Chapitre 26.
Danvers, lundi 12 avril 2021
22h, domicile des Geller
Normalement, à cette heure-ci, Asa le rejoint dans sa chambre. Hors, ce soir, comme hier, Leighton se retrouve seul. Doit-il rejoindre Asa, afin de consommer leur mariage ? C'est ce qu'un couple est censé faire pour leur nuit de noces, non ? Le sorcier est perdu, ne sachant pas ce qu'Asa attend de lui. Il aimerait aller le retrouver, pas uniquement pour..., mais juste parce que la présence du noiraud le rassure et l'aide à dormir. La solitude le fait pleurer.
Son menton tremble à mesure que les larmes coulent. Il n'a jamais eu le temps de parler avec sa mère, de ce qu'un couple fait dans l'intimité. Encore un domaine où il est novice. Il ne doit pas craquer. Asa lui a dit que ce n'était pas contre lui s'il s'enfermait sur lui-même. Leighton aurait voulu qu'ils en discutent tous les deux, il a tant de choses à demander, à éclaircir avec son mari.
Il l'aime. Il est marié avec son âme-soeur, il voudrait exprimer sa joie au principal intéressé. Lorsqu'Asa lui a proposé cette alternative afin de le protéger, Leighton a hésité à lui avouer le lien réel qui les unit. Il a l'impression de mentir à l'homme que le destin a choisi pour lui.
Il secoue la tête, refusant de se laisser abattre. Même si c'est censé être le plus beau jour de sa vie et qu'il se transforme en cauchemar. Il sèche ses larmes, soupire un bon coup. Il va reprendre le contrôle de ses émotions et laisser le temps au temps. Résolu à penser à autre chose, ses yeux se posent sur le livre que Virginia lui a donné. Curieux, il le récupère.
Dès les premiers mots, il devient cramoisi. L'intitulé est on ne peut plus clair : « Les sorciers et le sexe ». Pourquoi la cheffe lui a confié ce livre ? C'est affreusement gênant. Tout son corps est en feu et une chaleur se loge au niveau de son bas-ventre. Il pousse un cri étranglé en lisant le premier paragraphe. C'est un manuel qui explique comment utiliser certains sorts lors de relations intimes, spécifiquement entre deux hommes.
À partir de quel moment, les sorcières ont-elles inventé ce genre de sorts ? Sa mère serait outrée de savoir que Virginia lui a donné un tel manuel. Ses yeux sont prêts à sortir de leurs orbites lorsqu'il lit les mots « sortilège de lubrification ». Les doigts tremblant, il tape ce mot sur Google. Il pousse un autre cri quand l'explication lui apparaît, il s'empresse de verrouiller son téléphone.
De façon générale, il n'a aucune idée de comment se passe le sexe entre deux personnes, alors entre deux hommes s'est encore pire. Le second sort qui empêche la douleur lui fait peur. L'amour fait-il mal ? Il a atteint sa limite du supportable, en découvrant une liste de sorts, jugés utiles et amusants durant le sexe.
Il referme le livre, les joues brûlantes, le souffle erratique. Asa a de l'expérience lui, et même si ça rend fou de jalousie Leighton de savoir son âme-soeur avec d'autres personne, une part de lui, minime, est rassurée. Ses lacunes en la matière l'inquiètent, que se passera-t-il s'il ne sait pas quoi faire, s'il est ridicule ? Asa va-t-il se tourner vers d'autres hommes pour le combler ? Non, il ne peut pas laisser cela se produire. Asa est son mari, sa destinée.
De drôles de fourmillements, lui chatouillent le bas-ventre. Plus il pense à Asa et lui nus, en train de s'embrasser, de toucher le corps de l'autre, et plus il se sent bizarre. Il revoit les images intimes de certaines séries qu'il a regardé et se visualiser faire la même chose avec son âme-soeur, lui fait pousser un soupire d'extase. Le son qu'il émet, le surprend. Cette sensation dans son ventre fait que d'enfler, au point d'avoir presque mal à son entre-jambe.
Il baisse les yeux sur ce dernier et ouvre la bouche de stupeur. Son sexe est droit, comme certaines fois à son réveil. Dans un réflexe, un peu stupide, il l'admet, il plaque ses mains dessus, priant que cela disparaisse. Mais ce ne marche pas de cette façon et il n'arrive pas à enlever l'image d'un Asa nu de son esprit. Ses pensées sont blasphèmes. Il sait qu'aujourd'hui le sexe est quelque chose de naturel, moins tabou qu'à son époque.
Le problème, c'est qu'il n'a jamais parlé de cela à qui que ce soit et ce n'est pas un livre qui va lui expliquer le processus. Il sait que ce qu'il ressent à l'heure actuelle pour Asa, est du désir. Il désire son mari si fort que cela lui comprime la poitrine. Il ne peut pas se toucher. C'est beaucoup trop embarrassant.
Il se lève et fait les cent pas dans sa chambre, en secouant les bras. Il doit faire redescendre la pression. Est-ce que dans le livre, il y a un sort pour avorter le désir ? Il ne veut pas rouvrir ce grimoire de malheur. Après plusieurs minutes à penser à autre chose qu'Asa, il se sent de nouveau « normal ». La bosse emprisonnée dans son pantalon a disparu, il soupire de soulagement.
Néanmoins, il a envie d'Asa. Prenant son courage à deux mains et parce qu'il estime que c'est son devoir d'époux, il sort de sa chambre. Un coup d'oeil vers celle de Phoebe, lui indique que la jeune femme dort, vu qu'aucune lumière ne s'échappe de sous la porte. Il rejoint celle du noiraud et frappe de petits coups discrets. Il attend l'autorisation d'Asa, avant de pénétrer dans la pièce.
- Salut, dit-il timidement, tandis que son mari est assis sur son lit, son ordinateur devant lui.
- Salut.
Leighton sent un gros poids se retirer de sa poitrine lorsqu'Asa lui sourit. Triturant ses doigts dans tous les sens, il avance jusqu'à son mari. Le noiraud ferme l'écran et se tourne vers le sorcier, lui faisant comprend que celui-ci à toute son attention. Leighton déglutit, le courage qu'il avait il y a trois minutes, vient subitement de s'envoler. Peut-être n'aurait-il pas dû venir. Après tout, Asa lui a dit qu'il avait besoin de se faire à l'idée d'être marié et qu'il avait besoin d'espace.
Par chance, Asa le sauve de ce malaise, devinant parfaitement pourquoi il se tient devant lui à une heure aussi tard.
- C'est con, mais je n'ai pas osé venir te voir, lui avoue le noiraud.
- Je... je comprends, répond Leighton sans aller plus loin sur sa pensée.
- C'est encore plus con, parce que je n'arrive pas à dormir.
Le coeur du sorcier rate un battement suite à cet aveu. Son sang pulse plus fort dans ses veines, faisant rougir ses joues. Attendri, mais gêné par la confession, il détourne les yeux. Son regard se pose sur le vase protégeant le bouquet qu'il a offert a Asa. Aussi bête que cela puisse paraître, il est heureux et touché que son mari l'ait gardé. Est-ce que ses simples fleurs, mais qui signifie tellement pour lui, sont synonymes d'espoir ? Si Asa les a mis dans un vase et conservé, cela veut peut-être dire que d'une certaine manière, il tient à Leighton ?
- Est-ce que..., commence-t-il en bégayant, peu sûr de lui. Est-ce que tu attends quelque chose de moi cette nuit ?
- Quoi ?, s'exclame Asa avec étonnement.
- D'habitude, les époux doivent passer leur nuit de noces ensemble pour tu sais... honorer leur mariage. Donc je me disais que tu attendais peut-être cela de moi ?
- Non !, s'écrie le noiraud affolé. Jamais je ne te demanderais un truc pareil !
- Oh.
Leighton est incapable d'ajouter autre chose. Il ne sait pas s'il est déçu ou soulagé. En étant honnête avec lui-même, il doit avouer qu'il est dépité par cette réponse, dite avec un tel empressement, comme si cette idée le rebutait. Il essaye de ne pas montrer sa déception sur son visage. Jamais alors ? Asa ne ressent pas de désir pour lui.
Une boule de tristesse remonte le long de sa gorge. Il ne se sent pas prêt à faire l'amour, mais il avait pensé qu'ils auraient pu se découvrir un peu cette nuit. Hors, Asa n'est pas d'accord et semble horrifié d'avoir un quelconque rapport avec lui. Tous ses espoirs viennent de s'écrouler. Il se contrôle, afin de ne pas pleurer devant Asa.
- Tu es sûr de ne pas vouloir annuler le mariage ?, s'assure une nouvelle fois le sorcier, la voix rauque par l'émotion qui l'assaille.
- Non, décrète Asa en se levant pour être face au sorcier. Je te l'ai dit tout à l'heure et je te le répète Leighton, je ne reculerais pas et surtout, je ne regrette pas.
- D'accord, murmure-t-il en hochant la tête. Alors pourquoi tu ne veux pas...
- J'ai déjà l'impression de t'avoir forcé à ce mariage...
- Tu ne m'as pas forcé, le coupe-t-il en criant.
Au moment où Asa ouvre la bouche pour lui répondre, ils entendent une porte qui claque et des pas courir dans le couloir. La seconde qui suit, un bruit de déglutition tout à fait horrible leur parvient. Les deux hommes se regardent, inquiet. Asa percute plus vite que Leighton, il lui embrasse le front tout en lui assurant que cette conversation n'est pas terminée. Puis l'aîné quitte la pièce en trombe, suivi par le sorcier.
Ils découvrent Phoebe, accroupi devant les toilettes, en train de vomir tripes et boyaux. Asa s'agenouille à côté de sa soeur et lui frotte le dos. Leighton reste en retrait, un peu dégoûté par la scène. Tout de suite, il s'imagine le pire. Pourquoi sa belle-soeur est subitement malade ? Il possède une potion contre ce genre de maux.
- Ça va ma puce ?, s'inquiète Asa, après la crise de Phoebe passée.
- Non, gémit-elle, les larmes aux yeux dus aux contractions de son estomac lors des vomissements. Ça me défonce le ventre.
- Tu veux un peu d'eau pour te rincer la bouche ?, lui propose son frère.
Phoebe acquiesce en poussant un bruit plaintif de douleur. En voyant Asa se redresser, Leighton réagit en premier et fait apparaître un verre rempli d'eau qu'il tend à son mari. Celui-ci le remercie d'un sourire. Il donne le verre à sa soeur, puis l'aide à le tenir pendant qu'elle prend une gorgée. Une fois l'eau disparue, Phoebe se laisse aller contre le mur en gémissant. Asa s'accroupit devant elle et place une mèche de cheveux derrière son oreille, avant de caresser la joue de sa soeur.
Leighton observe le teint blafard de la jeune femme. Il ne peut pas la laisser souffrir de cette manière. C'est malheureux à dire, mais les humains sont plus fragiles. Le sorcier en a tellement vu mourir de maladie, il ne veut pas qu'une chose pareille arrive à Phoebe. C'est son rôle de beau-frère, de la guérir.
- Je suis sûr d'avoir une potion contre les vomissements et les maux de ventre, les informe-t-il. Cela pourrait soulager Phoebe.
- Heu..., hésite Asa peu enclin à utiliser la magie sur sa petite soeur. Je...
- Moi je prends, intervient la jeune femme, pliée en deux par la douleur.
- Je vais aller regarder, s'empresse de répondre Leighton, avant qu'Asa est pu répliquer quoi que ce soit.
Pendant ce temps, le noiraud aide sa soeur à se relever et l'emmène dans sa chambre. Il l'allonge sur le lit, une bassine à ses côtés par mesure de précaution. Il récupère la bouillotte, une peluche en forme de panda. En sortant, il croise son mari qui la chauffe entre ses mains en quelques secondes. Asa le remercie d'un baisser sur le front, cela lui a évité de descendre à la cuisine et de la mettre au micro-ondes.
De retour auprès de Phoebe, il place la bouillotte sur son ventre. La chaleur lui fait immédiatement du bien. Leighton revient, une fiole dans la main, sous le regard suspicieux de son mari, il s'explique :
- Les sorcières ne tombent pas malades, mais maman avait préparé cette potion contre les vomissements.
- C'est sans risque ?, s'inquiète Asa, les sourcils froncés.
- Bien sûr, je ne donnerais pas de potion qui mettrait Phoebe en danger, réplique Leighton, un peu vexé que son mari doute de ses compétences.
- Ça a quel goût ?, s'intéresse la jeune femme.
- Je ne sais pas. Désolé.
Le sorcier s'approche de sa belle-soeur et décapsule la fiole. Il a confiance aux pouvoirs de sa mère, il l'a déjà vu concocter cette potion, il l'a d'ailleurs apprise. Il aime Phoebe, il ne peut donc pas la laisser souffrir d'un mau qui pourrait aggraver sa santé. Il s'agenouille à gauche de son mari et tend le récipient à Phoebe.
Avec beaucoup de difficultés, la jeune femme attrape la fiole. Leighton l'aide à boire le liquide bleu. À en juger par l'expression d'Asa, il n'est pas d'accord pour cette pratique, mais faute de choix et parce qu'il veut prouver à son mari qu'il a confiance en lui, il ne dit rien. Une fois la potion entièrement avalée, Leighton la fait disparaître.
- Comment tu te sens ?, s'empresse de lui demander son frère.
- Bien. J'ai l'impression que quelque chose danse dans mon ventre, les informe Phoebe, une main posée sur son abdomen.
- C'est normal, intervient Leighton. La potion absorbe ton mal.
Satisfait, le sorcier lance un sourire en coin à son mari. Le concerné ignore ce geste qu'il trouve condescendant. Il refuse de s'excuser d'avoir des doutes, lui qui était un humain rationnel, il y a encore un mois. Il admet que sa soeur reprend des couleurs depuis qu'elle a ingurgitée la potion.
- Merci Leighton, enchaîne Phoebe après un soupire. Ça craint d'être malade pendant les vacances.
- C'est clair, ricane Asa, toute compassion envolée. En même temps, t'es malade à chaque vacance.
- Mais maintenant, j'ai un beau-frère sorcier pour me soigner.
- Comme quoi, cela a des avantages, réplique Leighton en souriant.
Ils partent tous les trois à rigoler. Le brun est loin de l'angoisse ressentie un peu plus tôt dans la soirée. Asa et lui, auront cette discussion, mais pas ce soir. Lorsqu'ils seront prêts à parler de leurs sentiments et qu'ils auront une relation concrète. Finalement, ce n'est peut-être pas plus mal que Phoebe les a interrompus.
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