3. Le début de l'entraînement
Dimanche. Dernier jour avant une longue, très longue semaine de travail. Je me prépare pour aller chez Mlle Leggins; Jimmy a insisté pour m'accompagner à chaque cours, je le retrouve donc au parc. Nous prenons le chemin, cette fois je n'ai plus peur, j'ai surtout hâte. Aujourd'hui il fait très froid dehors, et lorsque ma professeure ouvre la porte, elle propose à mon ami d'entrer, pour ne pas geler. Il accepte et je jure l'avoir vu faire un clin d'œil à la jeune femme, comme s'ils se connaissaient. Je m'installe dans le canapé et c'est partit pour les questions ! Je pose la mienne en première, la plus importante, celle qui me brûle les lèvres depuis la veille :" Mlle Leggins, pourquoi est-ce que c'est tombé sur moi ?
- Ça, je ne le sais pas vraiment. Je n'ai que des hypothèses. Il se peut que ce soit génétique, donc que quelqu'un de ta famille avait ce pouvoir dans le temps, ou que ce soit tout simplement le hasard, ou bien juste ton caractère...Mystère.
- Mes parents sont au courant, je risque, ?
- Bonne question ! Tu devrais le leur demander.
- Mais comment ça se fait que Jimmy soit au courant de tout alors qu'il n'est pas de ma famille ?
- Je pense qu'il aimerait te le dire lui-même lorsque ce sera le bon moment.
- Bon. Et le monde de la Magie, c'est quoi ?
- Ce n'est pas vraiment un autre monde, que pour s'y rendre, il faut passer un portail ou autre chose...Non. Le monde de la Magie est mélangé avec le monde des Normaux, il y a des gens comme nous ( qui ont des pouvoirs ) éparpillés un peu partout sur Terre. Il comprend aussi les créatures qui relèvent de l'imaginaire, comme les Grognures et les Lavinois, qui eux, vivent sous la mer, c'est pourquoi on ne les voit presque jamais.
- Grognures ? Lavinois ?
- Les Grognures sont de petites boules de poils aux dents acérées, ils sont sans arrêt en colère et il ne faut pas trop s'approcher d'eux car ils sont vraiment violents. Les Lavinois, par contre, sont totalement inoffensifs, ils ressemblent à des pissenlits sauf qu'ils ont trois yeux. Ils adorent la lavande et ont réussi à faire pousser des plants aquatiques de celle-ci. Mais ces deux espèces ne sont qu'un petit échantillon des nombreuses créatures qui peuplent ce monde...Pourtant, certains ont décidé de vivre parmi nous plutôt que dans l'océan.
- Mais, avoir des pouvoirs comme ceux que j'ai, ça porte un nom ? Je demande, de plus en plus confuse.
- Il faut que tu saches qu'il existe le Bon et le Mauvais côté, dit-t-elle en jetant un regard intense à Jimmy, tu as hérité du Mauvais. Attention, une personne avec de sombres pouvoirs n'est pas forcément une méchante, de même pour les bons ! Les gens aux pouvoirs maléfiques comme toi et moi sont appelés les Brûleurs de Vies et les Bons comme...heu...non rien, ils sont nommés les Faiseurs de Merveilles.
- C'est un peu méchant pour nous de nous appeler ainsi, hein ?
- Peut-être mais c'est notre nom officiel, termine-t-elle. Je décide de me taire car j'ai les lèvres gercées et la langue complétement sèche. Jim' pose une main sur mon épaule et je sens, dans le regard qu'il me lance, qu'il a beaucoup d'autres choses à m'expliquer mais qu'il le fera au bon endroit au bon moment et que ce n'est certainement pas aujourd'hui ni ici. Mlle Leggins reprend en souriant :" Allez, c'est le moment de commencer le cours !". Je la regarde un peu angoissée à l'idée de faire une bêtise comme de tout détruire accidentellement...Elle doit comprendre puisqu'elle me glisse à l'oreille :" Ne t'inquiètes pas, si ça se passe mal je connaît quelqu'un qui me réparera tout en un clin d'œil !
- Un faiseur de Merveilles ?" Elle hoche la tête en souriant de plus en plus et ça me ferait peur si elle n'avait pas l'air aussi gentille. Je m'engage à sa suite dans un long couloir éclairé seulement par quelques torches rougeoyantes, Jimmy sur mes talons. Enfin, nous débouchons sur une pièce petite salle encombrée d'une multitude d'immenses cartons ramollis par le temps. Je ne m'empêcher de remarquer, un brun de moquerie dans la voix :" C'est ici que je vais m'entraîner ?! Sans vouloir vous vexer, on dirait plutôt un placard à balais...
- Ah, mais ce n'est pas là...beaucoup trop exigu.
- Je confirme.
- Non, c'est dans CETTE pièce que ton premier cours va se dérouler, s'exclame-t-elle en poussant une porte dissimulée par une pile de cartons. Je passe ma tête à l'intérieur sans grande confiance en ce lieu; alors, Jim' me glisse doucement :" Tya, avance, tu ne seras pas déçue, crois-moi !" Je souris, puis entre; je me retrouve au centre d'une salle ronde et immense, si immense qu'il n'existe aucun mot pour décrire sa taille ! Sous mes pieds, un parquet brun me renvoie mon reflet, un lustre orné de cristaux brillants et de chandelles pend au plafond, les murs de la pièce, eux, sont bleus pâles et ornés d'une représentation peinte de vagues d'écume, quelques mouettes et un soleil brillant de milles étincelles furtives. Mon meilleur ami, de son côté, caresse le sol luxurieux comme s'il retrouvait un bonheur perdu et des souvenirs heureux...Mlle Leggins au contraire, ne semble pas impressionnée mais je suppose que c'est parce qu'elle est venue dans cette pièce des millions de fois. Je demande innocemment :" Dites, Mlle Leggins, vous entraînez aussi les Faiseurs de Merveilles ?
- Heu, oui. Pourquoi cette question ?
- Non... Je me demandais juste, pourquoi est-ce que d'un côté de la salle il y a des lapins en ballons et de l'autre des pointes noires...
- Disons que mes élèves sont parfois un peu trop...enthousiastes." Alors, là, d'un seul coup, la lumière s'éteint et je suis surprise de constater que je peux voir dans le noir...comme un chat ! Je m'apprête à lui poser une nouvelle question, mais elle me devance :" Oui...nous pouvons voir dans le noir; car nous sommes le noir.
- C'est vous qui avez éteint ?
- Oui, mais ne t'inquiètes pas, je rallumes." Et la lumière revient presque aussitôt. Ma professeure prend un air concentré et me désigne une chaise pour que je m'asseye. Ensuite, elle me donne les instructions :" Mets-toi en colère.
- Quoi ? Mais...
- C'est un test...pour évaluer ta force.
- Je risque de tout détruire !
- Je te l'ai déjà dit, je contrôle la situation." Je respire; la dernière fois que j'ai fait ça, tout s'est terminé en grosse catastrophe. J'essaie de penser au fait que Jimmy savait tout depuis le début et qu'il ne m'a jamais rien dit. Peu à peu, je commence à froncer les sourcils, ma chaîne me brûle...en clair, les symptômes de la veille ne se font pas attendre. Tout se brouille, j'entends les mêmes voix du passé avec quelques nouvelles...Sauf que cette fois, au lieu de me calmer, ma colère augmente, gonfle comme un ballon; puis, je sens deux bras passer autour de mon cou et de ma taille. Ils me serrent fort, de petites larmes commencent à rouler sur mes joues. A ce moment là, ma fureur descend en trombe et laisse la place à de la tristesse. Je pleure. Même très fort au point de tomber sur le sol en un bruit sourd. J'ai dû me lever à un moment parce que je ne sens plus la chaise. Les bras me serrent toujours, enfin je me décide à regarder autour de moi. Une nausée sans pareille s'empare de mon cœur : la pièce est noire, le lustre éteint est brisé par terre, les flammes violettes font deux fois la taille de celles d'hier et d'immenses pointes noires transpercent le sol. Celui qui me serre, c'est Jim'; il ouvre les yeux, puis pose ma tête sur son épaule, tout en me gardant toujours contre lui. C'est Mlle Leggins qui reprend ses esprits en première :" Bon, je vais être franche, tu es peut-être la plus forte brûleuse de Vie que j'ai jamais vue ! Margot, tes pouvoirs sont incroyablement puissants ! D'ailleurs, tu peux me laisser seule avec ton ami cinq minutes ? Le temps de réparer tout ça et d'avoir une petite discussion.
- Heu, oui bien sûr, mais vous ne vous connaissez même pas...je peux faire les présentations si vous voulez...
- Pas la peine, merci." La porte claque derrière moi et je me retrouve seule dans la pièce aux cartons. Je soupire en m'asseyant sur l'un d'eux, je suis un vrai danger public. Au bout de dix minutes, la porte s'ouvre, et je constate que la pièce a retrouvé son aspect scintillant. Je m'exclame :" Comment est-ce que vous avez fait ?
- Ben...Disons que..., commence Mlle Leggins
- Nous connaissons quelqu'un...un Faiseur de Merveilles qui s'appelle...Julien, complète mon ami." Je hausse les épaules, le principal, c'est que tout soit revenu à la normale :" Juste, c'était quoi votre " petite conversation " ?
- Rien d'important !" S'exclament-ils à l'unisson. Je les regardent de travers, ceux-là me cachent des choses...encore ! Ils me poussent à l'intérieur, puis ma prof continue :" Maintenant que j'ai évalué tes pouvoirs, je suis catégorique à cent pour cent, plus vite tu sauras te maîtriser, mieux les gens se porteront !
- Je suis tellement désolée, je ne sais vraiment pas ce qui s'est passé...Je pense que si Jim' n'était pas intervenu, je ne me serais pas calmée...Je n'arrive pas à croire que j'ai osé vous faire du mal à tous les deux..." Jimmy prend ma main et murmure :" Margot, ne te reproche jamais quelque chose que tu n'as pas fait consciemment...
- Mais j'avais juré que je ne te ferais jamais de mal... Et, je veux te remercier, malgré ta peur tu es venu me serrer, comme...si tu te fichais du risque. C'est ce qui m'a calmée.
- Je...Je...Tu es ma meilleure amie, je ferais n'importe quoi pour toi." Je ne trouve rien à dire; ma bouche reste ouverte parce que je n'avais jamais entendu de telle détermination dans sa voix. Mlle Leggins intervient :" Vous savez quoi ? Je préfère qu'on continue une prochaine fois...Et puis, je sens que tu as beaucoup de choses à lui dire.
- Vous êtes sûre ? je demande
- Mais oui ! On se retrouve lundi soir...viens quand tu sortiras de cours. Et ton ami est le bienvenu." Je la remercie puis nous nous disons au revoir. Une fois dehors, je dis :" Jim' je peux te demander une chose ?
- Euh...oui, bien sûr.
- Pourquoi est-ce que tu sais tout sur moi depuis le début ?
- Bon...La date de ton anniversaire, c'est le 1er Janvier, n'est-ce pas ?
- Oui, mais je ne vois pas le rapport...
- Le rapport c'est que, moi aussi, je suis né ce jour là, cinq secondes avant toi précisément, et dans la chambre à côté de la tienne.
- Comment peux-tu en être si sûr ?
- Je le sais car...Non. Ce n'est pas le bon moment. Tu n'as qu'à me retrouver Mercredi matin au parc et je te dirais tout, soupire-t-il.
- Encore attendre ? Bon, d'accord...J'y serais". Il sourit et me raccompagne chez moi; une fois à l'intérieur j'ai la sensation étrange que je ne vais pas apprécier ce qu'il va me dire mercredi.
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