Avant que la jeune fille n'ait le temps de se jeter par la fenêtre, elle entendit la porte de sa chambre s'ouvrir. Heureusement, son cœur ne s'emballa pas lorsqu'elle réalisa qu'il ne s'agissait que de Gabriel : une nouvelle accélération de son rythme cardiaque aurait causé une attaque.

Le prince ne dit rien en apercevant l'air paniqué de son amante. Il se contenta de s'assoir à côté d'elle sur les draps, la fixant droit dans les yeux.

Gabriel avait ce talent qu'Helena adorait : il était capable de faire passer une quantité saisissante d'émotions à travers ses yeux noirs. Pas de contact physique, pas de mots... Ses seuls yeux semblaient suffire.

Ou du moins, suffisaient-ils habituellement. Aujourd'hui, Helena avait besoin de plus. De beaucoup plus. Elle ne parvenait pas à se calmer, ne parvenait pas à effacer les images cauchemardesques qui tournaient en rond dans son esprit depuis son réveil. Elle se blottit dans les bras de l'héritier et respira son odeur à présent familière, qui déclenchait en elle un flot de souvenirs récents aussi délicieux qu'affreux.

Ses mains sur ses hanches, ses traits durs alors qu'il la menaçait, sa bouche contre son cou, sa lame contre sa peau...

Helena soupira, plus perdue que jamais.

-Je n'y arriverai pas, gémit-elle dans l'épaule de Gabriel.

Ce dernier poussa un profond soupir, presque déçu par l'attitude de son amante, Elue et fausse compagne.

-Je t'en prie, ne me dis pas que je viens de perdre deux semaines de ma vie à t'entraîner pour rien.

Son ton, mi-figue mi-raisin, fit échapper un léger rire à Helena. Cependant, elle ne dit rien, incapable de répondre à la question. Elle ne connaissait pas la réponse. Ces deux dernières semaines avaient-elles été une perte de temps ? Ou Helena avait-elle réellement passé les heures les plus dures de sa vie dans une arène de sable violet dans un but précis : celui de survivre ?

Alarmé et exaspéré par le manque de réponse de la part de l'ange dans ses bras, Gabriel la repoussa et la saisit par les épaules, la forçant à croiser son regard déterminé.

-C'est très simple, Helena. Que tu te penses capable de survivre à l'Epreuve et au vote ou non, tu vas quand même te rendre dans cette arène, et tu vas quand même affronter ton frère et ton ami d'enfance. Le problème ce n'est pas ça. Le problème c'est que tant que tu n'y croiras pas toi-même, tant que tu ne seras pas persuadée que tu vas remporter la mise à l'épreuve de ma mère, je ne pourrais rien faire pour toi. Je peux être là pour te réconforter, je vais être là pour panser tes blessures... Mais tant que tu ne seras pas disposée à te battre pour toi-même, toute mon aide ne te serviras à rien. Il faut que tu te battes, que tu remportes ce vote... Tu comprends tout ça ?

Helena laissa les paroles de Gabriel s'imprimer dans son esprit pendant de longues secondes. Puis, finalement, elle hocha la tête, sa confiance en soi retrouvée. Avait-elle peur ? Oui. Assez pour en mourir ? Empêcherait-elle cette peur de la pousser vers la victoire et le déclin social espéré par Ambre ? Absolument pas.

Son regard toujours planté dans celui du prince, elle se pencha en avant et laissa leurs lèvres se rencontrer. Il répondit immédiatement au baiser, laissant les mains de la jeune ange descendre le long de ses épaules et de ses bras pour trouver ses mains.

Ils n'arrivaient toujours pas à donner un nom à leur relation, mais cette absence d'étiquette et de règles semblait leur convenir à tous les deux. Briser toutes les règles établies par les souverains leur donnait le pouvoir d'obtenir cette liberté dont ils avaient tous les deux envie. Dont ils avaient tous les deux besoin.

Avec une dernière profonde inspiration, Helena quitta les bras de Gabriel et se dirigea vers sa salle de bains.

Elle y croyait. Elle allait survivre. Elle devait survivre.

***

-La première tâche, c'est le combat, là où se mélangent le corps à corps et le duel armé. Ensuite vient la magie et le vol est la dernière étape avant la liberté.

Helena hocha la tête, contrôlant sa respiration avec application tout en écoutant Ethan qui l'escortait jusqu'à l'arène.

La jeune Elue portait un pantalon de cuir noir moulant avec une nouvelle paire de bottes de combat, plus stables que les anciennes. Et plus mortelles. Sur l'abdomen elle portait un simple haut noir sans manches qui épousait ses formes à la perfection et qui était fait d'un tissu extrêmement résistant. Par-dessus, elle avait enfilé un corset de métal noir qui protégeait les zones les plus importantes. L'armure continuait sur ses bras et se refermait autour de ses poignets avec souplesse. Pour protéger ses mains, elle avait enfilé des gants métallique noirs étrangement fins et malléables, probablement enchantés. Le matin même, Jade était venue dans ses appartement pour l'habiller et la coiffer. Elle avait réalisé une parfaite tresse à cinq mèches dont aucun cheveu ne s'échappait. Helena avait également été forcée de se maquiller : du noir et du doré par petites touches sur les yeux et un rouge à lèvres d'un écarlate éblouissant, le tout lié avec un teint soigné à la perfection.

Elle revoyait le regard inquiet de la suivante alors qu'elle lui tendait sa nouvelle armure.

-Je sais que c'est bizarre comme situation, mais j'espère vraiment que tu vas survivre...

-Moi aussi, Jade. Moi aussi.

La Corneille n'avait pas reçu de casque car les coups à la tête étaient interdits selon le règlement de l'Epreuve, ce qui l'arrangeait grandement : elle savait que la visibilité était très réduite avec le port du casque...

Alors qu'elle se tenait derrière les grilles qui la séparaient de l'arène où elle devrait se battre pour sa vie, Helena avait plus l'impression d'être un gladiateur romain qu'un ange.

Elle entendait les conversations des Courtisans qui emplissaient peu à peu les gradins et les loges, attendant avec impatience de voir de quoi était capable la Première Corneille. Elle avait reçu un mot de la part de la Comtesse le matin-même. Elle ne savait pas s'il l'avait rassuré ou pas.

J'ai beaucoup parié sur vous. Une partie de la Cour se fie à mon avis. Tentez de rester en vie, très chère.

-Ailani

A sa grande surprise, Helena fut tirée de sa rêverie par la main du Combattant qui s'était posée au creux de son cou, diffusant une douce chaleur dans le reste de son corps.

-Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais j'ai le sentiment que nous avons fini par être amis tous les deux..., commença dubitativement l'héritier. Je n'irai pas jusqu'à dire que ta mort me dévasterais mais... Disons qu'elle me chagrinerais. Ne meurs pas, Helena. Tu ne mérites pas tout ça, je m'en rend compte aujourd'hui. Mais bats-toi pendant les prochaines heures et sauve ta peau. S'il te plaît.

Ethan était aussi surpris par ses propres propos qu'Helena elle-même. Jamais il n'aurait pensé que l'amitié qu'il avait fini par lier avec l'Elue pourrait être si importante à ses yeux... Et pourtant, la perspective de voir Helena disparaître le déstabilisait.

-Je vais tout faire pour, chuchota-t-elle en embrassant brièvement la joue de son interlocuteur.

Elle aussi avait fini par s'attacher à l'humour acide et grivois du Combattant et perdre cette étrange relation qu'ils avaient commencé à entreprendre la « chagrinait » également.

Peut-être que passer le reste de sa vie à Skylar ne serait pas si terrible, finalement...

***

-Tu es sûre que tu ne t'es pas trompé d'armure ?

-Non, Noémie ! Je suis sûre de lui avoir donné l'armure défectueuse.

-Va-t-elle y survivre ?

-Très peu probablement...

-Pour les Caedis. Pour la Communauté Rouge.

-Pour les Arwen. Pour un siècle de paix sous le règne des nouveaux Royaux.

***

Killian contrôlait sa respiration du mieux qu'il le pouvait. Il avait un plan. Un plan qui le ferait sans doute tuer, mais qui sauverait peut-être la vie de la femme qu'il aimait.

Il avait un plan, et il le mettrait en marche quoi qu'il lui en coûte.

***

-Prête ?

-Pas le moins du monde.

Gabriel sourit. Sa main trouva automatiquement celle de l'Elue. Elle entremêla leurs doigts à lui en faire mal, mais il ne se plaignit pas, trop occupé à tenter de mémoriser la forme de ses mains dans les siennes.

-Embrasse-moi.

Leurs lèvres se trouvèrent dans l'instant, anéanties par le fait que c'était peut-être la dernière fois qu'elles se goûtaient.

Les mains de Gabriel quittèrent celles d'Helena pour l'attirer contre lui. Elle laissa ses mains tracer la courbe dure et froide de son armure tout en passant ses doigts tremblant dans les cheveux sombres du prince.

Le souffle court et le cœur battant la chamade, les deux amants se fixèrent quelques instants avant que la voix de la reine ne résonne à l'extérieur du minuscule habitacle, annonçant le début de l'Epreuve dans quelques secondes.

Fiévreux, pressé et effrayé, Gabriel laissa –pour la première fois depuis longtemps- la panique traverser sa coquille et apparaître dans sa voix.

-Reviens-moi.

Helena ne répondit rien, se contentant de détacher ses mains de la nuque de l'Ange de Destinée et de se tourner face à la grille qui commençait déjà à bouger.

Lorsqu'elle se retourna, elle était seule.

Je ne promets rien...

***

Bon, oui je sais que ça fait longtemps que je n'ai rien posté, mais j'avais prévenu lors du dernier chapitre que je ne posterais rien jusqu'à fin janvier...

J'ai hâte de voir vos commentaires sur ce chapitre qui, s'il est court, reste empreint de beaucoup d'émotions entre les personnages!

Comme d'habitude, n'hésitez pas à dire ce que vous pensez avec honnêtetén ça ne peut que m'aider à m'améliorer.

Bon, par contre, cette fois-ci, le prochain chapitre va mettre plus de 1 mois à venir, parce que j'ai mon concours dans 2 semaines et que donc je ne pourrai pas écrire pendant les vacances.

Cependant, faites moi part de vos théories pour la suite, c'est toujours drôle!

Et aussi, que pensez-vous de ce petit média? Perso, je le trouve de circonstance, même si l'amure sur la photo n'a rien à voir avec l'armure que porte vraiment Helena...

Petite parenthèse, pour ceux d'entre vous qui ont lu mon autre histoire en anglais (si il y en a parmi les lecteurs de Royaux), vous en avez penser quoi?

Bref,

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