25. Bonne nouvelle... ou pas
Les semaines ont passé, jusqu'à ce jour de début mars. J'étais assise dans un des fauteuils de la salle commune de Serdaigle, et c'était le soir. Tout le monde était déjà couché, mais je voulais à tout prix terminer de lire mon roman – un roman moldu que m'avait offert Noelia pour Noël. Alors j'étais assise, seule, et je lisais.
Alec est arrivé près d'une heure après que tout le monde soit allé dans les dortoirs. Il avait l'air penaud, et dès que je l'ai vu, j'ai levé le nez de mon livre.
Quelque chose n'allait pas. Il avait l'air sur le point de vomir, ou de fondre en larmes, ou les deux à la fois. Je ne lui avais jamais vu cet air-là, à part le jour où il avait appris qu'Hugo était mort.
J'ai posé mon livre sur le fauteuil et je me suis levée.
Avant même qu'il ne me dise quoi que ce soit, je savais. Je savais ce qu'il allait me dire, ainsi que ce qu'il s'était passé. Je le savais pour avoir déjà vu cette expression sur mon visage lorsque Kevin m'avait larguée.
Alexander : Je... Cassie et moi, on a rompu.
Je l'ai serré dans mes bras avant de le relâcher.
D'un côté, mon cœur faisait des bonds désordonnés et mon cerveau m'envoyait des signaux signifiant que, sans Cassie, j'avais champ libre ; d'un autre côté, la peine que je lisais dans ses yeux m'empêchait de crier victoire.
Moi : Quoi ?! Mais pourquoi ?
Il a haussé les épaules lentement, tout en baissant les yeux.
Alexander : Je sais pas trop... Je l'aime beaucoup, seulement... J'avais tout le temps l'impression que ce n'était pas la bonne personne. J'avais tout le temps cette impression, comme si la fille qui m'était destinée n'était pas Cassie, mais une autre fille. Et... Je crois qu'elle l'a senti. Cassie, je veux dire. Je pense qu'elle a senti que j'hésitais. Sur la fin, j'hésitais même à l'embrasser, parfois. Ça ne lui a pas plu. En sortant de l'entraînement de Quidditch, hier soir, elle a tenu à me parler. Elle s'est énervée, elle a commencé à crier... et puis elle a fini par me dire qu'elle ne voulait pas continuer à sortir avec moi.
Je ne savais pas quoi répondre. D'un côté, j'étais heureuse, et j'adorais Cassie pour ce qu'elle avait fait, puisque dorénavant je pouvais librement séduire Alec. D'un autre côté, je la haïssais pour avoir ainsi fait de la peine à mon meilleur ami.
Moi : Dis-toi que ce n'était pas la fille qui t'étais destinée. Tu l'as dit toi-même, tu sentais au plus profond de toi que tu ne pensais pas qu'elle était la bonne...
Par contre, si la fille qui lui était destinée pouvait être grande, rousse, avec des yeux bleus, et s'appeler Lily Luna Potter, ça m'aurait arrangé !
Moi : ... et qu'une autre t'attendait quelque part.
J'ai posé ma main sur son épaule.
Moi : Ça va peut-être te paraître bizarre, comme métaphore, mais je vois l'univers comme une grande machine.
Alexander a levé les yeux vers moi. J'ai cru voir une lueur d'amusement dans son regard, bien vite remplacée par une lueur d'incompréhension. Il devait carrément me prendre pour une dingue.
Alexander : Une machine ? L'univers, une machine ?
J'ai hoché la tête. Je savais que la comparaison pouvait prêter à rire, mais c'était comme ça que je voyais le monde.
Moi : Ouais. Et une machine est faite pour fonctionner. Jusque là, tu me suis ?
Alexander : Ouais. Sauf les machines de ton grand-père, elles finissent toujours par exploser...
J'ai ri. Il n'avait pas tout à fait tort, mon grand-père adorait les objets moldus. Et dès qu'il essayait de faire marcher une machine moldue, il finissait inlassablement par la faire exploser.
Moi : Oui, bon... Mon grand-père est l'exception qui confirme la règle.
Alec a hoché la tête en souriant, et j'ai continué mon explication :
Moi : Eh bien, vu que l'univers est une machine, et que les machines sont faites pour fonctionner, l'univers est donc logiquement fait pour fonctionner. Ce qui veut dire que tout ce qu'il se passe, ça se passe pour une bonne raison. Et donc, par conséquent, chaque pièce de la machine a sa propre place pour faire fonctionner le tout. En suivant ce raisonnement, tu te rends compte que chaque personne de notre société a une place bien précise. On la cherche, comme le mécanicien cherche la place de telle ou telle pièce. On fait des essais, comme pour un puzzle. Et un jour, on trouve la place qui est la nôtre. Et toi, Alexander Londubat, tu trouveras ta place, même si ce n'est pas aux côtés de Cassie Thompson. J'ai foi en toi, et en ma machine, cette machine qu'est l'univers.
Alec a souri, et je dois avouer que j'étais assez fière de moi.
Alexander : C'est assez marrant ce que tu dis, mais ce n'est pas dénué de sens. J'aime bien.
J'ai réfléchi un instant. Ce que je venais de dire pouvait marcher pour moi-aussi. Je trouverais ma place, même si elle n'était pas aux côtés d'Alec.
Non. C'était impossible. Ma place était avec Alec, et avec personne d'autre. J'étais prête à tout, même à user d'un philtre d'amour s'il le fallait, pour lui faire réaliser à quel point j'étais dingue de lui.
Non. Je ne pouvais pas faire ça, je n'avais pas le droit. C'était immoral, abject.
Alec s'est assis dans le fauteuil, sans même prêter attention à mon livre. Il a cependant semblé remarquer qu'il s'était assis sur quelque chose car il s'est relevé, a pris le livre et s'est rassis. Je m'attendais à ce qu'il me rende mon roman, mais il s'est contenté d'observer la couverture.
Alexander : Ghosts, Le crâne perdu... C'est bien, comme roman ?
Je lui ai souri.
Moi : C'est intéressant. C'est une histoire de fantômes et de morts, mais pas comme ces fantômes qu'on trouve dans les couloirs. Il y a toute une histoire entre deux mondes, un monde des morts et un monde des vivants, avec une histoire de crâne qui empêcherait la formation de morts-vivants, tout ça. C'est plutôt cool, mais bien sûr, faut aimer.
Mon meilleur ami avait l'air songeur et il a poussé un soupir.
Alexander : Je... je crois que je vais aller me coucher...
J'ai hoché la tête en lui souriant tendrement. Puis j'ai fermé mon livre d'un coup sec.
Moi : Tu as raison. Je vais aller me coucher aussi.
J'ai bâillé longuement en prenant bien soin de mettre ma main devant ma bouche — je suis une fille bien élevée, quand même ! –, et j'ai cligné plusieurs fois des yeux.
Moi : T'es sûr que ça va aller ? Je veux dire... Je sais qu'il y a les garçons, mais...
Je n'ai pas fini ma phrase, mais Alec semblait avoir compris car il hocha la tête.
Alexander : Ouais... Ouais, t'inquiètes pas pour moi.
Il est parti aussi sec, me laissant seule dans la salle commune. Même les élèves qui d'habitude passaient une grosse partie de la soirée dans la salle commune n'étaient plus là. Donc j'ai décidé de monter me coucher.
Mal m'en a pris. Je ne sais pas si c'est parce qu'Alec était mal et que c'était mon meilleur ami – tout ce qui le touchait lui me touchait donc forcément –, mais en tout cas, j'ai fait d'horribles cauchemars.
Ça a commencé, j'étais assise par terre, sur du béton nu qui s'étendait à perte de vue. J'ai essayé de bouger, mais rien à faire, j'étais comme pétrifiée.
Soudain, Alec est apparu, quelques mètres devant moins. Il était d'une blancheur inquiétante, et semblait sur le point de vomir. Il fixait un point derrière moi.
Je me suis retournée pour faire face à Cassie Thompson. C'était elle que regardait Alec. Elle avait une expression féroce sur le visage, et elle s'est approchée de mon meilleur ami. Je ne sais pas comment, mais je savais qu'elle allait lui faire du mal. J'ai essayé de crier à Alec de partir, de fuir, mais ma voix n'a pas obéi. J'ai donc observé, impuissante, Cassie poser une main sur l'épaule d'Alexander et lui baiser le front. Aussitôt, ils se sont serrés et ont commencé à s'embrasser.
J'ai senti les larmes me brûler les yeux. Leur relation me détruisait. Je ne m'étais jamais rendu compte à quel point, mais ça me détruisait de l'intérieur.
Aussitôt, Cassie s'est écartée d'Alec et a plongé sa main dans sa poitrine. J'ai regardé le bras de la jeune fille entrer dans le torse d'Alec comme dans de la fumée. J'ai voulu hurler, mais mon cri m'est resté en travers de la gorge.
Cassie a retiré sa main. Elle tenait le cœur d'Alec entre ses doigts, et elle s'est tournée vers moi.
Cassie : Il est à moi, maintenant. Tu ne l'auras jamais, Lily. Il est à moi. À moi.
Elle m'a gratifiée d'un sourire carnassier et s'est volatilisé tandisqu'Alec s'écroulait sur le sol. J'ai immédiatement retrouvé l'usage de mes jambes ainsi que de ma voix, et j'ai hurlé :
Moi : Alec !
Je me suis précipitée vers mon meilleur ami, les larmes coulant sur mes joues. Alec ne respirait plus, ses yeux étaient clos.
Moi : Alec ! Alec je t'en supplie !
Mais rien à faire, il ne bougeait plus.
Le corps de mon meilleur ami s'est volatilisé à son tour, et mon rêve a changé.
J'étais assise dans le dortoir des garçons de septième année de Serdaigle. Je le connaissais bien, parce qu'il m'arrivait souvent de m'y rendre.
Un garçon était assis à côté de moi, et je ne voyais pas sa tête. Mais je n'en avais pas besoin, je savais qui il était. C'était Kevin, qui a alors murmuré :
Kevin : Lily...
J'ai sursauté en l'entendant murmurer mon prénom. La dernière fois qu'il avait mis tant d'émotion dans sa voix...
Moi : Quoi ?
Il n'a pas semblé m'entendre. Il a continué à fixer le vide de ses yeux marron.
Kevin : Lily, je suis tellement désolé...
Il a levé la tête vers moi et son regard m'est passé à travers. Il ne me voyait pas, ne m'entendait pas.
Kevin : Si j'avais su, je n'aurais jamais agi de la sorte... Je n'ai jamais voulu te faire de mal...
Il a poussé un soupir triste.
Kevin : Pardonne-moi, Lily. Pardonne-moi pour tout le mal que je t'ai fait. Et Alec... Alec, promets-moi que tu prendras soin d'elle. Si je ne peux avoir son cœur, protège-le pour moi. Ne le brise pas comme je l'ai brisé, Alec. Elle ne le mérite pas.
Kevin s'est pris la tête entre les mains. Il semblait en plein conflit intérieur.
Kevin : Tu as beau dire que tu ne l'aimes pas, je sais, Alec. Je sais que ce n'est pas vrai. Lily représente tout pour toi, et tu représentes tout pour elle. Plus que ce que j'ai jamais représenté pour elle. Je sais que tu l'aimes, même si tu le nies. Tu m'as assez reproché de lui avoir fait du mal pour que je comprenne ce que tu ressens pour elle, même si toi tu ne sembles pas le savoir. Alors protège-la, Alec.
Je suis restée silencieuse et j'ai observé Kevin. Il ne m'avait jamais paru si vulnérable, si triste qu'en cet instant, mais avant que je n'ai pu réagir, mon rêve a de nouveau changé.
J'étais à présent dans la tour d'Astronomie, debout et appuyée au garde-corps. L'endroit était sombre et silencieux, mais je sentais une présence. Puis une fille est sortie de l'ombre. Elle avait de longs cheveux noirs et emmêlés, un sourire dément et des yeux d'un marron presque noir. Elle était vêtue d'un corset en dentelle noire ainsi que d'une jupe assortie, et elle était carrément effrayante.
La femme a ri d'un rire fou et elle m'a fusillée du regard.
La femme : Vous allez voir, bande d'effroyables vauriens ! Je vais me venger, et je vous ferai tous payer pour vos crimes et ceux de vos aînés !
Elle a ri de nouveau et mon sang s'est glacé dans mes veines. Un frisson m'a parcouru des pieds à la tête. J'étais incapable de bouger.
La femme : J'ai déjà tué un garçon, et je ne vais pas tarder à tuer une fille. Seras-tu la prochaine, Lily Luna Potter ?
Elle a fixé ses yeux dans les miens et j'ai pris peur.
La femme a de nouveau ouvert la bouche pour parler, mais au lieu de sa voix horrible, c'est la voix de Zoé qui a dit :
La femme : Lily, réveille-toi !
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