11. Quand tout s'écroule

      Cette nuit-là, j'ai fait d'étranges rêves. J'ai rêvé de Botrucs qui me tiraient les cheveux et riaient. Puis j'ai rêvé que je tombais dans un puits sans fond – comme le gouffre sous le pont de Poudlard –, et qu'Alec me regardait chuter en m'insultant. Et, bien sûr, comme chaque fois que quelque chose qui se passait me perturbait, j'en ai rêvé. J'ai rêvé de ma dispute avec Alec, et des évènements récents. Donc quand je me suis réveillée, j'étais assez mal.

      Les filles avaient déjà commencé à se préparer.

Moi : Pourquoi t'as pas mis ton réveil Noelia ?

      Noelia a haussé les épaules.

Noelia : Je l'ai mis. C'est toi qui ne l'as pas entendu. Et on n'avait pas envie de te réveiller...

      Je me suis levée d'un bond. J'allais être en retard !

Moi : Vous êtes folles ? Je vais être en retard !

      Aussi rapidement que j'ai pu, j'ai enfilé ma jupe, ma chemise, ma cravate, mes chaussettes et un gilet. Puis j'ai mis mes chaussures, j'ai rapidement passé un coup de brosse dans mes cheveux et je me suis précipitée dans la salle commune, à la suite de Liz, Zoé, Elsa et Noelia.

      La journée est passée, toujours aussi lentement. Je ne parlais plus à Alec, et par conséquent, je ne parlais plus aux garçons, sauf s'ils se trouvaient sans Alec. J'étais sans arrêt sur les nerfs, à réagir au quart de tour lorsque les filles me parlaient. Je n'avais quasiment pas faim, alors je ne mangeais presque plus. Je n'étais pas non plus attentive en cours, j'oubliais de noter les trois quarts de ce que dictaient les professeurs, quand je n'oubliais pas carrément mes affaires. Bref, je n'étais pas moi-même, et les professeurs semblaient le remarquer puisqu'ils étaient tous sur mon dos – comme si ma dispute avec Alec ne suffisait pas.

      Le soir, j'avais besoin d'extérioriser. Je suis donc retournée dans la salle de bain des préfets. Je n'avais toujours pas le droit d'y aller car je n'étais pas préfète, mais je n'en avais rien à faire. Après la dispute qu'on avait eue, Alec et moi, j'avais besoin de me détendre, et rien ne me détendait mieux qu'un bon bain moussant.

      Une fois la baignoire remplie – si on pouvait appeler ça une baignoire, étant donné qu'elle ressemblait plus à une piscine –, j'ai fait deux longueurs puis je me suis arrêtée au bout. J'ai posé mes coudes sur le rebord et me suis plongée dans l'eau jusqu'au menton. Et je me suis mise à pleurer.

      Pourquoi ? Pourquoi Alexander m'accusait-il d'avoir voulu le tuer alors que je lui avais sauvé la vie ? Il était mon meilleur ami, je n'aurais jamais pu ne serait-ce que penser le tuer !

      En fait, il était plus que mon meilleur ami. J'étais amoureuse de lui depuis l'année précédente. Il était mon autre moitié, la personne sans qui je ne pourrais pas survivre. Je lui aurais tout donné, sans exception. J'aurais sacrifié ma vie pour lui. Alors comment pouvait-il pensé que j'avais voulu le tuer ?

      Mes sanglots ont redoublé sous les yeux médusés et compatissants de la sirène du tableau, qui a commencé à parler. Je ne comprenais pas un traître mot de ce qu'elle racontait. Je ne parlais pas son langage.

      Elle a dû remarquer que je ne comprenais pas, car elle s'est arrêtée. Puis elle s'est mise à chanter. Mon cœur a loupé un battement, puis deux. Son chant était magnifique. Elle arrivait à mettre tant d'émotions dans sa voix, aussi bizarre fût-elle !

      J'ai senti une vague d'émotions me submerger. Aucun doute, le chant de la sirène était magique. J'ai d'abord commencé à pleurer, toujours plus, puis la sirène a changé de chanson. Cette dernière semblait plus joyeuse, apaisante même. Puis, au travers de la chanson, j'ai compris ce que disait la sirène. Je ne sais pas comment c'était possible, mais elle me parlait, et je comprenais.

La sirène : Je n'ai jamais chanté pour personne, tu sais. Mais je sais qui tu es, ainsi que ton histoire. Une petite fille née trop tôt, qui aurait dû mourir mais qui s'est battue pour survivre. La petite dernière d'une grande famille, avec deux frères aînés qui ont autant brillé l'un que l'autre. Condamnée à être dans l'ombre. Mais tu as brillé, tu sais. Tu as brillé pour tes amis.

      Elle a soupiré tout en continuant de chanter. Je me demandais d'ailleurs comment elle arrivait à chanter et me parler en même temps. De plus, j'avais arrêté de pleurer, et je sentais comme une chaleur à l'intérieur de ma poitrine.

La sirène : Ne te laisse pas abattre pour des histoires sans importance. Un jour viendra, la vérité triomphera. La vérité triomphe toujours. Comme dirait le sorcier Sénèque, que les moldus connaissent également, l'erreur est humaine. Mais la vérité triomphera quoi qu'il advienne.

      Elle a alors arrêté de chanter puis a fermé les yeux. Je suis restée muette, saisie par le fait que les sirènes puissent philosopher de cette manière. Puis je me suis aperçu qu'il était tard, alors je suis retournée au dortoir pour me coucher.

      Le lendemain, je parlais de ma dispute avec Alec avec les filles et Lysander.

Moi : De toute façon, s'il est trop bête pour s'apercevoir que j'y suis pour rien, tant pis pour lui.

      Les paroles de la sirène résonnaient toujours dans ma tête, et elles avaient largement fait leur effet. Je me sentais beaucoup plus sereine, et je pouvais à présent parler de ma dispute avec Alec sans me mettre à pleurer ou manquer d'étrangler quelqu'un.

      Lysander a haussé les sourcils.

Lysander : Mais t'es sûre que c'est pas toi ?

      Je me suis aussitôt levée pour lui faire face, la rage au ventre et dans les yeux. Il a blêmi en croisant mon regard.

Moi : Tu me prends pour qui ? Tu crois vraiment que j'aurais pu tenter de tuer quelqu'un ? Mon meilleur ami, qui plus est ? Tu crois vraiment que j'aurais pu ne serait-ce qu'y penser ?

      Je l'ai fusillé du regard avec une haine qui ne m'était pas propre. Les effets de la chanson de la sirène venaient clairement de se dissiper, et je sentais monter en moi un mélange explosif de haine et de douleur.

Lysander : N-non...

      Je suis partie en trombe sans lui laisser le temps de s'expliquer. Derrière moi, j'ai entendu Elsa qui criait, outrée :

Elsa : Espèce d'imbécile ! Bien évidemment qu'elle n'a rien à voir avec ça ! Comment peux-tu dire une chose pareille ?

      À partir de là, j'ai arrêté de parler aux garçons, complètement. Et, peu à peu, j'ai arrêté de parler aux filles aussi, ou du moins, je leur parlais beaucoup moins qu'avant. Je préférais rester seule, comme ça, il n'y avait aucun risque pour que je pète un câble, que je me mette à hurler ou pleurer.

      J'ai donc passé une semaine complètement seule, je ne parlais aux filles que dans le dortoir. Mais ma semaine de tranquillité est bien vite partie en fumée. Tout ça à cause de lui

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top