Chapitre 29.
Danvers, jeudi 15 avril 2021
6h45, domicile des Geller
Lorsque son réveil sonne, Asa a toutes les peines du monde à émerger de son sommeil. C'est le souffle chaud de Leighton contre sa peau, qui le fait quitter sa léthargie et aussi le bruit insupportable de la musique. Il la coupe vite, avant que celle-ci réveille son mari. Il papillonne des yeux, puis les ouvre complètement.
Sa première vision est celle de Leighton, recroquevillé sur la moitié de son corps. En l'observant dormir paisiblement, il se rend compte que cela lui a manqué, de partager son lit avec le sorcier. Il dégage une mèche brune, afin de mieux pouvoir regarder son mari. Il est beau, indéniablement, de cette beauté douce, qui reflète sa personnalité. Il passe son pouce sur sa bouche, ses mêmes lèvres qu'il a dévoré la veille comme un affamé.
Enfin. Il a enfin goûté aux baisers de Leighton et il n'en est pas rassasié. Pourtant, Dieu leur est témoin, leurs lèvres se sont séparées juste le temps de respirer. Ils ont passé une grande partie de la nuit à s'embrasser. L'endroit le plus loin où a réussi à s'aventurer Asa, c'est le haut du thorax de Leighton.
Contre toute attente, dès qu'il s'éloignait trop du visage de son mari, il lui manquait. Ce qui est stupide puisqu'il le tenait dans ses bras. Il n'a pas compris ce sentiment, surtout qu'il voulait faire découvrir les plaisirs de la chair à Leighton. Même si le concerné n'a pas paru déçu ou frustré du déroulement.
Alors oui, ils se sont contenté de se dévorer la bouche, en se frottant l'un à l'autre, comme des animaux en chaleur. Néanmoins, Asa n'a jamais éprouvé un tel plaisir et cela lui a largement suffi. Il n'a même pas réussi à déshabiller son mari. Dorénavant, ils auront tout le temps pour se découvrir. Peut-être que leurs subconscients ont freiné leurs ardeurs. Leighton mérite une première fois mémorable, fantastique et non, un acte fait dans la précipitation.
Le sorcier se rapproche, en souriant de bien-être, l'une de ses mains glisse sur le ventre d'Asa, sous son tee-shirt. Le pouls du noiraud s'accélère. Délicatement, il bascule sur le côté, afin de laisser Leighton reposer sur le matelas. Il embrasse sa joue, tandis que ses doigts effleurent la peau douce du dos de son mari.
Dès la seconde où Asa a vu cet homme, au regard perdu, mais innocent, son coeur et son esprit ont crié : « c'est lui, c'est le bon ». Et pour cause, vu que l'homme en question est son âme-soeur. Cette réalité ne l'effraye plus, au contraire, elle le rassure. Au moins, il y a une raison, à peu près logique, à ses sentiments si rapides envers Leighton.
D'ailleurs, celui-ci papillonne des yeux, avant de marmonner dans son sommeil. Attendri, Asa ne peut pas s'empêcher de sourire. Il n'a jamais été aussi niait en étant amoureux, mais bizarrement, il s'en fiche. Parce qu'il s'agit de Leighton, son mari et il n'a jamais aimé comme il l'aime lui.
N'y tenant plus, Asa mordille la nuque du sorcier, puis la lèche. Il ricane en voyant son mari se tortiller sur le lit.
- Je dois me lever, le prévient-il à regret.
- Hum, grogne Leighton, encore endormi.
- Phoebe va chez Estelle aujourd'hui, lui rappelle Asa, ce à quoi le brun hoche la tête. À ce soir.
Ce matin, Asa a particulièrement du mal à quitter le cocon des draps et à s'éloigner de la chaleur émise par Leighton. Il se gorge de son odeur à pleins poumons. Après avoir embrassé son mari une dernière fois, il se lève. La journée va lui paraître longue, surtout si au bout d'une minute, le sorcier lui manque déjà.
Une heure et demie après, il pénètre dans la section des archives de la mairie de Salem, deux cafés en mains. Il a conscience d'avoir un sourire débile, accroché aux lèvres depuis son départ de la maison. Ce que lui fait remarquer sa collègue dès qu'elle le voit, de façon polie, mais moqueuse.
- Tu as l'air bien si heureux ce matin, lui dit-elle.
- Quoi ? On n'a pas le droit de sourire en arrivant au boulot ?
- Pas un jeudi matin, souligne-t-elle en rigolant. Tu as passé une bonne soirée ?
Instantanément, au souvenir de sa nuit avec Leighton, Asa rougit. Il bégaye une vague réponse, qui ressemble à un oui. Est-ce que c'est marqué sur son front qu'il a franchi un pas avec son mari ? Il sait que non, mais son sourire idiot doit le trahir. Il ne va pas confier à son amie, qu'il s'est frotté comme un ado sur le sorcier en l'embrassant encore et encore. Il chasse vite cette pensée, avant de se retrouver en érection.
Hier soir, signe-t-il le début réel de leur mariage ? Ils sont déjà marié certes, mais maintenant, peuvent-ils se considérer comme en couple ? Pour lui c'est évident. Leighton partage surement son avis, compte tenu des principes conjugaux dans lesquels il a été élevé.
- Ton mari va bien ?, lui demande Susann, avec une moue faussement innocente.
- Oui, répond-il et cette fois, il est aussi rouge qu'une tomate.
Il pose les deux gobelets de cafés entre les ordinateurs, sans parvenir à quitter son sourire et son air béat, malgré les sous-entendus de Susann. Les baisers de Leighton sont encore trop frais dans sa mémoire, pour rembrunir son humeur. Il flotte sur un nuage de bien-être, et ce, depuis son réveil.
- Tant mieux, réplique sa collègue. Ton bonheur est tout ce qui compte.
- Merci, souffle Asa, ému.
Là, il fait une chose qu'il n'avait plus fait ; il embrasse la joue de Susann. Puis il s'assoit, comme si de rien n'était, comme si ce geste était banal entre eux. Avant de se concentrer, enfin essayer, sur son travail, il envoie un message à Leighton pour lui souhaiter une bonne journée.
La sienne a été longue et ennuyeuse. Il a passé son temps à penser à son mari. À tel point que Susann a dû lui donner des coups de coudes afin de le ramener au moment présent. Il a hâte de retrouver Leighton, et sa soeur, cela va de soi.
Il s'empresse de quitter le parking de la mairie, cependant, il roule avec prudence. Le but est de rentrer en vie auprès de Leighton et si possible sans perdre de point sur son permis ou sans se prendre une amende. Le destin est avec lui, car il arrive assez rapidement chez lui. Par contre, il ne s'attendait pas à voir la voiture de Sidney devant sa maison. Cela n'augure rien de bon. Suspicieux, il se dépêche de se garer et de sortir.
Quelque chose ne va pas, il peut le sentir dès le premier pas franchit dans l'entrée. Ses doutes se renforcent lorsqu'il rejoint le séjour. Ses yeux se posent immédiatement sur Leighton, qui se ronge les ongles en faisant des allers-retours dans la cuisine. Sa soeur est assise sur une chaise autour de la table à manger, en face d'elle se trouve Virginia, ce qui est encore plus mauvais signe. Sidney est debout, au côté de la cheffe de clan.
- Heu... salut, finit-il par dire.
La situation semble être grave. Tout le monde se jette un regard anxieux, sans lui répondre. Ce qui inquiète le plus Asa, c'est que Leighton fuit ses yeux, il ne parvient pas à capter son attention. Visiblement, la nuit merveilleuse qu'ils ont passée, est loin.
- Je peux savoir ce qu'il se passe ?, demande-t-il aux deux personnes qui ne vivent pas sous ce toit.
- Ce n'est pas si grave, lui souffle Phoebe.
- Si, ça l'est, contre Virginia.
Asa fronce les sourcils, puis il remarque la main de la sorcière sur celle de sa soeur. Sont-ils tous réunis parce que Phoebe a eu un problème ? Cela expliquerait l'air affolé de Leighton. Tous ses sens se mettent en alerte, il rejoint Phoebe et entoure ses épaules de son bras. Sa poitrine se sert d'angoisse.
- Je répète ma question, qu'est-ce qui se passe ?, réitère Asa d'une voix dure.
- Le chasseur est venu nous parler avec Estelle, lui apprend la jeune femme.
- Quoi ?
Le sol s'ouvre sous ses pieds. Son cerveau met du temps à assimiler l'information et ce qu'elle signifie. Il ne se rend pas compte que sa poigne sur les épaules de Phoebe, se raffermit, lui faisant presque mal. Il nage en plein cauchemar. Comment sa bulle de bonheur a-t-elle pu éclater aussi brutalement en même pas vingt-quatre heures ?
Des tonnes de scénarios se bousculent dans sa tête. Et malheureusement pour son sang-froid, aucun n'est réjouissant. Il imagine des chasseurs à la Supernatural ou la famille Argent dans Teen Wolf. En tous les cas, Asa voit ce gars armé jusqu'au cou, prêt à tuer ou torturer. Visualiser sa petite soeur chérie face à cet homme le rend fou. Il bouillonne de rage. Ce type n'aurait pas dû s'approcher de sa soeur.
- Alistair est parti l'arrêter, l'informe Sidney. Il n'avait pas à aller interroger des ados de quatorze ans.
- Ça c'est clair, s'exclame-t-il et avant qu'il puisse les retenir, des mots de colère jaillissent de sa bouche. Votre mariage bidon était censé éviter ça !
Il est tellement énervé qu'il ne parvient pas à regretter ses propos, ni à s'excuser. Un cri de douleur atteint ses oreilles, mais son esprit est incapable de le traiter. Sinon, nul doute qu'il se serait haï d'avoir blessé son mari.
- Asa, calme-toi, le supplie Virginia.
- Non, hurle-t-il. Votre putain de chasseur est venu parler à ma soeur, ma soeur !
- Nous allons régler le problème, lui assure le shaman.
- Ah oui et comment ? En me proposant un autre mariage stupide ?
- Asa, murmure Phoebe, d'une voix suppliante.
- Je vais péter un câble.
Et il pèse ses mots. Pendant que lui fantasmait sur le sorcier, sa soeur aurait pu se faire enlever, dans le meilleur des cas. Sa précieuse Phoebe. Il n'a pas pu la protéger. Il ne sert à rien. Un sanglot lui fait relever la tête. Leighton est toujours dans la cuisine, des larmes dévalent ses joues. Une pensée dévastatrice traverse Asa, une qu'il aurait dû chasser aussi vite qu'elle est arrivée, car elle va tout ruiner.
Tout ça, c'est de sa faute. Le chasseur en a après la prunelle de ses yeux, à cause de lui, de sa condition de sorcier. C'est lui qui les met en danger, en permanence. Si Leighton n'était pas rentré dans leur vie, jamais cette situation ne serait arrivée. Il n'aurait pas risqué de perdre la personne la plus chère à son coeur. Phoebe n'aurait pas couru ce risque. Oui, tous leurs problèmes sont de sa faute. Avant qu'il apparaisse dans leur vie, ils vivaient une vie des plus normale. Hors, depuis qu'il a débarqué, ils n'ont que des emmerdes, en commençant par un mariage débile qui n'a pas eu l'effet escompté et qui au final, ne sert à rien. Phoebe et Asa s'en sortaient bien mieux avant, sans lui. Il n'aurait jamais dû accepter de l'héberger, il aurait dû se débarrasser de lui, du départ.
- Ça suffit, hurle la voix de sa soeur.
Il émerge de ses sombres pensées, mais tout le monde le regarde. Ce qui le perturbe, c'est l'expression douloureuse de sa soeur, ainsi que ses pleurs. Virginia a une main plaquée sur sa bouche, tandis que Sidney secoue la tête, une drôle de grimace sur le visage. Il ose un coup d'oeil à son mari. Celui-ci est recroquevillé contre un meuble, les bras autour de son torse, submergé par des sanglots, les joues inondées de larmes, qui malgré tout, déchirent le coeur d'Asa.
Avec horreur et stupéfaction, il réalise qu'il ne s'est pas contenté de penser cet affreux raisonnement, mais il a parlé à voix haute. Il ne peut pas revenir en arrière et encore moins s'excuser, le mal est fait. Les rouages de la colère lui font croire qu'il a raison, même si la vue des mines dévastées de Phoebe et de Leighton, l'amoindrie un peu.
- Rien de tout ça n'est de la faute de Leighton, poursuit sa soeur, elle aussi en colère.
- Je...
- Comment tu peux dire une chose pareille ? C'est injuste.
Les reproches de Phoebe agrandissent le trou de la culpabilité qui est en train de l'absorber. Il sait qu'il ne doit pas passer ses nerfs sur Leighton, mais aussi horrible que cette vérité puisse être, elle n'en reste pas moins vrai.
- Ne t'en prends pas à Leighton, il ne mérite pas que tu lui craches ton venin à la figure, enchaîne Virginia, ce qui le fait sortir de ses gongs.
- Pardon ?, rugit-il, la colère ayant réapparue.
- Il n'a rien fait de mal.
- Pour qui est-ce que tu te prends exactement ? Tu es peut-être cheffe d'un clan de sorcière, mais tu n'es pas la mienne, hors, tu n'arrêtes pas de venir chez moi et me dire ce que je dois faire.
- Mon rôle est de prendre soin de Leighton, et là, tu as dépassé les bornes, crie Virginia en se levant, le menton redressé.
- Et Phoebe, qui a pris soin d'elle cet après-midi hein ?
Asa sent des larmes d'impuissance et de frustration embrumer ses yeux. Nom d'un chien, sa colère est légitime. La peur obscurcie tous raisonnement logiques et tout autres sentiment. Il sait qu'il peut devenir méchant lorsqu'il est dans une fureur comme celle-ci, mais rien ne le calme.
- Nous sommes intervenus dès que les esprits m'ont prévenu, lui apprend Sidney.
- Ma soeur n'aurait jamais dû être mêlée à tout ça, s'étrangle-t-il.
Le contre coup de l'angoisse lui tombe dessus. Il ravale un sanglot et renifle. Son subconscient l'oblige à faire la chose qu'il s'interdit, il se tourne vers Leighton. Quel hypocrite il est. Il vient chercher du réconfort chez la personne dont il vient de briser le coeur, sans scrupule et avec une violence rarement égalée. Le visage anéanti de Leighton le ramène sur terre. Qu'est-ce qu'il a fait bon sang ?
Son mari interprète mal sans regard, puisqu'il disparaît d'un claquement de doigts.
- Leighton !, hurle Asa en amorçant un pas vers la cuisine.
- Nous partons, déclare Virginia d'une voix froide.
- Où est Leighton ?, s'affole-t-il en tournant en rond.
- Quand tu auras retrouvé tes esprits, je te le dirais.
Sur ses paroles, Virginia disparaît à son tour. Seul Sidney a la décence de le saluer avant de quitter la maison, par la porte. Déboussolé, il pivote vers sa soeur. Elle pleure tout le fusillant du regard.
- Phoebe, murmure-t-il, un noeud au fond de la gorge.
- Tais-toi !, crie-t-elle en se levant, furieuse comme il ne l'avait jamais vu. Je te déteste.
Impuissant, il observe sa soeur courir à l'étage. Il se laisse tomber sur la chaise qu'occupait la jeune femme. À ce moment-là, il s'autorise à pleurer toutes les larmes de son corps. Qu'est-ce qu'il a fait ?
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