Chapitre I : Espionne
Alex se jeta sur la chaise en face du Premier ministre anglais. Il la fixait, menton posé sur le dos de ses mains, une lueur inquiète dans le regard.
« Alex... murmura-t-il, l'air confus.
— Je vous faisais confiance. »
Le ministre baissa la tête, un peu honteux. Oui, elle lui avait fait confiance. Alors qu'elle n'accordait cette précieuse chose à personne. William le ministre, était une des seules personnes sur Terre depuis des années à avoir eu la chance de voir la vraie Alexandra.
La vraie Alex. Celle qui esquissait parfois des sourires, celle qui était pleine de sarcasme, et non pas cette fille au regard hautain et à l'air réservé. Les événements de la vie ne l'avaient pas gâté, ça non...
« Vous m'aviez promis de me tenir éloignée des Mangemorts, murmura la jeune femme, la voix brisée. Vous m'aviez promis que je n'aurais jamais de problèmes avec eux, que la mission que j'ai réalisée récemment pour obtenir ces foutues informations n'aurait aucune répercussion.
— A condition que tu la réussisses, répliqua William, sans agressivité. Malheureusement, les Mangemorts t'ont attrapés, et j'en suis navré, mais tu as déjà eu la chance de survivre. »
Alex sentit les larmes lui monter aux yeux. Comment pouvait-il lui dire ça ? A son arrivée dans ses équipes d'espionnage, un an auparavant, elle avait vu en lui une figure paternelle, remplaçant l'idiot qui lui servait de père, de façade du moins. Il lui avait promis de l'aider à aller mieux, à survivre après le fiasco que fut Poudlard, l'école de sorcellerie où elle avait fait une partie de ses études avant de quitter l'école à seize ans, de son plein gré.
« Les Mangemorts vont me tuer, lâcha Alex. Le bunker dans lequel vous m'avez enfermé pour ma protection n'a servi à rien, ils en ont passé les barrières aussi simplement qu'on traverse la rue pour aller dans une boulangerie !
— J'ai voulu faire au mieux » répondit cette fois-ci le Ministre, qui releva la tête pour croiser son regard embué.
William s'apprêtait à continuer, mais il se tut en voyant qu'Alex sanglotait sur sa chaise, tremblant de tous ses membres. Il la comprenait, si seulement elle arrivait à l'écouter, peut-être qu'elle se sentirait moins seule... L'homme se leva et vint s'installer juste à sa droite, essayant de la soutenir, étant plus gêné qu'autre chose : comment faire quand quelqu'un pleurait ? Il l'appréciait beaucoup, il avait même été jusqu'à en faire sa fille sur les papiers du gouvernement pour qu'elle puisse faire ce qu'elle voulait dans le monde moldu, avec les papiers au nom qu'elle avait pris.
Alex avait effacé son passé, et le voir ressurgir ainsi, à cause d'une mission...
« Tu es en danger, Alex, reprit William en lui tapant légèrement le dos, gêné. Je n'ai pas d'autres solutions que de t'envoyer dans un endroit plus sûr, où les Mangemorts ne pourront pas aller. J'ai déjà tout convenu avec mon collègue sorcier, il...
— Vous n'allez pas m'envoyer à Poudlard ? s'exclama Alex en relevant vivement la tête, scandalisée, les larmes coulant toujours sur ses joues. Vous ne pouvez pas me faire ça ? Je refuse d'y aller, vous m'entendez ! cria-t-elle presque en se levant avec précipitation. Je préfère mourir que d'y mettre les pieds !
— C'est le mieux à faire pour que tu survives, notre monde est trop dangereux, les Mangemorts sont bien plus forts que les personnes non-magiques ! »
Alex sanglotait toujours, maintenant debout. Elle tourna les talons et se dirigea vers la porte. A peine fut-elle sortie que son partenaire espion, Clem, avec qui elle avait fait une dizaine de missions, la repoussa gentiment à l'intérieur, lui indiquant que sa discussion avec le Premier ministre moldu n'était pas terminée. La porte claquée, la jeune femme se laissa glisser le long du bois, se cognant avec force sur le sol.
« Ils ne t'ont pas fait mal ? demanda le Ministre, remarquant enfin le sang qui tachait ses mains et ses vêtements, ainsi que ses cheveux.
— Fracassée contre les murs, torturée à coup de Doloris avant que mon cher ancien ami Luiz, cet idiot de sorcier qui était dans la même année que moi dans cette stupide école, ne vienne m'aider et me demander des comptes à propos de ces rumeurs qui ont circulé sur moi à l'école. Mais sinon non, tout va bien ! »
Toujours au sol, repliée sur elle-même, la tête enfouie dans ses bras, Alex criait contre lui. Ses cheveux avaient étonnamment changé de couleur, passant du roux au noir. Elle hurlait au ministre sa haine, sa colère, ses peurs, bien qu'elle ne le disait pas clairement. William avait appris à la connaître en un an, une longue année qui était pourtant passée à une vitesse.
« Et vous êtes là, à me dire à présent que je vais devoir aller dans le pire endroit sur Terre. Je vais devoir retourner à Poudlard... Non, je ne peux pas.
— Tu dois te protéger, Alex, murmura le vieil homme en partant s'asseoir lentement derrière le bureau. Je ne vois pas où te faire aller d'autre, les autres écoles de sorcellerie n'ont pas voulu t'accueillir, ils... Ils ont ton dossier scolaire, et... D'après mon confrère sorcier, arrêter l'école à seize ans n'est pas forcément bien vu là-bas. Il a accepté de te faire rentrer à Poudlard, ils aviseront de ce que tu feras là-bas. Si tu resteras à errer dans le château, à lire, à étudier, que sais-je...
— Vous voulez juste vous débarrasser de moi ? demanda-t-elle en relevant la tête, ses yeux bleu glacial brillant à cause des larmes.
— Alex, tu es la meilleure des espionnes de ce groupe. Nous souhaitons tous te protéger, et cela ne dépend plus de nous. Nous aurions fait la même pour n'importe qui ici, il faut que tu saches que ce n'est pas contre toi et...
— Avez-vous conscience qu'en m'envoyant là-bas, ce n'est pas des Mangemorts que je mourrais mais plutôt du désespoir ? Vous voulez me tuer à petit feu ! l'accusa-t-elle.
— Cesse donc d'être bornée ! s'énerva William en soupirant. Je souhaite te protéger ! Écoute-moi, cela ne sera pas long, juste le temps que les Mangemorts t'oublient. »
Alex baissa la tête, songeant que le moldu connaissait bien mal les partisans de Voldemort... Jamais ils ne l'oublieraient, comme jamais elle n'oublierait la douleur qu'ils lui avaient causé depuis des années.
« Combien de temps cela durerait-il ? questionna-t-elle, plus calme que quelques instants auparavant.
— Un trimestre, tout au plus, le temps qu'ils oublient et que nous soyons sûrs que tu ne risques plus rien.
— C'est déjà beaucoup trop... grinça-t-elle, les larmes lui remontant aux yeux.
— Je suis certain que si tu oublies pour quelque temps les problèmes que tu as eu par le passé, tu pourrais aimer cet endroit. Vraiment.
— Vous ne connaissez pas Poudlard. C'est un lieu rempli de haine, de faux sourires, et d'un directeur totalement fou qui a une obsession étrange pour le citron... »
William esquissa un sourire amusé par les mimiques dégoûtées que faisait Alex à chaque propos énoncé. Ah, ça, elle ne feignait pas sa haine envers l'école, cela se voyait bien...
« Bien, déclara enfin le ministre. Alors, c'est entendu ? Tu rejoins Poudlard pour trois mois pour te protéger, puis tu sortiras de là et tu reprendras ton travail auprès de nous ici-même à ton retour. Rien n'aura changé, je te le promets.
— Ne me forcez pas à dire oui, je refuse d'accepter ça... lança la jeune femme en sentant ses cheveux changer à nouveau de couleur, redevant roux, sa couleur naturelle.
— Alors je te l'impose, dans ce cas, dit-il en se levant. Alex, tu seras envoyée d'ici une heure à l'école de sorcellerie Poudlard, escortée par deux sorciers et un de mes espions, celui que tu veux.
— Qu'importe, lâcha-t-elle. Je préfère vous prévenir, vous êtes mon tuteur légal, vous risquez de devoir faire face au rendez-vous avec le professeur Dumbledore, le directeur, pour mauvais comportement de ma part. Je resterais moi-même, et je dirais ce que je pense, continua-t-elle en se levant à son tour. Je ne resterais pas inactive et inerte comme je l'ai été par le passé. »
Le ministre garda le silence, alors qu'elle sortait en claquant la porte, toujours énervée. En grandes enjambées, la rousse se dirigea vers sa chambre, attrapa sa valise, y jeta tous ses vêtements, son maquillage et ses chaussures, sans oublier ses armes moldues qui lui seraient utiles si l'envie lui prenait de fuguer. Au bout d'une heure, après s'être nettoyée et changée, à avoir ressassé ses idées noires et ses envies de meurtres envers ces idiots de Mangemorts, le ministre vint la chercher en personne, lui promettant que le temps passerait vite et qu'elle n'aurait pas à s'en faire. Qu'il pourrait lui parler par lettre et qu'il était prêt à l'aider, même à distance, et même sans pouvoir pénétrer dans l'école de sorcellerie sur-protégée. Quand elle monta dans la calèche tirée par des chevaux volants, Alex ne put s'empêcher de dire à son tuteur :
« J'aimerais tellement rester. Poudlard, les études, ce n'est pas fait pour moi, je préfère me battre et...
— Et cela ne durera que trois mois. Sois prudente et ne fais pas n'importe quoi juste par envie de rébellion. »
Alex hocha lentement la tête, les larmes lui montant à nouveau aux yeux. Elle haïssait le fait d'être si faible, à contempler d'un air impuissant sa vie sans pouvoir la contrôler... La rousse s'installa dans le carrosse, puis salua d'un signe de la main le ministre, avant de s'envoler. Les deux sorciers face à elle la saluèrent, mais la rousse ne leur adressa même pas un regard : tout ce qui était en rapport avec la magie était méprisable à ses yeux. Son voisin, Clem, entama une discussion, ce qui la soulagea : elle n'aurait pas à faire semblant de les apprécier... Bien que ce n'était pas son genre de le faire.
« Harold Minchum, notre Ministre de la Magie, nous a demandé de confier à la Miss une baguette magique qui lui servirait à Poudlard, déclara un des hommes en sortant un étui de sa poche avec le fameux objet.
— Vous le remercierez de la part d'Alex, dans ce cas, répondit Clem en souriant, ravi pour son amie qu'elle puisse disposer à nouveau de ses pouvoirs magiques.
— Je n'en ai sincèrement rien à faire de votre baguette magique, lâcha Alex en levant les yeux au ciel, concentrant son attention sur le paysage qui défilait par la fenêtre, la vue venant du ciel étant magnifique. Je hais la magie, je hais les sorciers et je hais tout ce qui se rapporte à un truc à faire avec de la magie. »
Ses cheveux étaient redevenus noirs. Un des sorciers la fixa quelques instants, ébahi, puis demanda :
« Vous êtes Métamorphage ?
— Non, je suis plombière. Bah oui, idiot, marmonna-t-elle, inaudible.
— Et vous n'avez pas vos ASPIC en étant Métamorphage ? Mais... lâcha l'autre, étonné aussi.
— Je ne vous ai pas permis de me juger à voix haute. Taisez-vous, ordonna-t-elle.
— Excusez-là, dit Clem, gêné. Elle est angoissée... Qu'est-ce-qu'un Métamorphage ? demanda-t-il ensuite.
— C'est une personne qui a la capacité de changer de forme sans lancer de formule magique, c'est un don de naissance très rare.
— Tout le monde peut le faire, vous autres sorciers êtes juste trop paresseux pour persévérer... Toujours à vous battre entre vous, continuellement, jusqu'à ce que tant de personnes perdent la vie... »
Les sorciers ne rajoutèrent rien, préférant discuter avec Clem qui adorait découvrir des choses sur ce monde qu'il ne connaissait que très peu. En rentrant dans l'équipe du Premier ministre moldu, celui-ci leur expliquait l'existence de ce monde magique vu que plusieurs missions avait un lien avec ce grand secret. Ensuite, il avait appris lors d'une mission avec Alex qu'elle était une sorcière avant, mais qu'elle avait tout abandonné après un grave événement dans le monde magique. Plus jamais après cette simple phrase, lancée par la jeune femme qui en avait assez des questions de son collègue après qu'elle ait changé d'apparence grâce à son don, il n'avait abordé le sujet avec elle.
Alex enrageait, alors que le château se faisait de plus en plus proche. Quand elle parvint à en distinguer les tours, la panique la gagna. Dans le carrosse, la jeune femme étouffait, et cela empira lorsqu'ils se posèrent à Pré-au-lard. Elle bredouilla quelques mots, puis se glissa à l'extérieur et se dirigea immédiatement vers la première ruelle qu'elle vit, essayant de respirer et de calmer ses sanglots qui l'envahissaient. Non, elle n'y arriverait pas, non, Poudlard la tuerait. Non, elle ne pouvait pas y aller, c'était trop compliqué... Tremblante, Alex murmurait des paroles incompréhensibles.
« Vous savez que tout ira bien ? déclara un des sorciers présent dans le carrosse en s'approchant d'elle. Poudlard a changé en quatre ans, vous savez. Et, peu de personnes se souviendront de vous, j'en suis convaincu.
— Mais il y aura Dumbledore, McGonagall, tous mes anciens professeurs, ils savent tout ce qu'il s'est passé à Poudlard quand j'y étais.
— Alors prouvez-leur que vous n'êtes plus la même, renchérit le sorcier. Calmez-vous quelques instants, je suis certain que vous y arriverez. Montrez-leur que vous n'êtes plus celle qu'ils ont connu. »
Ses paroles la calmèrent en quelques instants. Il avait raison. A Poudlard, Alex était allée dans la maison des personnes ambitieuses, rusées, manipulatrices : la maison Serpentard. Il fallait dès maintenant qu'elle use de ce qu'elle avait appris auprès de ses camarades de classe. Il fallait qu'elle les impressionne. Il fallait qu'elle leur montre qu'elle était bien plus forte qu'eux. Alors, la tête haute, aucune trace de ses pleurs se lisant sur son visage, Alex vint prendre sa valise que portait auparavant le sorcier avec qui elle avait parlé, puis lui dit :
« Notez bien ce que je vais dire, parce que je ne l'avoue pas souvent. Vous avez raison, Sir. »
Le sorcier esquissa un sourire amusé, puis la suivit du regard, la voyant ouvrir sa valise pour en sortir une arme, un pistolet qu'elle accrocha à sa taille, dans un étui accroché à la ceinture prévu à cet effet.
« On peut y aller » dit-elle ensuite, passant juste derrière eux.
Alex jeta un dernier regard à Clem, resté dans le carrosse, qui lui fit un signe de la main, auquel elle répondit discrètement. Puis, elle partit sur les talons des deux sorciers, qui discutaient en chuchotant. Ils rejoignirent une professeure à la grille qu'Alex ne connaissait pas, qui la salua d'un sourire sincère. Immédiatement, l'angoisse rejaillit : elle souriait comme Dumbledore à l'époque, de ce sourire qui devait être faux.
« Bonjour, Messieurs, Miss. Le professeur Dumbledore m'a demandé de vous accompagner jusqu'à son bureau. »
Alex, le visage fermé, balayait les environs du regard, comme si elle cherchait un possible ennemi autour d'elle. La professeure les escorta jusqu'à l'entrée, où la rousse s'arrêta net. Merlin, ce que c'était angoissant... Et si elle n'y arrivait pas ? Et si Dumbledore lui reparlait de son passé à Poudlard ? Le sorcier remarqua qu'elle doutait, parce qu'il vint lui murmurer :
« Prouvez-leur. »
Alex releva son regard bleu vers lui, qui le glaça sur place. Il espérait qu'il ne devrait pas se battre un jour avec elle, il n'était pas sûr d'en ressortir en vie... Elle reposa ensuite son attention sur les escaliers, d'où des élèves descendaient. Elle attrapa le sorcier par le bras, le tira vers la professeure qu'elle rattrapa en quelques enjambées, puis le lâcha et murmura :
« Plus vite ce sera fait, mieux ce sera... Je veux qu'on évite le plus possible les élèves. »
L'homme acquiesça puis se remit à côté de son collègue, près de la professeure. Alex gardait la tête baissée, souhaitant le moins possible revoir ces lieux qui la hantaient depuis des années. Depuis cette sombre année de ses seize ans... Sombre année.
Il fut temps de rentrer dans le bureau. Alex échangea un regard avec la professeure, qui lui sourit à nouveau avant de la laisser passer devant elle. Comment cela se passerait-il ? Alex arrivera-t-elle à parler à Dumbledore calmement ?
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