'est une déclaration ça, non ?
Il me considère un moment, essuie l'humidité de mes joues.
- Ça se pourrait bien.
Ses lèvres effleurent les miennes.
- Alors comme ça tu es amoureux de moi, Rafael Kingston ?
Et pendant qu'il m'embrasse, je lui glisse un papier froissé entre les doigts où il pourra lire :
« Les étoiles brillent, mais leurs visages blêmes me hantent et je sais que ces fantômes hurleront des millénaires encore. »
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top