Chapitre 38 :

Akan traverse la pièce, appui sur un miroir mural et la trappe métallique à l'autre bout de la pièce s'ouvre. Il récupère un boîtier en acier dedans, le passe dans un espace fin entre deux murs, et le boîtier s'ouvre automatiquement. Il récupère dedans un dossier tout fin.

- Lis cela, s'il te plaît.

Je l'ouvre et découvre une série de clichés et quelques papiers. Je fronce les sourcils. Que ça ? Je m'attendais à beaucoup plus de paperasses pour une mission. Je prends une des photos de ce qui paraît être une vue aérienne d'une zone industrielle à l'abandon. Suis des clichés du même endroit, mais de différents points de vue à différents endroits de la journée.

Sur l'une d'elles, je remarque une ombre. En reprenant les photos une par une, j'en repère des similaires. Sur chaque image, une ou deux personnes se déplacent dans l'ombre de bâtiments désaffectés.

Je lève la tête vers Akan, adossé à l'armoire.

- Les drones Yacks ont placé des détecteurs de mouvements dans différents bâtiments de la zone ciblée. Nous avons également des récepteurs à un ou deux kilomètres qui surveillent une activité satellite importante dans cette zone, ce qui correspond à des signaux radios.

Il me fait signe de regarder les papiers. Je prends les feuilles de papier protégé par du plastique et parcours des yeux les lignes. L'écriture est tellement brouillée que je dois relire plusieurs fois avant de comprendre. Ce sont des lettres. Le destinataire est anonyme, mais l'écriture appartient à un certain Jeff Brownshore. Il parle de lui, de ses voyages, et d'autres choses futiles comme d'un renard aux alentours de sa maison.

Placée dans ce dossier, je me doute que ces lettres sont truffées d'informations cachées, malheureusement celui qui l'a écrite devait se douter qu'une main inconnue l'interceptera. Je croise le regard du Hamu.

- Les Antilopes ont essayé de déchiffrer les lettres. (Je plisse les yeux avant de me rappeler que leur Lignée est spécialisée dans le déchiffrage.) Selon eux, il n'y a pas de code spécial, mais le destinataire saurait à partir d'un mot spécifique ce que Jeff aurait voulu dire, une sorte de référence cachée à un événement ou une personne qui serait introuvable aux yeux d'un simple lecteur. Nous avons remonté la destination des lettres jusqu'à un individu que nous suivons depuis longtemps, mais qui est trop volatile pour avoir des informations solides dessus. Bien sûr, il n'utilise jamais le même nom, mais nous avons un réseau de surveillance et nos unités informatiques utilisent un procédé qui allie chimie et données numériques pour deviner la lettre dans l'enveloppe. Ces lettres ne sont pas les originaux, mais des clichés.

Il désigne les clichés.

- Le destinataire est un membre de la CIA qui semble souvent être en charge de diverses missions. Nous sommes obligés de l'observer à distance, car la moindre filature que nous avons essayée contre lui s'est terminée par la disparition de nos éléments. Nous soupçonnons qu'il est protégé. L'approcher est trop dangereux, et nous devons rester à distance, car des drones qui se sont approchés un peu trop près de lui ont complètement perdu sa trace. Il doit avoir un moyen de les détecter dans un certain périmètre. Dernièrement, nous il est réapparu dans cette zone industrielle désaffectée que personne ne fréquente, car il est probable qu'il reste encore des obus de la Seconde Guerre mondiale dans les lieux, c'est donc parfait pour se cacher. Et là, nous avons eu la surprise de voir qu'il n'était pas tout seul. Il y est depuis quelques jours, ce qui n'est pas habituel pour un agent des services secrets, souvent en déplacement pour brouiller leur trace. C'est comme s'il attendait quelque chose... ou quelqu'un.

Il se retourne vers la fenêtre.

- Tu vas devoir t'infiltrer dans cette zone, reporter qui et combien ils sont et avec qui est ce rendez-vous. Je ne te demanderais pas de t'approcher près de lui, mais rapporte-moi des informations sur la personne avec qui il a planifié ce rendez-vous. Ne te mets pas en danger, si tu te fais prendre, ce n'est pas seulement ta vie qui est en danger, c'est la vie de tous les autres. Compris ?

Je hoche la tête et relève les yeux sur lui.

- Je serais donc seule ?

Il se retourne vers moi.

- Je suis conscient du stress que cela peut causer, mais c'est obligatoire pour cette mission. Tu peux encore renoncer et repartir si tu ne te sens pas de le faire.

Dans ses rêves.

- Pourquoi il vous intéresse ?

Ses yeux s'abaissent sur moi.

- Ce n'est pas ton rôle de savoir cela.

Il allume son oreillette.

- Quatre-quatre numéro deux.

Quelqu'un toque à la porte et un Yack à la peau tannée et aux yeux gris rentre dans la pièce. Il me salue d'un hochement de tête.

- Bonjour Liam. (Akan se tourne vers moi.) C'est ton préparateur. Suis-le, il va t'équiper. Tu pars dans quarante minutes.

On descend jusqu'au sous-sol. Le Yack me fait passer un portail métallique et il ouvre une porte que je n'avais jamais remarquée, caché derrière un porte-arme sur le mur de gauche de la salle d'armes. L'espace derrière est si vaste que je me demande comment j'ai pu passer à côté de cette salle. Des véhicules rutilants neufs de toute sorte sont rangés dans la partie la plus éloignée, dans ce qui semble être un garage caché et la partie la plus proche de moi est occupée par des rayons entiers de matériels et vêtements.

- Ne bouge pas, me dit Liam.

Il prend mes mensurations et disparaît dans une allée, me laissant sans surveillance. Erreur.

Mon regard glisse sur toutes les allées et les étiquettes qui annoncent leur classement : "tenue aquatique"; "tenue thermoadaptable", "tenue déplacement lourd", "tenu camouflage". Je me déplace et le nom des allées change en types d'équipements, puis d'armes et de soins.

Une Yack sort de l'allée "matériel de survie" et bifurque vers moi, un sac à dos gris à son bras. Elle me tend la main.

- Je suis Victoire. Liam et moi, nous occupons de ton départ. Il est en train d'arranger ta tenue, moi, je vais m'occuper de ton équipement. On m'a mise au courant de ta situation. Malgré le peu d'entraînement que tu as eu par rapport à des Agents complètement formés, t'as t'ont fait un brief sur le SDS ? Et sur les RF ?

Sac De Survie. Règles Fondamentales. Mon cerveau me traduit tout instantanément, ce qui me rassure sur les cours intensifs que j'ai suivis. Je hoche la tête.

- J'ai été préparé à cela.

Elle hoche la tête avec satisfaction et j'ai l'impression de l'avoir convaincu. Elle ouvre le sac, le pose sur une table contre le mur et en sort une paire de jumelles.

- Du modèle "Cold", de la nouvelle collection des Lynx, waterproof. Elles offrent un champ de vision pouvant atteindre 500 m² et sont très résistantes aux chocs. Si tu tournes le bouton à droite, tu passes en vision nocturne... un cran plus bas, c'est vision thermique...

Bien. Il me sera utile pour espionner sans trop m'approcher. Elle ouvre une poche sur le côté et me montre un petit appareil rond et le tourne face à moi.

- Le transcripteur. Directement relié au Roc. Il sert aussi d'enregistreur. Batterie autonome d'un mois. Cela suffira largement. Tu sais comment l'utiliser ?

J'acquiesce. Elle le pose sur la table, remonte la fermeture éclair sur les deux côtés et fait tourner deux objets circulaires dans ses mains. Je plisse les yeux. On dirait deux lames en demi-cercle qui forment un cercle ensemble. Une poignée relie les deux moitiés au centre du cercle et semble placer cette arme comme projectile.

- Les Namaki, les armes traditionnelles des Loups, m'explique la Yack. Ces armes légères et silencieuses agissent à la façon d'un boomerang, mais peuvent aussi être utilisées au corps-à-corps. Elles fonctionnent toujours par paire.

Les lames ont l'air très tranchantes, cette arme est autant fait pour assommer que pour pénétrer et le métal froid paraît très dur. Les Loups ont repris le concept des boomerangs et en ont amélioré sa résistance et sa capacité aérodynamique... cette arme aurait été dangereuse dans l'Arène.

Elle me tend une paire de lunettes à verre teinté. Je hausse un sourcil.

- De la crème solaire, aussi ?

- Très drôle. On ne t'a pas appris à reconnaître des lunettes de sécurité ? Elles ont été développées par nos chercheurs Panthères, comme les jumelles, pour qu'elle puisse prendre des photos par contact sur une zone des branches. Elles s'enregistrent directement sur notre base de données pour être sûr d'avoir les traces si les lunettes étaient détruites. Elles ont été reprogrammées pour ta mission, elles s'inscriront donc sur ton dossier. Elles font aussi office d'appel à l'aide, si tu dois avoir une évacuation immédiate ou des renforts.

Elle les range.

- Ce sac sera ton bien le plus précieux là-bas. Il contient de quoi te nourrir, une gamelle, une gourde pliable, des tubes de purification d'eau, une cordelette, deux mousquetons, un briquet, une crème de camouflage, une lampe torche, un tapis et un sac de couchage.

- Dans le pack de soin, elle continue en attirant mon attention sur l'objet, tu trouveras des bandages, des compresses de gaz, de l'alcool, des crèmes pour les brûlures, une paire de gants à usage unique, une paire de ciseaux, des gélules de type A à G en cas d'intoxication alimentaire, une couverture de secours, un rouleau adhésif, et une aiguille et du fil.

Mes muscles se crispent, comme s'ils se souvenaient de toutes les plaies que j'ai dû recoudre dans ma chambre.

- Si tu retournes la trousse de secours, il y a une poche cachée avec trois traceurs de la forme d'une épingle à cheveux, lance la voix de Liam, derrière nous. (Je me retourne et il pose des vêtements sur la table.) Elles s'attachent à n'importe quel vêtement et sont quasiment invisibles, il continue en se redressant. Choisis bien tes cibles, car tu n'en as pas indéfiniment. Elles mènent à notre salle informatique, et nous suivrons chacun de leur mouvement depuis ici. Maintenant, enfile ça.

Je m'exécute et sens la chaleur m'envahir. La nuit doit être froide là-bas. Liam déplace un miroir devant moi et je vois mon visage considérablement plus rouge que ce qu'il était tout à l'heure. J'ai des bottines en cuir renforcées au bout, un pantalon large avec plusieurs nuances de gris et de sable et une veste avec quatre poches intérieurs et extérieurs basée sur les mêmes couleurs. La tenue est très bien adaptée pour une zone industrielle, légère, grise et large pour faire circuler l'air dans la chaleur de la journée.

- Une protection pare-balles est intégrée devant et derrière ta veste, m'indique le Yack. Tu as un mini pistolet type MAGNUM accroché dans ta manche droite et deux fumigènes cachés dans la semelle de tes bottines. Et rappelle-toi : tes semelles adhèrent au métal au parpaing.

Je hoche la tête. Ça m'aidera. Je passe mon sac en bandoulière et glisse mes dagues et mon étui refermant la seringue de sang dans la poche extérieure. Victoire me fixe.

- On te débarquera à dix kilomètres de la zone. Là-bas, un cheval t'attend. Il est formé pour t'amener à deux kilomètres de la zone. À partir de là, tu dois marcher pour atteindre la zone d'action afin de ne pas attirer l'attention.

Une fois le brief finit, je prends le sac à dos et remonte dans la cours, où Lyo m'attend à l'ombre du bâtiment. Il me fait pivoter alors que je prends la direction de la piste de décollage. Il secoue la tête avec un petit sourire.

- Hun-hun. Pas d'avions, la voiture est plus discrète.

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