Chapitre 33

Les légions déferleraient bientôt sur les plaines fertiles du Lacron. Le bois de ses forêts vierges permettait de construire les innombrables navires de guerre, aussi son territoire restait particulièrement stratégique.

La reine Wendu de Lombal ne comptait pas perdre un lopin de ces terres et repoussait les armées de Nilcalar jusque dans le désert du Fennec. Là, les conflits s'intensifiaient et les pertes s'alourdissaient.

Dorgon se pencha au-dessus des cartes de l'état-major. Il profitait que la tente soit vide pour se faire une idée sur les véritables enjeux de cette guerre. Atalantë se retrouverait dans une posture bien délicate si la reine Luinil venait à se joindre à la souveraine de Lombal.

Heureusement pour le royaume de Narraca, celle qu'on appelait la Reine Vierge restait concentrée sur Calca et ses ennemis aux oreilles pointues.

Dorgon se moquait bien de qui sortirait vainqueur de ce conflit. Son intérêt résidait ailleurs. Cette guerre n'était qu'un prétexte pour avancer ses pions.

— Dorgon, vitupéra Wimal en entrant dans la tente, resserre ton foulard, on va finir par apercevoir tes oreilles.

— Tu me cherchais ?

— Le roi t'appelle dans sa tente. Et j'ai des vêtements pour toi.

L'elfe reposa les parchemins et posa les mains sur la taille avant de souffler :

— Rien d'affreux, j'espère.

— Non. Maintenant que tu deviens le garde du corps de sa Majesté, tu dois arborer une tenue des plus resplendissantes.

— Je suis d'accord.

— Tes goûts en matière de luxe ne changent pas...

Le Caprice hocha la tête et observa les vêtements soigneusement pliés sur les bras de l'eunuque. Il déplia la tunique blanche où des galons dorés se rejoignaient en un sublime soleil sur le torse et dans le dos. Des épaulettes et des genouillères en métal dorées rappelaient la ceinture alourdie de pièces pendantes.

— Tu mettras une armure légère en-dessous, précisa Wimal, je souhaite protéger ton joli cul des astres de Lombal.

Il lui claqua les fesses sans crier gare et le poussa vers la sortie.

— Wimal, murmura-t-il les dents serrés, attends ton tour avant de me toucher.

— Tu étais moins farouche l'autre jour avec le roi. J'ai eu vent de tes prouesses.

— Garde ta jalousie, elle dégouline.

Les deux hommes traversèrent le campement. Beaucoup de soldats se retournaient au passage du Caprice, intrigués par sa présence parmi eux. Ils ne savaient quoi penser de l'esclave. Crainte, curiosité, haine et désir, voilà les sentiments qui les animaient à son égard.

Dorgon remarqua que beaucoup de ces guerriers partageaient la même teinte de peau que son camériste.

— La séparation n'est pas uniquement valique, expliqua Wimal, tu sais que chez les astres, les catégories sociales se forment par la puissance de notre Vala. Notre couleur de peau nous prédestine aussi.

— C'est vrai que dans les sphères gouvernementales, les astres sont généralement basanés. Si tu affirmes que ceux comme toi se retrouvent au combat, j'ajouterai que les hommes avec une peau très pâle sont plutôt relégués à la prostitution ou ce genre de service...

— C'est juste.

Voilà qui était fort étrange pour l'elfe. En Calca, les variations de carnation restaient très limitées...

Topaze interrompit ses pensées en bondissant à ses devants. Nilcalar avait accepté que son Caprice emmène son chat avec lui.

Le gros félin commençait à remporter la sympathie de tous les hommes car il ne se montrait agressif que lorsque la menace planait. Par association, les soldats risquaient de bien apprécier le maître du fauve.

Ce dernier ronronna en fermant ses beaux yeux bruns et colla Dorgon jusque sous la tente royale. L'escorte de Nilcalar referma les tentures dès le passage des deux hommes.

Le sas passé, ils rejoignirent le séjour du chapiteau où Nilcalar s'entretenait avec ses deux généraux sous le regard attentif de l'intendant.

L'attention du Caprice se porta aussitôt sur le plateau regorgeant de fruits. Son ventre gargouilla dans une injonction à se rassasier.

— Wimal, commença le roi, accompagne Dorgon dans sa suite, il est attendu.

Le concerné obéit et sépara le Caprice de son félin pour le mener loin du souverain.

L'elfe grinça des dents sous son bâillon. Il aurait préféré se reposer après ce voyage sur les routes sableuses de Narraca. Mais Nilcalar avait trouvé la bonne idée de contenter l'un de ses sujets par une nuit avec le Caprice.

Globalement, Dorgon avait couché avec bien peu de courtisans. Son champ d'action se limitait au roi, son intendant, le couple de généraux et quelques hauts-fonctionnaires pour des exceptions.

Cependant, son invité du moment ne lui était pas inconnu. Fayra se leva de son siège et se précipita dans les bras de l'elfe.

— Dorgon ! Tu m'as tellement manqué.

— Que me vaut l'honneur de votre présence ?

L'astre passa joyeusement la main dans ses boucles blondes et sourit fièrement :

— Grâce à moi, le roi va pouvoir manœuvrer ses armées dans la plaine du Lacron. Je suis une espionne hors pair !

— Je vois... Vous ne m'en voulez pas pour la dernière fois ?

Fayra croisa les bras et plongea un regard luisant de rancune dans celui de l'elfe. Pour éviter d'attirer l'attention, elle avait revêtu des habits d'homme ce qui lui donnait un air plus intimidant.

— Bien évidemment que je t'en veux. Tu as réussi à me tromper alors que tu étais entre mes cuisses, c'est fort tout de même.

— C'est votre faute, vous n'auriez pas dû me donner d'aphrodisiaque.

L'astre siffla dans un ressentiment palpable et s'adressa à Wimal :

— Il devient malpoli, cet esclave.

— Ne me le fais pas dire, soupira l'eunuque.

— Quoiqu'il en soit, Dorgon, Nilcalar me récompense par ta présence.

L'elfe plissa les yeux :

— Vous le lui avez demandé.

Fayra avoua d'un signe et s'avança vers Dorgon pour lui retirer son foulard :

— Une nuit auprès d'un elfe laisse des séquelles très profondes. C'est plus puissant que n'importe quelle drogue.

Sans vouloir s'imposer davantage, Wimal prit congé. Le couple se retrouva seul dans cette partie de la tente royale.

— J'hésite encore à te donner ma potion.

Dorgon se retint de sourire. Réitérer l'expérience lui tentait bien et il ne s'opposerait pas au plaisir de ces hallucinations. En revanche, s'accoupler simplement avec l'astre ne l'intéressait pas plus que ses rapports avec les gouvernants d'Atalantë.

— Je risque d'être moins passionné si vous vous abstenez, Fayra.

— Je sais bien. Mais mon orgueil ne tolère pas que tu jouisses grâce à une autre.

Les oreilles du Caprice se baissèrent de déception. Il avait envie de laver ses rapports avec le roi en prenant du plaisir dans une relation sexuelle qui demeurait fidèle à ses penchants. Fayra avait un certain charme avec ses traits bien prononcés et son caractère tout aussi extraverti que confiant.

— Bien, décida l'espionne, disons que si tu t'occupes bien de moi, je te laisserai siffler ma liqueur.

Dorgon accepta ce compromis et commença à se déshabiller. Sa partenaire en fit de même, pressée de pouvoir enfin calmer sa libido croissante. La maladresse de son compagnon l'amusait, il demeurait très maladroit avec elle du fait de son peu d'expérience avec les femmes. Elle le guida donc dans les préliminaires, ce qu'il accepta sans mot dire. Il se concentrait dans l'unique but d'avoir sa contrepartie.

Heureusement pour lui, Fayra n'était pas compliquée à contenter. Elle s'échauffait vite et se frottait à lui sans lésiner sur les baisers sauvages ou les caresses douloureuses qu'elle prodiguait au sexe de l'homme.

Au moins Dorgon parvenait à suffisamment contrôler son corps pour s'introduire en elle et prolonger l'échange malgré son manque évident d'attirance pour l'astre. Sa jeunesse lui avait prouvé qu'il aimait les femmes pulpeuses et bien que Fayra ne manquât point de générosité dans sa chair, il ne lui trouvait aucun attrait qui pourrait l'exciter.

Elle, au contraire, tremblait sans discontinuer, tous ses sens en exergue. Ses cris incontrôlés s'échappaient de ses lèvres épaisses à un rythme irrégulier, emplissant alors la tente de ses plaintes érotiques.

Le Caprice la besogna autant qu'il fallut jusqu'à ce qu'il lui fasse décrocher un orgasme. Fayra demeura fébrile pendant quelques instants mais comme son partenaire ne partageait nullement son extase, elle se rappela sa promesse.

Elle ne put s'empêcher de déglutir en pensant qu'elle allait sans doute pâtir de ce revirement de situation ; la dernière fois, l'elfe avait totalement perdu le contrôle, il se pouvait qu'il soit violent dans son étreinte.

Comme il s'impatientait, elle lui donna la fiole :

— Garde-toi de mentionner le nom de cette fille, menaça-t-elle.

Dorgon ignora parfaitement ces mots et avala le sérum. Les effets se firent vite sentir et une étrange torpeur le gagna avant de laisser place à une soudaine fièvre incontrôlable. Les illusions causées avaient suffi pour lui faire perdre l'esprit et comment aurait-il pu être autrement alors que la femme de sa vie remplaçait l'astre ?

Son cœur s'emballa et sans doute la petite elfe devait le sentir par leur lien surnaturel.

L'esclave se saisit de sa maîtresse et la plaqua violemment contre le pilier de la tente avant de la culbuter sans pitié. À chaque va et vient, son sexe se gonflait douloureusement pour taper avec toujours plus d'entrain entre les cuisses de la femme.

Comme quoi, la vision d'Oryana dans ses aspects les plus lubriques le rendait complètement fou. Il voulait la prendre sans relâche et dans toutes les postures possibles. Son corps parfait l'enivrait et l'invitait à le marquer de son passage. Ce doux visage transi lui faisait redoubler d'ardeur dans ses mouvements brutaux et en retour, il l'embrassait avec passion.

Vint le moment où il ne parvint plus à tenir. Sa verge trop sollicitée lui paraissait en feu mais il ne pouvait se résoudre à arrêter. À chaque fois, il renfournait son membre tendu dans l'écrin trempé et si accueillant. Il ne voulait pour rien au monde mettre fin à cet échange avec son amante. Rien que ses sublimes prunelles de jade le ravissaient. Ses épaules rosies et ses petits bras potelés tressaillaient à chaque secousse. Emporté dans des spasmes de plaisir, Dorgon venait cajoler les seins gras et gonflés de sa compagne épuisée, les pressant et les secouant avant d'accorder ce même sort aux fesses rougies par les frottements.

Jusqu'à quand ces ébats bestiaux continuèrent-ils, Dorgon n'aurait su le dire. Quand son cœur commença à rater plusieurs battements, il se résolut à finir l'échange et se répandit sur la poitrine plantureuse de sa partenaire inconsciente.

Avec la perte totale d'énergie, les hallucinations s'estompèrent.

Fayra était étendue sur le tapis de la tente, comme morte. Son regard vitreux comme les nombreuses blessures qui parsemaient son corps alertèrent l'elfe. L'avait-il tuée ?

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