2. Mlle Leggins

Je baille. Je me glisse dans mes habits. Comme nous sommes Samedi il n'y a pas cours. Je vais enfin pouvoir souffler un peu ! J'ai décidé de laisser mes pouvoirs agir, juste pour une fois, juste pour voir ce que ça ferait...Une fois prête, je me dirige vers le parc d'à côté pour être tranquille. Le plus dur, c'est de me mettre en colère. Quand je suis furax c'est difficile de garder mon calme et quand je vais bien c'est difficile de ne plus être calme ? Comique. Je pense très fort à Lorie, à la journée d'hier, quand Jimmy m'a énervée...Je sens ma chaîne commencer à chauffer, mon cœur accélérer le rythme et peu à peu, je me met en colère. Mon collier n'a jamais chauffé aussi fort, il me brûle tellement que j'en pleure, la douleur est inimaginable tellement elle est intense. Enfin tout se brouille autour de moi. Tout est noir, j'entends des paroles étouffées autour de moi. Ce sont des voix de souvenirs, souvenirs plus ou moins loin, à quatre ans pour ma première trottinette, le jour où j'ai appris à nager...et par-dessus toutes, celle de Jimmy qui dis :" Calme-toi ma Tya. Respire. Ne laisse surtout pas la colère te contrôler." Qui date simplement de la veille. En un effort infime, je réussis à me calmer. Tout redevient net et une vision d'horreur s'offre à moi : le parc dans lequel je me trouvait il y a quelques instants n'existe plus. Le sol est noir et fissuré, les bancs, les réverbères, les jeux sont détruits, craquelés, et partout des flammes violettes attaquent encore les objets... Je dis :" Non...ce n'est pas moi qui ai fait cela ! C'est...c'est impossible !" J'ai mal à ma tête et je comprends pourquoi Jim' a peur de moi... Je rentre à la maison en courant. Je prends le téléphone et appelle mon ami. Je m'enferme dans la salle de bain pour être tranquille :" Allô ?
- Jim'?
- Tya, c'est toi ?
- Oui, je dois absolument te parler !
- Là, tout de suite ? Parce que ma grand-mère...
- Maintenant ! C'est urgent !
- Bon. Qu'est-ce qui se passe ?
- J'ai été au parc pour essayer mes pouvoirs. Pour voir ce que ça pourrait faire et...Tout est devenu noir, des voix venant du passé m'ont parlé, j'entendais surtout la tienne, quand tu me disais de me calmer hier. C'est grâce à ça que tout s'est arrêté. Après, le sol était tout noir, tout était détruit et des flammes violettes ravageaient les jeux ! Dis-moi ce qui se passe, s'il te plaît !
- Heu, bon. J'avais pas trop prévu ça...,Sa voix était étouffée et il devait se parler à lui-même, Tya ? Vas au parc et attends moi là-bas, OK ?
- Oui. J'y vais, salut !" Je retourne à l'espace vert et la situation ne s'est pas arrangée, à part que les flammes violettes ont un peu disparues. Comme il est tôt, il n'y pas encore de monde et heureusement ! Que diraient-ils si ils voyaient ça ?! Jimmy arrive en courant tout essoufflé. Je lui montre le carnage d'un geste désespéré de la main. Il se gratte la tête et dit :" Ouah, j'ai jamais vu ça ! Il y a eut un tremblement de terre ?
- Tu n'as rien entendu de ce que je t'ai expliqué au téléphone ?!
- Ah, oui, ton histoire de pouvoirs et de flammes violettes ? Je n'y croit pas du tout !
- Jim', je sais que tu sais, je t'ai entendu, quand tu as dis que tu n'avais pas prévu ça...
- Ah. Heu...bon sang, pourquoi a-t-il fallut que ce soit moi ?" Il sort son portable et s'éloigne pour parler avec quelqu'un. Je l'attends; lorsque qu'il revient, il me dit :" Voilà, tu vas te rendre à cette adresse : au 13 Rue de Marcel Pagnol et dépêche-toi, ne fait aucun détour, c'est juste à côté.
- Pourquoi tu ne viens pas avec moi ?
- Parce que...Heu...bon d'accord, je n'ai pas d'excuse valable. Je t'accompagne, mais je ne pourrais pas entrer dans la maison avec toi." Je n'ai pas la force de répéter un " Pourquoi ?" et lui il ne doit pas avoir la force d'y répondre. Je tremble sur le chemin, alors je lui prends le bras, je le serre fort, afin de faire taire la crainte qui naît en moi. Au bout d'un moment à marcher ainsi, nous arrivons devant le 13 de la rue indiquée : c'est une immense maison, avec un escalier majestueux à l'extérieur et un jardin à couper le souffle. Jimmy s'arrête et m'encourage d'un signe de tête; timidement, je m'avance vers la sonnette, puis appuie dessus. Une magnifique musique de trompette retentit et je me jure intérieurement d'acheter la même pour chez moi. Une dame d'un peu plus de trente-cinq ans vient m'ouvrir, la première chose qu'elle fait, c'est poser les yeux sur la chaîne à mon cou. Elle sourit, puis me laisse entrer; je la regarde, perplexe :" Bonjour, heu, je m'appelle Margot, mon ami m'a dit de venir vous voir pour...

- Chut, je sais pourquoi tu es là, ceux comme toi finissent toujours par venir ici...

- Ceux comme moi ?

- Oui. Viens t'asseoir dans le salon, c'est l'heure de répondre à toutes tes questions.

- Absolument toutes ? Parce que ça fait une éternité que j'attends ça !

- Si douze ans est, pour toi, une éternité, alors attends de voir trente-cinq !" Je vais m'installer à l'endroit désigné par la femme, elle revient de la cuisine avec deux limonades bien fraîches. Le salon aussi est majestueux, un grand lustre en cristal pend au plafond, de grands tableaux sont accrochés sur les murs, le canapé est en soie rouge et le sol est lustré si bien qu'il m'éblouit ! Toutes ces choses sont incroyablement belles, j'ai l'impression d'être dans un palais. La propriétaire vient s'asseoir à côté de moi :" Alors, voilà ce qu'on va faire, chacune notre tour on pose une question à l'autre et elle doit lui répondre. Ainsi, on en saura plus toutes les deux.

- D'accord. Je peux commencer ?

- Oui, bien sûr.

- C'est quoi votre prénom ?

- Martha. Martha Leggins. Mais mon prénom céleste est Lee. Toi, quel est ton prénom ?

- Margot heu, Koffer, Margot Koffer. Et tout le monde m'appelle Tya...

- Tu veux dire, Tya est ton prénom céleste ?

- Je ne sais pas ce qu'est un prénom céleste, je réponds, ne comprenant plus rien.

- C'est le nom que ton collier a décidé de te donner.

- Quoi ?

- A ton avis pourquoi est ce que ton pendentif est un T ?

- Je pensais que c'était un hasard...

- Tut, Tut, Tut. Dans le monde de la magie, il n'y a jamais de hasard. Tu m'entends ? Jamais !

- Le monde de la Magie ? Excusez-moi mais je suis totalement perdue...

- Ce n'est pas grave, je vais tout ré-expliquer depuis le début; mais commence par me tutoyer.

- Oui. Pas de problème.

- Tu as un collier autour du cou, qui te brûle lorsque que tu es très en colère, et si tu ne te calme pas rapidement, il libère des pouvoirs dévastateurs, n'est-ce pas ?

- Dévastateurs ? C'est bien pire que ça...

- Cataclysmiques ? Mortels ? Infernaux ? Ce sont les mots que j'ai employé la première fois.

- Toi aussi ?" Pour toute réponse, Mlle Leggins sort  de son tee-shirt, un collier au bout duquel pend un L. Je hoche la tête en souriant, puis elle reprend ses explications :" La seule façon pour que tes pouvoirs ne fassent aucun dégât est de ne jamais se mettre en colère ou de réussir à les contrôler à ta guise. C'est ce que je vais essayer de t'apprendre, si tu le veux bien.

- D'accord, j'ai compris. Mais...c'est quoi le monde de la magie ? Est ce que ma chaîne est vivante ? Pourquoi moi ? Et ma famille ? Et...

- Ouh la, on se calme. Tu as beaucoup de questions et moi beaucoup de choses à faire. Je te propose de revenir demain, si tu n'as rien de prévu, bien sûr. Disons à...quatorze heures ?

- OK. Merci et à demain". Je lui fait signe de la main, puis sort de la bâtisse. Jimmy m'attend exactement là où je l'ai laissé tout-à-l'heure. Il me fait des yeux compatissants :" Ça va ? Pas trop bouleversée ?

- Et bien, ça fait beaucoup à avaler." Il ne dit rien de plus, car il doit comprendre que je n'ai pas hyper envie de parler. Je rentre chez moi, avec la désagréable impression que ma vie ne sera plus jamais la même.

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