Chapitre 6: L'étranger [Réécriture]
-3 ans avant ADLP- (saison de cristal)
A quelques lieux de là, un jeune voyageur se dirigeait vers les paisibles campagnes de Sora. Venant de l'Ouest, il avait traversé les grandes étendus rocheuses des plaines de Creïka et déjà franchit le fleuve tranquille de la rivière Démerêka.
Tandis que de nombreux projets flottaient dans sa conscience, il aperçut au loin la haute tour de pierre d'écume. Ses reflets azurs luisaient sous le ruissellement de la pluie incessant, drapant ses façades d'un fin manteau scintillant. Le spectacle était grandiose. Mais là n'était pas la direction de cet étranger. L'homme pris la direction des gigantesque remparts qui gardaient en sécurité le monarque le plus influant de Brazla.
Pendant des mois, il avait marché à travers les vastes forêts de Flendïa et les terres rocheuses de Creïka. Il avait traversé à la nage le torrent de Kirïa puis affronter les violentes tempêtes qui font rage aux pieds des montagnes de Ninetïa. Il a affronté la nature, le continent et sa faune pour parfaire sa connaissance des terres de Brazla. Les hordes de brigands de grands chemins avaient été mise en échec, incapable d'égaler sa vivacité et autres capacités. Enfin, il était là, face à son objectif. Il pouvait admirer les hautes murailles de la demeure du roi Sar I se dessiner à l'horizon ; hautes, impressionnantes, impériales. La première étape de son voyage venait de prendre fin. Après plusieurs décennies, caché aux yeux du monde, il était temps de se faire connaître!
A peine s'était-il rapproché qu'il entendit les sentinelles du royaume signaler son approche. Un frisson de satisfaction intense parcouru son échine. Que c'était bon d'être repéré, vu et entendu ! Bientôt il serait même bien plus que cela... Savourant cette première victoire sur la multitude à venir, il changea d'allure, se précipitant presque contre les murailles menaçantes.
***
- Par Pashad, tu me tues Moïe. Je te maudits, toi et tes siècles de vie.
Sar I était en prise dans un jeu de stratégie avec son fidèle mage. Mauvais perdant, sa mâchoire était crispée et laissaient deviner un effort herculéen pour ne pas envoyer les délicates pièces de jade valser dans les airs.
- Mon Seigneur ne maîtrise toujours pas l'art de la patience, le charia Moïe.
Un cri des vigies sauva sans doute le plateau de jeu d'une mort certaine et les deux hommes se regardèrent une courte seconde. Oubliant totalement les stratégies du jeu posé devant eux, ils s'échangèrent un regard plein d'inquiétude... Ces derniers temps avaient été remplis de rebondissements, épuisants et dramatiques. Qu'allait-il encore se passer dans l'enceinte de ce royaume si paisible? Les deux amis descendirent vigoureusement les escaliers de marbres de la tour du roi pour se rendre à la rencontre du voyageur annoncé.
Pendant ce temps, Malvina entendis l'information du vigile se répercuter sur les murs de la grande cours. Un frisson glaciale lui parcouru le dos. Cette annonce était porteuse de mauvaises nouvelles ; une chose malsaine et puissante allait frapper aux portes gigantesques du pont. La jeune fille mit ses impressions lugubres et pessimistes sur le dos des atrocités vécues dernièrement et sortit des écuries pour aller voir de plus près ce nouvel arrivant. Mais avant tout, il lui fallait trouver Athèlme.
Paisiblement installé dans la bibliothèque, il tournait avec respect les pages d'un manuscrit, manifestement archaïque. Bien que d'apparence calme, le lecteur avait une mine pincée, le visage grave, et son front était strié de rides d'anxiété. Cela faisait des jours que le jeune guerrier dévorait les ouvrages de la pièce en quête de pouvoir. Entendant la démarche souple de sa sœur se précipiter à sa rencontre, il se hâta de camoufler sa nouvelle bible, imprima un sourire qu'il voulait sincère sur ses lèvres ourlées et se leva, prêt à l'accueillir. Malvina entra, tornade de chevelure d'or et d'énergie à peine contenue, exprimant à toute vitesse son mauvais pressentiment. Elle ne prit même pas le temps de séparer ses phrases les unes des autres. Amusé par le contraste entre la quiétude de son repère et la boule de nerfs qui se tenait en face de lui, Athèlme n'eut plus besoin de forcer son sourire. Seule son amie pouvait lui rendre sa bonne humeur aussi facilement.
- ... et comme je le disais, il est rare que j'ai de mauvais pressentiments Athèlme, je te jure, mais là c'est vraiment important, je ne saurais pas te l'expliquer, il faut faire quelque chose, je redoute ce qu'il pourrait arriver, tu imagines si..., levant un bras, le jeune homme la coupa puis la prit dans ses bras.
Il le savait, la seule solution que son amie avait trouvée pour faire face à son chagrin, était d'éviter à tout prix de penser trop longtemps. Alors qu'elle était déjà d'un naturel plutôt bavard, cette nouvelle manie la poussait à battre des records d'apnée.
- Cesse ce monologue je t'en conjure ! Est-ce un de tes nouveaux pouvoirs, sœurette? Mettre l'ennemi à terre par la simple parole? se disant, il lui lança un regard plein de moquerie enfantine, ses lèvres s'ouvrant sur un large sourire qui dévoila sa parfaite dentition.
Agacée mais amusée, Malvina se tu. Après une seconde de calme, Athèlme osa espérer qu'il était parvenu à tranquilliser son amie. Cette espérance aberrante disparut aussi vite qu'elle était venu. Malvina le saisit brutalement par le bras avant de se précipiter dans les couloirs du château, l'entraînant dans sa course. Il n'avait plus d'autres choix que de se laisser emporter docilement.
Le nouvel arrivant ne se doutait en rien du tumulte qui régnait à l'intérieur des enceintes imposantes de Sora. Le pont s'abattit devant lui pour le laisser passer la large rivière de Saruïa qui protégeait l'édifice par son courant, sa flore et les différentes espèces aquatiques plus ou moins hostiles qu'elle abritait.
On ordonna de lever la herse et deux gardes l'accueillirent pour le mener devant le roi qui avait pris place sur son estrade. L'homme fut submergé de sensations devant la splendeur de la demeure royale. Il se sentait infiniment microscopique à côté des majestueuses colonnes de marbre qui soutenaient le préau de la cours extérieure. Si lui, un homme de son rang, se trouvait amoindrit sous le regard de ces gigantesques statues, comment ces simples mortels faisaient pour supporter cela au quotidien, songea-t-il. Une fois arrivé à distance respectable du roi, son escorte le stoppa. Le mystérieux étranger pu enfin plonger son regard iridescent dans celui du seigneur des lieux. Tout dans l'homme d'importance qui se tenait devant lui était bon, intimident et robuste. Sar Ier était sans conteste un homme de poigne au physique imposant. Un peu impressionné malgré ses origines, le voyageur adressa une révérence respectueuse au roi et un salut plein de respect au mage qui se tenait à ses côtés.
- Bienvenu à Sora étranger! Pourrais-tu, je te prie, m'entretenir de ce qui pourrait bien avoir mené tes pas jusqu'aux portes de ma demeure? demanda Sar, affichant son habituel sourire doux et protecteur
- C'est une grâce que je ne pensais jamais mériter, que votre seigneurie m'accorde sa parole, et j'en suis honoré. Sachez que je ne viens aucunement en ces lieux dans l'intention de vous nuire.
En prononçant ces mots, il balaya des yeux les rangs de soldats armés jusqu'aux dents qui l'entouraient. Affichant une assurance sereine, il reprit d'un ton détaché :
- Mes périples ont été éreintants, ma monture est épuisée et mes jambes ne sauraient me supporter encore bien longtemps. Le premier village accessible est à plusieurs lieux d'ici encore, c'est pourquoi j'espérais que quelques pièces d'or suffiraient à convaincre mon seigneur d'héberger un humble serviteur, le temps que les forces lui reviennent.
L'étranger semblait perdu, il donnait l'impression de ne pas savoir quoi faire si son repos lui était refusé... Malvina se glissa plus près, au-devant de la foule afin de mieux l'observer. Elle ne comprenait pas ce qu'elle voyait. Un halo diaphane aux reflets dorés, nimbait le voyageur. Jamais elle n'avait observé un tel phénomène. Peut-être la bibliothèque lui apporterait des réponses, mais une chose en son temps.
- Pourrais-je connaître ton nom inconnu?
Le roi posa cette question, laissant transparaître dans son ton que c'était bien la moindre des choses.
- Luvac, messire.
- Enchanté Luvac, dit m'en plus. D'où viens-tu ? Que fais-tu dans ce long périple ?
Dans son angle de vue, le prénommé Luvac jurait avoir eu la vision d'une femme à la beauté divine. Déconcentré, il ne put s'empêcher de tourner la tête dans la direction que lui indiquait son instinct. Il en resta figé, dès le moment ou ses yeux rencontrèrent leur cible. Des lèvres rosées et pleines se pinçaient en signe d'inquiétude. Un cou fin digne de porter les plus beaux bijoux rattachait un menton distingué et fier à un décolleté... un décolleté... mince il fallait qu'il se reconcentre ! Honteux de sa perte de contrôle, il rougit avant de détourner précipitamment les yeux, les refixant sur le monarque. Il se jura de ne plus les bouger de là avant de reprendre sa présentation. La cours appris alors que ses origines lui étaient inconnues et qu'actuellement il vivait en nomade solitaire, arpentant sans relâche les terres de Brazla et quêtes de trésors et de découvertes.
Tandis que Luvac s'exprimait, Malvina avait rougit sous le regard qu'il avait osé se poser sur elle. Jamais personne ne l'avait observée de la sorte, mais bien que mal à l'aise, elle ne pouvait nier la satisfaction qui en résultait. Elle avait savouré le trouble qu'on pouvait distinguer dans le regard, pourtant si dur, du bel inconnu. Décidée à en jouer, elle se replaça malicieusement derrière l'estrade, juste assez en retrait du roi pour ne pas l'importuner, mais suffisamment proche pour que Luvac ne puisse la manquer.
Dès qu'il l'aperçu une fois encore, le beau visiteur en perdit son vocabulaire.
- Et c'est ainsi que... je veux dire... j'ai...
La beauté simple et pure de la jeune fille était tout ce qu'il y avait de plus touchant. Un flou naquit dans son esprit, et les paroles du roi Sar Ier lui devinrent totalement inaudibles. En plus de sa volonté de jouer pour la première fois de ses charmes, apparemment ravageur, Malvina cédait à sa curiosité qui la poursuivait depuis sa plus tendre enfance. Il lui était pratiquement impossible de lutter contre son désir d'être informée de tout. De son emplacement, non seulement elle pouvait en apprendre plus sur son bel âtre, mais aussi entraîner ce nouveau talent de séduction. En observant le jeune homme, elle remarque que ses yeux, uniques, arboraient une teinte étrange. Elle n'avait encore jamais rien vu de semblable... d'un vert-gris irisé de bleu, semblant plus profond encore que les océans de Merïa. De longs cils noirs et volumineux les étiraient en amande parfaite. Elle remarqua également sa peau, absolument immaculée, nette et lisse, d'un hale légèrement doré. Elle paraissait si douce que la petite curieuse fut prise d'une irrésistible envie d'aller la toucher, juste pour vérifier si un tel niveau de perfection était possible.
- ... ceci dit, tu seras évidemment le bienvenue le temps de te reposer. Un lit sera apprêté pour la nuit afin que tu reprennes ton voyage paisiblement, termina le roi, après un long monologue dont l'intéressé n'avait rien écouté.
Athèlme, resté en retrait, fulminait. Il avait bien vue avec quelle facilité cet homme, à la beauté sans pareil, avait réussi à envoûter sa protégée. Le petit manège de la donzelle ne lui avait pas échappé non plus. Jamais il n'aurait cru la voir minauder de cette manière, tortillant ses boucles blondes le long de ses doigts fins. Il allait avoir une sérieuse conversation avec la jeune fille... et cet inconnu.
Quand Luvac recouvra la parole et que, après avoir compris qu'il était accepté au château, avait remercié le roi. Quand le voyageur fut enfin libre de circuler dans le château, Malvina se précipita à sa rencontre pour en savoir plus. Luvac se retourna en entendant les bruits de pas précipités qui provenait de derrière lui et un sourire étira ses lèvres charnues pour découvrir des dents d'un blanc aveuglant. Sous le charme, Malvina fut forcée de ralentir la cadence, sentant ses jambes de moins en moins dociles. Mentalement, elle somma son cœur de récupérer un rythme correct.
- Messire Luvac, l'aborda-t-elle avec une révérence, permettez-moi de vous proposer mon aide. Le château est grand, si par hasard vous avez besoin d'être guidé, je vous prie de ne pas hésiter à me solliciter.
Elle avait prononcé son petit monologue parfaitement travaillé à toute vitesse. Ce n'est qu'en découvrant la mine interrogative de Luvac qu'elle comprit son erreur.
- Heu, pardonnez-moi. Je m'appelle Malvina, fille d'Edwinn et de Karence, de la campagne de Sora.
Luvac lui rendit son salut, ne se répartissant pas de son sourire charmeur. Il ne parvint toutefois pas à retenir un tic qui agita le coin de ses lèvres à l'entente de ce nom. Ne quittant pas sa cible des yeux, il fut rassuré de découvrir qu'elle n'avait de toute évidence rien remarqué.
- Chère Malvina, croyez que je suis enchanté de vous rencontrer. Puis-je vous demander de m'accompagner pour une visite des lieux. J'avoue être fasciné par l'édifice, mais je ne voudrais pas paraître grossier à me promener seul dans les couloirs.
Il termina sa phrase en lui tendant un bras musculeux, le biceps orné d'un bijou cuivré aux motifs exotiques. Malgré toute sa volonté, Malvina ne put réprimer une expression d'envie et de soulagement à l'idée de finalement toucher cette peau dorée, luisante d'un fin halo lumineux. Lorsque sa peau rencontra la sienne, elle comprit pourquoi son corps la poussait à ce point auprès de cet homme. Une décharge la parcourus de la tête au pied, et elle dut se faire violence pour conserver son équilibre.
Les jeunes gens firent connaissance longuement, errants dans les couloirs du palais, sans se douter que chacun gardaient ses secrets encore enfuit. En tant qu'adjointe au chef d'armée, la jeune magicienne se devait de faire des efforts sur sa naïveté ; on ne l'avait que déjà trop sermonnée à ce sujet. Quant à Luvac, moins les gens en savaient sur lui, mieux il se portait et moins ses plans risquaient d'être mis en péril. Pensant être seuls dans l'immense cours du château, ils marchèrent au hasard entre les nombreuses colonnes sculptées. Alors qu'ils se racontaient leurs histoires, leur rire se répercutait sur les façades de la cours et dans les incalculables allées de la demeure. Ils ne se doutaient pas qu'un regard indiscret était posé sur eux depuis le début de leur rencontre...
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