Les semaines suivantes furent un véritable enfer pour Iruka. La fatigue mentale, la solitude et la douleur ne faisaient que grandir, et les pensées sombres qui s'étaient installées dans son esprit commençaient à le dévorer. Il essayait de lutter, de maintenir une façade, mais à chaque instant, cette bataille devenait plus insoutenable. Finalement, il trouva une échappatoire, un moyen de faire taire temporairement les voix dans sa tête : l'alcool.

Ce soir-là, après une longue journée à l'Académie, il entra dans un bar du village. Il n'avait jamais été un gros buveur auparavant, mais à ce moment-là, il s'en fichait. L'idée de sombrer dans l'oubli, ne serait-ce que pour quelques heures, était bien plus attrayante que de retourner seul dans son appartement silencieux et affronter ses cauchemars. La première gorgée de saké lui brûla la gorge, mais le soulagement qui suivit fut immédiat. Pendant un bref instant, il ne ressentait plus la douleur, la peur ou la honte. Juste le néant. Et c'était tout ce qu'il demandait.

Au fil des jours, ces visites au bar devinrent de plus en plus fréquentes. Iruka passait une grande partie de ses soirées à boire, cherchant désespérément à noyer ses pensées dans l'alcool. Il arrivait parfois à rentrer chez lui sans trop de dégâts, d'autres fois, il s'effondrait simplement sur le canapé, incapable de trouver le chemin vers sa chambre. Il se réveillait chaque matin avec une lourdeur nouvelle dans la tête, mais aussi un vide plus profond dans son cœur.

Ses crises de colère devinrent encore plus incontrôlables. À l'Académie, il perdit complètement patience à plusieurs reprises, hurlant sur ses élèves pour des erreurs insignifiantes. Ses collègues, auparavant inquiets mais distants, commençaient à murmurer entre eux, à discuter de possibles mesures à prendre. Mais personne ne savait comment aborder Iruka sans déclencher une nouvelle explosion.

Kakashi, quant à lui, observait cette déchéance avec une profonde tristesse et un sentiment d'impuissance. Il avait vu de nombreux shinobis sombrer de la sorte, chercher refuge dans l'alcool pour échapper à leurs douleurs. Il savait ce que cela signifiait : Iruka touchait le fond. Mais malgré tout, Kakashi n'abandonnait pas. Il continuait de le surveiller de loin, tentant parfois de l'aborder lorsque la situation semblait moins tendue. Mais à chaque tentative, Iruka le repoussait, soit avec un silence froid, soit avec une réplique acerbe.

Un soir, alors que Kakashi revenait d'une mission de routine, il aperçut Iruka titubant en sortant d'un des bars du village. Le visage rouge, les vêtements en désordre, l'enseignant avait l'air d'un homme complètement différent de celui que Kakashi avait connu. Il s'avança instinctivement, mais s'arrêta à quelques mètres de lui, incertain de la manière dont Iruka réagirait à sa présence.

Iruka leva les yeux et reconnut immédiatement Kakashi. Ses traits se crispèrent, une vague de colère et de honte traversant son visage. « Tu me suis maintenant ? » grogna-t-il, sa voix légèrement slurée par l'alcool. « T'es content ? Tu voulais voir ça, hein ? Le pauvre Iruka, qui s'enfonce dans la merde... »

Kakashi resta silencieux, le laissant parler, se déverser. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait quelqu'un dans cet état, et il savait que le pire serait de répondre avec de la condescendance ou des reproches. Iruka avait besoin de vider son sac, même si cela passait par des mots blessants.

« Qu'est-ce que tu veux, Kakashi ?! » cria Iruka, ses mains tremblantes sous l'effet de l'alcool et de l'émotion. « Tu crois que tu peux juste... être là et que tout ira mieux ? Eh bien, désolé de te décevoir, mais ça ne marche pas comme ça ! »

Kakashi prit une profonde inspiration, serrant légèrement les poings, mais il resta calme. « Je ne suis pas là pour te juger, Iruka, » répondit-il doucement. « Je suis juste... là. »

« Là ? » répéta Iruka avec une amertume palpable. « Tu ne sais rien, Kakashi. Tu ne sais pas ce que c'est de... » Il s'arrêta, la fin de sa phrase mourant dans sa gorge. Une vague d'émotion le submergea, et il détourna brusquement le regard, refusant de laisser voir à Kakashi la douleur derrière ses yeux.

Kakashi n'insista pas. Il savait qu'Iruka était sur le point de basculer, et qu'un mot de travers pourrait le faire fuir à nouveau. Il se contenta d'hocher légèrement la tête, comme pour dire qu'il comprenait, même s'il ne savait pas tout. « Tu n'as pas besoin de tout affronter seul, » dit-il simplement.

Mais Iruka n'était pas encore prêt à l'entendre. Il recula, titubant légèrement, avant de lancer un dernier regard chargé de mépris à Kakashi. « Laisse-moi tranquille, » murmura-t-il avant de s'éloigner dans les ruelles sombres, sa silhouette se perdant dans la nuit.

Kakashi resta debout un long moment après qu'Iruka soit parti, le cœur lourd. Il avait été témoin de tant de souffrances dans sa vie, mais voir Iruka dans cet état était une blessure nouvelle, plus personnelle. Il savait que le professeur était en train de s'autodétruire, et cela lui faisait mal de rester impuissant face à cette déchéance.

Kakashi passa les jours suivants à réfléchir à une solution. Il ne pouvait pas forcer Iruka à accepter de l'aide, mais il devait trouver un moyen de le faire comprendre qu'il n'était pas seul. Il se souvenait de ses propres moments de faiblesse, de ses propres batailles avec la solitude et la douleur. Mais il avait eu des gens comme Gai ou Yamato pour lui rappeler qu'il y avait toujours une lumière quelque part, même dans les moments les plus sombres.

Peut-être qu'Iruka avait besoin de ça aussi : une main tendue, mais discrète. Quelque chose qui ne le brusquerait pas, mais qui lui montrerait qu'il y avait encore de l'espoir.

Kakashi décida d'observer de plus près les habitudes d'Iruka. Il savait qu'il ne pouvait pas intervenir directement tant qu'Iruka continuait à le repousser, mais il se promit de ne pas le laisser sombrer sans rien faire. Peu importe combien de temps cela prendrait, il trouverait un moyen d'aider Iruka à remonter la pente.

Il n'abandonnerait pas. Pas cette fois.