XXXVIII
/Quelques phrases du chap précédent #37~
Je me disais que je ne devais rien dire, et surtout ne pas attirer l'attention. De toute manière, il fallait bien se faire une raison : puisque le reste de ma foutue vie est de rester ici, alors je devrai m'habituer à voir ce genre de chose tous les jours...
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J'étais restée dans le laboratoire de Yael plus longtemps que prévu. Déboussolée par ma découverte, je m'étais réfugiée dans les toilettes que j'avais pris soin de fermer à clé.
Un certain lapse de temps s'écoula avant que je ne sorte de mon refuge.
Tout était encore silencieux. L'odeur des produits qu'utilisaient Yael ne me faisait plus rien. Je m'y étais habituée.
J'étais vaseuse. Comme endormie mentalement. Je flânais dans le laboratoire. Après avoir vu tout ça, mon cerveau s'était reposée et mis en mode repos. Clairement.
Après quelques minutes, mon regard se posa sur la dernière porte. Celle que je n'avais pas ouverte. Encore un espace de rangement de membres, ou bien ?
D'un pas mou mais décidé, je marchais vers celle-ci avant de saisir fermement la poignée.
Les yeux bien fermés et les muscles crispés, j'abaissai la poignée et tirai la porte vers moi. Je me retins d'hurler, au cas où. Je m'attendais à recevoir un truc sur la tête, quelque chose que j'avais fait tomber. Ou bien une odeur nauséabonde. Ou même entendre des gémissements ressemblants à ceux d'un animal.
Mais rien de tout ça.
En réalité, cette issue menait à une large chambre. Elle était bien éclairée, les lumières y étaient encore allumées et une petite fenêtre digne de celle des cellules laissait passée un peu de lumière artificielle venant de l'extérieur.
Mon corps se détendit subitement, j'étais soulagée.
Mes yeux se baladèrent sur l'ensemble des choses constituant cette chambre.
« C'est là que Yael dort alors... Sympa comme tout. »
Avec un léger sourire et sans appréhension, je pénétrai dans la pièce et refermai la porte derrière moi.
Dans cette chambre, il y avait un léger parfum : non pas celui qu'il y avait dans le laboratoire de Yael juste à côté, non, non, mais bien celui de la vanille. Une odeur qui semblait plaire à ce monstre qu'il était.
La pièce était plutôt large et spacieuse, mais bien remplie. Comme si on avait entassé des souvenirs. Il y avait beaucoup de vieux meubles, comme des anciennes commodes en bois, une horloge à pendule ou encore un paravent troué. La plupart du mobilier était sale et souvent dégradé.
Yael était, soit passionné par les vieux trucs comme il est passionné de membres humains, soit tout ceci était d'anciens souvenirs de sa vie davant. Vie dont on ne m'avait jamais parlé. Herykler devait le faire à mon arrivée, mais il ne l'avait jamais fait. Comme pour lui, Kyron et Wino.
Ce qui me mettait la puce à l'oreille comme quoi ce serait des souvenirs, ce sont toutes ces photos qui tapissaient le mur face à moi. Il devait en avoir des centaines, vraiment. Des dizaines de centaines. La plupart avaient été prises avec un polaroid. D'autres étaient très anciennes.
Impressionnée, je ne bougeais pas. Il y en avait tellement que je ne savais plus où regarder.
Soudain, quelqu'un racla fortement sa gorge derrière moi, ce qui me fit sortir de mes pensées tout de suite.
Et merde. Putain de merde, même.
« Je te dérange ? »
Yael. C'était Yael. Juste derrière moi. Il allait me tuer. Il allait me tuer, vraiment. J'étais là, dans sa chambre, à regarder des choses qui ne me concernent absolument pas. Lui qui était totalement fou, c'était sur, j'étais foutue.
Mon corps se mit à trembler légèrement alors que je me retournai rapidement.
Je vis alors Yael, ses lunettes sur la tête, posé contre l'encadrement de la porte, ouverte bien sur, les bras croisés sur son sweat blanc.
« Je... Je... »
Je fis un pas en arrière, prise par la panique.
« Qu'est-ce que tu fous ici ?, demanda-t-il sans expression sur son visage pale.
-Je... Rien... C'était pour mon nez... Quand... Tout à l'heure...
-Eh. Elie. »
Il eut alors un sourire doux et léger.
« Détends-toi. Je ne vais rien te faire. Si ça peut te rassurer, j'ai pris mes cachets. Je venais juste prendre la manette de console de Taleb. »
Il se dirige vers son lit et sort de dessous la fameuse commande de jeux.
« Il l'a laissé ici hier quand il est venu. »
Il garda un léger sourire et pencha sa tête sur le côté.
« Tu regardais mes photos ?
-Je... Oui... Elles sont belles...
-Surtout elles, tu ne trouves pas ? »
Il pointa du doigt des paysages, de magnifiques paysages.
« C'est toi qui les a pris en photos ?
-Bien sur. Je suis un fada de photographie. »
C'est vrai que je n'avais pas vu les différents appareils, de toutes époques, disposés sur le bureau dans un coin de la pièce.
« Elles sont vraiment très belles. Tu es très doué...
-Comme toi.
-M-Moi ?
-Pour te prendre la porte de mon laboratoire par exemple », fit-il en faisant référence à tout à l'heure quand il est sorti et que je courais dans le couloir.
Il rit alors un petit peu, ce qui me surprit. Bizarrement, j'eus envie de rire avec lui. Il semblait naturel. C'était le vrai Yael que j'avais face à moi. Ce n'était pas le monstre, l'inhumain, le malade.
« Continue de regarder, je t'en prie. Tu as l'air d'aimer l'art.
-Oui, plutôt, avouais-je en me remettant à regarder chaque photo.
-Au moins une personne ici reconnaît que l'art c'est cool. A part Kyron.
-Kyron aime l'art?
-Il fait ça simplement pour ma santé mentale, comme il dit. C'est un putain de faux-cul. »
J'eus un petit sourire. Il le vit et sassit sur une chaise en osier.
« J'aime bien quand tu souris. On dirait Keith quand il était plus jeune. Tu as la même fossette que lui là. »
Il pointait le haut de sa joue avec son doigt.
Je posai mon doigt sur ma propre joue au même endroit en souriant.
« Je n'avais jamais remarqué...
-Faut dire que tu as maigri aussi ces derniers temps, je me trompe ?
-Nan... C'est vrai...
-Elle ressort un peu plus quavant maintenant. »
Je me retournai vers les murs de photos et les observaient longuement en silence.
« C'est quoi cette photo ? Ce n'est pas toi qui la prise, si ?
-Non. C'est une photo de classe de quand j'étais petit.
-Tu es où ?
-Cherche. »
Mon regard se baladait sur chaque petite tête abimée par la couleur de la photo ancienne. D'ailleurs, tous les petits écoliers semblaient tristes, rangés en rangs d'oignons.
« Là ?
-Nope.
-Là alors !
-Pas du tout.
-Ici ?
-T'as de la merde devant les yeux ou quoi ?, ricana-t-il.
-Ah ! Tu es là.
-Ouais, c'est ça. »
Le petit garçon qu'était Yael était très sérieux et semblant triste aussi. Le noir de ses yeux me fixait à travers le temps. Ce qui me frappait le plus c'était la couleur de ses cheveux : en réalité, Yael était brun.
Je tournai ma tête vers lui pour le comparer à ce qu'il était avant.
Il avait perdu toute sa couleur ébène. Et sa maladie l'avait remplacée par un blanc presque translucide.
« Tu étais vraiment adorable.
-Je ne le suis plus ? »
Il haussa un sourcil et je me mise à rire.
« Ce n'est pas ce que je voulais dire, Yael !
-Si, si ! J'ai très bien compris ! »
Il leva les bras au ciel et se mit à rire avec moi. C'était comme si nous étions de bons amis depuis toujours. Ce que n'était pas du tout le cas. Je ne comprenais pas ce qu'il lui arrivait. Ce qu'il marrivait aussi. C'était... Une sensation étrange...
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