Chapitre 35


Raph se tenait debout, au bord du vide. Le vent balayait doucement ses cheveux sur le côté de son visage, et lui permettait difficilement de retenir ses larmes. Sous ses pieds, la roche ne tenait presque plus, touchée par l'érosion. Raph déglutit durement en voyant l'écume lécher le bord de la falaise, en contrebas. Tous les êtres chers qui comptaient le plus pour lui étaient morts. Toute sa famille, son père, sa mère... Will. Il n'avait plus aucune attache. Il lui suffisait de faire un petit pas, et hop. Son corps reposerait au fond des abysses, loin de tout. Loin de ce cauchemar.

Raph ferma les yeux, puis leva l'une de ses jambes.


***


- Dépêche-toi, Raph ! Sors de ce lit avant que je ne vienne t'en sortir moi-même.


Raph pouffa, le nez encore plongé dans l'oreiller.


- J'aimerai bien voir ça, tiens... Marmonna-t-il pour lui-même.


Il étouffa un cri de surprise quand une masse se laissa tomber sur le creux de ses reins. Il râla pour la forme, étant donné que la présence de son petit bouclé le mettait plus en joie qu'autre chose. Will posa ses mains froides sur le dos nu de Raph, qui ne se retint pas –cette fois-ci– de crier. Il bondit hors du lit, ne se souciant pas d'en d'avoir fait tomber Will, un doigt pointé vers ce dernier.


- Ca... T'avais pas le droit ! S'exclama-t-il.


Will était hilare. Il aimait beaucoup voir Raph dans cet état.


- Ce n'est pas poli de faire attendre les autres, reprit Will après s'être calmé.

- Je sais, bougonna Raph.


Il se dirigea vers la salle de bains à contrecœur. Après avoir avalé un rapide petit-déjeuner, il n'oublia pas de voler un baiser à Will, avant de quitter la maison au pas de course.


***


- Bonjour, j'ai rendez-vous avec madame Ottarsen.

- Installez-vous là-bas, Elvira va vous recevoir dans quelques instants.


Raph remercia poliment la dame de l'accueil. Il s'éloigna pour rejoindre les fauteuils et s'y asseoir. Il regarda un peu partout autour de lui, comme la première fois qu'il était venu ici. Tout semblait être extrêmement riche. Raph n'avait jamais vu un lieu aussi bien décoré. Même sa maison, autrefois, n'avait pas été aussi luxuriante et lumineuse.


- Raphaël López ?


Raph releva les yeux et vit Elvira Ottarsen en face de lui. Elle lui offrait un sourire étincelant.


- Juste Raph, répondit celui-ci en se levant de manière nonchalante.

- Allons, mon garçon. Vos parents –qui ne sont surement plus parmi nous aujourd'hui– vous ont donné ce prénom parce qu'ils l'aimaient. Il faut l'honorer !


Raph était choqué par ces mots. Pas à cause de son discours sur ses parents, mais du fait qu'elle ose mentionner leur décès. De quel droit osait-elle parler de cela ?


- Suivez-moi.


Raph ne dit rien. Il exécuta simplement les ordres de cette femme –qu'il trouvait désormais mauvaise–, qui les conduisit au troisième sous-sol, grâce à un ascenseur. Décidemment, cet endroit était véritablement immense ! Raph avait l'impression de ne pas en croire ses yeux.

Raph et Elvira rejoignirent un bloc fermé. Pour pénétrer à l'intérieur, il fallait passer par un sas qui semblait être pour la décontamination. Elvira ouvrit la porte vitrée, qui coulissa, grâce à l'empreinte de sa main. Elle et Raph entrèrent. Elvira revêtit une nouvelle blouse blanche, qu'elle enfila par-dessus la première. Raph s'apprêtait à en faire de même, un peu perdu et ne sachant pas quoi faire, mais Elvira l'arrêta.


- Pas toi, dit-elle.


Raph rougit légèrement. Il laissa retomber son bras le long de son corps. Une fois qu'Elvira eut terminé d'enfiler ses gants, elle ouvrit la porte en enfilade. Ils rejoignirent l'intérieur et Raph découvrit une salle quasiment plongée dans le noir. Seuls trois néons bleus crépitaient faiblement. Assez pour diffuser une douce lueur et baigner la pièce d'un joli éclat. Une table, style celle qu'on peut trouver dans les morgues, se trouvait au milieu de la pièce. Raph frissonna désagréablement, sans savoir ce qui l'attendait. Des tas de chariots contenant divers ustensiles et produits se trouvaient de part et d'autre de la table. Un scientifique apparu d'une autre porte.


- Bonjour, tu dois être Raphaël, dit celui-ci.


Le garçon acquiesça, incapable de répondre. Il ne savait pas pourquoi, mais il était extrêmement mal à l'aise. Il se frotta nerveusement la nuque.


- Juste Raph, répéta-t-il.

- Très bien, Juste Raph, sourit le scientifique en appuyant bien sur son surnom. Je m'appelle Fabien. Déshabille-toi s'il te plaît. Garde seulement ton boxer.


Les yeux de Raph s'arrondirent. Inconsciemment, il resserra ses bras autour de son corps. Il n'était pas pudique, mais il ne connaissait absolument pas ces gens. Elvira et le scientifique étaient déjà en train de s'occuper du contenu des chariots. Toutefois, l'homme se tourna vers lui de nouveau.


- Retire tes vêtements, s'il te plaît.


Raph soupira. Contraint, il se sépara lentement de son tee-shirt, de ses chaussures, de ses chaussettes et de son pantalon. Il croisa ses bras à nouveau sur son torse pour cacher sa maigreur et sa quasi-nudité.


- Tu peux t'allonger sur la table.


Raph s'approcher de celle-ci, le corps recouvert de chair de poule. Il avait très froid. Il s'allongea à l'endroit prévu en se retenant de claquer des dents. Le chauffage était en panne ou quoi ?

Elvira et Fabien s'approchèrent de ses jambes. Raph commença à s'agiter, toujours autant nerveux. Les doigts froids d'Elvira se glissèrent autour de ses chevilles, comme un serpent s'enroule autour de sa proie. Elle les lui maintint en lui demandant gentiment de ne pas bouger. Raph se plia aux ordres avec difficulté. Lui qui n'aimait pas qu'on lui en donne d'habitude...

Raph vit Fabien, du coin de l'œil, attraper une grosse pince. Tout son sang quitta son visage en voyant cela. Il se redressa d'un seul coup.


- Vous allez me faire quoi là ? Demanda-t-il, paniqué.

- Juste vérifier la plaie à l'intérieur de ta cuisse, rassura Fabien.


Raph se rallongea sur la table quand le métal froid commença à triturer sa peau. Il manqua de défaillir. Il posa un bras sur ses yeux, tout en gémissant de douleurs. Il sentit Elvira lâcher ses chevilles. Fabien lui dicta certaines choses, qu'elle prenait sans doute en note.

Raph ne se sentait pas très bien. Finalement, on lui planta une seringue dans le creux de son bras libre pour lui injecter un produit, ce qui le plongea dans un sommeil sans rêve.

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