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/Quelques phrases du chap précédent #49~
Sur le chemin du retour, nous croisâmes Herykler. Il tremblait. Il trainait des pieds et semblait préoccupé. Même angoissé.
« Eh ! Heryk ! »
Il tourna sa tête vers nous, les yeux exorbités, et des éclaboussures de sang partout sur son visage et ses affaires.
« Qu'est-ce qu'il s'est passé ?, fit en se rapprochant le jeune Rôdeur.
-Je... J'ai fait une connerie... J'ai fait une connerie... Elie... »
Il me fixait avec un regard désolé et attristé. Il me faisait peur. Très peur. Qu'est-ce qu'il avait ?
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« T'as fait quoi ?
-Elie... Pardon...
-Quoi pardon ?,fit Keith en ne comprenant pas. Qu'est-ce qu'il y a ?
-J'ai pas voulu... J'ai pas voulu... C'est vrai... C'est vrai... Faut rien dire...
-Heryk ?, demanda Elie en restant en retrait.
-Elie... M'en veux pas... M'en veux pas... »
Je les regardais en tremblant, passant frénétiquement mes mains sur mes bras.
« J'ai fait une grosse connerie... Une grosse connerie... Olalah...
-Dis-nous !
-J'ai deux personnes... Je n'arrivais pas à me contrôler... C'est vrai...
-Tu quoi ?
-Je suis sorti, Keith. Sorti.
-Hein ?! T'es sorti ? Mais t'es con ou quoi ? Pourquoi t'es sorti ?
-Pour prendre l'air... Et puis... Je ne sais pas... Je les ai vus... Et je les ai... Pardon Elie...
-Tu as quoi, Heryk ?, demanda-t-elle en se rapprochant, inquiète.
-J'ai tué.
-Tu as tué ?
-Pardon... Pardon... »
Je me jetai à mes pieds, elle recula. Keith me prit par le col avec force et me repoussa.
« TU AS FAIT QUOI ? TU ES SORTI ET TU AS TUÉ ?
-Chut... Dis pas... Dites pas... Je...
-Qui ça ? Tu as buté qui ? Où ? Comment ?
-Dans une rue de la ville... J'étais tout seul et j'avais mon arme, comme toujours... Et dans une ruelle la petite fille... Jolie, avec sa maman... J'ai eu une pulsion... Désolé... Je...
-Tu les as butés dans une ruelle ? Putain, Heryk !
-Je vous jure, je... Je ne voulais pas! Je ne sais pas ce qu'il m'a prit !, déclarais-je avec détresse. Elie, crois-moi... »
Alors que Keith essayait de retrouver son calme, la jeune femme s'approcha doucement, tendant sa main vers mon épaule.
« Raconte-nous tout. Tes sentiments à ce moment-là, et tout le reste. Ça t'aidera.
-Ne dites... Rien... Je n'ai pas envie de me faire frapper... Je n'ai pas...
-HERYK !, hurla Keith, sa veine au front apparaissant. Tu te rends compte de ce que tu as fait ? Tu es sorti tout seul, sans autorisation ! Tu sais très bien que c'est interdit ! INTERDIT !
-JE SAIS ! JE SAIS QUE CEST INTERDIT ! MAIS JE TE RAPPELLE QUE JE SUIS SENSÉ ALLER MIEUX QUE VOUS TOUS ! JE... Je ne suis pas malade...
-Et bien peut-être que maintenant si, murmura Elie en baissant les yeux.
-Tu deviens comme les autres, Herykler. On... On doit au moins informer Kyron.
-Oui, mais avant je veux qu'il nous raconte tout », répliqua avec assurance Elie.
Elle me fit m'asseoir contre le mur et s'accroupit face à moi, essuyant le sang que j'avais sur le visage avec le revers de son pull.
Elle avait pris une voix calme. Etrangement, elle n'avait pas peur. Comme si elle était habituée à nous voir délirer, rentrer avec du sang sur nos habits. Ou alors elle essayait juste de m'aider. Ce qui était possible, mais douteux. On lui faisait vivre les pires moments de sa vie. Pas moi, mais les autres, oui.
« Vas-y. Dis nous.
-Je..., soufflais-je en fermant les yeux. Je... Tout allait bien, c'est vrai... Ce matin, j'étais en pleine forme... J'ai pas voulu...
-Je sais. Calme-toi, respire doucement, et raconte-nous tout. »
Je la fixais du regard. Ses yeux couleur châtaigne avaient une petite lueur. Son sourire était aussi doux que celui qu'avait ma mère. Elle me rassurait finalement.
En passant une main dans mes cheveux qui goutaient le sang de mes victimes, je repris mon histoire dans l'ordre.
« Je suis sorti sans permission... C'est vrai mais... Je me sentais bien, vraiment... Je voulais acheter un paquet de cigarettes, et...
-Tu fumes toi ?, s'étonna Keith. C'est nouveau ?
-De temps en temps. J'évite, comme tu as des problèmes avec la fumée. Je ne veux pas que tu fasses des crises d'asthme par ma faute.
-Et tu fumes où ?
-Sur le balcon, une fois par semaine. Ou dans ma pièce de relaxation.
-Là où tu découpe des gens ? »
Mes pupilles rétrécirent quand Elie prononça sa phrase. Elle savait. Merde. Merde, qu'est-ce que je pouvais dire ?
« Je... Comment tu...
-Je te vois, Heryk, quand tu es stressé. Tu as le besoin de les découper. Une fois, je t'ai même suivi, mais tu étais tellement obnubilé par le corps que tu démembrais que tu n'as même pas senti l'odeur de mon vomi, derrière la porte. C'est même Jaden qui a nettoyé pour moi.
-Tu as tout vu ? Tout ? Et tu as vomi ?
-C'est dégueulasse ce que tu fais. »
Son ton était sec. Je n'aimais pas voir Elie comme ça. C'était comme si elle me grondait, comme si j'étais un enfant. Dans son regard, on voyait bien qu'elle était déçue de mon comportement. Mais je n'y pouvais rien.
« Bref. Continue, s'exclama Keith, qui était toujours debout contre le mur.
-Je..., fis-je en baissant la tête. Donc oui... Les clopes... J'ai mis mes lunettes de soleil opaques, mon masque et mon bonnet, comme toujours. J'étais camouflé quoi... Et... Une fois sorti du tabac, je... J'ai pris une rue différente, comme ça, pour voir. Et... J'ai entendu cette petite fille. Elle riait... Elle était heureuse et... »
Je fermais les yeux. Des images abominables me revenaient en tête. Mes mains serraient alors mes cheveux.
« Heryk ? Tout va bien ?, demanda Elie en posant de nouveau sa main sur moi.
-Oui... Oui... Ça va.
-Continue.
-Oui... Et bien, je ne sais pas ce qu'il s'est passé en moi mais... J'ai approché la petite fille. Elle était avec seule, comme perdue dans la foule... Je lui ai proposé de lui acheté une glace... Elle m'a suivi jusque dans une ruelle... Je lui ai fait croire qu'il y avait un marchant. Quand... Quand elle est passée devant moi, tout contente, j'ai sorti mon... Mon poignard et...
-Et ?
-J'ai égorgé la petite. »
Elie s'était raidie d'un coup. Elle retira sa main de mon épaule et déglutit. J'avais gardé mes yeux fermés et je sentais les larmes me piquer les yeux. Les images se mélangeaient dans ma tête. Passé, présent ? Je ne savais plus.
« Tu l'as égorgée...
-Oui... Et la mère aussi... Elle est venue dans la ruelle après, paniquée par la disparition de sa fille.
-Tu es monstrueux, Heryk. »
Elie se releva et passa ses mains sur elle. Comme pour effacer les marques d'horreur qu'elle avait sur le visage.
« Je sais... Mais... Je ne voulais pas... J'avais cette pulsion et...
-Elle était brune ?, questionna Keith.
-Q-Quoi ?
-La petite. Elle était brune ?
-O-Oui... Pourquoi ?
-Avec une frange ?
-Euh... Oui...
-La frange lui arrivait jusqu'aux yeux, n'est-ce pas ?, fit-il en se décollant du mur.
-Oui. Oui, oui et oui..., déclarais-je en me balançant davant en arrière.
-Pourquoi tous ces critères ?, s'étonna Elie.
-Parce que la sœur de Heryk était comme ça aussi.
-Ta sœur ?, me demanda-t-elle avec incompréhension.
-Oui... Ma sœur était comme ça, sanglotais-je en silence.
-Et c'est quoi le rapport ?
-Heryk a tué sa petite sœur par accident quand il était petit. Il jouait avec elle dans la cuisine, aux chevaliers si je ne me trompe pas, jusqu'au moment où il a tranché sa gorge avec le couteau à pain.
-Mon dieu Heryk, je ne savais pas... »
La petite fille de ce matin et l'image de ma sœur se confrontaient dans ma tête. J'avais envie d'hurler. C'était une torture. Ma pauvre petite sœur. Je l'aimais tellement.
Je pleurais à chaudes larmes. Je m'en voulais. Réellement.
Elie s'assit près de moi et frotta sa main sur mon bras.
« Eh... Ça va, c'est fini... Je...
-Ça sert à rien. Il a déjà fait ça, il y a trois ans. Lors d'une de nos sorties. Il a égorgé par pulsion une petite brunette à frange. On a dû la ramener pour la cacher. Elle était avec son grand-père.
-Et il ne l'a pas défendu ?
-On l'a ramené ici, avec le corps de la petite. Et on l'a tué par injection de poison mortel.
-C'est... »
Elle se tut et continua de me caresser le bras pour me rassurer.
« Je suis désolé... Je ne voulais pas... C'est horrible ce que j'ai fait... J'en suis conscient...
-Heryk...
-Eh Herykou... Je ne dirai rien à Nils. Promis. Mais tu iras voir Kyron. Ok ? Dis-moi où sont les corps. Tu les as ramenés au moins ? »
Je levai la tête vers le jeune homme et Elie, les joues trempées par mes pleurs et tachées par le sang. Mes yeux étaient rouges et gonflés. Le silence régnait.
« Tu ne les as pas ramenés ? Sérieusement ?
-Ne t'énerve pas, Keith.
-Tais-toi, Elie. C'est grave là.
-Je les ai cachés... Dans une poubelle de la ruelle. Sous des ordures.
-Je vais les chercher. Pendant ce temps, Elie, tu ramènes Heryk dans sa chambre et tu appelles Kyron avec discrétion. Je reviens dans moins de deux heures. »
Elie hocha la tête et m'aida à me relever.
Le jeune homme partit presque en courant et disparut dans les couloirs.
Je regardais Elie, presque gênée par sa présence. Elle savait des éléments terribles de mon passé. Moi qui voulait lui donner une autre facette de moi, lui prouver qu'on n'était pas tous pareils... Loupé.
« Aller, viens. On ne traine pas ici. »
Elle passa son bras autour de moi et m'aida à aller jusque dans ma chambre sans croiser personne.
Elle ne disait rien durant le court voyage. Mais je sentais comme une force de tristesse, ou de déception chez elle. J'étais dégoutée. Mais quel con ! Je suis vraiment con !
« Parle pas aussi fort, tout le monde va t'entendre. Et tu n'es pas con. Tu es malade, Heryk. »
Merde, je parlais à haute voix.
Ce fut dans un silence que nous ouvrîmes la porte et qu'Elie m'aida à nettoyer mes habits tachés de sang.
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N°50~
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