Chapitre 46

Vendredi 20 Mai 2022, Washington D.C.
12h05, bureau de Jude à la bibliothèque

    Dévorant les lèvres de Jude, parce qu'à ce stade cela dépasse le stade d'embrasser, William le soulève du sol pour l'asseoir sur la table en bois derrière lui. Il a résisté deux minutes, avant de se jeter sur son âme-soeur comme un drogué en manque. Ce qu'il était. Quelques heures séparées de cet homme et c'est déjà trop. Il sait qu'il est sur une pente dangereuse, car l'absence de Jude ne devrait pas l'atteindre de façon aussi flagrante et douloureuse. Car son coeur a littéralement mal, d'être loin de sa moitié.

    Le jeune homme timide et innocent disparaît complètement entre les bras de William. Il se transforme en homme fougueux, rendant au centuple ce que lui donne le Guerrier. Celui-ci conquiert la bouche de Jude à l'aide de sa langue. Il a ce besoin presque animal de le revendiquer, un élan de possessivité comme jamais il n'a ressenti. Ce qui est certainement encore moins sain que ce besoin d'être près de lui.

- Touche-moi, susurre le rouquin tout aussi affamé, contre son cou.

- Tout ce que tu désires mon ange.

- Seulement toi. Pour l'éternité.

    Si William était un prédateur, il grognerait de satisfaction et revendiquerait son âme-soeur sur le champ. Il est un simple humain qui peut juste émettre un son guttural sorti de ses tripes, qui semble plaire à Jude vu la façon dont il gémit et se cambre à la recherche de plus de contact. Cela l'excite également d'entendre ce genre de déclaration. Il les a attendues toute sa vie.

    D'un geste un peu trop empressé, William retire la veste bleue claire de son âme-soeur. Il ne se soucis pas de la froisser, il la jette à travers la pièce. Les mains de Jude ont déjà déboutonné sa ceinture et ses doigts se sont faufilés à l'intérieur de son pantalon. Il est heureux de constater qu'ils partagent le même empressement.

    Il s'apprête à arracher les boutons de la chemise que porte Jude, lorsqu'une exclamation les faits sursauter tous les deux. Leurs mentons se cognent. Son cri de douleur fait écho à celui horrifié de quelqu'un d'autre.

- Bordel de merde !, hurle une nouvelle fois Taylor, la main toujours sur la poignée qu'il vient d'ouvrir.

    Rouge (de gêne ou d'excitation qui peut le dire ?), Jude s'écarte vivement, retirant sa main du caleçon de William en bafouillant des phrases incompréhensibles. Ce dernier leur tourne le dos, refermant son pantalon. Ils n'ont pas à être honteux de ce qu'ils faisaient, seulement, c'est embarrassant de se faire surprendre en train de se toucher par leurs deux meilleurs amis.

- Vous avez oublié qu'on devait manger ensemble à midi ?, leur demande le tatoué en s'avançant, les bras croisés sur sa poitrine, ce qui fait ressortir ses muscles.

- Oui, répond Jude le plus calmement possible, toute trace de gêne envolée.

- J'hallucine. On vous attendait, pendant que vous vous tripotiez.

- On ne se tripotait pas, réplique le rouquin, têtu.

- T'appelles ça comment d'avoir la main dans le pantalon de ton mec ?

- Ok mon coeur, intervient Lance le visage en feu, en agrippant les biceps de Taylor. Pas besoin de plus de détails.

    Jude envoie un sourire taquin à son meilleur ami qui fait une grimace de dégoût. Comment celui qui est censé être le plus timide du groupe, peut être le moins gêné en ce moment ? William voudrait se faufiler sous terre pour se cacher. Un soupçon de frustration demeure, de ne pas avoir été au bout de ce qu'il avait prévu avec le rouquin. Il se voyait déjà à genoux aux pieds de Jude, son sexe dans sa bouche. Il chasse ses images qui commencent déjà à raviver son érection.

    Il a le malheur de croiser le regard de Jude. Les yeux de ce dernier sont brillants de la même faim qui étreint William. Ils hurlent l'excitation de leur propriétaire. Le Guerrier doit enfoncer ses ongles dans les paumes de ses mains pour s'éviter de grogner, ou d'ordonner à leurs amis de dégager afin de reprendre leur activité.

- On y va, maintenant, tonne Taylor d'une voix forte.

- Vous pouvez y aller sans nous, réplique Jude sans quitter William du regard.

- Non. Hors de question qu'on aille manger pendant que vous..., s'agite le tatoué en secouant la main vers eux. Je me sens malade rien que d'y penser.

- Tu vas sérieusement faire ton prude ?, ricane le rouquin.

- Voir mon meilleur ami en pleine action n'est pas quelque chose dont je veux être témoin.

    Jude hausse les épaules, peu chagriné et perturbé par les paroles de Taylor. Il a même le culot de faire un geste dédaigneux de sa main gauche en direction de son meilleur ami. William se retient de rire, ou de sauter sur son âme-soeur, car son impertinence à un drôle d'effet sur son corps.

- C'est quoi ça ?, s'étonne Taylor en avançant vers Jude pour lui prendre le poignet gauche.

- Ma bague de fiançailles, répond le rouquin avec un calme impressionnant.

    Le regard étonné de Lance se pose sur William, tandis que Taylor a les yeux aussi gros que des soucoupes en dévisageant Jude, la bouche ouverte de stupeur. Le Guerrier a un élan de fierté et de possessivité, encore. Il adore cette nouvelle personnalité chez son âme-soeur, elle est si inattendue que cela rajoute à son charme. Cela prouve que Jude n'est plus aussi timide qu'avant. Son fougueux compagnon.

- Enfin théoriquement, c'est son alliance, pas uniquement..., tente de mettre au point William, mais ses explications se perdrent dans le cri de Taylor.

- Vous vous êtes ma...mariés ?

- Non, pas encore. C'est de ça dont nous voulions vous parler pendant le déjeuner.

- Déjeuner que vous avez oublié pour vous envoyer en l'air, objecte Taylor trop abasourdi pour répliquer autre chose.

    Jude se tourne vers Will et lui fait un clin d'oeil, que le Guerrier lui rend par un sourire qui annonce des futures promesses. Lorsqu'ils seront seuls, si on veut bien leur foutre la paix. Ils n'auraient jamais dû prévoir un repas, ni même se séparer après avoir pris la décision d'hier soir. Il pensait être assez fort pour gérer le manque et le désir, mais il s'est planté en beauté.

    Perdant patience, William leur ordonne de sortir. Plus vite ils iront manger, plus vite il pourra être seul avec son âme-soeur. Ils sortent du bureau sous les yeux interrogateurs de Lance et les protestations de Taylor. Jude entrelace leurs doigts tandis qu'ils traversent la bibliothèque. Dès que l'entrée se profile devant eux, ils se figent.

- Papa ?, s'étrangle Jude en broyant les os de la main de Will.

- Bon...bonjour, hésite Erich, visiblement mal à l'aise. Pouvons-nous parler ?

    Jude ne répond pas, trop paralysé par la présence de son père. William se met directement sur la défensive, même s'il ne sent pas de danger émaner d'Erich, il n'est jamais trop prudent. Taylor et Lance se rapprochent aussi, tel un mur de protection autour d'eux. Évidemment, la décision finale appartient au rouquin. Ils sont tous suspendus à ses lèvres.

- Oui, répond Jude dans un souffle rauque.

    Le rouquin reste focalisé sur son père qui se détend à ce simple mot. Le couple échange un regard avec William. Ils semblent se comprendre sans avoir besoin de parler, car après un hochement de tête à leur attention, Lance et Taylor quittent la bibliothèque. Jude n'a pas non plus besoin de s'exprimer à voix haute pour que William sache ce qu'il doit faire. La main qui écrase la sienne est un indicateur assez gros. Un coup d'oeil sur leur étreinte permet à Erich de le deviner également. Il n'omet aucune objection. Tant mieux. Il n'est pas vraiment en position de force ici.

- Qu'est-ce qui se passe ?, questionne Jude avec réticence.

- Je... pouvons-nous nous asseoir ?, propose Erich. Cela sera plus confortable pour discuter.

    Ils obtempèrent. William est surpris de voir que Jude les emmène vers le coin détente et non à une table. Il les installe sur un canapé, pendant qu'Erich prend place dans un fauteuil. Ce dernier se racle la gorge, visiblement mal à l'aise.

- Donc..., le presse Jude en posant leurs mains liées sur sa cuisse, s'y accrochant avec puissance.

- Je tenais à m'excuser de ne pas être venu te voir avant et de te laisser croire que je... que je t'abandonnais. Ce n'est pas le cas Jude.

- Papa, croasse le rouquin, d'une voix étranglée par l'espoir.

- Je veux que tu saches, que vous sachiez tous les deux, que je respecte tes choix Jude. Je t'ai perdu pendant si longtemps, je ne veux pas te perdre une seconde fois pour... pour quelque chose que vous ne pouvez pas contrôler.

- Merci papa. Je ne veux pas vous perdre non plus.

    Père et fils se sourient, des larmes au bord des paupières. William retient un soupir de soulagement. Plus les jours passaient et plus l'ignorance des parents de Jude pesait sur ce dernier. Le Guerrier sait que c'est une histoire entre les Rhodes, mais il en fait partit également, il en est le responsable et par-dessus tout, il est l'âme-soeur de Jude. Son élan de protection est trop présent pour être réprimé.

- Merci Monsieur Rhodes, intervient-il avec respect. Jude vous aime et c'est important pour lui, pour nous, d'avoir votre soutien.

    Jude le regarde, des étoiles pleins les yeux et un sourire de reconnaissance. Il voudrait le prendre dans ses bras, mais une certaine pudeur le retient. Alors il tente, par son expression, d'exprimer tout l'amour qu'il éprouve pour lui. Un petit rire discret éclate leur bulle. Nullement embarrassés de leur démonstration d'affection mutuelle, ils se tournent à nouveau vers à Erich.

- J'ai la confirmation de ce que j'avais besoin de savoir, déclare celui-ci, amusé. Tu prendras soin de mon fils, n'est-ce pas ?

- Oui, de toute mon âme. Je l'aime, affirme-t-il.

- Je le vois. Nous ne pourrons pas oublier le passé, mais je pense que nous pouvons aller au-delà, pour le bien de tous. Je veux que mon fils soit enfin heureux.

- Je le suis papa. Avec William. Nous...

- Tu es sûr ?, le coupe le Guerrier ayant deviné les prochaines paroles de Jude.

- Oui. Nous allons nous marier papa. Nous avons rendez-vous demain après-midi à la mairie pour signer notre mariage. Juste tous les deux.

    Erich est aussi abasourdi que William l'imaginait. Il fixe son fils comme s'il voyait un étranger. Il est vrai que c'est une nouvelle assez inattendue. Ils l'ont décidé hier soir, après avoir fait l'amour pour la première fois. À cause de l'euphorie dans laquelle les a plongés leur orgasme, ils se sont demandés pourquoi ils devaient attendre pour s'unir et pourquoi ne pas le faire lorsqu'ils le souhaitent, avec qui ils le souhaitent et où ils le souhaitent. Ils ne vont pas l'expliquer ainsi au père de Jude.

- C'est..., hésite Erich avant de déglutir pour continuer. Comme je l'ai dit, je respecte tes choix, celui-là en fait parti, donc je te soutiens. Si vous êtes sûr de vous.

- Nous le sommes, répondent-ils à l'unisson.

- Quand et comment en êtes vous arrivée à vous marier ? Le Conseil est-il prévenu ?

- Non, souffle Jude et c'est à cet aveu qu'il se ratatine sur lui-même. Nous... nous ne voulons pas que ce soient eux qui nous marient. Ils... ce sont eux qui ont tout gâché en premier lieu.

- Nous ne voulons plus subir la pression du Conseil, enchaîne William qui sent la panique chez Jude. C'est à nous de décider où et quand nous voulons nous marier.

- Je comprends. Ils vous ont fait beaucoup de mal.

    Et aux parents du rouquin aussi, si Erich en est à aller contre le Conseil. Chaque mariage au sein de l'Institut doit être validé par le Conseil, puis célébré par son Évêque. William et Jude ont réfuté cette idée. L'Ordre doit être écarté de leur mariage. Ni l'un ni l'autre ne veut de cérémonie à l'Institut, surtout Jude qui ne veut pas que les personnes ayant fait de sa vie un enfer, viennent le féliciter ou pire, soient présents lors du plus beau jour de sa vie. Ils souhaitent uniquement que Lance et Taylor soient là, les deux personnes les plus importantes pour eux. Et le reste de leur équipe s'ils le désirent.

    C'est de ça dont ils devaient parler à leurs meilleurs amis lors du déjeuner. En plus de leur demander d'être leurs témoins respectifs. Ils n'ont plus beaucoup de temps pour les préparer à l'événement.

- Nous déclarerons notre mariage plus tard, poursuit Jude rassuré par l'acceptation de son père. Après tout, eux aussi, nous on mis devant le fait accompli.

- Cela ne concerne que vous deux, acquiesce Erich. Écoutez, je suis de tout coeur avec vous, soyez s'en certain. En revanche, ta mère a besoin de plus de temps pour se faire à l'idée, mais elle ne t'abandonne pas non plus.

- C'est ce qu'elle a dit.

- Elle était bouleversée, mais elle réfléchit depuis.

- Nous serions ravis que vous veniez demain, si vous le désirez. Nous avons rendez-vous à 15h à la mairie de Washington D.C., les invite William avec sincérité.

- Merci beaucoup, accepte Erich dont la gratitude se reflète sur son visage ému.

    Jude remercie également William pour sa proposition, d'un baiser sur la joue. Le Guerrier sait que son âme-soeur n'allait pas oser le faire, par peur d'écoper un refus.

    Demain va être la concrétisation de leur lien, après des années à souffrir.

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