Chapitre 1
La paix.
Quel autre mot pourrait mieux qualifier l'état actuel du royaume d'Hyrule ? Ganon avait été défait par les deux élus des déesses, libérant leurs terres de son emprise et permettant de restaurer l'ordre. La princesse Zelda put revenir auprès d'Impa, sa nourrice qui l'avait élevée et éduquée avec le plus de justesse possible. Après cent ans de terreur et d'insécurité, il était temps que la princesse reprenne sa place sur le trône et gouverne à l'image de son défunt père. Impa, l'ancienne conseillère du roi, se remit au service de la famille royale et prit Pahya sous son aile afin de lui enseigner le rôle qu'elle avait tenu un siècle auparavant.
Après ses retrouvailles avec sa nourrice, Zelda dut quitter son chevalier servant car celui-ci désirait éliminer les derniers camps de monstres restants. Leur séparation fut douloureuse malgré leur envie de rester l'un auprès de l'autre. Mais ils durent s'y plier et accepter leur devoir respectif. Suite au départ de Link, la princesse se rendit au domaine Zora pour rencontrer le roi Dorefah qui désirait lui parler de sa fille, Mipha. Comme l'émotion fut vive... Zelda ne put se retenir de pleurer face à la statue édifiée en l'honneur du prodige zora. Elle regrettait la mort de tous ses compagnons. Hélas, rien ne les ramènerait. Il semblait même que les pouvoirs légués à Link se soient atténués bien qu'encore présents. Après une longue inspection de Vah'Ruta à cause d'un problème technique, la princesse revint au village Cocorico afin de parler de ses futurs projets à Impa, cette dernière lui étant toujours de bon conseil.
Ainsi, grâce à son aide, Zelda mit au point un système de gouvernement où un membre de chaque peuple l'assisterait pour prendre des décisions sur la gestion du royaume, de son commerce, de sa protection ou même de sa reconstruction. Seule et sans connaissance du rôle de souverain, la princesse pourrait ainsi guider son peuple le plus justement qu'il soit. Les différentes ethnies se sentiraient représentées et s'uniraient bien mieux. Impa mit au point un plan pour reconstruire la citadelle d'Hyrule en moins de trois ans. De nombreux ouvriers seraient sollicités, le budget se montrait astronomique mais restait tout de même à la portée de la princesse. Durant les cents dernières années, personne n'avait osé piller le château à cause des monstres ainsi que des Gardiens qui tuaient tout être vivant sur leur passage. Les trésors de la famille royale devaient encore s'y trouver, il ne fallait donc pas perdre de temps pour récupérer tout l'or caché dans les coffres de la forteresse.
Et c'est ainsi que le royaume d'Hyrule put renaître de ses cendres.
oOo
Ce jour-là, les rues étaient bien plus animées qu'à l'accoutume, des Piafs et des Gerudos se fondaient dans la masse d'Hyliens qui étaient venus peupler la citadelle d'Hyrule, complètement reconstruite à partir de ses ruines. La partie nord du château, quant à elle, restait encore en rénovation car elle avait été le plus endommagée lors de l'attaque de Ganon. La vie reprenait peu à peu son cours, les tragiques événements passés semblaient se volatiliser de jour en jour pour laisser place à l'insouciance et aux plaisirs de la vie. Parmi les cinq représentants des peuples venus épauler Zelda, Yunobo, Teba et Sidon étaient présents et apportaient leurs meilleurs conseils. Quant à Riju, en tant que suzeraine gerudo, elle ne pouvait quitter son peuple pour venir vivre à la citadelle. Elle désigna l'une de ses sœurs pour assurer ce rôle si notable : Rosa. C'était une femme rousse regorgeant de vivacité et d'un esprit critique à toute épreuve. Elle surplombait presque tout le monde par sa taille, ses muscles saillants laissaient plus d'un homme envieux sur son passage. Pahya, elle, apprenait toujours aux côtés de sa grand-mère mais devait terminer sa formation d'ici peu. La jeune femme avait appris les arts du combat afin de défendre la princesse dans toutes les situations puisque toutes les deux se côtoieraient relativement souvent dans la journée.
Dans les rues de la citadelle, certains passants se retournaient ou s'arrêtaient pour observer un simple cavalier qui avait fière allure sur son destrier à la robe baie. Sa cape ainsi que ses cheveux blonds volaient au gré du vent de l'est, l'épée de garde royale sanglée dans son dos s'entrechoquait par moments avec son bouclier d'Hylia. Sa prestance seule suffisait à imposer le respect de ceux qu'il croisait. À leurs yeux, il était un jeune homme aguerri, un héros qui avait sauvé le royaume du Mal qui le rongeait. Ces trois dernières années, Link avait fini de grandir pour atteindre la taille moyenne des Hyliens, sa musculature s'était un peu développée bien qu'elle soit discrète sous ses habits. Ce n'était pas son genre de s'exposer à la vue de tous. Calmement, il déambulait à travers la citadelle pour se rendre au château où sa grande amie l'attendait. Le jeune homme revenait de la forteresse d'Akkala où il finalisait la formation des futurs soldats du royaume. Et dire que la moitié d'entre eux avait le double de son âge...
Link portait toujours sa tunique de prodige par-dessus laquelle il avait placé certains éléments de sa tenue hylienne, comme la protection en cuir sur son poitrail, par exemple. L'ajout d'une cotte de mailles sous son vêtement bleu lui assurait une sécurité supplémentaire en dépit de son poids important. Et puis, cela lui donnait toujours l'impression d'être chevalier. Quant à la Lame Purificatrice, il l'avait replacée dans son socle face à l'arbre Mojo, car il n'y avait plus de danger depuis la défaite de la Calamité Ganon.
Certes, ces trois ans passés avaient rendu Link encore plus adulte, seulement ils n'avaient pas permis aux deux élus de se rapprocher davantage, malheureusement. Bien que leurs sentiments l'un envers l'autre soient toujours aussi forts, leurs devoirs restaient leur plus grande préoccupation pour élever le royaume au rang qui lui était dû.
Le cavalier passa les portes menant à la forteresse, il leva la tête vers l'une des tours pour scruter les fenêtres avec attention. Puisqu'il ne vit rien, Link émit un faible soupir puis continua son chemin jusqu'aux écuries où il put laisser son cheval. Ce dernier fut aussitôt pris en charge par un jeune garçon qui travaillait depuis peu pour la famille royale. Le Héros le remercia poliment avant de s'en aller en direction du grand hall, restauré depuis quelques semaines à peine. Quand il y entra, Link s'arrêta quelques secondes pour contempler les hautes colonnes où pendaient des étendards bleus. De tristes souvenirs lui revinrent à l'esprit quand il revit la multitude d'Hyliens mourir ici lors du retour de Ganon. Rien n'aurait pu les sauver. Pas même lui. Un air peiné passa sur son visage lorsqu'il reprit son chemin.
Il y a des souvenirs que nous n'oublierons jamais. Et d'autres qui resteront à jamais gravés dans nos cœurs.
Machinalement, Link replaça correctement sa ceinture thoracique en la tirant vers le bas. Jamais les souvenirs de ce jour-là ne s'effaceraient de sa mémoire. Il se souviendrait toujours de la détresse de Zelda, de la perte de leurs proches ainsi que de leur fuite. Certaines nuits, il n'était pas rare que le prodige revive des événements du passé. Et toutes les fois, il se réveillait en sursaut, le cœur battant à tout rompre.
- Link, tu es rentré ! se réjouit la future conseillère de Zelda.
Le jeune homme tourna la tête pour découvrir Pahya qui s'avançait vers lui, souriante. Elle tenait sous son bras un lourd dossier de finance destiné au trésorier du château. Depuis leur première rencontre, la Sheikah n'avait pas changé mis à part le fait qu'elle se montrait moins embarrassée en présence de Link.
- Bonjour, la salua-t-il à travers un discret sourire. Tu vas apporter les comptes à Alwin ?
Elle acquiesça pour le confirmer.
- Oui, il m'a demandé de les apporter le plus tôt possible. Au fait, Link ! La princesse Zelda t'attend dans son étude.
Le jeune homme la remercia puis emprunta les escaliers principaux qui menaient au premier étage afin de rejoindre l'aile Ouest du château, l'une des premières parties restaurées. Par manque de personnel, les couloirs demeuraient vides pour la plupart, les murs dénudés de tableaux laissaient voir leurs blocs de pierres grises. Une ambiance parfois lourde régnait au sein de la forteresse car elle manquait encore de vie. Mais au fil des années, ce problème finirait par se régler avec la venue de nouveaux Hyruliens à la citadelle.
Link arriva aux appartements royaux protégés par deux gardes à leur entrée. Quand ils le reconnurent, les deux hommes saluèrent le Héros et lui permirent de passer. Le jeune homme les gratifia d'un hochement de tête puis passa la porte, le cœur léger. Revoir la princesse, même après une courte absence, restait pour lui une joie sans pareille. Le chevalier entra dans la chambre de Zelda car celle-ci ne l'occupait pas actuellement puis il se dirigea vers l'escalier qui menait à l'étage supérieur. Il traversa ensuite le petit pont et frappa doucement à la porte de l'étude.
Link attendit l'autorisation avant d'entrer, ce qui ne tarda pas à venir. Il découvrir la princesse qui essayait d'attraper une boîte en métal avec polaris car celle-ci se trouvait trop en hauteur pour elle. Quand l'Hylienne aperçut le héros, elle sursauta et désenclencha le pouvoir, provoquant la chute de la boîte. Le contenu se déversa et dévoila un tas de feuilles séchées qui lui servait d'éléments d'étude.
- Link ! s'exclama-t-elle en posant précipitamment sa tablette sheikah sur son bureau. Je ne pensais pas que tu reviendrais si tôt dans la journée...
Zelda s'abaissa pour ramasser la boîte et ses plantes. Si elle s'occupait maintenant de son chevalier servant, elle finirait par oublier sa précédente bêtise. Celui-ci s'accroupit justement à ses côtés pour l'aider.
- Pardonnez-moi, j'aurais dû m'annoncer.
La princesse leva la tête vers lui pour ancrer son regard dans ses yeux bleus.
- Tu t'excuses encore pour ce genre de chose ? s'étonna-t-elle. Depuis le temps que nous nous connaissons, tu sais très bien que ce n'est pas grave.
Elle lui adressa un sourire pour le rassurer. Mais comme toujours, le jeune homme finirait par s'excuser pour une autre raison, lors d'une situation différente. Zelda finit de remettre toutes les herbes dans la boîte puis elle la posa près de la tablette avant d'épousseter sa robe bleue marine.
- Comment s'est passé ton séjour à Akkala ? se renseigna-t-elle pendant qu'elle feuilletait un gros ouvrage posé sur le bureau. Les nouvelles recrues se montrent assidues ?
- Il n'y a pas eu d'incidents, les hommes que je forme sont très impliqués dans leurs entraînements.
- C'est une bonne chose.
Zelda abandonna sa lecture pour refaire face à son ami qui ne cessait de l'observer.
- Aucune femme ne suit de formation ?
- Il n'y a jamais eu de femmes dans l'armée hylienne... Je n'en ai donc aucune en tant qu'apprentie, avoua Link avec une certaine honte.
Il savait bien que les Hyliennes étaient aussi capables de manier les armes, les Gerudos en étaient le parfait exemple.
- Voulez-vous que je lance une campagne de recrutement visant les femmes ?
Zelda attrapa son menton pour y réfléchir avec sérieux. Elle n'y voyait aucun inconvénient, chacun était libre de choisir sa voie. La princesse hocha la tête.
- Ce serait une bonne chose. Mais avant cela, je vais demander l'avis d'Impa. Je doute qu'elle ait d'objections mais je préfère tout de même savoir ce qu'elle en pense.
Sur ce, sans même se concerter, ils se dirigèrent vers la chambre princière afin de regagner l'enceinte du château au plus vite. Link remarqua le pas de la damoiselle plus précipité qu'à l'accoutumé, elle se montrait plus tendue voire mal assurée. Tous deux descendirent les escaliers en colimaçon pour arriver dans la chambre. Zelda gardait la tête baissée, son étrange silence suscita d'autant plus d'interrogations chez son compagnon qui décida de lui prendre la main. Link lui demanda :
- Zelda, je vous sens tourmentée.
La blonde s'arrêta brusquement, les lèvres pincées, puis riva son regard sur sa cheminée pour se sentir plus à son aise.
- C'est à propos de ma discussion avec Impa, après la défaite de Ganon, avoua Zelda qui finit tout de même par esquisser un sourire. Même après trois ans de réflexion et d'observation, elle ne peut accepter que je renonce à mon titre de princesse. Je suis désolée...
Sa déception se manifesta par le tressaillement de ses lèvres ainsi que par le picotement de ses yeux. Zelda aurait sincèrement voulu être en mesure de vivre une existence normale auprès de Link. Seulement, sa personne représentait le royaume tout entier aux yeux des territoires voisins, les différents Hyruliens avaient besoin d'une figure de référence qui n'était autre que la princesse. Après avoir saisi son audace, le chevalier osa poser sa main sous l'oreille de sa damoiselle tandis que ses doigts glissaient dans sa longue chevelure blonde. Il attira Zelda vers lui et déposa ses lèvres tièdes sur les siennes, avec sa douceur habituelle. Le cœur de la jeune femme bondit dans sa poitrine, toute sa tension se relâcha pour se laisser faire et profiter de ce moment si précieux et rare. Même s'ils s'aimaient, les deux élus n'osaient s'embrasser que très peu.
Zelda ferma un court instant les yeux pour s'abandonner à son amant et à ce court moment de bonheur. Elle aimait quand Link osait prendre des initiatives. D'habitude, c'était plutôt elle qui faisait les premiers pas alors un peu de changement ne lui déplaisait pas, bien au contraire. Ce baiser eut le mérite de la réconforter et de la mettre de bonne humeur. La princesse finit par s'écarter de quelques centimètres, le souffle court à cause de sa vive émotion, puis elle posa son front contre le sien.
- En quel honneur ai-je eu droit à un baiser de ta part, Link ? demanda-t-elle en souriant.
L'expression détendue et heureuse du jeune homme ne fit qu'accroître son sentiment de sécurité.
- J'ai juré de ne pas vous laisser retomber dans cette peine qui vous rongeait il y a un siècle. Je... n'ai pas vraiment réfléchi, je l'ai fait sous l'impulsion.
Link n'osa pas avouer qu'il en avait aussi très envie depuis plusieurs semaines ; plus le temps passait, plus il désirait partager du temps avec Zelda. La reconstruction du royaume, au lieu de les rapprocher encore plus, n'avait fait que les éloigner car leurs rôles ne furent pas les mêmes. Personne n'était au courant pour leur relation, surtout qu'eux-mêmes n'étaient pas sûrs de former un véritable couple. Oh, ils en avaient très envie en réalité ! Le frein à leur relation n'était autre que le futur de la princesse qui restait incertain. Devait-elle encore suivre les anciennes mœurs et épouser un homme de son rang pour respecter la lignée noble ? Pour pallier cela, il n'y avait qu'une solution.
- Link, nous en avions déjà parlé il y a plusieurs mois mais... si tu me laissais t'anoblir, nous pourrions aller plus loin sans craindre pour ces fichues traditions.
Le chevalier fronça légèrement les sourcils.
- Vous connaissez mieux que quiconque mon aversion pour les nobles, Zelda. Leurs privilèges leur sont montés à la tête, argua Link en passant une main sur son épaule en signe de nervosité.
- Je peux abolir les privilèges si c'est vraiment cela qui te rebute.
- Dans ce cas-là, la noblesse n'aurait plus lieu d'être. Je devrais rester roturier, cela reviendrait au même.
Affectée, Zelda le prit dans ses bras et enfouie sa tête au creux de son cou. Le héros passa ses mains dans son dos pour la serrer contre lui.
- Revenons aux bases même de la noblesse, proposa la damoiselle d'une voix pleine d'espoir. Je ne devrais attribuer ce titre qu'à ceux et celles qui se sont montrés nobles d'esprit et nobles dans leurs actions. Actuellement, tu es sans aucun doute le plus méritant, tu peux être un exemple et le symbole d'un renouveau. Je peux ainsi retirer les privilèges.
- J'approuve votre façon de penser. Mais je vous en prie, laissez-moi le temps d'y réfléchir...
Elle hocha la tête puis lui embrassa la joue avant de reculer de quelques pas. Zelda offrit un discret sourire à Link qui l'accueillit avec joie. Elle lui accorda sa requête car cette dernière était tout à fait compréhensible. Talonnée par son chevalier servant, la princesse se dirigea vers la porte pour regagner le couloir et rejoindre Impa. En effet, elle avait à lui parler du recrutement des femmes dans l'armée ainsi que du potentiel anoblissement de Link. Celui-ci fut contraint de quitter sa compagne pour assurer ses obligations de capitaine de la garde royale, titre qu'il conservait avec beaucoup de modestie et qui lui tenait particulièrement à cœur. Dans l'enceinte du château, Zelda marchait d'un pas soutenu jusqu'à l'aile Est pour rejoindre l'emplacement du bureau qu'Impa partageait maintenant avec sa petite-fille.
La princesse finit par arriver à la porte en question, elle frappa de brefs coups puis entra en prenant soin de ne pas être trop brusque. La vieille Sheikah se tenait derrière son bureau jonché de dossiers tandis que Pahya rangeait justement un gros manuscrit dans un coin de l'étagère, à droite. Impa gratifia sa protégée d'un chaleureux sourire après l'avoir invitée à s'asseoir devant elle.
- Vous avez une demande à me faire, Votre Altesse ? lui demanda sa nourrice sur un ton rassurant.
Sa petite-fille vint se placer à côté d'elle, les doigts entrelacés devant son ventre. Zelda acquiesça.
- Oui, j'aurais quelque chose à te demander.
Elle lui parla des futurs soldats ou chevaliers qui pouvaient être des femmes ainsi que des avantages que cela apporterait pour l'armée d'Hyrule. Les Hyliennes n'étaient pas moins compétentes que les Hyliens, il y avait juste leur musculature qui, de par nature, ne pourrait jamais égaler celle des hommes. Mais l'entraînement des recrues ne demandant pas des capacités surhumaines, les femmes pouvaient largement suivre la formation au même rythme que les hommes. Impa l'approuva et l'encouragea même dans son projet. Cela ajouterait un peu plus d'égalité entre les deux sexes et résoudrait même quelques petits problèmes au sein de la population. Zelda changea finalement de sujet :
- Je pense anoblir Link d'ici peu et supprimer les privilèges par la même occasion. Être noble ne serait qu'un titre en guise de reconnaissance, qui ne se transmettrait pas par le sang.
Les yeux de la vieille Sheikah s'écarquillèrent tant elle fut sidérée par ses propos. Re... Retirer les privilèges ?! Jamais elle n'avait entendu une telle chose !
- Princesse, avez-vous conscience de ce que cela représenterait pour les pays limitrophes ? la questionna Impa, hébétée. Quel roi voudrait d'une cour sans privilèges ?
- Ce n'est le cas que si je décide d'épouser un prince étranger, répliqua la princesse en croisant les bras. Les autres royaumes n'ont pas à se soucier de ce qu'il se passe ici, Hyrule ne dépend et ne dépendra jamais d'eux. Et quand bien même je désirerais épouser un noble étranger, il aura tout intérêt à accepter mes décisions. De plus, je ne suis pas disposée au mariage pour le moment.
Sans qu'elle ne sache exactement pourquoi, la gorge de Pahya s'était asséchée. Elle pensait voir un lien entre ce sujet et le potentiel anoblissement de Link. Impa soupira puis reporta son attention sur sa protégée au sang royal. Elle lui accorda un sourire mêlé à de la tristesse.
- Votre Altesse, d'ici quelques jours, ma fonction au château aura définitivement pris fin, lui annonça-t-elle d'une voix grave. La formation de Pahya est terminée, elle est dorénavant apte à prendre ma relève pour vous épauler. De plus, je lui ai appris quelques techniques ancestrales sheikahs qui devraient vous aider. Hélas, je me fais trop vieille pour rester ici. J'espère que vous le comprenez.
Cette annonce pour les moins brutales eut l'effet d'un véritable choc pour Zelda dont les yeux la piquèrent aussitôt.
- Impa, tu... tu aurais pu me le dire plus tôt...
- Je m'en excuse, Princesse. Mon souhait était de ne pas perturber votre quotidien suite à mon annonce. Même si cela vous attriste, je ne peux pas rester éternellement ici. Mon village compte sur moi.
Zelda se montra forte, elle hocha simplement la tête en agrippant fermement sa robe. Elle savait que tôt ou tard, sa nourrice finirait par rentrer à Cocorico. Cette séparation ne pouvait que peiner la princesse qui considérait Impa comme une deuxième mère. Il y a cent ans, la conseillère faisait partie des uniques personnes à même de la comprendre et de veiller sur elle.
- Oui, je comprends. Je ne saurai jamais assez te remercier pour tes bons et loyaux services, Impa. Tu m'as toujours été d'une aide précieuse. Si tu as besoin du moindre service, je serai à ta disposition.
La blonde observa à présent Pahya qui paraissait plus tendue qu'à l'ordinaire. Zelda lui adressa un sourire rassurant.
- Pahya, je suis ravie de travailler à tes côtés, lui affirma-t-elle avec une flamme de détermination dans le regard. Ensemble, je suis persuadée que nous accomplirons de grandes choses pour le royaume.
- Vous pouvez compter sur moi, Princesse ! Je risque de manquer encore d'expérience pour le mois à venir, mais soyez assurée que je m'efforcerai d'y pallier rapidement.
Zelda la gratifia d'un énième sourire pour la remercier de sa dévotion ; elle avait déjà aisément remarqué le potentiel de la jeune Sheikah et sa capacité à prendre des décisions réfléchies et sensées. L'Hylienne jeta un regard par-dessus son épaule pour observer un long instant ses cheveux. Depuis quelques temps, elle songeait à les rétrécir car ils devenaient trop encombrants et gênants. Zelda finit par contourner le bureau puis prit sa nourrice dans ses bras pour la remercier une fois de plus pour tous ses services. Malheureusement, elle dut laisser les deux femmes pour regagner l'ancienne salle du trône où siégeait maintenant une longue table qui accueillait les divers dirigeants. A l'heure actuelle, ils devaient sans doute traiter des affaires séparément en fonction de leurs compétences.
Sur son chemin, Zelda s'arrêta en fronçant les sourcils. Oui, elle venait de prendre sa décision. Même si elle en avait déjà la maturité et l'allure, elle voulait se montrer plus adulte, elle désirait avoir le profil d'une future reine forte et assurée. Pour aller de l'avant, la jeune femme n'hésiterait pas à couper certains liens la reliant à sa vie passée. Ses cheveux, qu'elle chérissait autrefois, étaient dorénavant devenus un frein dans son accomplissement personnel.
oOo
Quelque part, tapi dans le coin sombre d'une maison de la citadelle, un souffle sifflait entre les quatre murs et devenait de plus en plus rapide au fil des secondes. L'ambiance oppressante et glaciale n'arrangeait rien. Plaqué contre le dossier de sa chaise, un Hylien d'une cinquantaine d'années suait à grosses gouttes et laissait échapper des larmes de terreur. La lame placée sur sa gorge ne le trompait pas et menaçait de l'arracher à la vie d'un moment à l'autre.
- Je... Je vous jure que je ne sais rien ! répéta-t-il d'une voix tremblante, tous ses sens en alerte. Je n'ai pas pu avoir des informations cette fois-ci !
Un visage pâle surplombé de cheveux gras et noirs s'abaissa jusqu'à son oreille puis lui murmura d'une voix glaciale :
- Vous mentez.
Le sang de l'Hylien se glaça soudainement et la panique lui monta brutalement à la tête, provoquant sa perte de raison.
- Non, atten... ! hurla-t-il avant de se taire quand le couteau lui trancha la gorge.
Son assassin le lâcha et le regarda tomber au sol, pris de vives convulsions à cause de la douleur et de l'hémorragie. L'Hylien fut incapable d'émettre le moindre cri, il mourut dans le silence, sous les yeux impénétrables de l'individu. Ce dernier essuya sa lame sur sa demi-cape noire puis la plaça dans son étui sanglé à sa cuisse. Avec lenteur, il se dirigea vers la fenêtre où il poussa légèrement les rideaux pour observer le château, ses sourcils noirs étaient froncés à cause de son air fermé. Sur son bras gauche, on pouvait entrapercevoir un tatouage noir et rouge aux formes courbées et étranges. Quant à ses yeux, ils étaient d'un vert clair qui contrastait avec le reste de son physique.
- Je te retrouverai... prononça-t-il avec une certaine rancœur dans la voix.
Il plissa les yeux et poussa une faible expiration.
- Orazio de Lanelle.
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