Chapitre IV : Haine

  Tout Poudlard était sous tension. La nuit avait passé, tout le monde attendait Alex qui tardait. Les Serpentard commençaient à dire qu'elle n'avait pas le courage d'affronter leur camarade qui ne mentait pas : il disait évidemment ce que son grand-frère lui avait dit par lettre. C'est connu, les lettres de plus de centaines de kilomètres s'envoient en deux heures à peine, aller et retour... 

  Vingt minutes avant le début des cours, les élèves virent la rousse rentrer, vêtue de vêtements similaires à la veille, un manteau long et noir en plus. Le groupe des Gryffondor était confortablement installé, avec de la nourriture dans les mains, prêts à profiter de leur séance de cinéma gratuite. Alex balaya la salle du regard, puis se dirigea vers la table de Serpentard, les talons de ses cuissardes noires résonnant dans toute la salle et ramenant le silence. Avec calme, la jeune femme s'arrêta devant un groupe de Serpentard de 6e année. Apeuré, un d'entre eux se leva pour fuir, lui laissant la place pour s'appuyer sur le bois et plonger le regard de celui d'un garçon aux cheveux bruns. 

« Tu es Mulciber, c'est ça ? »

  Le garçon acquiesça, un sourire moqueur se dessinant sur ses lèvres. Cette fille ne lui faisait pas peur, loin de là...

« Ecoute-moi bien, mon grand, que je n'ai pas à le répéter. Toi et tous tes amis, vous allez la fermer. Je ne suis ni votre amie, ni votre camarade, je suis juste une invitée de cette foutue école. Maintenant, vous allez arrêter de m'inventer une vie et continuer de faire comme d'habitude : vous en inventer une à vous. »

  Mulciber gardait son sourire aux lèvres. Alex se rapprocha encore de lui, menaçante, et murmura, de manière à ce que seuls ses amis et lui puissent l'entendre : 

« Tu ne souhaiterais pas que tout Poudlard sache que ton cher papa a rejoint les Mangemorts dès leur création, n'est-ce-pas ? Ce serait triste que tu sois renvoyé de l'école pour "usage de magie noire". »

  Le garçon déglutit puis dit, indigné : 

« Je n'ai jamais fait usage de magie noire. »

   Alex fit une moue moqueuse, y croyant peu, puis répondit :

« Très bien, si tu le dis. Mais bon, vu que tu inventes des choses, je pourrais faire de même, non ? Et qui croiront-ils, un pauvre Serpentard qui a déjà fait trop d'erreurs ou alors la belle et gentille Alex, cette fille qui souhaitait juste se réintégrer chez les sorciers ? »

  La rousse se recula et lança, assez fort pour être entendu de tous dans la salle silencieuse : 

« A présent, repartons du bon pied. Je suis Alex Wilson, je viens ici pour quelques semaines seulement. J'assisterais à certains de vos cours.»

  Alex leur sourit, alors que Mulciber se rasseyait, pâle. Il murmura :

« Tu le paieras. 

— Hâte de voir ta vengeance, gamin !»

    La jeune femme lui tourna le dos, et ce fut avec stupeur qu'il la vit lui faire un doigt d'honneur, avant de se diriger vers la porte d'un pas assuré. Sirius échangea un regard ravi avec James, se leva, suivi de tous ses amis et de Lily, puis se dépêchèrent pour arriver à son niveau avant qu'elle ne sorte.

« Hey, salut Alex ! s'exclama Sirius en arrivant à côté d'elle. Je suis Sirius Black, enchanté.

— Non, tu ne pourras pas jouer avec le pistolet » lâcha-t-elle en levant les yeux au ciel.

  Sirius lâcha un petit rire puis dit :

« Je ne venais pas te parler de ça. On te l'a déjà demandé ? 

— Dès que je pose un pied en dehors de ma chambre, on me demande pour regarder mon pistolet. C'est une arme de fonction, pas pour jouer, marmonna-t-elle en souriant en coin. Du coup, vous voulez me parler d'autre chose que cette arme ? Vous êtes des perles rares. 

— Nous sommes des perles, en effet ! s'exclama James en se mettant à côté de Sirius. 

— Tu as cours en septième année, c'est ça ? demanda Lily en arrivant derrière. Je suis Lily Evans, voici James Potter, Remus Lupin, Peter Pettigrow et... Sirius.»

  Chacun avait fait un signe de tête quand son nom était cité, Sirius l'assortissant d'un clin d'œil. Alex sourit et dit, une lueur d'ores et déjà amusée dans le regard : 

« Ravie de vous rencontrer. Oui, j'ai cours en septième année. Normalement j'ai... deux heures de Défense contre les Forces du Mal.

— Nous aussi, on a un cours commun, déclara Remus en lui souriant. 

— Génial ! lança-t-elle. Je ne serais pas toute seule avec les Serpentard.»

  Lily acquiesça et proposa :

« On peut y aller ensemble, si tu veux. 

— Avec plaisir, répondit Alex. 

— Tu as choisi d'aller à Serpentard ? demanda Peter alors qu'ils se mettaient en route.

— Le Choixpeau a décidé de me mettre à Serpentard. Je n'aime pas cette maison, mais je n'avais pas envie d'aller chez les gentils Poufsouffle, chez les lourds Serdaigle et les Bouffondor.»

  Alex pouffa, puis reprit sous le regard agacé des Lions :

« Eh, je suis Serpentard, je ne peux pas aimer les Gryffondor de mon plein gré ! 

— C'est triste que tu ne sois pas venue chez les Lions, on s'amuse bien pourtant.

— A l'époque, on s'amusait bien chez les Serpents aussi, répliqua Alex en haussant les épaules. Enfin, seulement avec certaines personnes. 

— Tu étais à Poudlard en quelle année ? questionna Sirius. On s'est peut-être déjà croisés.»

  La jeune femme sentit ses cheveux changer de couleur pour devenir blonds clairs. Elle sembla paniquer quelques instants puis balbutia :

« On ne s'est jamais croisés. Dites-moi, en quoi consiste le cours où nous allons ? »

  Le groupe s'échangea des regards interrogatifs, la rousse devenue blonde ne leur ayant pas répondu exactement. Sirius demanda comment elle avait fait pour ses cheveux, ce à quoi elle avait insisté à propos du cours et de son contenu. Lily, qui comprenait que c'était un sujet sensible, lui répondit donc, et c'est en riant aux blagues des garçons qu'ils arrivèrent devant la salle. Comme à chaque cours, Alex partit saluer le professeur qu'elle n'avait jamais vu puis s'installa à côté de Sirius, qui avait perdu au pierre feuille ciseaux pour être seul.

« Je sens que toi, tu ne fais rien en cours » dit Alex en s'installant de manière désinvolte sur sa chaise au dernier rang.

  Sirius sourit en coin et répliqua :

« Toi non plus, visiblement. »

   Alex haussa les épaules et tourna la tête vers le professeur, qui commençait son cours. Evidemment, avec ses lacunes et son année de 6e année qu'elle n'avait jamais travaillé, la rousse ne comprenait pas grand chose. Alex en profita donc pour bavarder avec Sirius, qui semblait également se ficher du cours. Cela ne plut pas au professeur qui l'interpella :

« Miss, cessez donc de batifoler avec votre voisin et écoutez donc. A moins que vous sachiez comment faire un Patronus...

— Tout le monde sait en faire, je l'avais vu en 5e année, se justifia Alex.

— Montrez-nous, alors, puisque vous semblez si douée. »

   Alex resta silencieuse quelques instants, puis déclara :

« J'aurais aimé, mais je n'ai pas pratiqué la magie depuis plus de trois ans, je n'ai pas voulu prendre une baguette.

— Vous êtes à Poudlard, Miss, rétorqua le professeur. Vous feriez mieux d'en trouver une rapidement.

— Non merci, ça ira. Je n'aime pas la magie. »

   Le professeur croisa les bras et demanda :

« Alors que faites-vous ici ? »

   Alex fronça les sourcils. Comment pouvait-il ignorer le sujet de sa présence ici ?

« Le professeur Dumbledore est censé vous avoir prévenu.

— Cela m'a échappé. En tout cas, merci Miss pour les minutes de cours perdues. »

   La jeune femme lui fit un magnifique sourire, n'allant pourtant pas jusqu'à ses yeux qui étaient froids.

 « Nous pouvons reprendre ? Vous allez cesser de bavarder ? »

     La rousse acquiesça à nouveau, ses cheveux passant du blond au noir. Sirius marmonna :

« Tes cheveux sont super stylés, j'aimerais bien les changer de couleur aussi comme ça.

— Je n'arrive pas à les contrôler, donc... Ce n'est pas forcément le meilleur don.

— Tes parents ne te l'ont pas appris ? Ou ici, à Poudlard, McGonagall ne t'a pas aidé ? »

   Alex poussa un soupir. Elle attendit que le professeur s'installe derrière son bureau pour laisser les élèves faire un travail de groupe, puis dit :

« Mes parents n'étaient pas des gens biens, et je n'ai jamais réussi à suivre ce que McGo disait. Elle m'avait dit qu'elle m'aiderait en me donnant des cours supplémentaires, mais j'ai quitté Poudlard juste avant que ces leçons commencent.

— On a le droit de quitter Poudlard ? questionna le jeune homme, interrogatif.

— Aucune idée, en tout cas je l'ai fait, répondit-elle en haussant les épaules. Tout le monde a le droit d'avoir le choix, non ? »

  Finalement, ils travaillèrent un peu, ce qui leur permit de rendre un devoir plutôt bon à leur professeur. Puis, en sortant, ils retrouvèrent le reste du groupe.

« Le prof ne t'a pas raté » déclara Peter en se tournant vers elle.

   Alex fit un sourire amusé et haussa les épaules. Au même moment, McGonagall arriva d'un pas pressé puis lâcha d'une voix agacée :

« Miss Wilson, le directeur souhaite vous parler.»

   La rousse échangea un regard avec Lily puis dit :

« Eh bien, finalement, peut-être était-ce mon dernier cours avec vous. Ce fut un plaisir ! »

   Les cinq s'échangèrent des regards paniqués, songeant déjà à perdre leur nouvelle camarade, mais Alex ne leur laissa pas le temps de commenter car elle quitta le couloir rapidement, accompagnée de McGonagall, ses talons claquant sur le carrelage.

« Miss Wilson, installez-vous, je vous prie. » lui dit Dumbledore à peine fut-elle rentrée dans son bureau.

  La rousse s'installa face au directeur, ses cheveux passant du roux au noir et devenant plus lisses.

« On m'a fait savoir ce matin que vous aviez eu un différend avec un élève de votre maison.

— Oui, le coupa Alex, il a lancé des rumeurs à mon sujet, des choses fausses qui plus est. Il est clair qu'en tant que nouvelle élève ici, je me dois d'imposer le fait que je ne doive pas me faire marcher sur les pieds, non ? »

  Dumbledore sembla retenir un soupir, puisqu'il marqua un temps d'arrêt avant de dire, calme :

« J'ai conscience que vous vouliez vous imposer. Cependant, je ne dois pas avoir de problèmes avec les élèves et les parents si, de cette menace que vous lui avez proférée, en découlent des moqueries et autres atrocités que vous n'admetteriez pas.»

  Alex sentit la colère monter. Elle sourit, puis dit :

« Vous n'êtes pas bien placé pour me parler de moqueries. Il y a quatre ans, je me souviens être venue vous voir pour du harcèlement, et... Vous n'aviez rien fait, n'est-ce-pas ? Je ne compte pas faire subir aux autres ce que j'ai subi, au contraire, mais je ne me laisserais pas tomber une nouvelle fois dans ce piège. Jamais, au grand jamais, je ne ferais encore marcher sur les pieds de cette manière.

— Vous avez conscience que vous n'avez plus 16 ans ? Le contexte n'est plus le même, les gens ne sont plus les mêmes...

— Tout est exactement pareil, lâcha Alex. Les élèves ont le même comportement, l'école n'a pas évolué et vous êtes toujours convaincu que je suis responsable du drame de Pré-au-lard.

— Je sais que...

— Non, vous ne savez pas. Vous ne savez rien du tout. J'étais la seule témoin ce soir-là, s'exclama la jeune femme en se levant, et j'étais également la seule à être convaincue de mon innocence. Tous les événements qui ont suivi n'ont fait que me faire sombrer, sous vos yeux, et vous n'avez rien fait. Alors à présent, vous allez me laisser faire mon deuil, vous allez me laisser tenter de rester à la surface devant tous ces élèves qui, s'ils apprenaient ce qu'il s'est passé ce jour-là et qui je suis, seront convaincus que je suis coupable alors que je n'ai rien pu faire.

— Miss Wilson, attendez, je... »

  Dumbledore entendit uniquement la porte du bureau claquer. Il baissa la tête, impuissant, puis murmura :

« Je ne lui souhaite que de réussir à tenir à Poudlard... Si la rumeur se lance, cette Alex sera fichue.  »

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