8 - Le jardin aux vents

— Père, je vous conjure de dépêcher une armée aux grottes de Castellane.

Jessica arpentait la pièce dans tous les sens.

— C'est déjà trop tard ! Je préfère garder mes hommes pour protéger le domaine d'Amalius. Les sassandres ne sont qu'à un jour de nage après tout. Et je ne vais pas aider ce vieux requin d'Augustin, alors qu'il m'a volé la femme que j'aimais ! Et puis bon sang, arrêtez de gesticuler, vous me donnez le tournis !

Elle s'arrêta net.

— Si vous ne le faites pas pour Augustin, faites-le pour Isabel ! Elle pinça ses lèvres.

Turold eut un moment d'hésitation. Isabel avait été son premier amour et ils auraient dû se marier. Sauf qu'Augustin avait fait chavirer le cœur d'Isabel et sa romance avait tourné au vinaigre.

Une lueur froide envahit les yeux du roi.

— Isabel a choisi de faire sa vie avec Augustin. Qu'elle assume son choix ! Vous n'avez qu'à demander l'aide de votre fiancé, Liétald de Deminici !

Elle resta sans mots. Il reprit :

— C'est ce que je pensais. Toujours très forte pour donner des conseils que vous ne pouvez appliquer à vous-même !

Elle s'interrogeait sur ce qu'elle avait bien pu faire pour que son père la traite de façon aussi froide.

— C'est bon. Sa voix était inaudible.

— Que dites-vous ?

— C'est bon. Je vais lui poser la question.

— Et bien voilà... Bien, maintenant faîtes place, Jessica, je dois diriger nos armées pour nous préparer à la guerre. Et renforcez votre garde avant de partir ! Il faut tout vous dire !

Il se leva, marchant sur la traine de la robe de sa fille.

Accompagnée d'une escouade d'une dizaine de gardes, Jessica partit en direction du jardin aux vents, le domaine des Deminicis. Dans leur tenue noire sous-marine apprêtée pour la chasse, les Akerys se fondaient dans les eaux profondes. Et même si la mer de Lorimée se réchauffait, les eaux qui bordaient le jardin aux vents y étaient, quant à elles, un peu froides pour les sassandres qui avaient besoin d'une température bien précise. Elles ne rencontrèrent donc aucune créature hostile sur leur chemin.

Jessica fut reçue avec une joie sadique par Liétald de Deminici, qui tenait le domaine, en l'absence de son père parti au couvent des Mantas pour une assemblée extraordinaire.

— Jessica, ma promise, qu'il est bon de vous voir !

Rien que de voir ses globules de grenouille et ses lèvres de mérou s'agiter la rendait malade. Il s'était levé de son fauteuil et lui tendait sa main pour qu'elle la baise. Elle faillit avoir un mouvement de recul et il lui fallut penser à la survie des Castellans pour réussir à prendre sur elle. Elle fit la révérence et avec le plus grand des dégouts, se força à approcher sa bouche de sa main.

— Sieur Liétald, j'ai une requête à vous faire avant notre mariage. Elle s'était redressée.

Il se rassit au fond de son fauteuil.

— Et quelle est telle ?

— Les Castellans se font assiéger par les sassandres. Vous devez envoyer votre armée de requins pour les aider !

— Ma petite poupée... je ne dois rien du tout... Sa chemise était entrouverte et une lourde chaine d'argent pendait sur sa poitrine velue.

— Si vous ne les aidez pas, je ne vous épouserai pas. Le défia-t-elle, advenant que vous et moi soyons encore en vie après l'invasion des sassandres ! Ses yeux tiraient des éclairs. Elle ne parvenait plus à se maîtriser.

Il se leva d'un bon et l'empoigna, la dévisagea puis porta son regard sur son décolleté.

Il aimait son jouet. Il le trouvait beau.

— Du chantage ?

Un long silence s'installa.

— Vous êtes en chance, finit-il pas concéder en la lâchant. Je vous délègue un demi-bataillon de requins, mais ensuite, je vous veux pour moi seul et avant le mariage.

Elle bafouilla un timide merci en se massant le poignet. La nausée lui souleva le cœur, mais elle penserait à elle plus tard. 

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