Seize

Clairement, je ne m'attendais pas à ça. J'étais contente à propos de ce rendez-vous avec Platon, un peu moins pour la réaction de mon idiot de frère, et encore moins pour le fait d'aller chez lui aussi rapidement. Normalement c'est uniquement après le troisième rendez-vous. 

Je peux comprendre pourquoi Lutsu réagit ainsi, mais en montrant une telle opposition à un quelconque rapprochement, il risque de me mettre des bâtons dans les roues. Pourquoi la seule fois où je suis sincère avec un mec mon frère s'en mêle et désapprouve ? 

Oh. J'ai compris. 

Le gêne Dragnir aime bien jouer des tours à la logique. 

Avant de rentrer, il m'a demandé si j'aimais Platon. J'ai répondu un peu dans la panique, par peur qu'il m'entende. Mais je ne sais pas ce que c'est que de réellement aimer quelqu'un. Je ne suis pas aussi fleur bleue que mon frère, qui rougit facilement et bafouille devant Jay, à croire au véritable amour et à vouloir être sur de ses sentiments avant de faire une quelconque déclaration. 

Je préfère faire au feeling : si quelqu'un me plait un minimum, je vais le voir, je lui dis, on sort un peu ensemble puis je le quitte parce qu'il est chiant. Cette fois c'est .. Différent. 

Platon a sourit en ouvrant la porte, heureux de nous (me) voir. Clairement je panique. Et le grognement inquiétant venant d'un coin de la chambre de Platon ne me rassure pas. Ni le départ précipité de Lustu "aux toilettes". 

C'est un Heartfilia lui aussi, il ne va pas juste aux toilettes. Je commence à le connaître à force (surtout que j'aurais fait la même chose). 

Je me retrouve donc seule avec Platon, et Jay, qui ne dit rien comme toujours. Ma présence le met si mal à l'aise ? Ou c'est l'absence de Lutsu qui l'a à nouveau pétrifié ? 

- Bon .. Je pense que mon frère va mettre un peu de temps. 
- Il va surtout se perdre dans la maison, il est parti avant que je lui dise où sont les toilettes. 

Je ne suis même pas étonnée de lui. 

Platon et moi regardons Jay, qui semble encore plus perdu dans sa vie. 
- Alors tu comptes lui dire ce que tu ressens un jour ? demande Platon. 
Jay devient aussi rouge qu'un être humain puisse l'être. 
- Je .. Hum .. 

- Fais gaffe je pourrais te le piquer .. Après tout j'aurais les Dragnir pour moi .. dit Platon avec un sourire en coin. 
Jay quitte la pièce en courant. Il l'a fait fuir. Je sais que Platon a dit ça dans cet unique but, mais je ne sais pas si ce qu'il a dit m'a fait plaisir ou m'a gêné. 

- Nous voilà enfin seuls, annonce le blond. 
- Tu aurais pu faire mieux quand même. Moi j'aurais pas mit autant de temps à le faire partir. 
- C'est de la triche : il a peur des filles, tu as juste à te mettre à côté de lui il va s'enfuir. 
- Oui mais j'aurais quand même gagné, même si la méthode est pas très réglo. 

- Tu penses qu'ils font quoi là ? Je veux pas qu'ils mènent le petit au cirque chez moi ! 
- C'est très glauque comme expression, mais rassure-toi, ils se touchent le bras ils sont tous gênés donc aucune chance. 

Le silence s'installe. J'ai l'impression que Jay et Lutsu sont partis depuis longtemps. 

Je suis assise à côté de Platon, on sait pas trop quoi se dire. C'est la première fois qu'on se retrouve dans ce genre de situation. 

- Tu as une idée de ce qu'on pourrait faire pour notre rencard ? 
- Pas un karaoké déjà. 
Platon se met à rire. 
- Pourquoi ? On pourrait inviter Mavis ce serait super ! 
Je le regarde de travers. 

- Tu veux vraiment qu'on finisse par se battre ? 
- Uniquement si vous vous battez pour moi. 

Il sourit, fier de lui, et heureux à l'idée que deux filles se battent pour lui.
- J'ai pas besoin de me battre pour toi.
- Pourquoi ? me demande Platon, surpris par ma réponse.
- Parce que je t'ai déjà. 
- Prouve-le moi. 

Je me tourne vers lui. 
- Vraiment ? 
- Tu penses déjà m'avoir ? Alors montre-moi pourquoi. 
Il ne faut pas lancer ce genre de défi à Nashi Dragnir. Jamais. 

Je m'approche de lui, la bouche légèrement entrouverte, les yeux mi-clos. C'est bien évidemment comme ça que je compte le garder. Platon sourit, et se laisse faire, prêt à m'embrasser. Nos lèvres sont proches.. 
Je me penche légèrement pour attraper le cahier de Platon où il y a écrit un gros "N" avec un cœur. 

- Saluuuut les moches ! 
Gajeela entre dans la pièce en criant, avant de se casser la gueule sur Jay et Lutsu, allongés par terre à regarder ce qu'il se passe ici. Le fracas de leur chute fait entendre un nouveau grognement venant du fond de la pièce. Sous la surprise, Platon et moi nous cognons, incapables de finir ce qu'on avait pas encore commencé. 

- J'ai manqué quelque chose ? demande Gajeela, perdue par la situation. 
- Nashi tu oses te rapprocher de ce gars aussi vite ? Après ce qu'il t'a fait ? 
- Nash pourquoi ton frère et son copain nous espionnaient ? 
Tout le monde parle en même temps. 
- Fermez-là. 
Je me relève, et défroisse ma jupe. Je la tiens près de moi, et m'éloigne de Platon afin d'éviter tout regard malencontreux. 

- On doit... 

Nouveau grognement, extrêmement fort. Tout le monde sursaute et se retourne vers l'endroit en question, et en sort une bestiole ressemblant à pas grand chose.. Cette bestiole n'arrête pas de grogner. En voyant ce truc s'approcher d'elle, Gajeela panique et se jette sur le lit. 

- Au secours il va me manger ! 

Je vois Jay et Lutsu qui se sont éloignés de quelques centimètres, surpris par la bestiole eux aussi. 

La bête s'approche de Platon, et lui grimpe dessus. 
- Bah alors Félix.. T'aimes pas quand il y a des gens à la maison ? 
- C'est .. ça Félix ? demande Lutsu. 
- Oui. Tu t'attendais à quoi ? A un chat ? Ce n'est pas parce que mon ornithorynque n'est pas un chat que je n'ai pas le droit de l'appeler Félix. C'est raciste envers les ornithorynques. 

Personne ne répond, trop surpris par la situation. 

- C'est légal ? demande Gajeela. 
Tout le monde m'ôte mes questions de la bouche. 
- Tant qu'il ne devient pas un espion qui se porte sur ses pattes arrières et passe à travers des tubes comme les Totally Spies, bien sûr. 
Mais qui fait ça ? 

- Mon chériiiiiiii ! crie une voix féminine. 
- Merde c'est ma mère ! Planquez-vous tous ! Nashi vient avec moi. 

Platon ouvre la porte fenêtre menant sur le balcon, et y fourre Gajeela, Jay et Lutsu. Il ferme la porte, et le rideau, avant de me prendre la main et de nous jeter sur le lit. Félix nous rejoint (cet animal m'effraie). 

- Mon chéri ? tu es là ? dit la voix en toquant à la porte. 
Platon et moi sommes assis sur son lit, un livre de cours posé sur le dos de Félix qui s'est endormi. Pourquoi il avait besoin de moi pour faire semblant de réviser ? 

La porte s'ouvre. 
- Oh, bonjour, lance une femme aux longs cheveux blancs. 
Elle me sourit, même si je vois de la haine dans son regard. J'ai fait quelque chose de mal ? 
- Maman t'es déjà là  ? Je pensais pas que tu rentrerais aussi tôt ! Je.. Je te présente Nashi. 
- Bon..
Elle me fait signe de me taire. La mère de Platon me toise, puis fixe mes pieds. 
- Dis-moi Platon, si ta copine n'a que deux pieds, pourquoi il y a-t-il huit chaussures dans l'entrée ? 
- Je .. C'est pour un devoir pour l'école Maman. Rien de plus. 

- Je me fous de savoir pour quoi c'est, au lieu de venir squatter chez les gens, vous allez  à la bibliothèque pour les travaux de groupes, comme tous les étudiants de votre âge. 

Elle a haussé le ton, puis quitte la pièce en claquant violemment la porte. La porte s'ouvre. 
- Je vous ramène quelque chose à boire, dit-elle avec un grand sourire. 
Elle me fait penser à quelqu'un... 

- Elle ressemble à .. 
- Mavis. 
- Ma mère. 

Nous nous regardons, réalisant que nous avons dit des choses différentes, et que les deux sont vraies. Il a donc embrassé une fille qui ressemble à sa mère ? Flippant. 

- Je .. Je devrais y aller. On travaillera au téléphone. 

Je me sens mal à l'aise. 

- Désolé, je pensais pas que ma mère allait rentrer, je voulais pas te mettre dans l'embarras. 
- Alors pourquoi tu ne m'as pas caché sur la terrasse avec les autres ? 
- Tu sais pourquoi. 
 
Je soupire. Je quitte le lit, et vais ouvrir aux autres. Les garçons ont tous les deux les joues rouges. Ils ont du accidentellement se toucher la main, et voilà. 

- A demain, Platon. 

Je quitte sa chambre, suivie par les garçons, et .. ? Où est Gajeela ? Bon tant pis. On la retrouvera plus tard. 

Nous passons devant la cuisine, où la mère de Platon prépare quelque chose à boire. Malheureusement pour nous, elle nous voit passer. Elle me dit de venir la voir. 

Elle veut me tuer discrètement ? Je ne suis pas très rassurée. Elle a l'air d'un démon vivant dans le corps d'un ange. 

- Est-ce que c'est à cause de toi que Platon refuse de sortir avec Mavis ? 

💛💛💛💛💛💛


L'excuse des toilettes. Mouahaha. Je suis un génie.

Je commence mon exploration de la maison de Platon par un rapide passage dans sa chambre. Là bas rien de suspect - malheureusement - quelques magasines, des photos de lui, Mavis et d'autres gars que je connais pas épinglés sur les murs ainsi qu'un très esthétique saxophone calé dans un coin. La chambre n'est pas si dérangée que ça, outre les quelques vêtements sales qui traînent par terre.

Je commence a penser que je devrais vraiment ranger la mienne.

Après cette brève recherche infructueuse je ressors, pénétrant dans la pièce suivante.

Il s'agit d'une salle de musculation très équipée, avec des charges à en faire pâlir Dwayne Johnson. De toutes évidence quelqu'un dans sa famille - je ne veux meme pas savoir qui - est adepte de la musculation intensive.

Je ressors dans le couloir, prêt à continuer. Mon exploration est cependant interrompue dans sa lancée par l'arrivée en trombe de Jay au détour d'un couloir. Ses yeux sont écarquillés et il est a bout de souffle.

Il a l'air horrifié.

« - S'il te plaît, ne te mets pas en couple avec Platon », supplie-t-il. 

Je hausse les sourcils.

« - D'ou tu sors une idiotie pareille ? Je sortirais jamais avec un mec comme ça. », m'offusquais-je.

Il ne répond pas et passe ses bras autour de ma taille pour me serrer contre lui. Complètement pris au dépourvu, je ne bouge pas et reste planté au milieu du couloir comme un idiot. Avec le gars que j'aime qui me fait un câlin pour une raison obscure. Quelques secondes de silence complet s'écoulent.

« - ... Tu vas bien ? », demandais-je finalement.

Il secoue négativement la tête.

« - Je crois que j'ai mis un peu de sang sur ton épaule. 

 - Pas grave, mon t-shirt est rouge, personne le verra. 

- Désolé. », s'excuse-t-il, et je lève un bras pour lui tapoter le dos.

« - T'inquiète pas. »

J'ai du mal a saisir pourquoi il est aussi sensible aux contacts physiques. D'un autre côté, ca m'arrange, parce que je l'aurais mauvaise s'il commençait à enlacer tout le monde comme ça.

Comme ça... Prenant soudainement conscience que notre position actuelle pourrait être interprétée bizarrement si quelqu'un arrivait, je m'écarte.

« - Hahah, hum... Ouais, la forme ? », lançais-je à tout hasard pour éviter un blanc.

Jay me répond avec le regard le plus sérieux que je l'ai jamais vu exprimer. 

« - Ne sors pas avec Platon. », répète-il, et je recule d'un pas.

« - Jay, c'est... On est tous les deux des gars, je vais pas aller sortir avec Platon... »

Mais ca sonne extrêmement faux dans ma bouche, sachant que je n'ai jamais été dérangé par ces histoires de sexe.

« - Hmm. », fait-il. Il semble prêt a ajouter quelque chose, mais je détourne son attention.

« - Allons voir ce que fait ma soeur, hahaha ! », me forçais-je à rire en le tirant par le bras.

Je m'arrête net en constatant la scène dans le salon. Ma soeur et ce vil faquin de Platon se font face, un peu trop proches pour discuter de la choses telles que la quantité de vaisselle que leurs parents les forcent a faire.

« - J'ai pas besoin de me battre pour toi », dit-elle avec un sourire assuré.

« - Qu'est ce qui se passe Lutsu ? », demande Jay derrière moi. Je lui fait signe de se taire.

« - A terre Jay, on va s'approcher.

 - Comment ?

 - Discrètement.

 - Mais...

 - A terre. »

Je le force a se mettre a plat ventre et m'avance dans l'entrée. 

Platon et ma soeur commencent a s'approcher un peu trop. 

Définitivement trop.

Je devrais intervenir ?

« - Saluut les moches ! », s'écrie Gajeela en déboulant dans la pièce. Elle trébuche sur nous en passant, brisant leur moment et probablement plusieurs de mes côtes.

Sans trop comprendre comment, et suite a l'apparition d'un ornithorynque ( ??? ) et de la mère de Platon, on se retrouve virés sur le balcon avec la délicatesse d'un tractopelle.

« - Est ce qu'on est censés attendre que Nashi se fasse tuer avant de rentrer ? », demandais-je.

Gajeela croise les bras d'un air morne, nous scrute, regarde par la fenêtre et soupire.

« - Donc vous êtes en train de me dire que j'ai le choix entre rester avec le couple idiot ou rentrer a l'interieur et faire face au couple débile. Tu parles d'une alternative.

 - P-pardon ? », bégayais-je, surpris.

Elle secoue la tête avec résignation, attrapant la barrière du balcon.

« - Bon, je me barre. Ca c'est clair. »

Et elle saute sans aucun autre avertissement.

« - Gajeela ?!! », hoquetais-je en me précipitant au balcon, mais je ne peux qu'entrapercevoir ses cheveux noirs disparaitre au coin de la maison.

Ce truc était hyper stylé. J'hésite entre l'admiration et la franche inquiétude pour sa santé. Elle va finir par se casser un truc.

« - Est ce qu'elle vient de nous appeler couple idiot ? », remarque Jay.

Je rougis comme une tomate. 

« - Ce... C'est pas la première a nous appeler comme ça. »

Encore une fois, nous sommes interrompus par la porte qui s'ouvre brutalement, et ma soeur nous ouvre avec bonheur. Ironie, quand tu nous tiens.

« - On va devoir y aller », fait-elle en se retournant.

Soudain la mère de Platon l’appelle depuis la cuisine. Jay et moi remettons nos chaussures dans l’entrée. Soudain, un hurlement se fait entendre.

« - J’Y CROIS PAS, TU M’AS DÉTRUIT MON SHIP !!! »

Je pile net et passe la tête dans l’encadrement de la porte. La mère de Platon est entrain de courser ma soeur, armée d’un gros couteau de boucher et de ses insultes les plus aiguisées.

« - TU SAIS COMBIEN DE TEMPS ET D’ENERGIE IL M’A FALLU POUR LES RAPPROCHER ? BEAUCOUP TROP ! REVIENS ICI QUE JE T’ÉVENTRE SALE BRISEUSE DE COUPLES ! »

Ma soeur me repère et me fait un signe paniqué. A son passage j’ouvre la porte, pour la refermer immédiatement après sur la mère psychopathe. 

Quelques milisecondes plus tard le couteau vient se ficher dans la porte, faisant ressortir la lame quelque part entre mon majeur et mon index. Je retiens un hurlement de frayeur.

« - Qu’est ce que tu dirais d’un repli stratégique ? », suggérais-je a ma soeur, mais elle a deja repris son manteau et ses bottes.

« - Grouille-toi si tu veux rester en vie Lustucru ! », me presse-t-elle.

Je relache la porte au dernier moment et pars en trombe. Jay et Nashi sont déjà dans la rue mais étonnamment la potentielle meurtrière ne nous suit pas.

« - Oh mon dieu. » Mon corps commencer à frissonner incontrôlablement. « On a failli mourir. »

Ma soeur croise les bras.

« - J’AI failli mourir, oui ! Cette vieille a intérêt a s’excuser à genoux la prochaine fois qu’on la croise. 

- Désolé pour ca. », fait une voix derrière nous. 

On sursaute. Platon nous rejoint avec un sourire d’excuse.

« - Ma mère est parfois impulsive. »

Si le sarcasme était une discipline olympique, Platon y aurait empoché la médaille d’or en observant ses adversaires s’incliner devant lui avec respect.

« - Merci pour cette précision Sherlock. »

J’espère sincèrement que ce n’est pas mon futur beau frère qui se tient devant moi, parce que c’est la merde sinon. Je ne veux pas avoir cette aliénée qu’est sa mère dans la famille.

Ce serait presque un mec bien comparé à sa génitrice.


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