RDV de l'Avent - J7 Ambroise
J7 Ambroise
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Comme tous les midis, Ambroise se mit à table dans son fast-food préféré. Il choisit la table la plus à l'écart : une table pour 4 où il ne serait pas dérangé. À chaque fois, il prenait 9 nuggets, une moyenne potatoes et une compote en gourde. Pour la boisson, il emmenait toujours son thermos.
Comme chaque midi, depuis qu'elle travaillait dans ce restaurant, Véro observait du coin de l'œil le manège de ce grand benêt. « Si peu de jugeote dans un physique de rêve, quel gâchis ! » pensait-elle.
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Ambroise, la petite trentaine, grand, beau, look ténébreux, et regard bleu topaze, ferait chavirer n'importe quel cœur. Il avait le physique d'un Apollon, un modèle à la plastique parfaite. Malheureusement, il souffrait d'un handicap moteur qui l'empêchait de se sentir à l'aise : ses mains et ses doigts lui obéissaient difficilement. Pour ce perfectionniste de nature, c'était une véritable torture.
- Bonjour Monsieur, Comme d'habitude ?
Ambroise leva la tête. Il ne reconnaissait pas la voix de son interlocutrice. Connaissait-elle son problème, il ne le savait pas encore. La panique se lisait sur ses traits, et Véronique s'en aperçut. Elle voyait régulièrement ces signes chez Benjamin, son petit garçon autiste.
- Pardonnez-moi, reprit-elle d'une voix plus chaleureuse, je ne voulais pas vous effrayer. Habituellement, Mélanie vous apporte toujours des nuggets, des potatoes et une compote. Voudriez-vous la même chose pour aujourd'hui ?
Ambroise la fixa reconnaissant, et bégaya quelques mots, que Véronique interpréta comme « S'il vous plaît » et « merci ».
À cette heure de la matinée, les étudiants étaient encore en cours, et le staff pouvait prendre du temps avec les clients présents. Véronique en profita pour lui parler à cœur ouvert.
- Voilà ce que je sais : vous êtes toujours sur la réserve, vous avez des difficultés de compréhension, et de préhension d'ailleurs. De plus, vous êtes paniqué devant la nouveauté. J'en déduis que vous souffrez d'un TSA.
Intrigué par cette sans-gêne, Ambroise écouta. Il ne savait pas trop comment le prendre. Il finit par jouer le jeu, et lui tendit la main droite comme pour lui serrer la sienne. Machinalement, elle lui offrit la sienne en retour.
La main d'Ambroise était froide, et n'avait pas la force suffisante pour aller au bout de son intention. De sa main gauche il vint appuyer sur les doigts de la première main pour améliorer sa prise, et avoir un appui léger sur la main de son interlocutrice.
- Méningite à 20 ans, suivie d'un syndrome de Guillain-Barré. Ça fait dix ans que je lutte pour récupérer un peu de motricité. Et ça fait presque autant de temps que je fréquente le resto.
- Vous fréquentez la clinique d'en face alors.
- Oui, vous connaissez ?
- Mon fils y est suivi dans le service autisme. Et vous savez ce que nous aimons le plus dans cette clinique ?
- La gentillesse du personnel, j'imagine.
- Ils sont vraiment très humains, en effet. Mais ce que nous apprécions le plus c'est leur beau jardin paysager. Et si un jour vous en avez l'occasion, allez le voir. Ça vaut vraiment le détour.
Ambroise eut un sourire de contentement que Véronique ne sut interpréter.
- Je vous remercie. Et que pensez-vous du wagon ?
- Ah, vous connaissez alors... le wagon c'est ce que Benjamin préfère. Et en plus le 7, c'est son chiffre préféré. Il est né le 7 juillet 2017... Vous vous moquez !
- Je ne me le permettrait pas. Je suis aussi né un 7 juillet, et quand je suis tombé sur ce wagon, je n'ai pu m'empêcher de l'acheter. On aurait dit qu'il m'appelait.
- Mais c'est vous l'architecte paysager ?
- Je vous parle d'un wagon, et vous en déduisez que j'ai fait tout le jardin.
- Et vous savez quoi, je trouve que toutes les gouttières à eau que vous y avez installées sont géniales. Quand je m'assois dans ce jardin, je me sens en paix. Et c'est à vous que je le dois.
Les étudiants commencèrent à arriver, et Véronique, à contre-cœur, abandonna Ambroise à sa solitude.
Un peu plus tard, en débarrassant la table, Véro trouva une carte de visite avec le mot « merci » maladroitement écrit...
© WafaBabin
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